Rupture de contrat et non-renouvellement : enjeux de discrimination et de requalification.

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Rupture de contrat et non-renouvellement : enjeux de discrimination et de requalification.

Discrimination dans le cadre de l’emploi

Aux termes de l’article L.1132-1 du Code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de nomination, ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, en raison de critères tels que l’origine, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état de santé, ou d’autres caractéristiques personnelles.

L’article L.1134-1 du même code précise que, lorsqu’un litige survient en raison d’une méconnaissance des dispositions relatives à la discrimination, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Il incombe alors à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Requalification du contrat de travail

Selon l’article L.1242-2 du Code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Ce même article énumère les cas dans lesquels un contrat à durée déterminée peut être conclu, notamment pour un accroissement temporaire d’activité.

L’article L.1245-2 du Code du travail stipule que le contrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif. À défaut, il est réputé être conclu à durée indéterminée.

Indemnité de requalification

L’article L.1245-2, alinéa 2, du Code du travail prévoit que, lorsque la juridiction saisie fait droit à la demande de requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, elle doit condamner l’employeur à verser au salarié une indemnité de requalification, qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

Licenciement sans cause réelle et sérieuse

L’article L.1235-3 du Code du travail dispose que si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par ledit article, en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.

Indemnité de licenciement

L’article L.1234-9 du Code du travail stipule que le salarié titulaire d’un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue, a droit à une indemnité de licenciement, sauf en cas de faute grave. Les modalités de calcul de cette indemnité sont déterminées par voie réglementaire.

Indemnité compensatrice de préavis

L’article L.1234-1 du Code du travail précise que lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l’accord collectif de travail.

Indemnité de fin de contrat

L’article L.1243-8 du Code du travail prévoit qu’à l’issue d’un contrat à durée déterminée, le salarié a droit à une indemnité de fin de contrat, égale à 10 % de la rémunération totale brute versée, sauf si la relation contractuelle se poursuit par un contrat à durée indéterminée.

Maintien de salaire en cas de maladie

L’article L.1226-23 du Code du travail applicable en Alsace-Moselle stipule que le salarié dont le contrat est suspendu pour une cause personnelle indépendante de sa volonté a droit au maintien de son salaire, sous réserve des indemnités versées par un régime d’assurances sociales obligatoire.

Congés payés

L’article 17 de la convention collective du personnel des prestataires de service prévoit que le salarié a droit à un congé déterminé à raison de 2 jours et demi ouvrables par mois de travail effectif, sans que l’absence au travail entraîne une réduction de ses droits à congés plus que proportionnelle à la durée de cette absence.

L’Essentiel : Aux termes de l’article L.1132-1 du Code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou d’accès à un stage en raison de critères tels que l’origine, le sexe, ou l’état de santé. L’article L.1134-1 précise que, en cas de litige, le salarié doit présenter des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination, et il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs.
Résumé de l’affaire : Dans cette affaire, une salariée, ayant travaillé pour la société Webhelp [Localité 3] en tant que conseiller client, a contesté la non-reconduction de son contrat à durée déterminée (CDD) qui a pris fin le 31 juillet 2021. Après avoir été en arrêt de travail du 20 au 28 juillet 2021, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Forbach le 21 mars 2022, demandant la requalification de son CDD en contrat à durée indéterminée (CDI) et des dommages et intérêts.

Le jugement rendu le 11 janvier 2023 a confirmé la conformité du CDD avec le code du travail, affirmant qu’il avait pris fin comme prévu et que la salariée n’avait pas été victime de discrimination. La salariée a interjeté appel le 25 janvier 2023, demandant l’annulation de la rupture de son contrat et des indemnités.

Dans ses conclusions, la salariée a soutenu que son employeur avait agi de manière discriminatoire en refusant de renouveler son contrat, en raison de son accident de travail survenu après la fin de son CDD. Elle a également contesté le motif de l’accroissement temporaire d’activité, arguant que son poste était permanent.

La société Webhelp [Localité 3], représentée par la société Webhelp Grand Est, a demandé la confirmation du jugement initial, affirmant que la rupture du contrat était justifiée par une anticipation de baisse d’activité et que la salariée n’avait pas prouvé l’existence d’une discrimination.

Finalement, la cour a infirmé le jugement sur certains points, requalifiant le CDD en CDI à compter du 1er février 2021, et a condamné la société à verser des indemnités à la salariée, considérant que la rupture équivalait à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La société a également été condamnée à fournir une attestation d’employeur conforme aux dispositions de l’arrêt.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la discrimination alléguée par la salariée ?

La salariée invoque l’article L.1132-1 du code du travail, qui stipule qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou d’une nomination en raison de divers critères, tels que l’origine, le sexe, l’âge, ou encore l’état de santé.

