Rénovation et responsabilités contractuelles : enjeux de la nullité et des malfaçons.

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Rénovation et responsabilités contractuelles : enjeux de la nullité et des malfaçons.

La nullité du contrat de crédit affecté est constatée en application de l’article L. 311-32 du Code de la consommation, qui stipule que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. En l’espèce, le contrat de travaux a été déclaré nul en raison de l’irrégularité du bon de commande, qui ne respectait pas les exigences des articles L. 121-18-1 et L. 121-21 du Code de la consommation, relatifs aux contrats conclus hors établissement. Ces articles imposent que le contrat soit écrit, daté, et qu’il comporte des informations essentielles, y compris un formulaire de rétractation détachable, à peine de nullité. La nullité du contrat principal entraîne celle du contrat de crédit, conformément au principe d’interdépendance des contrats, et impose la remise des parties dans l’état antérieur à la conclusion des contrats, comme le prévoit l’article 1147 du Code civil devenu 1231-1. En conséquence, l’emprunteur est tenu de restituer le capital emprunté, sauf preuve d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute, conformément aux articles L. 311-31 et L. 311-32 du Code de la consommation.

L’Essentiel : La nullité du contrat de crédit affecté est constatée en application de l’article L. 311-32 du Code de la consommation, qui stipule que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. En l’espèce, le contrat de travaux a été déclaré nul en raison de l’irrégularité du bon de commande, qui ne respectait pas les exigences des articles L. 121-18-1 et L. 121-21.
Résumé de l’affaire :

Exposé du litige

M. et Mme [J], propriétaires d’un immeuble, ont confié des travaux de rénovation à une entreprise, la SARL Valentin Despierre, pour un montant total de 41 374,47 euros. Un crédit affecté a été consenti par une banque pour financer ces travaux. Après la réception des travaux, des malfaçons ont été signalées, entraînant des désaccords entre les parties.

Procédures judiciaires

M. et Mme [J] ont fait dresser un procès-verbal par un huissier et ont demandé des réparations. La SARL Valentin Despierre a ensuite mis en demeure M. et Mme [J] de payer des factures. En mai 2017, la liquidation judiciaire de l’entreprise a été prononcée. M. et Mme [J] ont alors sollicité l’admission de leur créance.

Assignation et demandes

M. et Mme [J] ont assigné le liquidateur judiciaire et la banque devant le tribunal, demandant des dommages et intérêts, la résiliation du contrat de prêt, et le remboursement des sommes versées. En juin 2018, la procédure de liquidation a été clôturée pour insuffisance d’actif.

Jugement du tribunal judiciaire

En novembre 2022, le tribunal a débouté M. et Mme [J] de toutes leurs demandes et a condamné M. et Mme [J] aux dépens. M. et Mme [J] ont interjeté appel de cette décision.

Appel et désignation d’un mandataire

En janvier 2023, M. et Mme [J] ont interjeté appel et demandé la désignation d’un mandataire ad hoc pour représenter la SARL Valentin Despierre. Un mandataire a été désigné en août 2023.

Conclusions des parties

M. et Mme [J] ont demandé la réforme du jugement, la nullité du contrat de travaux, et le remboursement des mensualités payées. La banque a contesté la nullité du contrat de crédit et a demandé la confirmation du jugement initial.

Motivation de la décision

La cour a constaté que l’action contre le liquidateur était irrecevable, et a annulé le contrat de travaux en raison de l’irrégularité du bon de commande. La nullité du contrat de crédit a également été constatée, entraînant des obligations de restitution entre les parties.

Conclusion

M. et Mme [J] ont été condamnés à restituer le capital emprunté à la banque, tandis que la banque a été condamnée à rembourser les frais engagés par M. et Mme [J]. Les demandes de dommages et intérêts ont été rejetées.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la demande de M. et Mme [J] concernant la nullité du contrat de travaux ?

La demande de M. et Mme [J] repose sur l’absence de conformité du bon de commande aux exigences des articles L. 121-23 et L. 121-24 du code de la consommation, qui imposent la présence d’un formulaire détachable de rétractation et d’informations claires sur le droit de rétractation.

Ces articles stipulent que pour les contrats conclus hors établissement, le professionnel doit fournir un contrat écrit daté, comportant des informations essentielles, notamment sur le droit de rétractation. L’article L. 121-18-1 précise que les mentions obligatoires à peine de nullité incluent les informations relatives à l’identité du démarcheur, les caractéristiques essentielles du service, et la faculté de rétractation.

