Discrimination syndicale et inégalités de traitement dans l’évolution professionnelle et salariale.

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Discrimination syndicale et inégalités de traitement dans l’évolution professionnelle et salariale.

Discrimination syndicale

L’article L.2141-5 du Code du travail prohibe la prise en considération par l’employeur de l’appartenance d’un salarié à un syndicat ou de l’exercice d’une activité syndicale pour prendre des décisions concernant le recrutement, la répartition du travail, la formation professionnelle, l’avancement, la rémunération, et d’autres aspects liés à l’emploi.

L’article L.1132-1 du Code du travail prohibe toute discrimination directe ou indirecte d’un salarié, notamment en matière de rémunération, d’affectation, de qualification, de classification, et de promotion professionnelle, en raison de son âge ou de ses activités syndicales.

En cas de litige, l’article L.1134-1 impose au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination, et il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Évolution professionnelle et entretien professionnel

L’article L.6315-1 du Code du travail impose à l’employeur d’organiser tous les deux ans un entretien professionnel portant sur les perspectives d’évolution professionnelle du salarié, distinct de l’entretien d’évaluation.

L’article L.2141-5, dans sa version applicable, prévoit qu’un représentant du personnel peut demander un entretien individuel avec son employeur pour discuter des modalités d’exercice de son mandat, sans que cela ne remplace l’entretien professionnel.

Formation professionnelle

L’article L.6321-1 du Code du travail stipule que l’employeur doit assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller à leur capacité à occuper un emploi, notamment par des formations.

L’employeur n’est pas tenu d’assurer la formation initiale du salarié, mais il doit proposer des formations qui participent au développement des compétences.

Garantie salariale

L’article L.2141-5-1 du Code du travail prévoit qu’en l’absence d’accord collectif déterminant des garanties d’évolution de la rémunération, les salariés bénéficiant d’un nombre d’heures de délégation supérieur à 30 % de leur temps de travail doivent voir leur rémunération évoluer au moins au même rythme que les augmentations générales et individuelles perçues par des salariés comparables.

L’absence de mise en œuvre de ce mécanisme de garantie doit être justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Prescription des actions en réparation

L’article L.1134-5 du Code du travail établit que l’action en réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination.

Les dommages et intérêts doivent réparer l’entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

Éléments de preuve et charge de la preuve

Il appartient au juge d’apprécier si les éléments présentés par le salarié laissent supposer l’existence d’une discrimination. Si tel est le cas, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le salarié doit établir des faits matériels qui, pris dans leur ensemble, laissent présumer l’existence d’une discrimination, et l’employeur doit démontrer que ses agissements sont justifiés.

L’Essentiel : L’article L.2141-5 du Code du travail prohibe la prise en considération par l’employeur de l’appartenance d’un salarié à un syndicat pour des décisions liées à l’emploi. L’article L.1132-1 interdit toute discrimination en raison de l’âge ou des activités syndicales. En cas de litige, le salarié doit présenter des éléments laissant supposer une discrimination, et l’employeur doit prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs.
Résumé de l’affaire : Un salarié, engagé par la société Dynetcom en tant que consultant/chef de projet réseau et sécurité, a vu son contrat transféré à la société Orange cyberdéfense lors de la création d’une nouvelle unité spécialisée en cybersécurité. Au fil des années, ce salarié a occupé divers mandats représentatifs, notamment en tant que délégué syndical et membre de plusieurs comités. En 2017, il a dénoncé une différence de traitement salarial par rapport à des collègues, ce que l’employeur a contesté, affirmant que sa rémunération était cohérente avec celle de ses pairs.

En 2019, le salarié a dénoncé des faits de discrimination syndicale et d’inégalité de traitement, ce qui a conduit à une assignation devant le conseil de prud’hommes. Ce dernier a rendu un jugement en 2021, concluant à l’absence de discrimination et déboutant le salarié de ses demandes. Ce dernier a interjeté appel, demandant la reconnaissance de la discrimination syndicale et une réévaluation de sa rémunération.

Exposé des prétentions des parties

Le salarié demande à la cour d’infirmer le jugement initial, de reconnaître la discrimination syndicale, et de condamner l’employeur à lui verser des dommages et intérêts, ainsi qu’à fixer un nouveau salaire et une part variable. En réponse, la société Orange cyberdéfense demande la confirmation du jugement, arguant de l’absence de discrimination et d’inégalité de traitement, tout en contestant le montant des demandes du salarié.

Motivation

Le salarié soutient avoir subi une discrimination syndicale et une stagnation salariale. La cour doit examiner si les éléments présentés par le salarié laissent présumer l’existence d’une discrimination. Les faits allégués, tels que l’absence d’évolution de carrière et de formation, ainsi que des différences de rémunération par rapport à des collègues, sont examinés. La société doit prouver que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs. La cour conclut que le salarié a établi des éléments de fait laissant présumer une discrimination, et que l’employeur n’a pas suffisamment justifié ses décisions.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre juridique de la discrimination syndicale selon le Code du travail ?