Cet article vise à protéger les individus contre toute forme de discrimination dans le cadre de l’emploi. En cas de litige, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

L’article L.1134-1 du même code précise que, lorsqu’un litige survient, le candidat ou le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination.

Ainsi, la salariée doit démontrer que son employeur a agi de manière discriminatoire en refusant de renouveler son contrat de travail.

Quel est le critère de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ?

La requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée est régie par l’article L.1242-2 du code du travail. Cet article stipule qu’un contrat à durée déterminée ne peut avoir pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Il doit être établi par écrit et comporter une définition précise de son motif. En cas de contestation, il appartient à l’employeur de prouver la réalité de l’accroissement d’activité et son caractère temporaire.

Dans cette affaire, la cour a constaté que le contrat de la salariée ne s’est pas poursuivi au-delà de son terme, mais a néanmoins prononcé la requalification en raison de l’absence de justification d’un motif réel et sérieux pour le non-renouvellement.

Quels sont les droits de la salariée en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

L’article L.1235-3 du code du travail prévoit que si le licenciement d’un salarié est sans cause réelle et sérieuse, le juge doit octroyer une indemnité au salarié. Cette indemnité est déterminée en fonction de l’ancienneté du salarié et du nombre de salariés dans l’entreprise.

Dans le cas présent, la salariée a moins d’un an d’ancienneté, ce qui lui permet de bénéficier d’une indemnité de 1 554,88 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’article L.1234-9 précise également que le salarié licencié a droit à une indemnité de licenciement, dont le montant est fonction de la rémunération brute perçue avant la rupture.

Ainsi, la salariée a droit à une indemnité de licenciement, ainsi qu’à d’autres compensations liées à la rupture de son contrat.

Quelles sont les conséquences financières de la requalification du contrat de travail ?

L’article L.1245-2, alinéa 2, du code du travail stipule que lorsqu’un contrat à durée déterminée est requalifié en contrat à durée indéterminée, l’employeur doit verser une indemnité de requalification, qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

Dans cette affaire, la cour a condamné l’employeur à verser à la salariée une indemnité de requalification de 1 554,58 euros.

De plus, la rupture du contrat, suite à la requalification, équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, entraînant des dommages et intérêts supplémentaires pour la salariée.

Ainsi, la requalification a des conséquences financières significatives pour l’employeur, qui doit indemniser la salariée pour la rupture de son contrat.

Quels sont les droits de la salariée concernant les indemnités de préavis et de congés payés ?

L’article L.1234-1 du code du travail précise que le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis, sauf en cas de licenciement pour faute grave.

La durée de ce préavis dépend de l’ancienneté du salarié. Dans le cas présent, la salariée a été reconnue comme ayant droit à une indemnité compensatrice de préavis de 1 554,58 euros, ainsi qu’une indemnité compensatrice de congés payés de 155,45 euros.

Ces indemnités sont dues en raison de la rupture du contrat de travail, qui a été requalifié en contrat à durée indéterminée.

Ainsi, la salariée a droit à ces indemnités, qui doivent être versées par l’employeur en conséquence de la requalification de son contrat.

Quel est le régime des indemnités de fin de contrat pour un contrat à durée déterminée ?

L’article L.1243-8 du code du travail stipule que, lorsque les relations contractuelles ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité de fin de contrat, égale à 10 % de la rémunération totale brute versée.

Cependant, cette indemnité n’est pas due lorsque le contrat est requalifié en contrat à durée indéterminée.

Dans cette affaire, la cour a confirmé que, étant donné la requalification du contrat, la salariée ne pouvait pas prétendre à l’indemnité de fin de contrat.

Ainsi, la requalification du contrat a des implications directes sur le droit à cette indemnité, qui est annulée dans ce cas.

Arrêt n°25/00112

26 mars 2025

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N° RG 23/00189 –

N° Portalis DBVS-V-B7H-F4RG

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Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FORBACH

11 janvier 2023

22/00050

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Vingt six mars deux mille vingt cinq

APPELANTE :

Mme [A] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Ulysse GOBERT, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2023/000736 du 19/05/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉE :

SASU WEBHELP [Localité 3] (WGE) prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Laure-Anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ, avocat postulant et par Me Myriam TOURNEUR, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 décembre 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

M. François-Xavier KOEHL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [A] [I] a effectué des missions intérimaires pour la SAS Webhelp [Localité 3] du 23 juin 2020 au 31 janvier 2021.

Elle a ensuite été embauchée par contrat à durée déterminée pour une durée de 6 mois, du 1er février au 31 juillet 2021, en qualité de conseiller client, statut employé, niveau 1.

Elle a été placée en arrêt de travail du 20 juillet au 28 juillet 2021.

Par requête introductive du 21 mars 2022, Mme [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Forbach pour obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée.