En l’espèce, le bon de commande ne respectait pas ces exigences, ce qui entraîne sa nullité. La jurisprudence a confirmé que l’absence de ces mentions constitue une nullité d’ordre public, sans que le consommateur ait à prouver le caractère déterminant de ces informations pour son consentement.

Quel est l’impact de la liquidation judiciaire de la SARL Valentin Despierre sur les actions de M. et Mme [J] ?

La liquidation judiciaire de la SARL Valentin Despierre, prononcée par le tribunal de commerce de Lille Métropole, a pour effet d’interrompre toute action en justice de la part des créanciers, conformément à l’article L. 622-21 du code de commerce. Cet article stipule que le jugement d’ouverture interdit toute action en justice visant à condamner le débiteur au paiement d’une somme d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement.

M. et Mme [J] ont engagé une action contre le liquidateur judiciaire après le prononcé de la liquidation, ce qui rend leur action irrecevable. Le tribunal a donc relevé d’office cette fin de non-recevoir, soulignant que la règle de l’arrêt des poursuites individuelles est d’ordre public et doit être respectée.

Quel est le fondement de la demande de M. et Mme [J] concernant la résiliation du contrat de prêt affecté ?

M. et Mme [J] invoquent l’article L. 311-32 du code de la consommation, qui stipule que le contrat de crédit est résolu de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même annulé ou résolu. Ils soutiennent que la banque a commis une faute en débloquant les fonds sans s’assurer de l’exécution complète des travaux, ce qui constitue une violation de ses obligations.

L’article L. 312-48 précise que l’emprunteur n’est pas tenu de restituer le capital prêté si le prêteur a commis une faute dans l’exécution de ses obligations. M. et Mme [J] affirment que les travaux ont été mal réalisés et que la banque aurait dû vérifier la conformité des travaux avant de débloquer les fonds.

En conséquence, ils demandent la résiliation du contrat de prêt et le remboursement des mensualités déjà versées, en raison de la faute de la banque dans le déblocage des fonds.

Quel est le rôle de la SA CA Consumer Finance dans cette affaire ?

La SA CA Consumer Finance, en tant que prêteur, a l’obligation de s’assurer de la régularité du contrat principal avant de débloquer les fonds. Selon l’article L. 311-32 du code de la consommation, le contrat de crédit est lié au contrat de travaux, et toute irrégularité dans ce dernier peut entraîner la nullité du contrat de crédit.

La banque soutient qu’elle a respecté ses obligations en se basant sur le procès-verbal de réception signé par M. et Mme [J]. Cependant, ce document ne prouve pas que les travaux ont été réalisés conformément au contrat, car il mentionne une entreprise qui n’était pas partie au contrat de crédit.

La SA CA Consumer Finance conteste également avoir commis une faute, arguant que les emprunteurs ne peuvent pas invoquer des non-conformités après avoir signé le procès-verbal de réception. Toutefois, si la banque a débloqué les fonds sans vérifier l’exécution complète des travaux, elle pourrait être tenue responsable des conséquences de cette décision.

Quel est le résultat de la demande de M. et Mme [J] concernant les dommages et intérêts ?

La demande de M. et Mme [J] pour obtenir des dommages et intérêts a été rejetée. Le tribunal a constaté que, bien que des malfaçons aient été relevées, celles-ci étaient imputables à la SARL Valentin Despierre et non à la SA CA Consumer Finance.

Les articles 1147 du code civil, devenu 1231-1, et L. 311-31 du code de la consommation stipulent que l’annulation d’un contrat entraîne la remise des parties dans l’état antérieur. Cependant, pour obtenir des dommages et intérêts, il est nécessaire de prouver un lien de causalité entre la faute du prêteur et le préjudice subi.

En l’espèce, M. et Mme [J] n’ont pas réussi à établir ce lien, car les malfaçons étaient directement liées aux manquements contractuels de la SARL Valentin Despierre. Par conséquent, la SA CA Consumer Finance conserve son droit au remboursement du capital prêté, et les demandes de dommages et intérêts ont été rejetées.