L’article L.2141-5 du Code du travail prohibe la prise en considération par l’employeur de l’appartenance d’un salarié à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération, d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

De plus, l’article L.1132-1 du Code du travail prohibe la discrimination directe ou indirecte d’un salarié, notamment en matière de rémunération, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, en raison de son âge et/ou de ses activités syndicales.

Ainsi, ces articles établissent un cadre juridique clair interdisant toute forme de discrimination fondée sur l’appartenance syndicale ou l’exercice d’activités syndicales, garantissant ainsi l’égalité de traitement des salariés.

Quel est le rôle du juge en cas de litige sur la discrimination ?

Selon l’article L.1134-1 du Code du travail, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions relatives à la discrimination, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte.

Il incombe alors à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, si nécessaire, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Cela signifie que le juge doit examiner la matérialité des éléments invoqués par le salarié et apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’une discrimination. Si tel est le cas, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs.

Quel est le contenu des obligations de l’employeur en matière d’entretien professionnel ?

L’article L.6315-1 du Code du travail impose à l’employeur d’organiser tous les deux ans un entretien professionnel portant sur les perspectives d’évolution professionnelle du salarié, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Cet entretien ne doit pas porter sur l’évaluation du travail du salarié.

Il est précisé que l’exigence d’entretiens distincts ne s’oppose pas à la tenue à la même date de l’entretien d’évaluation et de l’entretien professionnel, à condition que les questions d’évaluation ne soient pas évoquées lors de l’entretien professionnel.

En l’espèce, il a été établi que l’employeur a organisé des entretiens annuels, ce qui contredit les allégations du salarié concernant l’absence d’entretien professionnel.

Quel est le cadre juridique concernant la stagnation salariale et les garanties d’évolution de la rémunération ?

L’article L.2141-5-1 du Code du travail stipule que, en l’absence d’accord collectif déterminant des garanties d’évolution de la rémunération, les salariés bénéficiant d’un nombre d’heures de délégation supérieur à 30 % de la durée de travail fixée dans leur contrat doivent bénéficier d’une évolution de rémunération au moins égale aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues par des salariés de la même catégorie professionnelle.

Il est donc essentiel que l’employeur justifie l’absence d’évolution salariale par des éléments objectifs. En l’espèce, le salarié a démontré que son salaire n’a pas évolué entre 2016 et 2018, ce qui soulève des questions sur le respect de ces dispositions.

Quel est le cadre juridique relatif à la formation professionnelle des salariés ?

L’article L.6321-1 du Code du travail impose à l’employeur d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, notamment par le biais de formations.

L’employeur doit démontrer qu’il a assuré cette adaptation et veillé au respect de la capacité des salariés à occuper leur emploi. En l’espèce, bien que le salarié ait suivi des formations liées à ses fonctions représentatives, celles-ci ne constituent pas des formations permettant l’adaptation à son poste de travail.

Il est donc crucial que l’employeur propose des formations adaptées aux besoins et aux perspectives d’évolution professionnelle du salarié, ce qui n’a pas été démontré dans ce cas.

Quel est le cadre juridique concernant la prescription des actions en réparation du préjudice résultant d’une discrimination ?

L’article L.1134-5 du Code du travail stipule que l’action en réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination.

Dans le cas présent, bien que le salarié ait évoqué des faits de discrimination depuis 2009, il a également soutenu que ces faits avaient des effets continus sur sa carrière, ce qui permet de considérer que l’action n’est pas prescrite.

Ainsi, la société ne peut pas opposer la prescription pour des faits qui continuent de produire des effets discriminatoires.

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRET DU 26 MARS 2025

(n° /2025, 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/07899 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CELTT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Août 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LONGJUMEAU – RG n° 20/00155

APPELANT

Monsieur [W] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Karim HAMOUDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0282

INTIMEE

Société ORANGE CYBERDEFENSE Prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-bernard MICHEL, avocat au barreau de LYON, toque : 1377

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sonia NORVAL-GRIVET, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme MEUNIER Guillemette, présidente de chambre

Mme NORVAL-GRIVET Sonia, conseillère rédactrice

Mme MARQUES Florence, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Clara MICHEL, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet le 2 mars 2007, M. [W] [K] a été embauché par la société Dynetcom, en qualité de consultant/chef de projet réseau et sécurité, statut cadre position VII coefficient 300. En 2009, la société Dynetcom a fusionné avec la société Silicomp réseaux sous l’appellation « Obiane ».

Suite à la création de l’unité d’affaire Orange cyberdéfense, spécialisée dans le secteur d’activité de la cybersécurité des entreprises et administrations, le contrat de travail de M. [K] a été transféré le 1er janvier 2016 moyennant une rémunération mensuelle brute de 4 167 euros.

La convention collective nationale applicable est celle des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de Conseils (« BETIC »). La société Orange cyberdéfense emploie environ 1 500 salariés.

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [K] occupait, depuis le mois de juin 2008, le poste de chef de projet, son salaire brut de base s’élevant à la somme de 5 619,20 euros.

Depuis 2009, M. [K] a occupé divers mandats représentatifs, à savoir celui de délégué syndical central de 2009 à 2012, de délégué syndical de 2012 à 2017, de délégué syndical et délégué du personnel de 2017 à 2019, de membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de janvier à décembre 2019, et de membre du comité social et économique (CSE) en tant que représentant syndical et délégué syndical depuis décembre 2019.