Par jugement contradictoire du 11 janvier 2023, la formation paritaire du conseil de prud’hommes de Forbach a :

– dit que le contrat de travail à durée déterminée conclu entre Mme [I] et la société Webhelp [Localité 3] est conforme au code du travail et s’est terminé le 31 juillet 2021,

– dit que le 3 août 2021 il n’y avait plus de relation de travail entre Mme [I] et la société Webhelp [Localité 3],

– dit que Mme [I] n’a pas été victime de discrimination,

– débouté Mme [I] de l’intégralité de ses demandes,

– débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe le 25 janvier 2023, Mme [I] a interjeté appel.

En l’état de ses dernières conclusions remises par voie électronique le 20 avril 2023, Mme [I] demande à la cour d’infirmer le jugement et de :

– annuler la rupture du contrat de travail à durée déterminée qui l’a liée à la société Webhelp [Localité 3],

– condamner la société Webhelp [Localité 3] aux droits de laquelle vient la société Webhelp Grand Est à lui payer la somme de 18 654,96 euros à titre de dommages et intérêts,

subsidiairement,

– requalifier le contrat de travail l’ayant lié à la société Webhelp [Localité 3] en contrat en durée indéterminée,

– condamner la société Webhelp [Localité 3] aux droits de laquelle vient la société Webhelp Grand Est à lui payer la somme de 1 544,88 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

dans tous les cas,

– condamner la société Webhelp [Localité 3] aux droits de laquelle vient la société Webhelp Grand Est à lui payer les sommes suivantes :

1 554,58 euros,

3 109,16 euros avant déduction du décompte salarial à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

310,91 euros avant déduction du décompte salarial à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis,

291,48 euros à titre d’indemnité de licenciement,

506,70 euros avant déduction du décompte salarial à titre de rappel de salaire et garantie de ressources,

50,67 euros avant déduction du décompte salarial à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire et garantie de ressources,

145,12 euros avant déduction du décompte salarial à titre de solde d’indemnité compensatrice de congés payés,

89,54 euros à titre de complément d’indemnité de fin de contrat,

– condamner la société Webhelp [Localité 3] aux droits de laquelle vient la société Webhelp Grand Est à lui délivrer dans un délai de sept jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir une attestation d’employeur destinée à Pôle emploi conforme aux motifs et au dispositif dudit arrêt,

– condamner la société Webhelp [Localité 3] aux droits de laquelle vient la société Webhelp Grand Est à lui payer la somme de 4 000 euros en compensation de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel,

– condamner la société Webhelp [Localité 3] aux droits de laquelle vient la société Webhelp Grand Est aux dépens de première instance et d’appel.

Au visa des dispositions des articles L1132-1 et subsidiairement L1226-13 du code du travail, Mme [I] expose que son employeur, en refusant de renouveler son contrat de travail à durée déterminée ou d’admettre que celui-ci c’est poursuivi au-delà du terme pour une durée indéterminée, a adopté à son égard une attitude discriminatoire emportant l’annulation de la rupture dudit contrat.

Elle considère qu’il ressort d’un faisceau d’indices que la société Webhelp [Localité 3] entendait poursuivre leur collaboration au-delà du 31 juillet 2021. Ainsi, elle se prévaut de l’intention de son employeur exprimée au travers des contrats proposés, des attestations de Mme [V] [X] et de M. [G] [W], des échanges de SMS entre salariés, du procès-verbal du comité économique et social, de la reconnaissance par la CPAM du caractère professionnel de son accident du travail du 3 août 2021 et de la lettre que lui a adressée la société le 6 août 2021 pour l’informer de la cessation de leur collaboration avec effet au 31 juillet 2021.

L’appelante se fondant sur les dispositions de l’article L1226-19 du code du travail estime que la société Webhelp [Localité 3] n’a pas justifié d’un motif réel et sérieux étranger à son accident pour refuser le renouvellement de son contrat de travail.

Mme [I] indique que le motif de recours au contrat à durée indéterminée énoncé dans son contrat « accroissement temporaire d’activité non pérenne liée à une demande client » s’écarte des exigences légales d’un motif précis. Elle ajoute qu’il appartient à l’employeur d’apporter la preuve de cet accroissement et souligne qu’il existait une relation d’affaires depuis 2019 avec la société à l’origine de ce supplément d’activité.

Elle fait valoir qu’à la date d’échéance de son contrat de travail, elle occupait le même emploi au sein de la société Webhelp [Localité 3] depuis plus d’un an, ayant effectué deux missions intérimaires préalablement et qu’elle a été remplacée de manière effective et permanente par une autre salariée à ce poste. Elle indique que l’absorption de la société Webhelp [Localité 3] par la société Webhelp Grand Est implique un besoin de salariés permanents.

Mme [I] invoque les dispositions du droit local relatives au maintien de salaire en période de maladie pour solliciter un rappel de rémunération et les dispositions de la convention collective pour réclamer un solde d’indemnité compensatrice de congés payés.