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 27/02/2025

****

N° de MINUTE :

N° RG 23/00480 – N° Portalis DBVT-V-B7H-UXAH

Jugement (N° 18/04762)

rendu le 22 novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANTS

Monsieur [B] [J]

né le 16 septembre 1976 à [Localité 6]

Madame [F] [P] épouse [J]

née le 13 mai 1982 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 7]

représentés par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistés de Me Patrick Drancourt, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

INTIMÉS

Maître [T] [I] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Valentin Despierre et désormais nommé en qualité de mandataire ad’hoc de la SARL Valentin Despierre

[Adresse 3]

[Localité 4]

défaillant à qui la déclaration d’appel a été signifiée à l’étude de l’huissier instrumentaire le 23 mars 2023 (en qualité de liquidateur judiciaire)

défaillant à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 26 septembre 2023 à personne habilitée (en qualité de mandataure ad’hoc)

La SA CA Consumer Finance Département Sofinco

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Catherine Courteille, présidente de chambre

Véronique Galliot, conseiller

Carole Van Goetsenhoven, conseiller

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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anaïs Millescamps

DÉBATS à l’audience publique du 09 septembre 2024.

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 27 février 2025 après prorogation du délibéré en date du 19 décembre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Catherine Courteille, présidente, et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 mars 2024

****

EXPOSE DU LITIGE

M. [B] [J], propriétaire d’un immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 7], a confié, suivant devis, n° DE00034, du 28 octobre 2015, et bon de commande du 3 novembre 2015 à la SARL Valentin Despierre, des travaux de rénovation pour un montant total de 41 374,47 euros.

Suivant offre acceptée le 3 novembre 2015 par M. [B] [J] et Mme [F] [P] épouse [J] (ci-après M. et Mme [J]), la SA CA Consumer Finance ‘ département Sofinco a consenti un crédit affecté à ses travaux d’un montant de 41 374,47 euros.

Le 9 décembre 2015, ils ont signé un accord pour un nouveau devis d’un montant de 8690 euros pour la pose de pierres bleues.

Les travaux ont été réceptionnés le 5 janvier 2016, sans réserve.

En janvier 2016, la société de crédit a débloqué les fonds.

Se plaignant de désordres et malfaçons affectant les travaux, M. et Mme [J] ont fait dresser procès-verbal par huissier de justice le 4 août 2016 et réaliser un rapport d’audit par la société Maquarie, consultant technique bâtiment.

Par courrier du 21 septembre 2016, la SARL Valentin Despierre a mis en demeure M. et Mme [J] de lui payer deux factures du 19 septembre 2016 d’un montant de 1468,50 euros TTC et de 1295,80 eurosTTC.

Par jugement du 15 mai 2017, le tribunal de commerce de Lille Métropole a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL Valentin Despierre.

Par courrier du 10 juin 2017, M. et Mme [J] ont sollicité l’admission de leur créance d’un montant de 102 168,55 euros TTC à titre chirographaire.

Par acte d’huissier de justice du 25 mai 2018, ils ont fait assigner Me [T] [I], en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Valentin Despierre et la société CA Consumer Finance département Sofinco devant le tribunal de grande instance de Lille sur le fondement des articles 1134 et suivants du code civil et L.311-32 du code de la consommation aux fins de :

Condamner Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire la SARL Valentin Despierre à payer à M. et Mme [J] la somme de 104 932, 85 euros de dommages et intérêts,

Résilier le contrat de prêt qui a été souscrit pour le financement des travaux, et ce en application de l’article L311-32 du code de la consommation,

Condamner Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire la SARL Valentin Despierre et la Banque Sofinco à rembourser les mensualités qui ont été payées au titre du remboursement du prêt ; et toutes les sommes qui ont été payées au titre des travaux,

Condamner Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Valentin Despierre et la Banque Sofinco à payer à M. et Mme [J] la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code procédure civile,

Condamner Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Valentin Despierre et la Banque Sofinco aux entiers frais et dépens

Par jugement du 1er juin 2018, le tribunal de commerce de Lille Métropole a prononcé la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif.

Par jugement du 22 novembre 2022, tribunal judiciaire de Lille a :

débouté M. et Mme [J] de l’ensemble de leurs demandes ;

débouté la société CA Consumer Finance Département Sofinco de sa demande de paiement du capital restant dû au jour du premier impayé ;

condamné M. et Mme [J] solidairement aux dépens ;

débouté M. et Mme [J] ainsi que la société CA Consumer Finance Département Sofinco de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

ordonné l’exécution provisoire de la décision.