Le salarié a entre-temps bénéficié d’une convention d’accompagnement à la création d’entreprise qui a débuté le 1er septembre 2014, et a réintégré la société Orange cyberdéfense au mois de novembre 2016 en qualité de chef de projet.

Par courrier du 28 août 2017, M. [K] a revendiqué une différence de traitement de rémunération par rapport à des collègues ayant selon lui une qualification et un poste identiques et a demandé à son employeur de lui faire savoir sur quels éléments concrets il se fondait pour évaluer son travail.

La société Orange cyberdéfense lui a répondu par courrier du 21 septembre 2017, en lui indiquant considérer que sa rémunération était « parfaitement cohérente avec celles perçues par [ses] collègues de travail, exerçant des fonctions identiques (‘) dans l’entreprise ».

Par courrier du 27 février 2019, M. [K] a, par l’intermédiaire de son conseil, dénoncé des faits de discrimination syndicale et d’inégalité de traitement, ce que la société Orange cyberdéfense a contesté par un courrier du 19 avril 2019.

Par acte du 11 mars 2020, M. [K] a assigné la société Orange cyberdéfense devant le conseil de prud’hommes de Longjumeau aux fins de voir, notamment, dire et juger qu’il subit des faits de discrimination syndicale, ordonner la fixation d’un nouveau salaire brut annuel, la fixation d’une part variable ainsi que son reclassement à titre principal et à titre subsidiaire dire et juger qu’il subit une inégalité de traitement au plan salarial ainsi que condamner son employeur à lui verser diverses sommes relatives à l’exécution de la relation contractuelle.

Par jugement du 12 août 2021, le conseil de prud’hommes de Longjumeau a statué en ces termes :

– Dit que M. [K] n’a subi ni discrimination syndicale ni différence de traitement;

– Déboute en conséquence M. [K] de toutes ses demandes;

– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile;

– Condamne M. [K] aux entiers dépens éventuels.

Par déclaration du 20 septembre 2021, M. [K] a interjeté appel de ce jugement, intimant la société Orange cyberdéfense.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 14 janvier 2025.

EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 décembre 2024, M. [K] demande à la cour de :

– Infirmer en totalité le jugement ;

En conséquence,

A titre principal :

– Dire et juger que M. [K] subit des faits de discrimination syndicale ;

En conséquence,

– Condamner la société Orange Cyberdéfense à payer à M. [K] la somme 328 444 euros de dommages et intérêts en réparation de l’entier préjudice subi ;

– Ordonner la fixation du nouveau salaire brut annuel à la somme de 78 542 euros bruts à compter du 1er janvier 2025, soit 6 545 euros bruts par mois ;

– Ordonner la fixation de la part variable annuelle de rémunération à la somme de 9 182 euros bruts à compter du 1er janvier 2025 ;

– Ordonner le reclassement de M. [K], à titre principal, à la position 3.2 coefficient 210, et, subsidiairement, à la position 3.1 coefficient 170 à compter du 1er janvier 2025 ;

A titre subsidiaire :

– Dire et juger que M. [K] subit une inégalité de traitement au plan salarial ;

En conséquence,

– Condamner la société Orange Cyberdéfense à payer à M. [K] la somme de 176 031,55 euros bruts au titre du rappel de salaire pour la période 2017 à 2024, outre 17 603,16 euros bruts au titre des congés payés y afférents ;

– Condamner la société Orange Cyberdéfense à payer à M. [K] la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi ;

– Ordonner la fixation du nouveau salaire brut annuel à la somme de 78 542 euros bruts à compter du 1er janvier 2025, soit 6 545 euros bruts par mois ;

– Ordonner la fixation de la part variable annuelle de rémunération à la somme de 9 182 euros bruts à compter du 1er janvier 2025 ;

En tout état de cause :

– Condamner la société Orange Cyberdéfense à payer à M. [K] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société Orange Cyberdéfense aux entiers dépens de l’instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 janvier 2025, la société Orange cyberdéfense demande à la cour de :

– Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Longjumeau du 12 août 2021,

– Constater l’absence de discrimination syndicale à l’encontre de M. [K],

– Constater l’absence d’inégalité de traitement à l’encontre de M. [K],

– Constater que le positionnement 2.3, coefficient 150 de M. [K] est justifié,

– Débouter M. [K] de l’intégralité de ses demandes,

– Constater que M. [K] ne justifie pas du montant de ses demandes,

– Condamner M. [K] à verser à la société Orange la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique, en application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur l’exécution du contrat de travail :

M. [K] soutient à titre principal qu’il a été victime d’une discrimination syndicale, et, à titre subsidiaire, d’une inégalité de traitement.

Sur la discrimination syndicale :

L’article L.2141-5 du code du travail prohibe la prise en considération par l’employeur de l’appartenance d’un salarié à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

L’article L.1132-1 du code du travail prohibe la discrimination directe ou indirecte d’un salarié, notamment en matière de rémunération, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, notamment en raison de son âge et/ou de ses activités syndicales.