En l’état de ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 20 juillet 2023, la société WGE venant aux droits de la société Webhelp [Localité 3] demande à la cour de :

– confirmer le jugement,

– débouter Mme [I] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner Mme [I] à lui payer 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [I] aux dépens.

Au visa des dispositions des articles L1243-13 et L1243-13-1 du code du travail, l’intimée rappelle que l’employeur n’a pas à notifier le non renouvellement du contrat à durée déterminée. Elle ajoute que les dispositions du contrat signé entre les parties mentionnent que ce dernier prendra fin automatiquement sans formalité. Elle précise que, s’il est d’usage au sein de la société que les managers avertissent préalablement les salariés du renouvellement ou non de leur contrat, Mme [I] se trouvait en arrêt de travail du 20 au 28 juillet 2021 et n’a effectué aucune démarche pour s’enquérir de l’éventuelle suite donnée à son contrat.

Elle conteste les affirmations de la salariée selon lesquelles elle aurait été planifiée pour travailler au-delà du terme de son contrat et qu’il lui aurait été demandé d’être à son poste de travail le 3 août 2021. Elle remet en cause la véracité des attestations produites par l’appelante, établies par son conjoint et une ancienne salariée ayant fait l’objet d’une procédure de licenciement. La société Webhelp [Localité 3] se prévaut quant à elle d’un courriel du 1er juillet 2021, du témoignage d’un salarié et d’un extrait du logiciel de planification des salariés.

Elle réfute avoir pourvu au remplacement de Mme [I] par une autre salariée. Elle précise que le non-renouvellement de son contrat de travail est dû à l’anticipation d’une baisse prochaine des commandes du client et à l’insuffisance des objectifs réalisés par l’appelante.

La société Webhelp [Localité 3] considère que la salariée n’apporte aucun élément de nature à étayer l’existence d’une discrimination et ajoute que la décision de non renouvellement de son contrat de travail est antérieure à l’accident dont elle a été victime. Elle relève que Mme [I] a, elle-même, constaté qu’elle ne disposait plus de ses identifiants de connexion le 2 août 2021.

L’intimée affirme que l’appelante n’occupait pas de poste permanent et précise qu’elle justifie de l’accroissement temporaire d’activité puis de la baisse survenue à compter du mois d’août 2021.

Elle prétend n’avoir commis aucune erreur dans le calcul des congés payés et du salaire de Mme [I], relevant les jours de carence et les absences injustifiées de la salariée.

La société Webhelp [Localité 3] conteste les demandes indemnitaires de l’appelante et fait valoir que celle-ci ne rapporte pas l’existence d’un préjudice.

L’ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 9 janvier 2024.

MOTIFS

Sur l’annulation de la rupture du contrat de travail :

Aux termes de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de nomination ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d’un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d’alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d’alerte, au sens, respectivement, du I de l’article 6 et des 1° et 2° de l’article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

L’article L1134-1 du code du travail dispose que lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, auquel appartient l’article précité, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

L’article L1226-19 du code du travail prévoit que les périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle ne font pas obstacle à l’échéance du contrat de travail à durée déterminée.

Toutefois, lorsque ce contrat comporte une clause de renouvellement, l’employeur ne peut, au cours des périodes de suspension, refuser le renouvellement que s’il justifie d’un motif réel et sérieux, étranger à l’accident ou à la maladie. A défaut, il verse au salarié une indemnité correspondant au préjudice subi, qui ne peut être inférieure au montant des salaires et avantages que le salarié aurait reçus jusqu’au terme de la période de renouvellement prévue au contrat.

En l’espèce, Mme [I] fait grief à son employeur d’avoir eu à son égard une attitude discriminatoire en refusant de renouveler son contrat ou d’admettre qu’il s’était poursuivi au-delà de son terme.

A l’appui de ses prétentions, elle se prévaut des éléments suivants :

– l’attestation de Mme [V] [X], conseillère client de la société Webhelp [Localité 3], datée du 29 septembre 2021, qui indique s’être inquiétée de ne pas avoir vu Mme [I] connectée sur Teams le 3 août 2021 alors qu’elle « était planifiée sur la semaine 31 donc logiquement renouvelée ». Elle précise « à ce jour Mme [I] se bat tout comme moi pour faire reconnaître ses droits de salariée et je la soutiens car je subis la même injustice. ».

– l’attestation M. [G] [W], qui mentionne avoir écouté une conversation entre sa compagne et Mme [J] le 31 juillet 2021 aux termes desquels cette dernière demandait à Mme [I] de reprendre le travail le 3 août et de se connecter à son poste en lui précisant qu’elle n’avait pas encore d’information concernant le renouvellement ou le non-renouvellement de son contrat. Il ajoute que le 2 août 2021 la connexion était opérationnelle.