Par déclaration reçue au greffe le 30 janvier 2023, M. et Mme [J] a interjeté appel des chefs du jugement les ayants déboutés de leurs demandes et condamnés aux dépens.

Par requête du 5 juillet 2023, les appelants ont saisi M. le Premier Président afin qu’il désigne un mandataire ad hoc aux fins de représenter la SARL Valentin Despierre.

Par ordonnance de 28 août 2023, Me [T] [I] a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de la SARL Valentin Despierre.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe le 9 février 2024, M. et Mme [J] demandent à la cour, au visa des articles 1134 et suivants du code civil, des articles L. 311-32 et L. 312-48 du code de la consommation, de :

réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant à dire et juger que les conditions de résolution du contrat principal de prestations de services conclu avec la SARL Valentin Despierre ne sont pas réunies et qu’en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. et Mme [J] n’est pas résolu.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant à débouter M. et Mme [J] de l’intégralité de leurs prétentions, demandes, fins et conclusions telles que formulées à l’encontre de la SA CA Consumer Finance.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant ordonner à M. et Mme [J] de poursuivre le règlement des échéances du prêt entre les mains de la SA CA Consumer Finance conformément aux stipulations du contrat de crédit affecté accepté par ses soins le 03 novembre 2015 et ce, jusqu’au plus parfait paiement.

Statuant à nouveau,

réformer les dispositions du jugement rejetant la demande de résolution du marché de travaux et statuant à nouveau prononcer l’annulation du marché de travaux qui a été régularisé entre la SARL Valentin Despierre et M. et Mme [J].

réformer les dispositions du jugement rejetant la demande tendant à la résolution du marché de travaux conclu avec la SARL Valentin Despierre ; et statuant à nouveau prononcer l’annulation du marché de travaux qui a été régularisé entre la SARL Valentin Despierre et M. et Mme [J] en raison de l’importance des malfaçons et du fait que la SARL Valentin Despierre n’a pas respecté ses obligations contractuelles.

réformer les dispositions du jugement rejetant la demande tendant à la résolution du marché de travaux conclu avec la SARL Valentin Despierre ; et statuant à nouveau prononcer l’annulation du marché de travaux puisque le bon de commande ne comprend pas de formulaire détachable de rétractation.

réformant les dispositions du jugement rejetant la demande de dommage et intérêts et statuant à nouveau condamner Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire et désormais mandataire ad hoc de la SARL Valentin Despierre à payer à M. et Mme [J] la somme de 104 932,85 euros de dommages et intérêts.

réformant les dispositions du jugement rejetant la demande de résiliation du contrat de prêt et statuant à nouveau annuler ou résilier le contrat de prêt qui a été souscrit pour le financement des travaux, et ce en application de l’article L311-32 du Code de la Consommation.

réformer les dispositions du jugement rejetant la demande de remboursement des mensualités payées du prêt et statuant à nouveau condamner la SA CA Consumer Finance à rembourser à M. et Mme [J] la somme de 32485.12 euros au titre des échéances de prêt payées pour la période de juillet 2016 à mars 2023.

réformer le jugement et statuant à nouveau de condamner la SA CA Consumer Finance à rembourser à M. et Mme [J] toutes les mensualités payées du contrat de prêt ; et ce de juillet 2016 jusqu’à la date de résiliation ou d’annulation du contrat de prêt

juger que nonobstant l’annulation du contrat de crédit, M. et Mme [J] ne seront pas tenus, en application de l’article L 312-48 du code de la consommation, de restituer à la SA CA Consumer Finance le capital prêté.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande, à titre subsidiaire, tendant à dire et juger que la SA CA Consumer Finance n’a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds ni aucune faute dans l’octroi du crédit.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant, à titre subsidiaire, à condamner solidairement M. et Mme [J] à rembourser à la SA CA Consumer Finance le montant du capital prêté, déduction faites des paiements d’ores et déjà effectués par les emprunteurs.

