Sur le licenciement pour faute graveLa faute grave est définie comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier un salarié doit en apporter la preuve. Cette exigence est fondée sur les articles L1232-1 et L1235-3 du Code du travail, qui stipulent que le licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. La faute grave nécessite également une réaction immédiate de l’employeur, qui doit agir dans un délai restreint. Sur la prescription des faits fautifsConformément à l’article L1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à des poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, sauf si ce fait a donné lieu à des poursuites pénales dans le même délai. Cependant, ce texte ne s’oppose pas à la prise en compte d’un fait antérieur à deux mois si le comportement du salarié s’est poursuivi dans ce délai. Le délai de prescription court à compter du jour où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié. Sur le bien-fondé du licenciementPour justifier l’existence d’une faute grave, l’employeur doit prouver l’accumulation de faits fautifs, tels que des propos racistes et homophobes, ainsi que des manquements aux obligations de travail. Les propos à caractère raciste et homophobe sont prohibés par le Code du travail et le Code pénal, qui interdisent toute forme de discrimination. L’employeur doit également respecter les dispositions de son règlement intérieur, qui stipule que tout comportement agressif et toute incivilité sont interdits, notamment lorsqu’ils sont pénalement sanctionnables. Sur l’existence de propos racistesLes propos à connotation raciste, en raison de l’origine ou de la religion, sont caractérisés par des témoignages de salariés et des éléments de preuve recueillis lors d’une enquête. Ces propos, tels que ceux relatifs au ramadan ou à l’origine ethnique, constituent une faute grave, rendant impossible la poursuite du contrat de travail. L’employeur doit démontrer que ces comportements ont eu un impact négatif sur les conditions de travail des salariés concernés, ce qui est corroboré par des attestations et des témoignages. Sur l’existence de propos homophobesLes propos homophobes, tout comme les propos racistes, sont prohibés par le Code du travail et peuvent justifier un licenciement pour faute grave. L’employeur doit apporter la preuve de la tenue de tels propos, ce qui peut être corroboré par des témoignages de collègues. Si les témoignages ne sont pas suffisamment caractérisés, le licenciement peut être jugé sans cause réelle et sérieuse. Sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépensL’article 700 du Code de procédure civile permet à la partie gagnante d’obtenir le remboursement de ses frais irrépétibles, ce qui inclut les honoraires d’avocat. La partie succombante est généralement condamnée à payer les dépens de la première instance et d’appel, conformément aux dispositions du Code de procédure civile. Cette règle vise à garantir l’accès à la justice et à compenser les frais engagés par la partie qui a dû défendre ses droits en justice. |
L’Essentiel : La faute grave est un ensemble de faits imputables au salarié, rendant impossible son maintien dans l’entreprise. L’employeur doit prouver cette faute pour licencier, conformément aux articles L1232-1 et L1235-3 du Code du travail. De plus, il doit agir rapidement, dans un délai restreint. Les propos racistes et homophobes, ainsi que les manquements aux obligations de travail, constituent des fautes graves. L’employeur doit démontrer l’impact négatif de ces comportements sur les conditions de travail.
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Résumé de l’affaire : Dans cette affaire, un salarié, occupant le poste de premier assistant manager au sein de la société SSP Province, a été licencié pour faute grave. Ce licenciement fait suite à des accusations de harcèlement moral et de propos racistes formulées par une salariée, qui a démissionné en invoquant ces faits. Un enquête a été menée par le Comité Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail (CHSCT), révélant des comportements inappropriés de la part du salarié, notamment des remarques dégradantes sur l’origine ethnique et la religion de ses collègues.