Selon l’article L.1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Il en résulte que lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Il appartient donc au juge du fond d’examiner la matérialité de tous les éléments invoqués par le salarié, d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte et enfin, dans l’affirmative, d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l’espèce, M. [K] se prévaut au soutien de ses allégations relatives à la discrimination d’éléments afférents à une stagnation de sa carrière, à une stagnation salariale, et à la persistance de discriminations depuis 2009, ce que conteste la société Orange cyberdéfense.

En ce qui concerne la stagnation de carrière :

En premier lieu, M. [K] fait valoir qu’il occupe depuis 2008 le poste de chef de projet et n’a connu depuis aucune évolution professionnelle, ne se voyant notamment pas proposer le poste de directeur de projet occupé par M. [H] au moment de l’organisation du départ à la retraite de celui-ci. La matérialité de ces allégations est établie.

En deuxième lieu, l’appelant soutient que sa rémunération a été bloquée au même coefficient de 150 depuis 2012.

L’application de ce coefficient 150 à M. [K] depuis l’année 2012, au demeurant non contestée, est également établie.

En troisième lieu, l’appelant soutient qu’il n’a pas bénéficié de l’entretien professionnel, prévu par l’article L. 6315-1 du code du travail, consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, et que la société n’a pas pour autant abondé son compte personnel de formation conformément à l’alinéa 8 de ce texte.

Ces dispositions, dans leurs versions successives applicables à compter du 7 mars 2014, imposent à l’employeur l’organisation tous les deux ans d’un entretien professionnel devant porter sur les perspectives d’évolution professionnelle du salarié, notamment en termes de qualifications et d’emploi, et qui ne porte pas sur l’évaluation de son travail.

Il résulte de ces dispositions que l’exigence d’entretiens distincts ne s’oppose pas à la tenue à la même date de l’entretien d’évaluation et de l’entretien professionnel pourvu que, lors de la tenue de ce dernier, les questions d’évaluation ne soient pas évoquées.

En l’espèce, il ressort des pièces produites par la société Orange cyberdéfense, et plus spécifiquement des courriels versés en pièces n°15, 19, 64.1 et 74.7, que contrairement à ce que soutient le salarié, l’employeur a organisé, en 2018, 2019, 2021 et 2022, des « entretiens annuels » (« entretien individuel + entretien professionnel »).

Le salarié n’est pas fondé à soutenir que la société aurait entretenu une confusion sur ces entretiens distincts ni à se prévaloir de la circonstance qu’elle l’ait invité à commencer à renseigner les parties devant être remplies par lui.

Le grief tiré de l’absence d’organisation de l’entretien professionnel prévu par l’article L. 6315-1 du code du travail n’est donc pas établi.

En quatrième lieu, l’appelant soutient qu’il n’a pas bénéficié de l’entretien professionnel spécifique aux représentants du personnel prévu par l’article L. 2141-5 du code du travail ni des entretiens « cap carrière » et « cap sénior » prévus par l’accord « senior » applicable.

S’agissant de l’entretien professionnel spécifique aux représentants du personnel, les dispositions de l’article L. 2141-5, dans leurs versions applicables à compter du 19 août 2015, prévoient une faculté pour le représentant du personnel titulaire, le délégué syndical ou le titulaire d’un mandat syndical de bénéficier, au début de son mandat et à sa demande, d’un entretien individuel avec son employeur portant sur les modalités pratiques d’exercice de son mandat au sein de l’entreprise au regard de son emploi, cet entretien ne se substituant pas à l’entretien professionnel mentionné à l’article L. 6315-1. Lorsque l’entretien professionnel est réalisé au terme d’un mandat de représentant du personnel titulaire ou d’un mandat syndical et que le titulaire du mandat dispose d’heures de délégation sur l’année représentant au moins 30 % de la durée de travail fixée dans son contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l’établissement, l’entretien permet de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l’expérience acquise.

D’une part, il n’est pas établi ni même allégué par le salarié que celui-ci aurait présenté une telle demande d’entretien individuel à laquelle il n’aurait pas été donné suite.

D’autre part, il ressort de la pièce n°12 produite par la société que celle-ci a organisé au profit de M. [K] un entretien individuel « représentant du personnel » – « EIRP » – le 12 février 2018, et de la pièce n°43 produite par le salarié que celui-ci a pu bénéficier le 5 mars 2020 d’un « entretien de prise de mandat(s) ».

La méconnaissance par l’employeur des dispositions de l’article L. 2141-5 du code du travail n’est donc pas établie.

S’agissant de l’entretien « cap carrière », l’article 3.1 de l’accord sur l’emploi des séniors et les mesures en faveur des 2èmes parties de carrière du 31 décembre 2012 prévoit que : « Afin d’accompagner l’élaboration et le suivi du projet et du parcours professionnel tout au long de la vie, les entreprises du Groupe offriront systématiquement aux personnels la possibilité d’avoir un entretien « cap carrière’ afin de faire le point sur leur projet professionnel, après leur 45ème anniversaire ou après 20 ans d’activité professionnelle, et ensuite tous les 5 ans. Cet entretien réalisé sur la base du volontariat, est destiné à éviter toute pratique discriminatoire liée à l’âge dans les évolutions de carrière (‘). Une attention particulière sera apportée aux salariés de 45 ans et + qui n’ont pas progressé d’au moins un niveau de qualification au cours de leur carrière professionnelle. Dans ce cas, et sur demande du salarié, le conseiller Orange Avenirs informera le DRH de proximité du salarié concerne afin que ce dernier béné’cie d’un suivi personnalisé sur un projet professionnel qui lui permettrait d’atteindre cet objectif d’évolution ».