débouter SA CA Consumer Finance de toutes ses demandes , fins et conclusions,

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant à dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant dire et juger que la SA CA Consumer Finance ne saurait être privée de la totalité de sa créance de restitution, compte tenu de l’absence de préjudice avéré pour M. et Mme [J] directement lié à la prétendue faute que M. et Mme [J] tentent de mettre à la charge de l’établissement financier prêteur.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant à condamner solidairement M. et Mme [J] à rembourser à la SA CA Consumer Finance le montant du capital prêté, déduction faites des paiements d’ores et déjà effectués par les emprunteurs.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant à défaut, réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par M. et Mme [J] et condamner à tout le moins M. et Mme [J] à restituer à la SA CA Consumer Finance une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté litigieux.

débouter la SA CA Consumer Finance de sa demande tendant à obtenir la condamnation de M. et Mme [J] à lui payer la somme de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, si par impossible, la Cour condamnait M. et Mme [J] à rembourser le capital prêté, juger que cette condamnation interviendra sous déduction des règlements déjà effectués par M. et Mme [J] et ordonner la compensation entre les sommes.

condamner in solidum Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire et désormais mandataire ad hoc de la SARL Valentin Despierre et la SA CA Consumer Finance à payer à M. et Mme [J] la somme de 7 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

condamner in solidum Maître [T] [I], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire et désormais mandataire ad hoc de la SARL Valentin Despierre et la SA CA Consumer Finance aux entiers frais et dépens d’instance et d’appel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 1er décembre 2023, la SA CA CONSUMER Finance département Sofinco demande, au visa des articles 1103, 1104, 1353 et 1128 du code civil, des articles L. 312-55 et L. 312-56 du code de la consommation et de l’article 9 du code de procédure civile, à la cour de :

A titre principal,

dire bien jugé et mal appelé

confirmer le jugement intervenu devant le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Lille en date du 22 Novembre 2022 en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a débouté M. et Mme [J] de l’ensemble de leurs demandes.

constater la carence probatoire de M. et Mme [J].

dire et juger que les conditions de résolution du contrat principal de prestations de services conclu avec la SARL Valentin Despierre ne sont pas réunies et qu’en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. et Mme [J] n’est pas résolu.

En conséquence, débouter M. et Mme [J] de l’intégralité de leurs prétentions, demandes, fins et conclusions telles que formulées à l’encontre de la SA CA Consumer Finance.

ordonner à M. et Mme [J] de poursuivre le règlement des échéances du prêt entre les mains de la SA CA Consumer Finance conformément aux stipulations du contrat de crédit affecté accepté par ses soins le 03 novembre 2015 et ce, jusqu’au plus parfait paiement.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour d’appel décidait de réformer le jugement entrepris et de prononcer l’annulation, la résolution ou la résiliation du contrat principal de prestations de services conclu le 3 novembre 2015 entre M. et Mme [J] et la SARL Valentin Despierre entraînant l’annulation ou la résolution du contrat de crédit affecté,

constater, dire et juger que la SA CA Consumer Finance n’a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds ni aucune faute dans l’octroi du crédit

Par conséquent, condamner solidairement M. et Mme [J] à rembourser à la SA CA Consumer Finance le montant du capital prêté, déduction faites des paiements d’ores et déjà effectués par les emprunteurs.

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour devait juger que la SA CA Consumer Finance a commis une faute dans le déblocage de fonds,

dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque.

dire et juger que la SA CA Consumer Finance ne saurait être privée de la totalité de sa créance de restitution, compte tenu de l’absence de préjudice avéré pour M. et Mme [J] directement lié à la prétendue faute que M. et Mme [J] tentent de mettre à la charge de l’établissement financier prêteur.

Par conséquent, condamner solidairement M. et Mme [J] à rembourser à la SA CA Consumer Finance le montant du capital prêté, déduction faites des paiements d’ores et déjà effectués par les emprunteurs.

A défaut, réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par M. et Mme [J] et condamner à tout le moins M. et Mme [J] à restituer à la SA CA Consumer Finance une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté litigieux.

En tout état de cause,

condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à la SA CA Consumer Finance la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

condamner in solidum M. et Mme [J] aux entiers frais et dépens, y compris ceux d’appel dont distraction au profit de Maître Francis Deffrennes, Avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par note transmises par RPVA le 23 janvier 2025, la cour a demandé aux parties de « de communiquer leurs observations quant à la recevabilité de la demande de condamnation formée à l’encontre du liquidateur, en application de l’article L. 622-21 du code de commerce.