– un courrier recommandé daté du 6 août 2021 adressé par la société Webhelp [Localité 3] lui indiquant que son contrat s’était achevé le 30 juillet 2021 mettant fin à leurs relations contractuelles et rappelant qu’aux termes de l’article 3 du contrat de travail, celui-ci s’achevait sans aucune formalité à son terme.

– un certificat médical d’accident du travail daté du 3 août 2021 prescrivant un arrêt de travail jusqu’au 9 août 2021.

– un courrier de la CPAM de Moselle du 14 mars 2022 notifiant à Mme [I] la prise en charge de son accident de travail du 3 août 2021.

– un contrat de mission temporaire du 23 juin 2020 au profit de la société Webhelp [Localité 3] du 23 juin au 31 juillet 2020, mentionnant comme motif « un accroissement temporaire d’activité » et comme justificatif « surcroît d’activité suite au déconfinement engendrant une hausse des appels nécessitant un renfort de personnel ». Les caractéristiques du poste sont ainsi décrits : « gestion d’appels entrants pour le projet Pick Up, renseignement des clients, gestion des réclamations, utilisation de l’outil informatique. ».

– un contrat de mission temporaire du 1er janvier 2021 au profit de la société Webhelp [Localité 3] du 1er janvier au 15 janvier 2021, mentionnant comme motif « un accroissement temporaire d’activité » et comme justificatif « lié à une forte hausse des appels pour le client Pick Up nécessitant un renfort de l’équipe pendant les fêtes de fin d’années ». Les caractéristiques du poste sont ainsi décrites : « gestion d’appels entrants pour le client Pick Up, répondre aux différentes demandes des clients, suivi administratif des dossiers, l’organisation du temps de travail pourra se faire en télétravail pour tout ou partie de la mission. ».

– un contrat de travail à durée déterminé « post interim » du 28 janvier 2021 comportant un paragraphe 3 « l’objet et la durée du contrat » ainsi rédigé :

« 3.1 Le(a) salarié(e) est engagé(e) dans le cadre d’un accroissement temporaire d’activité non pérenne liée à une demande client.

3,2 Le présent contrat est conclu pour un durée déterminée courant du 01/02/2021 au 31/07/2021. Etant conclu pour une durée déterminée, cet engagement prendra fin automatiquement et sans formalités à la date qui lui a été assigné ci-dessus dans le terme.

Le présent contrat pourra cependant être renouvelé. Dans ce cas, la société Webhelp [Localité 3] proposera au/à la salarié(e) un avenant pour fixer les conditions de ce renouvellement avant le terme prévu ci-dessus. ».

– un courrier recommandé daté du 7 septembre 2021 adressé par la société Webhelp [Localité 3] au conseil de Mme [I] en réponse à un courrier reçu le 19 août 2021. L’employeur expose notamment que lors de la conversation téléphonique du 30 juillet 2021, Mme [J] a invité Mme [I] à prendre contact avec son manager afin de connaître la suite donnée à son contrat dont le terme était fixé au 31 juillet. Il précise que la salariée n’a jamais honoré son engagement d’appeler le site et n’a pas décroché aux différents appels de ses superviseurs.

– des SMS non datés échangés entre Mme [I], Mme [V] [X] et une prénommée [L], selon l’appelante, au sujet des modalités de prolongation des contrats. Il est indiqué que généralement les supérieurs avertissaient une semaine avant la fin du contrat. Il est également mentionné que cette information intervenait au dernier moment.

– un procès-verbal du CSE du 28 août 2019 comportant les points suivants :

« 4) Les CDD sont toujours prévenus à la dernière minute pour leurs renouvellements. Est-ce normal ‘

Les salariés en CDD ne sont pas systématiquement prévenus à la dernière minute. Cependant, l’entreprise est contrainte d’obtenir le prévisionnel client afin de statuer sur le renouvellement et la durée des CDD.

6) Aura-t-il un nouveau sup sur pickup ‘

La volumétrie des commandes Pickup ne cesse de diminuer ce qui ne nous permet pas de recruter un nouveau superviseur. Pour votre information, l’entreprise est en cours de recrutement pour un poste de chef de projet. »

– des SMS échangés le 15 septembre 2021 entre Mme [D] [Z], déléguée syndicale, et [V] [X], indiquant que Mme [B] avait remplacé Mme [I].

– une copie d’écran de planning du 11 octobre 2021 sur lequel apparaît Mme [C] [B] et une activité « Pickup services AE ».

– une décision de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé de Mme [I] du 10 janvier 2022.

– un article de journal paru le 10 septembre 2022 évoquant l’implantation de la société Webhelp [Localité 3] à [Localité 4] et la perspective d’une embauche de 250 salariés.

– un arrêt de travail du 20 juillet 2021 au 28 juillet 2021.

La salariée présente des éléments de fait laissant supposer qu’il y a eu discrimination.