Ces stipulations imposent donc à l’employeur d’offrir systématiquement aux salariés concernés la possibilité de bénéficier d’un tel entretien, dont la réalisation repose toutefois sur la base du volontariat.

Or il ressort des pièces du dossier qu’à l’issue de l’entretien individuel du 3 avril 2013, M. [K], alors âgé de 46 ans, a bien été informé de la possibilité de bénéficier de cet entretien et a été invité à contacter à cet effet le service Orange Avenirs, sans que le salarié ne donne suite à cette proposition.

En outre, en dépit du fait qu’à son retour dans l’entreprise au mois de décembre 2016 à l’issue de son congé de création d’entreprise, cet entretien ne s’imposait plus dès lors qu’en application de l’article 8.3, l’accord avait cessé de s’appliquer au 31 décembre 2015, la société lui a proposé le 24 octobre 2016 un entretien de carrière fixé au 24 novembre suivant.

Par suite, le salarié n’est pas fondé à se prévaloir d’une méconnaissance de l’article 3.1 de l’accord sur l’emploi des séniors.

S’agissant de l’entretien « cap sénior », celui-ci était prévu par l’article 6.1 de l’accord mentionné ci-dessus du 31 décembre 2012 au bénéfice des salariés âgés de plus de 55 ans.

Or ainsi qu’il a été dit précédemment, l’accord sur l’emploi des séniors du 31 décembre 2012 ayant cessé de s’appliquer au 31 décembre 2015, date à laquelle l’appelant était âgé de 48 ans, M. [K] n’est pas fondé à se prévaloir d’une absence d’entretien « cap sénior », dès lors qu’il n’entrait pas dans le champ d’application des salariés concernés.

En cinquième et dernier lieu, l’appelant soutient qu’il n’a bénéficié d’aucune formation professionnelle depuis 2016, soit depuis huit ans.

Selon l’article L. 6321-1 du code du travail dans sa version applicable à l’espèce, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès à un socle de connaissances et de compétences.

Il appartient à l’employeur de démontrer qu’il a assuré l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veillé au respect de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

L’employeur n’est toutefois pas tenu d’assurer la formation initiale du salarié qui fait défaut.

En l’espèce, si le salarié a pu suivre, aux mois de février et octobre 2018, des formations relatives à ses fonctions de délégué du personnel et de membre du CHSCT, ces formations dédiées à l’exercice de ses fonctions représentatives ne constituent pas des formations permettant l’adaptation du salarié à son poste de travail au sens des dispositions précitées de l’article L. 6321-1.

Il appartient à l’employeur de démontrer qu’il a assuré l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veillé au respect de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

L’employeur n’est toutefois pas tenu d’assurer la formation initiale du salarié qui fait défaut.

En l’espèce, si le salarié a pu suivre, aux mois de février et octobre 2018, des formations relatives à ses fonctions de délégué du personnel et de membre du CHSCT, ces formations dédiées à l’exercice de ses fonctions représentatives ne constituent pas des formations permettant l’adaptation du salarié à son poste de travail au sens des dispositions précitées de l’article L. 6321-1.

Si l’employeur n’était en outre pas tenu de le faire bénéficier d’une formation initiale sans relation avec ses perspectives d’évolution professionnelles, il ressort des échanges produits en pièce n°75 que le salarié avait émis en 2018 le souhait de bénéficier d’une formation pour le poste de directeur de projet, sans qu’il n’ait été finalement mis en mesure de suivre cette formation.

Les éléments présentés par le salarié établissent donc les faits allégués.

En ce qui concerne la stagnation salariale :

M. [K] fait valoir, d’une part, que son salaire de base n’a pas évolué en 2016, 2017 et 2018, puisqu’il percevait alors un salaire annuel brut de base de 51 024 euros, et qu’il n’a ainsi pas bénéficié du mécanisme de garantie salariale prévu par l’article L. 2141-5-1 du code du travail.

Aux termes de ces dispositions, en l’absence d’accord collectif de branche ou d’entreprise déterminant des garanties d’évolution de la rémunération des salariés mentionnés aux 1° à 7° de l’article L. 2411-1 et aux articles L. 2142-1-1 et L. 2411-2 au moins aussi favorables que celles mentionnées au présent article, ces salariés, lorsque le nombre d’heures de délégation dont ils disposent sur l’année dépasse 30 % de la durée de travail fixée dans leur contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l’établissement, bénéficient d’une évolution de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, au moins égale, sur l’ensemble de la durée de leur mandat, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable ou, à défaut de tels salariés, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l’entreprise.