Il est rappelé que la fin de non-recevoir de l’article L. 622-21 qui n’est pas invoquée par une partie, le juge est tenu de la relever d’office (Com., 8 mars 2023, n° 21-20.738 ».

Par note reçue par RPVA le 11 février 2025, M. et Mme [J] ont indiqué s’en rapporter à la justice quant à la question soulevée par la cour.

Par note reçue par RPVA le 12 février 2025, la SA Consumer Finance département Sofinco a indiqué s’en rapporter à la justice quant à la question soulevée par la cour.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées et rappelées ci-dessus.

Me [I] ès qualités, bien que cité, n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 11 mars 2024.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

Il est rappelé que la cour n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « dire et juger » ou de « constater » qui ne sont pas des prétentions juridiques.

Sur la recevabilité de la demande de condamnation formée à l’encontre du liquidateur

L’article L. 622-21 du code de commerce I et II dispose : « I.-Le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;

2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

II.- Sans préjudice des droits des créanciers dont la créance est mentionnée au I de l’article L. 622-17, le jugement d’ouverture arrête ou interdit toute procédure d’exécution tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d’ouverture ».

La règle de l’arrêt des poursuites individuelles, consécutive à l’ouverture d’une procédure collective est d’ordre public. Il en résulte qu’elle constitue une fin de non-recevoir et que, si elle n’est pas invoquée par une partie, le juge est tenu de la relever d’office en respectant le principe de la contradiction.

A la demande de la cour, les parties ont transmis leurs observations sur cette fin de non-recevoir et ont indiqué s’en remettre à l’appréciation de la cour.

En l’espèce, par jugement du 15 mai 2017, le tribunal de commerce de Lille Métropole a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL Valentin Despierre.

Or, M. et Mme [J] ont engagé une action à l’encontre de Me [T] [I], en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Valentin Despierre le 25 mai 2018, soit après le prononcé de la liquidation judiciaire. Cette action est irrecevable.

Sur la demande tendant à la nullité du contrat de travaux

M. et Mme [J] sollicitent la constatation de la nullité du contrat de travaux souscrit auprès de la SARL Valentin Despierre aux motifs que le bon de commande ne comportait pas de formulaire détachable de rétractation conforme aux dispositions des articles L. 121-23 et L.121-24 du code de la consommation et qu’il ne comprenait pas le texte de l’article L. 121-25 du code de la consommation, obligation prescrite à peine de nullité. Ils ajoutent que le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24 et L. 121-26 du code de la consommation n’apparaissent pas de façon apparente dans le bon de commande alors que ces mentions sont prévues à peine de nullité.

La SA CA Consumer Finance fait valoir que le contrat principal n’est pas nul au motif que les conditions de validité, en application de l’article 1128 du code civil, sont remplies et qu’il comportait bien un formulaire de rétractation détachable et conforme aux dispositions du code de la consommation. Elle ajoute que de surcroît l’absence de bordereau et son caractère irrégulier ne peuvent entraîner la nullité du contrat puisque cette nullité n’est pas prévue par l’article L. 121-24 du code de la consommation.

Le contrat principal ayant été conclu le 3 novembre 2015, il y a lieu de préciser qu’il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Il n’est pas discuté que le contrat principal est soumis aux dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement.

En vertu de l’article L 121-18-1 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter notamment, à peine de nullité, les informations relatives à l’identité du démarcheur et ses coordonnées, les caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix du bien ou du service, en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ; la faculté de rétractation du consommateur prévue à l’article L.121-21 du code de la consommation et les conditions d’exercice de cette faculté. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l’article L. 121-17, lequel doit être détachable pour permettre au consommateur d’adresser au professionnel sa rétractation.

L’article L.121-17 III du même code dispose que la charge de la preuve concernant le respect des obligations d’information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel.

Aux termes de l’article L.121-21 dans sa version applicable du 8 août 2015 au 1er juillet 2016, soit à la date du contrat de vente, issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 : « Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 121-21-3 à L. 121-21-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle.

Le délai mentionné au premier alinéa du présent article court à compter du jour :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 121-16-2 ;

2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien ».

En l’espèce, il résulte de l’examen du contrat litigieux qu’il est mentionné de façon manuscrite qu’il porte sur la fourniture, la livraison et la pose de laine de verre, de plaque de plâtre, de cloisons, de velux, de VMC et d’un escalier pour un prix de 41 374,47 euros TTC. Il est mentionné « une garantie : 10 ans » et « un délai : 12 semaines ».