L’employeur, quant à lui, verse aux débats les pièces suivantes :

– un courriel de Mme [I] adressé le 1er juillet 2021 à Mme [Y] [J] indiquant que son contrat à durée déterminée prenait fin le 31 janvier 2021 (en réalité le 31 juillet 2021) et formulant une demande de contrat à durée indéterminée. La salariée précise en outre qu’un « nouveau renouvellement de CDD ne correspondrait pas à mes (ses) futures attentes ».

– un courriel de réponse de Mme [J] du 1er juillet 2021 lui indiquant que chaque contrat ayant son terme au 31 juillet 2021 fera l’objet d’une étude en lien avec les équipes de production.

– un listing des 19 contrats de travail arrivants à échéance le 31 juillet 2021 concernant le projet Pick Up.

– un courriel de Mme [I] du 3 août 2021 adressé à Mme [P] [T] indiquant avoir été victime d’un accident en voulant se connecter pour le travail.

– un courriel en réponse de Mme [T], assistante ressources humaines à Mme [I] du 4 août 2021 précisant que le 31 juillet 2021 était le dernier jour de travail et qu’il ne s’agit pas d’un accident du travail.

– une capture d’écran démontrant une absence de planning pour les 2 et 3 août 2021.

– un tableau relatif aux commandes heures pick up de juin 2021 à septembre 2022 indiquant une baisse constante des ETP nécessaires pour assurer la commande.

– une attestation de M. [U] [K], superviseur, indiquant avoir assisté à la conversation entre Mme [J] et Mme [I] et mentionnant qu’à « aucun moment il ne lui a été demandé de se connecter le lundi. Par contre, Mme [J] lui a demandé de rappeler le site à l’issue de la conversation pour avoir un superviseur en ligne afin de discuter du terme de son contrat. ».

– une attestation de Mme [P] [E], conseillère client, indiquant que son renouvellement de contrat du 31 juillet 2021 lui a été annoncé une semaine avant la date de fin par son superviseur.

– une attestation de Mme [L] [R], chargée de flux, indiquant que les renouvellements de ses contrats lui ont toujours été « annoncés en temps et en heure ».

– un courriel de Mme [F] [M] du 5 août 2021, indiquant avoir informé Mme [I] qu’elle avait tenté de la joindre « en fin de semaine dernière pour lui donner les suites de son contrat dont la date d’échéance était au 31/07 » et lui annonçant la fin de son contrat au 31 juillet 2021.

Il ressort des documents produits par l’employeur que le contrat à durée déterminée signé entre les parties est arrivé à terme le 31 juillet 2021 conformément aux dispositions de celui-ci, et que l’accident dont se prévaut la salariée est survenu postérieurement le 3 août 2021 et n’a donc pu en motiver le non renouvellement.

En tout état de cause, l’intention de renouveler le contrat à durée déterminée de Mme [I], sur laquelle serait revenu l’employeur, n’est pas caractérisée. Elle ne ressort d’aucune des pièces produites étant relevé que le contenu de la conversation du 30 juillet 2021 entre Mme [I] et Mme [J] tel que rapporté par le compagnon de l’appelante est contredit par plusieurs attestations produites par la société Webhelp [Localité 3].

En outre, la salariée n’apparaît plus sur les plannings de la société et ne conteste pas n’avoir pu se connecter à son poste de travail le lundi 3 août 2021.

Ces pièces de l’employeur montrent que celui-ci s’est déterminé en fonction d’éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a dit que Mme [I] n’avait pas été victime de discrimination et qu’il a rejeté sa demande de dommages et intérêts formée à ce titre.

Sur la requalification en contrat à durée indéterminée :

Selon l’article L.1242-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

L’article L.1242-2 du même code dispose que, sous réserve des contrats spéciaux prévus à l’article L.1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu’il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d’un salarié (1°), l’accroissement temporaire d’activité (2°) et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d’usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois(3°).

Aux termes de l’article L.1245-2 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif, et notamment les mentions énumérées par ce texte ; à défaut, il est réputé être conclu à durée indéterminée.

Il est ajouté à l’article L.1245-2 du code du travail, est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1245-2 à L.1245-2, L.1245-2 à L.1245-2 ; L.1245-2 alinéa 1, L.1243-11 alinéa 1, L.1243-13, L.1244-3 et L.1244-4 du même code.

En cas de contestation de la réalité du motif d’un contrat à durée déterminée, il appartient à l’employeur de prouver à la fois la réalité de l’accroissement d’activité et son caractère temporaire, et au juge du fond de constater la réalité du motif mentionné dans le contrat.

Il lui incombe également d’apporter toutes les pièces permettant d’apprécier si les salariés concernés ont été recrutés à l’occasion d’un surcroît d’activité

En l’espèce, comme il l’a été exposé précédemment, le contrat à durée déterminée de Mme [I] ne s’est pas poursuivi au-delà de son terme du 31 juillet 2021, il n’y a donc pas lieu de prononcer la requalification de ce chef.