Le 12 décembre 2018, la société a notifié le licenciement du salarié, qui a contesté cette décision en saisissant le conseil de prud’hommes. Le jugement rendu le 5 juillet 2021 a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamnant la société à verser des indemnités au salarié. En réponse, la société a interjeté appel, soutenant que le licenciement était justifié par les faits reprochés. La cour d’appel a examiné les éléments de preuve, notamment les témoignages de plusieurs salariées attestant des propos racistes et homophobes tenus par le salarié. Elle a également pris en compte les éléments de l’enquête du CHSCT, qui a corroboré les accusations. La cour a conclu que les comportements du salarié constituaient une faute grave, rendant impossible la poursuite de son contrat de travail. En conséquence, la cour a infirmé le jugement de première instance, validant le licenciement pour faute grave et condamnant le salarié à payer des frais à la société. Cette décision souligne l’importance de maintenir un environnement de travail respectueux et exempt de discrimination. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique du licenciement pour faute grave ?Le licenciement pour faute grave repose sur des dispositions spécifiques du Code du travail, notamment les articles L1232-1 et L1235-3. L’article L1232-1 stipule que « tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ». Cela signifie que l’employeur doit prouver que le comportement du salarié constitue une violation suffisamment grave de ses obligations contractuelles pour justifier la rupture du contrat de travail. L’article L1235-3 précise que « le juge doit vérifier si les faits invoqués par l’employeur sont suffisamment graves pour justifier le licenciement ». Ainsi, la cour doit examiner si les faits reprochés au salarié sont constitutifs d’une faute grave ou, à défaut, d’une faute de nature à conférer une cause réelle et sérieuse au licenciement. En l’espèce, la cour a jugé que le licenciement était justifié par des faits de nature à constituer une faute grave, notamment des propos racistes et homophobes. Quel est le délai de prescription pour engager des poursuites disciplinaires ?Le délai de prescription pour engager des poursuites disciplinaires est régi par l’article L1332-4 du Code du travail. Cet article stipule que « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance ». Ce délai peut être prolongé si le fait fautif a donné lieu à des poursuites pénales dans le même délai. Toutefois, il est important de noter que ce texte ne s’oppose pas à la prise en compte d’un fait antérieur à deux mois si le comportement fautif du salarié s’est poursuivi dans ce délai. Dans cette affaire, la cour a constaté que l’employeur n’avait eu connaissance des faits reprochés que le 25 septembre 2018, date à laquelle le rapport d’enquête a été transmis. Par conséquent, les faits antérieurs n’étaient pas prescrits, car ils avaient été pleinement connus moins de deux mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires. Quel est le rôle de la preuve dans le licenciement pour faute grave ?La charge de la preuve incombe à l’employeur, qui doit démontrer la réalité des faits reprochés au salarié. L’article L1235-1 du Code du travail précise que « l’employeur doit prouver la cause du licenciement ». Dans le cas présent, la société a produit des éléments de preuve, tels que des témoignages et des attestations, pour justifier le licenciement de l’assistant manager. Les propos racistes et homophobes ont été corroborés par plusieurs témoignages de collègues, ainsi que par le rapport d’enquête du CHSCT. Cependant, le salarié a également contesté ces accusations en produisant des attestations de collègues qui n’avaient pas été témoins de tels propos. La cour a dû évaluer la crédibilité des témoignages et la valeur probante des éléments présentés par les deux parties. Quels sont les critères pour qualifier des propos de racistes ou homophobes ?Les propos racistes ou homophobes sont définis par leur capacité à discriminer ou à porter atteinte à la dignité d’une personne en raison de son origine, de sa religion ou de son orientation sexuelle. Le Code du travail, ainsi que le Code pénal, prohibent de tels comportements. L’article L1132-1 du Code du travail stipule que « nul ne peut être écarté d’un emploi ou d’un stage en raison de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de son état de santé, de son handicap, de ses opinions politiques, de ses croyances religieuses ou de son orientation sexuelle ». Dans cette affaire, les propos tenus par le salarié, tels que « vous les marocains vous ne savez pas compter » ou « il faut arrêter de nous faire chier avec votre ramadan, ici on est en France », ont été jugés comme constitutifs de discrimination raciale et religieuse, justifiant ainsi le licenciement pour faute grave. Quel est l’impact des témoignages sur la décision de licenciement ?Les témoignages jouent un rôle crucial dans l’évaluation des faits reprochés au salarié. L’article 9 du Code de procédure civile stipule que « chacun a droit à un procès équitable », ce qui inclut le droit de présenter des preuves et des témoignages en sa faveur. Dans cette affaire, la cour a examiné les témoignages des collègues qui ont rapporté des propos racistes et homophobes, ainsi que ceux du salarié qui a nié ces accusations. La cour a jugé que les témoignages des victimes étaient suffisamment crédibles et corroborés par d’autres éléments de preuve, tels que le rapport d’enquête du CHSCT. En revanche, les attestations produites par le salarié, émanant de personnes qui ne travaillaient pas directement avec lui, n’ont pas été jugées suffisantes pour contredire les témoignages des victimes. Cela a conduit la cour à conclure que les faits reprochés étaient bien établis et justifiaient le licenciement pour faute grave. |
ARRÊT N°73
N° RG 21/04978 –
N° Portalis DBVL-V-B7F-R4ZU
S.A.S. SSP PROVINCE
C/
M. [A] [R]
Sur appel du jugement du C.P.H. de NANTES du 05/07/2021
RG : F19/00501
Infirmation
Copie exécutoire délivrée
le : 27-03-25
à :
-Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN
-Me Jean-Christophe DAVID
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 26 MARS 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nadège BOSSARD, Présidente,
Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,
Madame Anne-Laure DELACOUR, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 30 Janvier 2025
devant Madame Nadège BOSSARD, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
En présence de Madame [E] [W], médiatrice judiciaire,
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Mars 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
La S.A.S. SSP PROVINCE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Ayant Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Avocat au Barreau de RENNES, pour Avocat postulant et représentée par Me Etienne DUBUCQ substituant à l’audience Me Christian BROCHARD, Avocats plaidants du Barreau de LYON
INTIMÉ :
Monsieur [A] [R]
né le 03 Janvier 1969 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Jean-Christophe DAVID, Avocat au Barreau de NANTES
M. [A] [R] a été engagé par la société SSP Province selon contrat de travail à durée déterminée, à compter 1er avril 2015 en qualité d’assistant manager au sein de l’aéroport de [Localité 5] à [Localité 2].