Il résulte de l’article L. 2141-5-1 du code du travail et de l’exposé des motifs de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 ayant créé ce texte, combinés aux articles L. 3141-24, alinéa 1, L. 3121-63, L. 2241-8, alinéa 1, et L. 2241-9 du code du travail, qu’en l’absence d’accord collectif de branche ou d’entreprise déterminant des garanties d’évolution de la rémunération des salariés mentionnés à l’article L. 2141-5-1 du code du travail au moins aussi favorables, la comparaison de l’évolution de leur rémunération, au sens de l’article L. 3221-3 de ce code, au moins égale aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable ou, à défaut de tels salariés, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l’entreprise, doit être effectuée annuellement.

En l’espèce, il est constant que le nombre d’heures de délégation dont le salarié disposait entre 2016 et 2018 était supérieur à 30 % de la durée de travail prévue au contrat de travail.Il résulte de l’examen des bulletins de salaire produits par le salarié que celui-ci a perçu un salaire de base identique sur les années 2016 à 2018, et qu’il n’est en outre justifié d’aucune comparaison annuelle par l’employeur de l’évolution de la rémunération de M. [K] sur la période litigieuse.

La matérialité des faits allégués par le salarié est donc établie.

M. [K] fait valoir, d’autre part, que s’il a, à compter de l’année 2019, bénéficié d’une augmentation individuelle de salaire chaque année, ces augmentations sont uniquement intervenues au titre de la garantie salariale prévue par l’article L.2141-5-1 du code du travail et qu’il n’a bénéficié d’aucune augmentation individuelle basée sur l’appréciation de ses performances, contrairement à d’autres collègues.

Il ressort des pièces du dossier que M. [K] a vu sa rémunération annuelle fixe portée à 52 394 euros en 2019, 58 081 euros en 2021, 60 460 euros en 2022, 62 799 euros en 2023 et 65 227 euros en 2024.

Le salarié produit notamment des éléments tendant à comparer sa rémunération annuelle au regard de celles perçues par Mme [S] et M. [I], occupant un poste comparable de chef de projet et ayant une ancienneté inférieure à la sienne.

Il ressort notamment des éléments concernant M. [I] sur la période considérée que la différence de rémunération annuelle au détriment de M. [K] s’élevait à 4 752 euros en 2019, 1 625 euros en 2021 et en dernier lieu à 3 616 euros en 2024.

La matérialité des faits allégués par le salarié est donc établie.

M. [K] soutient, enfin, qu’il a subi une discrimination en termes de rémunération variable.

Il fait valoir qu’il n’a perçu à ce titre qu’une somme de 750 euros en 2017, de 730,29 euros en 2018 et ce malgré un courrier qui lui indiquait que sa part variable pour 2018 serait fixée à 1 623 euros bruts, de 486,84 en 2019 malgré un courrier annonçant une part variable de 1 622,95 euros bruts et qu’il ne perçoit, depuis l’année 2020, aucune rémunération variable, dès lors qu’aucun objectif n’est fixé ou seulement des objectifs qualitatifs faisant l’objet d’une évaluation biaisée de la part de la direction. Il indique que ses collègues occupant un poste similaire ont bénéficié de parts variables très supérieures aux siennes.

L’appelant produit notamment, au soutien de ses allégations, ses bulletins de salaire sur la période considérée, des courriers relatifs aux révisions salariales, ainsi qu’un courriel de la responsable des relations sociales du 30 novembre 2021 faisant apparaître que 32 chefs de projet ont perçu une rémunération variable en 2021.

La matérialité des éléments invoqués par le salarié est donc établie.

En ce qui concerne les autres discriminations alléguées depuis 2009 :

M. [K] soutient qu’il a été victime d’une situation discriminatoire depuis sa prise de mandat en 2009, qui s’est révélée à plusieurs reprises.

La société oppose la prescription quinquennale des faits concernant la période antérieure au 11 mars 2015.

S’agissant de la prescription :

Selon l’article L. 1134-5 du code du travail, l’action en réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination.

Les dommages et intérêts réparent l’entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

Au cas présent, si le salarié faisait état d’une discrimination syndicale ayant commencé dès 2009, il faisait valoir que cette discrimination s’était poursuivie tout au long de sa carrière en terme d’évolution professionnelle, tant salariale que personnelle.

Il en résulte qu’il se fonde sur des faits qui n’avaient pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription.

Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la société doit être écartée.

S’agissant des faits allégués au titre des discriminations depuis 2009 :

En premier lieu, M. [K] fait valoir qu’en juin 2009, après sa première nomination en qualité de délégué syndical central, il s’est vu refuser ses congés, refus dénoncé par le représentant du personnel dont il produit le courrier.

En deuxième lieu, l’appelant soutient qu’entre 2010 et 2011 et suite à une réorganisation des bureaux, il s’est retrouvé sans poste fixe et mis à l’écart, étant sans cesse obligé de déménager de bureau.

Il produit à cet égard des éléments et notamment des échanges de courriels qui établissent la réalité des faits allégués et dont il ressort qu’en janvier 2011, un représentant du CHSCT avait constaté que le caisson de son bureau était « stocké dans un couloir de circulation », que son bureau initial, qui était censé avoir été attribué à une autre équipe, était vacant et que le bureau qu’on lui proposait dans l’autre unité n’était pas préparé pour l’accueillir, étant dépourvu de ligne téléphonique.