S’agissant du motif de recours au contrat de travail à durée déterminée, Mme [I] prétend qu’il n’est pas conforme aux exigences légales.

L’employeur, pour justifier le recours au contrat à durée déterminée verse aux débats les pièces suivantes :

– un tableau sur lequel apparaissent les commandes du client pour 2020-2021. Le nombre de commandes y apparaît en baisse à compter de janvier 2021 de même que les besoins en Etp productif.

– un tableau relatif aux commandes heures pick up de juin 2021 à septembre 2022 indiquant une baisse constante des ETP nécessaires pour assurer la commande.

La teneur de ces documents et les explications de la société Webhelp [Localité 3] ne permettent pas de caractériser une augmentation temporaire d’activité.

Il convient en outre de relever que le listing des salariés employés à durée déterminée ou en interim laisse apparaître que cinq contrats ont été prolongés jusqu’au 31 décembre 2021 alors même que le tableau ci-dessus mentionne une baisse constante des ETP nécessaires.

Dès lors, le jugement entrepris est infirmé et la requalification du contrat à durée déterminée de Mme [I] prononcée à compter du 1er février 2021.

Sur les conséquences de la requalification du contrat de travail :

– indemnité de requalification

Aux termes de l’article L1245-2, alinéa 2, du code du travail, lorsqu’elle fait droit à la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la juridiction saisie doit, au besoin d’office, condamner l’employeur à payer au salarié une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

En l’espèce, eu égard à la requalification prononcée, la société Webhelp [Localité 3] sera condamnée à verser à Mme [I] une indemnité de requalification qui sera fixée à la somme de 1 554,58 euros.

– rupture du contrat de travail

Compte tenu de la requalification en contrat à durée indéterminée, la relation de travail entre les parties a été rompue au terme du dernier contrat, ce qui, eu égard à la requalification en contrat à durée indéterminée, équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dommages et intérêts pour licenciement infondé

Selon les dispositions de l’article L 1235-3 du code du travail, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, en cas de refus de la réintégration du salarié dans l’entreprise, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par ledit article, en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise et du nombre de salariés employés habituellement dans cette entreprise.

En l’espèce, Mme [I] bénéficie d’une ancienneté inférieure à un an. Il lui est alloué une somme de 1 554,88 euros à titre de dommages et intérêts.

Indemnité de licenciement

L’article L1234-9 du code du travail dispose que le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

L’article R1234-2 du code du travail précise que l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1° Un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à dix ans ;

2° Un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années à partir de dix ans.

L’article L1251-38 du code du travail dispose que lorsque l’entreprise utilisatrice embauche, après une mission, un salarié mis à sa disposition par une entreprise de travail temporaire, la durée des missions accomplies au sein de cette entreprise au cours des trois mois précédant le recrutement est prise en compte pour le calcul de l’ancienneté du salarié.

En l’espèce, la rémunération brute retenue est celle proposée par la salariée, figurant sur ses bulletins de paie au titre de la rémunération brute de base. L’employeur la conteste sans justifier de son calcul.

Les missions intérimaires successives pour une durée totale de trois mois effectuées par l’appelante, préalablement à son embauche, ressortent des pièces produites et peuvent donc être prises en compte pour le calcul de l’ancienneté.

La société Webhelp [Localité 3] est condamnée à verser à Mme [I] une somme de 291,48 euros [(1 554,58×1/4)x(9/12)] à ce titre.

Indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents

L’article L1234-1 du code du travail dispose que lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit :

1° S’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l’accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ;

2° S’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d’un mois ;

3° S’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l’accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d’ancienneté de services plus favorable pour le salarié.

L’article L5213-9 du code du travail dispose qu’en cas de licenciement, la durée du préavis déterminée en application de l’article L. 1234-1 est doublée pour les bénéficiaires du chapitre II, sans toutefois que cette mesure puisse avoir pour effet de porter au-delà de trois mois la durée de ce préavis.

En l’espèce, Mme [I] s’est vue reconnaître la qualité de travailleur handicapé par décision de la MDPH de Moselle du 10 janvier 2022, soit postérieurement à la rupture du contrat de travail, le 31 juillet 2021. Elle ne peut donc s’en prévaloir pour bénéficier des dispositions précitées.

La société Webhelp [Localité 3] est condamnée à verser à Mme [I] une somme de 1 554,58 euros brut à ce titre, outre une indemnité compensatrice sur congés payés de 155,45 euros brut.

Sur les demandes accessoires :

– rappel de salaire

L’article L1226-23 du code du travail applicable en Alsace-Moselle prévoit que le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour une cause personnelle indépendante de sa volonté et pour une durée relativement sans importance a droit au maintien de son salaire.