Le 1er novembre 2015, M. [R] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de premier assistant manager, statut agent de maîtrise, et percevait une rémunération mensuelle moyenne de 2 038 euros bruts pour 151,67 heures de travail mensuelles.
La société SSP Province a pour activité la restauration spécialisée au sein des gares et aéroports.
Elle emploie habituellement environ 700 salariés et comptabilise en moyenne un effectif de 60 salariés sur l’aéroport de [Localité 5].
La convention collective applicable est celle de la restauration rapide.
A la suite de la plainte reçue par une déléguée du personnel d’une salariée se sentant harcelée par M. [R], le CHSCT a été saisi et lors de sa réunion du 26 juin 2018 a décidé de procéder à une enquête.
La salariée plaignante a démissionné avec effet au 28 juin 2018 en invoquant subir un harcèlement et des propos racistes.
L’enquête diligentée par le CHSCT s’est déroulée les 11, 12 et 13 juillet 2018 puis les 3 et 4 septembre 2018.
Le rapport a été transmis à l’employeur le 25 septembre 2018.
Par courrier du 7 novembre 2018, M. [R] a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle sanction pouvant aller jusqu’au licenciement le 18 novembre 2018, lequel a été reporté au 22 novembre 2018 et auquel il s’est présenté.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 12 décembre 2018, la société SSP Province a notifié à M. [R] son licenciement pour faute grave.
M. [R] a contesté par courrier en date du 17 décembre 2018 l’intégralité des faits reprochés.
Le 22 mai 2019, M. [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes aux fins de voir juger son licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement en date du 5 juillet 2021, le conseil de prud’hommes de Nantes a :
– dit que le licenciement pour faute grave notifié le 12 décembre 2018 à M. [R] est dénué de cause réelle et sérieuse
En conséquence, condamné la S.A.S. SSP Province à payer à M. [R] les sommes de :
– 4 077,52 € bruts à titre d’indemnités compensatrice de préavis,
– 407,75 € bruts à titre d’indemnités de congés payés sur préavis,
– 1 845,08 € nets à titre d’indemnités de licenciement,
– 7 135,66 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 500 € nets au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
– lesdites condamnations étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du conseil, soit le 22 mai 2019, pour les sommes à caractère salarial et de la date du prononcé du présent jugement pour celles à caractère indemnitaire,
– lesdits intérêts produisant eux-mêmes intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil,
– ordonné la remise par la SSP Province à M. [R] d’une attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif rectifiés sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard à compter du 45ème jour jusqu’au 90ème jour suivant la notification du jugement, le conseil se réservant compétence pour liquider l’astreinte,
– condamné d’office la S.A.S. SSP Province à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à M. [R] dans la limite de six mois d’indemnités,
– fixé, en application de l’article R.1454-28 du Code du travail, le salaire mensuel de référence à la somme de 2.038,76 € bruts,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement à hauteur de la totalité des sommes allouées,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– condamné la S.A.S SSP Province aux entiers dépens,
– dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire devront être supportées par la S.A.S. SSP Province.
La société SSP Province a interjeté appel de ce jugement le 30 juillet 2021.
Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 29 mars 2022, la société SSP Province sollicite de la cour de :
– recevant l’appel, le disant bien fondé et y faisant droit,
– Infirmer le jugement du conseil de Prud’hommes de Nantes en ce qu’il a :
– dit que le licenciement pour faute grave notifié le 12 décembre 2018 à M. [R] est dénué de cause réelle et sérieuse,
– condamné la SSP Province à payer à M. [R] les sommes de :
– 4 077, 52 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 407, 75 € bruts à titre de congés payés sur préavis,
– 1 845, 08 € nets à titre d’indemnité de licenciement,
– 7 135, 66 € nets à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 500 € nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– lesdites condamnations étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil soit le 22 mai 2019 pour les sommes à caractère salarial et à compter du jugement pour celles à caractère indemnitaire, lesdits intérêts produisant eux-mêmes intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil,
– ordonné la remise par la SSP Province à M. [R] d’une attestation pôle emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif rectifiés sous astreinte provisoire
de 50 € par jour de retard à compter du 45ème jour jusqu’au 90ème suivant la notification du jugement, le conseil se réservant compétence pour liquider l’astreinte
– condamné d’office la SAS SSP Province à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à M. [R] dans la limite de 6 mois d’indemnités,
– fixé en application de l’article R 1454-28 du Code de travail le salaire mensuel de référence à la somme de 2 038, 76 € bruts,
– condamné la SAS SSP Province aux dépens,
– débouté la SAS SSP Province de ses demandes tendant à voir :
– juger que le licenciement de M. [R] repose sur une faute grave,
– condamner M. [R] à lui verser la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du CPC,
– condamner M. [R] aux dépens.
Partant, statuant à nouveau,
– dire et juger que le licenciement de M. [R] repose sur une faute grave,
En conséquence,
– le débouter de l’intégralité de ses demandes,
– le condamner aux entiers dépens ainsi qu’au versement d’une somme de 1 500 euros à la société SSP Province sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeter toutes demandes, fins et conclusions autres ou contraires aux présentes.
Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 26 janvier 2022, M. [A] [R] sollicite de la cour de :
– confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement du conseil de prud’hommes de Nantes en date du 5 juillet 2021 et notamment en ce qu’il :
– dit que le licenciement pour faute grave notifié le 12 décembre 2018 à M. [R] est dénué de cause réelle et sérieuse,
– condamné la SSP Province à payer à M. [R] les sommes de :
– 4 077,52 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 4 077,75 € bruts à titre de congés payés sur préavis,
– 1 845,08 € nets à titre d’indemnité de licenciement,
– 7 135,66 € nets à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
– 1 500 € nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– y additer 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la SAS SSP Province aux entiers dépens de la présente instance.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 12 décembre 2024.
Par application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.
Sur le licenciement pour faute grave
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en apporter la preuve.
La faute grave nécessite la réaction immédiate de l’employeur, lequel est tenu d’agir dans un délai restreint.
Sur le fondement des articles L1232-1 et L1235-3 du code du travail dans leur rédaction applicable en l’espèce, la cour, à qui il appartient de qualifier les faits invoqués et qui constate l’absence de faute grave, doit vérifier s’ils ne sont pas tout au moins constitutifs d’une faute de nature à conférer une cause réelle et sérieuse au licenciement.
En l’espèce, la lettre de licenciement est rédigée comme suit :
‘[…]
1. Propos racistes envers vos collègues de travail
Ce sujet a été porté en réunion avec les membres du CHSCT et ces derniers ont mandaté une commission interne afin de mener une enquête, qui s’est déroulée les 11, 12, 13 juillet 2018, puis les 3 et 4 septembre 2018. Les résultats de cette enquête ont été portés à la connaissance de l’ensemble des membres du CHSCT lors de la réunion du 25 septembre 2018. Les éléments suivants ont été révélés :
1) Vous avez fait des réflexions sur le physique et la religion d’un salarié en disant : ‘Tu as des cheveux de marocaine, tu fais chier avec ton ramadan, je vais te virer’
2) Lors du paiement d’un croissant par un salarié, vous avez vérifié que la pièce de deux euros soit une vraie : ‘On ne sait jamais avec vous les arabes, je préfère vérifier l’argent’
3) Vous avez proposé à un salarié, à plusieurs reprises, de la nourriture pendant le ramadan en disant à chaque fois : ‘Ah oui c’est vrai, tu fais le ramadan’
4) Suite à des erreurs sur la caisse d’un salarié, vous lui avez dit : ‘Vous les marocains vous ne savez pas compter !’