En troisième lieu, M. [K] se prévaut de ce qu’il a dénoncé, en octobre 2010, sa situation d’isolement ainsi que, outre les faits évoqués précédemment, des incitations à quitter l’entreprise, cette dénonciation étant effectuée directement auprès de la direction en janvier 2011, le salarié ajoutant alors que ses missions n’étaient pas en rapport avec son contrat de travail et se plaignant du fait qu’on lui impose d’aller « en mission ».

Le salarié produit les courriers relatifs à ces allégations, sans qu’il ne soit toutefois établi qu’il ait été victime d’incitations à quitter l’entreprise.

En quatrième lieu, l’appelant indique qu’en 2010, lorsque la société a changé de boîte de messagerie, il n’a pu bénéficier de la restauration de sa boîte mails, ce qui a entraîné la perte de nombreux courriels et documents importants. L’absence de restauration de sa messagerie est établie par les échanges de courriels qu’il produit.

En cinquième lieu, le salarié soutient qu’en mai 2012, l’inspection du travail lui a indiqué avoir constaté une différence de classification le concernant par rapport à d’autres salariés en situation similaire, et avoir saisi de nouveau ces services au mois de mars 2014.

Il produit à cet égard le courrier du 31 mai 2012 émanant de l’inspecteur du travail ainsi qu’un courriel attestant d’une nouvelle saisine de l’administration du travail le 27 mars 2014 qui établissent ces allégations.

En sixième lieu, M. [K] soutient que lorsqu’il a demandé à bénéficier en 2014 du dispositif d’essaimage lui permettant de créer son entreprise avec le soutien de la société, sa demande n’a été acceptée qu’après plusieurs mois et que plusieurs modalités telles que le remboursement de frais de transport, matériel, et le suivi pendant 3 ans n’ont pas été envisagées.

Ces allégations sont établies.

En septième lieu, le salarié fait valoir qu’il n’a pas été suffisamment accompagné lors de sa reprise de poste en 2016 à son retour de congé pour création d’entreprise, et soutient à cet égard qu’alors qu’il n’avait pas formulé de demande de mobilité, la société lui a annoncé qu’il allait bénéficier d’une mobilité et qu’il devait commencer à chercher dans le groupe un poste, mais sans lui attribuer de nouveaux projets clients.

Il ressort toutefois des éléments produits que son employeur s’est alors borné à l’informer d’opportunités de postes de travail dans le cadre d’une possibilité de mobilité.

Aucun élément du dossier n’est ainsi de nature à étayer la matérialité des faits invoqués.

En huitième lieu, le salarié fait valoir et justifie qu’en novembre 2017, il a fait à tort l’objet d’une retenue de salaire au titre de son véhicule de fonction, alors que son contrat de travail prévoit qu’il s’agit d’un avantage en nature, et que s’il en a immédiatement exigé le remboursement, la société, bien qu’ayant reconnu son erreur, ne l’a remboursé qu’au mois de février 2018.

En neuvième lieu, le salarié fait valoir et justifie qu’il a reçu son avenant de télétravail au mois de janvier 2023, alors que son collègue M. [I] avait signé le sien en 2018.

En dixième lieu, le salarié fait valoir qu’en 2018, il avait repris la suite de M. [H] sur le projet Action logement, que celui-ci avait seulement initié mais que lui-même avait mené à son terme, et que c’est le nom de son collègue qui a été mentionné par l’entreprise dans la présentation du projet faite lors de l’événement dit « Kick off ».

S’il ressort de la pièce n°84 qu’il produit que ce projet avait bien été mené par M. [K], il ne ressort d’aucun élément que la société aurait indûment mentionné le nom de son prédécesseur lors de l’événement en cause.

En onzième lieu, le salarié fait valoir et justifie qu’à l’occasion de son entretien de prise de mandat en 2020, son responsable a effectué une description plus détaillée tant des missions attribuées à son collègue M. [I] que de l’organisation et la répartition des tâches au sein de son équipe de rattachement.

En douzième lieu, le salarié soutient qu’en janvier 2021, la direction a, dans le cadre de sa demande de renouvellement de son véhicule de fonction faite en 2020, bloqué sa commande en lui interdisant de choisir dans le catalogue de flotte dont il bénéficiait jusque-là. Il produit notamment, à cet égard, des échanges de courriels relatifs à la politique de la société en la matière ainsi qu’une réclamation aux termes de laquelle il se plaignait d’une discrimination du fait que l’employeur lui refuse les options choisies qui constituaient un usage dans l’entreprise depuis 2012.

Ces éléments établissent que le salarié n’a pu bénéficier des options qu’il aurait souhaitées s’agissant du renouvellement de son véhicule.

En dernier lieu, M. [K] soutient qu’il a, depuis le mois de juillet 2022, été victime d’une « mise au placard » dès lors que son employeur ne lui a plus confié aucun projet, alors que son taux d’activité syndicale s’élevant à 50,93% lui permettait de se voir confier de tels projets.