Toutefois, pendant la suspension du contrat, les indemnités versées par un régime d’assurances sociales obligatoire sont déduites du montant de la rémunération due par l’employeur.

A l’appui de sa demande de rappel de salaire, Mme [I] expose que :

– en avril 2021, elle a perçu 475,97 euros d’indemnités journalières au lieu de 673,66 euros soit un solde de 197,69 euros,

– en mai 2021, une déduction de 20,19 euros,

– en juin 2021, elle a perçu 169,13 euros d’indemnités journalières au lieu de 310,92 euros soit un solde de 141,79 euros,

– en août 2021, elle a perçu 112,07 euros d’indemnités journalières au lieu de 259,10 euros soit un solde de 147,03 euros.

La société Webhelp [Localité 3] mentionne des absences injustifiées et des retards dans la transmission des indemnités journalières à déduire, sans pour autant apporter de contestations précises sur le décompte produit par la salariée ni fournir ses propres éléments de calcul.

Il sera donc fait droit à la demande de l’appelante et la société Webhelp [Localité 3] sera condamnée à lui verser une somme de 506,70 euros brut à titre de rappel de salaire outre 50,67 euros brut pour les congés payés y afférents.

– indemnité de congés payés

L’article 17 de la convention collective du personnel des prestataires de service prévoit que le salarié qui, au cours de l’année de référence, justifie avoir été occupé chez le même employeur pendant un temps équivalant à un minimum de 1 mois de travail effectif au sens de l’article L. 223-4 du code du travail a droit à un congé dont la durée est déterminée à raison de 2 jours et demi ouvrables par mois de travail effectif sans que la durée totale du congé puisse excéder 30 jours ouvrables.

L’absence au travail ne peut avoir pour effet d’entraîner une réduction de ses droits à congés plus que proportionnelle à la durée de cette absence.

En l’espèce, l’employeur reconnaît ne pas avoir fait application des dispositions précitée tout en affirmant, sans le démontrer, avoir retenu une règle plus favorable à la salariée. Il ressort des calculs de cette dernière que sur un montant de 1 006,61 euros, 861,49 euros lui ont été payés.

Dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de Mme [I] et de condamner la société Webhelp [Localité 3] à lui verser un solde de 145,12 euros.

– indemnité de fin de contrat

L’article L1243-8 du code du travail dispose que lorsque, à l’issue d’un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.

Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.

Elle s’ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l’issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant.

La cour rappelle que l’indemnité de précarité prévue par l’article L1243-8 du code du travail qui compense pour la salariée la situation dans laquelle elle est placée du fait de son contrat à durée déterminée n’est pas due lorsque la relation contractuelle se poursuit en contrat à durée indéterminée, notamment en cas de requalification du contrat de travail.

En conséquence, et eu égard à la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée à la date du contrat à durée déterminée, Mme [I] sera déboutée de sa demande et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur l’attestation employeur

Il convient de condamner la société Webhelp [Localité 3] à remettre à Mme [I] une attestation destinée à France Travail conforme à la teneur du présent arrêt.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Les dispositions du jugement relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance sont infirmées.

La société Webhelp [Localité 3], partie succombante, est condamnée aux dépens d’instance et d’appel. Elle est déboutée de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés par celui-ci.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a dit que Mme [I] n’avait pas été victime de discrimination, a rejeté sa demande de dommages et intérêts formée à ce titre, et l’a déboutée de sa demande au titre de l’indemnité de précarité ;

L’infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Prononce la requalification du contrat de travail de Mme [A] [I] en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er février 2021 ;

Condamne la SAS Webhelp Grand Est WGE venant aux droits de la SAS Webhelp [Localité 3] à payer à Mme [A] [I] une somme de 1 554,58 euros au titre de l’indemnité de requalification ;

Dit que la rupture du contrat de travail équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SAS Webhelp Grand Est WGE venant aux droits de la SAS Webhelp [Localité 3] à payer à Mme [A] [I] les sommes suivantes :

– 1 554,88 euros de dommages et intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse,

– 291,48 euros à titre d’indemnité de licenciement,

– 1 554,58 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 155,45 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

– 506,70 euros brut à titre de rappel de salaire outre 50,67 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

– 145,12 euros brut à titre de solde d’indemnité de congés payés ;

Ordonne à la SAS Webhelp Grand Est WGE venant aux droits de la SAS Webhelp [Localité 3] de remettre à Mme [A] [I] une attestation destinée à France Travail conforme aux dispositions du présent arrêt ;

Condamne la SAS Webhelp Grand Est WGE venant aux droits de la SAS Webhelp [Localité 3] à payer à Mme [A] [I] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SAS Webhelp Grand Est WGE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamne la SAS Webhelp Grand Est WGE aux dépens de première instance et d’appel.

La Greffière La Présidente


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