5) Vous avez dit à un salarié : ‘Il faut arrêter de nous faire chier avec votre ramadan, ici on est en France !’
6) Au retour d’un voyage dans son pays d’origine, suite au décès de sa grand-mère, vous avez dit à un salarié : ‘Alors ‘ Les vacances étaient bonnes au bled ‘ Tu t’es bien reposé ».
2. Propos homophobes envers vos collègues de travail
Le 26 septembre 2018 vous avez tenu les propos homophobes suivants : ‘Petit Pédé’, envers un salarié.
Vous avez réagi de manière virulente et agressive et vous avez réfuté, une nouvelle fois, l’ensemble des griefs exposés.
3. Non-typage des consommations des clients
Le 27 octobre 2018, aux alentours de 16 heures, un client est venu prendre un café expresso. Ce client a réglé son café en espèces, et vous a donné une pièce de deux euros. Cependant, vous n’avez pas typé sa consommation dans la caisse et le client n’a donc pas eu son ticket. Vous avez déposé la pièce de deux euros sur le comptoir et non dans la caisse.
Le 28 octobre 2018, dans l’après-midi, vous n’avez pas saisi les consommations des clients à plusieurs reprises.
En outre, votre attitude est intolérable et nuit au bon fonctionnement de notre Entreprise. Nous ne pouvons accepter de tels agissements qui ne sont absolument pas conformes aux dispositions en vigueur.
Lors de notre entretien, vous avez nié les faits et avez menacé de déposer plainte pour diffamation contre la Direction et contre la société SSP Province.
[…]’
– sur la prescription des faits fautifs :
Selon l’article L1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
Toutefois, ce texte ne s’oppose pas à la prise en considération d’un fait antérieur à deux mois dans la mesure où ce comportement du salarié s’est poursuivi dans le délai.
Le délai de prescription de deux mois de l’article L.1332-4 du code du travail court à compter du jour où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié.
M. [R] a été convoqué à l’entretien préalable le 12 novembre 2018 permettant une sanction des faits antérieurs de deux mois.
Si le salarié souligne au soutien de sa demande de prescription des propos racistes qui lui sont reprochés que ceux-ci sont datés de juin 2018 et du 3 septembre 2018, il convient de constater qu’une enquête a été diligentée par le CHSCT laquelle s’est déroulée les 11, 12 et 13 juillet 2018 puis les 3 et 4 septembre 2018.
Il n’est en outre pas contesté que le rapport a été transmis à l’employeur le 25 septembre 2018.
Dès lors, celui-ci n’a eu une connaissance exacte des propos reprochés à M. [R] et de l’étendue de ceux-ci qu’à cette date.
Les propos reprochés bien qu’antérieurs, n’ayant été pleinement connus que moins de deux mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires, ces faits ne sont pas prescrits.
– sur le bien fondé du licenciement :
La société SSP Province, pour justifier de l’existence d’une faute grave, a invoqué l’accumulation de faits fautifs, et plus précisément la tenue de propos racistes et homophobes ainsi que le non-typage de consommations de la part de M. [R].
M. [R] conteste l’ensemble des griefs invoqués au sein de la lettre de licenciement et sollicite à ce titre que son licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse.
– sur l’existence de propos homophobes
Au soutien du grief relatif à des propos homophobes, la société produit deux attestations, celle de Mme [XY] [I], salariée, indiquant ‘J’ai entendu [A] le mercredi 26/09/2018 à 13h30 insulter de ‘PD’ [C]’ et celle de Mme [YR] [H], salariée, qui témoigne que : ‘Mercredi 26.09.2018 sur le lieu de travail Mr [A] [R] a prononcé la phrase ‘petit pédé’. Cette phrase discriminante il l’a adressé à Mr [C] [P]’.
M. [R] conteste avoir tenu de tels propos et produit l’attestation de M. [C] [P] lui même indiquant ‘certifie ne jamais avoir entendu Monsieur [R] [A] avoir prononcé des propos homophobes à mon encontre’.
Dans ces conditions, dans la mesure où la victime désignée par les attestations produites par l’employeur soutient ne jamais avoir été destinataire de propos homophobes, ce grief n’est pas suffisamment caractérisé.
Le jugement est confirmé sur ce point.