Il produit, au soutien de ces allégations :

– son entretien annuel d’évaluation pour l’année 2023 dont il ressort que les objectifs apparaissent comme « non évaluables » et que son responsable relève, dans la partie relative aux commentaires sur l’appréciation globale de la performance : « de par son mandat d’IRP, [M] a beaucoup de temps consacré à cette activité » ;

– des extractions du système Agresso, qui montrent qu’au 15 décembre 2024, M. [K] n’a aucun « projet actif », contrairement à d’autres collègues ayant le même niveau de responsabilités ;

– des échanges de courriels montrant que sa feuille de temps a pu être préremplie de façon erronée, qu’il en a alerté la direction sans recevoir d’explications, et que le dernier projet effectivement mené par lui a pris fin de 30 juin 2022.

Au vu de ces éléments, ses allégations sont établies.

Au regard de ces considérations, les éléments de fait présentés par M. [K], pris dans leur ensemble, laissent présumer l’existence d’une discrimination syndicale.

Il incombe par conséquent à la société Orange cyberdéfense de rapporter la preuve que ses agissements étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En ce qui concerne la stagnation de carrière :

S’agissant de la circonstance que M. [K] occupe depuis 2008 un poste de chef de projet sans aucune évolution professionnelle, la société Orange cyberdéfense justifie :

– que parmi les emplois disponibles, des postes de directeur de projet sécurité ou de projet infrastructures ont été proposés, par un courriel du 8 septembre 2017 en réponse à une demande du salarié, à [Localité 5] ou en région parisienne, proposition à laquelle il apparaît que le salarié n’a pas donné suite ;

– que depuis son retour au sein de la société à l’issue de son congé pour création d’entreprise en décembre 2016, le salarié a refusé de collaborer à plusieurs entretiens individuels au cours desquels son manager a noté ses performances comme partiellement atteintes et l’a alerté à plusieurs reprises, notamment, sur sa communication et sa capacité d’écoute ;

– que si elle n’a pas proposé à M. [K] le poste occupé par M. [H] au moment de son départ en retraite partielle en 2019, celui-ci, qui, contrairement à ce qu’elle indique, occupait le poste de directeur de projet, n’avait, contrairement à ce qu’allègue l’appelant, pas encore quitté ses effectifs puisqu’il bénéficiait d’un temps partiel sénior à hauteur de 75% jusqu’au 31 janvier 2024.

Au regard de ces éléments, l’employeur justifie que le maintien de M. [K] sur le poste de chef de projet depuis 2008 était justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

S’agissant de l’absence d’évolution de son coefficient de rémunération bloquée au même coefficient de 150 depuis 2012, la société justifie, par la production d’un tableau « position/coefficient chefs de projet » et de la classification « ingénieurs et cadres », que les chefs de projets bénéficiaient en moyenne d’un coefficient compris entre 115 et 150, les responsables de production bénéficiant d’un coefficient 170 et certains membres du Comité de direction d’un coefficient 210 impliquant des fonctions de commandement.

Il ressort en outre des pièces produites que M. [K] assumait des fonctions impliquant une prise d’initiative et une prise de responsabilités pour diriger des salariés travaillant à la même tâche, qui correspondent au coefficient 150.

Au regard de ces éléments, l’employeur justifie que le maintien d’un coefficient de 150 depuis 2012 était justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

S’agissant de l’absence de formation professionnelle depuis 2016, la société soutient qu’une formation « certificat synergie » (« storytelling ») destinée aux chefs de projet a été organisée en septembre 2020 à laquelle le salarié n’a pas participé.

Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. [K] devait suivre, le jour même de cette formation, une formation SSCT, de sorte que l’employeur ne justifie d’aucun élément objectif étranger à toute discrimination.

En outre, l’employeur soutient qu’il n’était pas tenu d’accepter de financer, en 2018, la formation demandée de mastère spécialisé en management et direction de projets dont la durée s’élevait à 17 mois et le coût à 21 000 euros, ni en 2022 une formation diplômante dépourvue de lien avec le poste du salarié et l’exercice de ses missions. Pour autant, cette circonstance ne le dispensait pas de faire bénéficier le salarié de formations adaptées à ses besoins et à ses perspectives d’évolution professionnelle.

La société ne fournit ainsi pas d’élément objectif expliquant pour quel motif M. [K] n’a bénéficié d’aucune formation professionnelle depuis 2016.

En ce qui concerne la stagnation salariale :

S’agissant de l’absence d’évolution du salaire de base de M. [K] entre 2016 et 2018 conforme à la garantie salariale prévu par l’article L.2141-5-1 du code du travail, la société, qui ne justifie pas avoir procédé à la comparaison annuelle prévue par ces dispositions, ne démontre pas que l’absence de mise en ‘uvre de ce mécanisme de garantie sur cette période serait justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

S’agissant de la limitation de l’augmentation individuelle de salaire de M. [K], à compter de l’année 2019, dans la limite de la garantie salariale prévue par l’article L.2141-5-1 du code du travail et dans des proportions inférieures à celles d’autres collègues du salarié, la société Orange cyberdéfense fait valoir que M. [K] ayant suspendu son contrat de travail pendant plus deux ans et a exercé un emploi totalement différent, il ne disposait plus de la même expérience professionnelle sur son poste de chef de projet.

Elle indique également que les autres salariés auxquels il compare sa situation ne se trouvaient pas dans une situation com


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