– sur le non-typage des consommations client
Tel qu’indiqué dans la lettre de licenciement, la société SSP Province reproche à M. [R] de ne pas avoir procédé, le 27 octobre 2018, au typage de la consommation d’un montant de 2 euros d’un client et d’avoir posé la pièce sur le comptoir et non dans la caisse. Il est également reproché au salarié de ne pas avoir saisi, le 28 octobre 2018, plusieurs consommations de clients.
L’employeur produit l’article 14 du règlement intérieur également rappelé au terme de la lettre de licenciement indiquant que ‘Chaque produit servi doit être typé sur la caisse électronique. Un ticket correspondant à la commande doit être systématiquement édité et remis au consommateur’. Il précise avoir également mis en place une procédure de caisse affichée sur les points de vente intitulée ‘7 règles d’or’ reprenant les mêmes consignes.
Si la société précise que M. [R] s’est déjà vu notifier un avertissement le 26 septembre 2016, celui-ci était intervenu en raison d’un non-respect des règles d’hygiène et est donc sans lien avec les manquements reprochés au terme de la lettre de licenciement.
Elle communique l’attestation de Mme [WD] [B], salariée, qui indique ‘certifie que Mr [R] [A] a posé 4,20 euros sur sa caisse venant d’une bière 25cl vendu n’ayant pas tapé sur l’ordi et comme je le regardais n’a pas pus les mettres dans sa poche. Je lui est confirmé que de toute façon je l’avait déjà vus le faire. Certifie avoir vus Mr [R] [A] ne pas avoir tapé à plusieurs reprise les consommations des clients ce jour le 27.10.18’.
La société produit également un courrier de réclamation d’un client, M. [ZJ], daté au 29 octobre 2018 et indiquant ‘le monsieur m’ayant servit le café espresso m’a encaissé les deux euros sans enregistrer le paiment et ne m’a remit aucun ticket ni reçu’.
M. [R] conteste ces éléments et soutient que lorsque des pièces étaient posées sur le comptoir, il s’agissait des pourboires de clients et que dans ces conditions, aucun reçu ni ticket de caisse n’était établi. Il déclare lors du dépôt d’une main courante ‘Elle [une employée] m’accuse de vol. Elle a fourni à la direction une photo de ma caisse avec des pièces sur le dessus de celle-ci. Elle déclare que ces pièces ont été sortie de la caisse alors qu’il s’agit tout bonnement de pourboire laissé par les clients.’
Il produit également l’attestation de M. [Y] [V] indiquant ‘Le dimanche 28 octobre 2018, Mlle [B] [WD] a pris en photo la caisse de Mr [R] en le traitant de voleur alors que sur sa caisse il y avait 4 euros 20 cts ce qui correspondait à ses pourboirs de la journée’.
Plusieurs autres salariés attestent avoir entendu Mme [B] exprimer son souhait de faire licencier M. [R] :
– M. [J] [U], employé polyvalent : ‘avoir entendu au bar Mademoiselle [B] [WD] parlé de Monsieur [R] [A] signifiant vouloir le faire licencier par n’importe quel moyen quelqu’il soit’.
– Mme [XO] [S], employée polyvalente : ‘le 19 octobre 2018 à 6h30 du matin, au moment de prendre ma pause, Madame [WD] [B] a tenu ces propos : ‘Je suis venu à [Localité 5] par ordre de la direction pour faire en sorte que monsieur [A] [R] soit licencié à tout prix ».
– Mme [N] [YH], employée polyvalente : ‘Je certifie avoir entendue le 19 octobre 2018 [WD] travaillant au 144, dire clairement quelle faisait tous pour faire licensier Mr [R] [A]’.
Le grief de non-typage des consommations ne reposant que sur les déclarations d’une salariée dont la réalité du témoignage est remis en cause par les attestations d’autres salariés, celui-ci n’est pas corroboré par des éléments extérieurs et objectifs.
Les éléments produits ne permettent pas d’établir que M. [R] a intentionnellement laissé des pièces de monnaie sur la caisse enregistreuse dans le but de les subtiliser par la suite.
Dès lors, ce manquement n’est pas caractérisé.
Le jugement est confirmé sur ce point.
– sur l’existence de propos racistes
L’employeur reproche à M. [R] d’avoir tenu des propos racistes à l’encontre d’une salariée en particulier, Mme [XK], notamment : ‘Il faut arrêter de nous faire chier avec votre ramadan, ici on est en France !’ ou ‘Tu as des cheveux de marocaine, tu fais chier avec ton ramadan, je vais te virer’ ou ‘On ne sait jamais avec vous les arabes, je préfère vérifier l’argent’ ou encore ‘Vous les marocains vous ne savez pas compter !’.
Il produit un extrait du règlement intérieur également mentionné dans la lettre de licenciement et indiquant : ‘Toute rixe, injure, insulte, tout comportement agressif et toute incivilité sont interdits dans l’entreprise, a fortiori lorsqu’ils sont pénalement sanctionnables. Il en est de même de tout comportement raciste, xénophobe, sexiste et/ou discriminant au sens des dispositions du Code du travail et du Code pénal’.
La société SSP Province établit qu’au mois de juin 2018, Mme [XK] s’est plainte d’avoir été victime de harcèlement moral et de propos à caractère raciste de la part de M. [R] et qu’une autre salariée également d’origine marocaine a indiqué elle aussi subir le même traitement. Les salariées attestent en ces termes :
– Mme [G] [XK], serveuse : ‘je subis depuis le début de mon contrat du harcèlement, des propos racistes, des pressions, des remarques désobligeantes et des propos dévalorisantes de la part de Mr [A] [R]. […] comme quoi je suis moche et que je dois arreter de manger si non mes hanches vont continuer de grossir, il tien aussi des propos raciste par rapport à ma religion, il me dit que je lui fait chier avec mon ramadan. […] Le jeudi 31 mai c’était la gôute de trop quand il a commencer à me dire de toutes façon moi qui va te viré d’ici et sa il me la repeter toute la journée. […] ensuite ke lui est demandr si je pouvez prednre une vienoiserie pour couper mpon juene, il m’a direct répondu NON !! Et quand je lui est dit je vait la payer il me dit oui et quand je lui est donner l’argent, il a taper l’argent sur la caisse pour vérifier que c’était pas des faux il a dit on c’est jamais avec vous les arabes si c’est des vrais ou des faux […]Ces agissement commence à peser sur mon morale’.
– Mme [M] [X], serveuse : ‘témoigne à faveur de [XK] [G], subis du harcèlement et des propos racistes de la part de Mr [A] [R]. […] Il tient des propos comme vous les arabes ici on est en france on es pas au Bled aussi il me dit à moi que je devrais apprendre à lire et à écrire parce que j’ai loupé plusieurs fois mon test pour l Badge et ausi par rapport au ramadan qu’on lui fesais chier avec notre ramadan.’
– Mme [N] [YH], employée polyvalente : ‘J’ai à plusieurs reprises entendue des propos racistes tels que c’est encore la faute au arabe’, ‘encore un bougnoule’ ce sont des propos répétitifs [A] [R]’.
Ces propos sont par ailleurs corroborés par des attestations des représentantes du personnel ayant recueillis les propos de Mme [XK] :
– Mme [K] [Z], assistante manager, déléguée au comité d’entreprise : ‘Au début du mois de juin 2018, une salariée du bar 1.44 sur le site de l’aéroport de [Localité 5], Madame [XK], est venue me voir pour que je lui vienne en aide. Elle subissait un harcèlement moral constant ainsi que des propos racistes de la part de son manager Monsieur [R] [A]. Elle m’a donné des exemples de certains propos qu’il a eu envers elle, comme de commentaires sur le ramadan ‘Tu me fais chier avec ton ramadan !’ ou sur son physique comme quoi elle est moche, qu’elle va grossir à force de manger. Un soir en fermeture, la salariée lui a demandé si elle pouvait prendre une viennoiserie pour cesser son jeûne. En prenant l’argent celui-ci a tapé les pièces sur le comptoir et lui a dit ‘On sait jamais avec vous les arabes si c’est des vraies ou pas ».
– Mme [AF] [T], chef de rang, déléguée du personnel : ‘Début juin 2018, j’ai été sollicitée par Mme [XK], salariée du bar 1.44, en qualité de déléguée du personnel. En effet, elle est venue me parler du harcèlement moral et des propos racistes qu’elle subissait de la part de son supérieur hiérarchique M. [R] [A]. La salariée était en détresse émotionnelle quand elle est venue me parler. Elle ne supportait plus les brimades répétées que M. [R] lui faisait subir. Elle m’a donné quelques exemples de propos (concernant principalement le ramadan). […] J’ai été outrée d’entendre le genre de pratique qu’utilisait cet assistant manager pour intimider cette employée. […] J’ai fait la demande à M. [F], responsable opérationnel à l’époque, pour changer la salariée de point de vente. La salariée est venue travailler avec moi.’
L’employeur produit également le compte-rendu de l’enquête CHSCT reprenant les propos de Mme [XK], en ces termes ‘Il était sur mon dos tout le temps, en me faisant des réflexions sur mon physique, ma religion : tu as des cheveux de marocaine, tu me fais chier avec ton ramadan, je vais te virer. […] Je suis allée chercher une pièce de 2€ dans mon vestiaire. Il a pris la pièce en la tapant sur le bord du bar en me disant ‘on ne sait jamais avec vous les arabes je préfère vérifier l’argent’. Je sais que je ne suis pas la seule dans ce cas et qu’ils ont peur de parler’ lesquels sont conformes à sa propre attestation.
M. [R] produit pour sa part 22 attestations de salariés et de personnes extérieures à la société indiquant en substance n’avoir jamais été témoins de la tenue de propos racistes ou homophobes de sa part.
Ces attestations, qui émanent de personnes qui ne travaillent pas au quotidien dans les mêmes locaux que M. [R], ne permettent pas d’écarter la valeur probante des attestations des deux salariées dénonçant les faits reprochés à M. [R] avec lequel elles travaillaient, et qu’elles ont porté à la connaissance des représentants du personnel et qu’elles ont réitéré lors de l’enquête diligentée par le CHSCT.
Si les conclusions de l’enquête CHSCT indiquent que ‘mises à part deux salariées, nous n’avons recueilli aucun autre fait qui pourrait corroborer leurs témoignages’ il est précisé qu »il y règne une atmosphère pesante, compte-tenu de l’attitude de [A] [R] lors de son audition : autoritaire, prédominant avec une certaine arrogance. Nous avons le sentiment qu’il y a eu de réels dérapages managériaux de type discriminatoire à caractère raciste envers ces deux salariées’.
Les propos à connotation raciste en raison de l’origine ou de la religion sont ainsi caractérisés.
Il constitue une faute, laquelle par la nature des propos proférés et par le positionnement hiérarchique de M. [R] rendait impossible la poursuite du contrat de travail.
Sans formuler expressément de moyen dans ses conclusions pour voir considérer que les motifs réels de son licenciement sont autres, M. [R] produit l’attestation de M. [O] [D], responsable multi-unités, selon lequel : ‘courant septembre 2018, [L] [F] (responsable opérationnel du site) m’a affirmé suite aux nombreux arrêts maladie du 01/04/2018 que pour lui cela était un mouvement de grève déguisée, que les ‘responsables’ identifiés (selon ses dires) [A] [R] et [XB] [ZA] en paieraient le prix de toutes les façons, même si il faut mentir pour les licencier’.
Deux salariés, M. [D] et M. [ZA], attestent que M. [F], responsable opérationnel leur a déclaré en septembre 2018 que les arrêts de travail pour maladie des salariés en avril 2018 constituaient selon lui une grève déguisée, qu’il avait identifié les meneurs comme étant M.[R] et M. [ZA] et que ceux-ci en paieraient le prix même s’il fallait mentir pour les licencier.
M. [R] n’apporte aucun élément permettant de considérer que M. [F], ayant quitté la société par rupture conventionnelle, ait ainsi orchestré la mesure de rétorsion évoquée.
Il n’est ni expressément invoqué ni démontré que la cause réelle du licenciement ait été de sanctionner le salarié pour avoir initié une grève déguisée et non pour le comportement fautif caractérisé qui a été le sien.
Il est au contraire établi de manière objective et circonstanciée que M. [R] a tenu des propos à connotation raciste à l’encontre d’une salariée ayant eu pour effet de dégrader ses conditions de travail, ce manquement étant constitutif d’une faute grave.
Le jugement entrepris est infirmé en ce qu’il a retenu l’absence de cause réelle et sérieuse au licenciement.
Dans ces conditions, M. [R] est débouté de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité compensatrice de préavis et à titre de congés payés, le jugement étant infirmé de ces chefs.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Il y a lieu d’infirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Partie succombante, M. [A] [R] est condamné aux dépens de la première instance et d’appel et au paiement de la somme de 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Juge le licenciement de M. [A] [R] pour faute grave justifié,
Déboute M. [A] [R] de ses autres demandes,
Condamne M. [A] [R] à payer à la société SSP Province la somme de 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [A] [R] aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.
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