M. et Mme [J] contestent la régularité du bon de rétractation aux motifs qu’il n’est pas détachable et qu’il ne reprend de façon apparente le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de consommation, dispositions relatives aux conditions d’exercice du droit de rétractation.

Or, ces dispositions avaient été abrogées par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et ne s’appliquaient pas aux contrats conclus après et, notamment le 3 novembre 2015. Néanmoins, M. et Mme [J] soutiennent l’irrégularité du bon de commande en ce qu’il ne contient pas les conditions d’exercice de la faculté de rétractation.

Il résulte de ces dispositions que les mentions obligatoires à peine de nullité ne sont, s’agissant de ce contrat, que celles de l’article L. 111-1 du code de la consommation dans cette version et les informations relatives au droit de rétractation.

Le bon de commande comporte au haut de son recto un paragraphe intitulé « Information concernant l’exercice du droit de rétractation » qui peut être utilisé sans qu’il soit porté atteinte physique au contrat puisqu’il ne comporte rien d’autre en son verso que le nom de la SARL Valentin Despierre ainsi que ses coordonnées.

Ce formulaire est libellé de la façon suivante :

« Information concernant l’exercice du droit de rétractation

Droit de rétractation :

Vous avez le droit de vous rétracter du présent contrat sans donner de motif dans un délai de quatorze jours. Le délai de rétractation expire quatorze jours après le jour de la conclusion du contrat. L’expédition au plus tard le quatorzième jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche, ou jour fériés, chromés, le premier jour ouvrable suivants. Pour exercer le droit de rétractation, vous devez notifier votre décision de rétractation du présent contrat à l’aide du formulaire de rétractation ci-dessous à : Conditions : compléter et signer ce formulaire, l’envoyer par lettre recommandées avec accusés réception à : Adresse au dos (découper sur les pointiller). Je vous notifie par la présente ma rétractation du contrat portant sur la vente du bien/prestation ci-dessous :

Numéro de devis :  » »’..signature :  ».

Accepté le :  »

Nom du client : ‘..

Adresse du client : ‘..

Code de la consommation Art L. 121-17 1.2°, R.121-1 ».

Le titre de ce bon, à savoir « Information concernant l’exercice du droit de rétractation » et non « bordereau de rétractation » peut prêter à confusion et ne correspond pas au modèle type.

C’est à juste titre que les appelants invoquent l’irrégularité du bordereau de rétractation. En effet, il ne visait que la date de conclusion du contrat de vente comme point de départ du délai de rétractation, alors que l’article L.121-21 fixait le point de départ du délai de rétractation à la date de réception du bien pour les contrats de vente de biens et de prestations de service incluant la livraison du bien comme en l’espèce, le consommateur pouvant exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat pour les contrats conclus hors établissement, mais ne perdant pas la faculté de rétractation offerte dans le délai de livraison du bien.

De plus, il est constaté que la reproduction de l’article L. 121-21 du code la consommation (mal nommé dans le contrat comme étant l’article L. 121-17 I 2°) dans les conditions générales est tronquée, elle ne reprend la mention « sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 121-21-3 à L. 121-21-5. »

Dès lors, il est manifeste que M. et Mme [J] n’ont pas reçu une information correcte et complète quant à sa faculté de rétractation sur le bordereau de rétractation, ni aux termes des conditions générales de vente.

Le bon de commande litigieux est donc irrégulier au regard des dispositions du code de la consommation, ce qui entraîne sa nullité sans que le consommateur ait à démontrer le caractère déterminant pour son consentement des informations manquantes, s’agissant d’une nullité d’ordre public.

La nullité du contrat principal étant constatée, la demande de prononcer sa résolution judiciaire est donc sans objet. Il est, néanmoins précisé, que si des désordres sont relevés dans le constat d’huissier et dans le rapport d’audit, il n’est pas démontré qu’ils sont suffisamment graves pour justifier la résolution du contrat.

Sur les demandes relatives au contrat de crédit affecté

M. et Mme [J] demandent de voir, en application des dispositions de l’article L. 311-32 du code de la consommation, constater la nullité ou de résilier le contrat de prêt affecté souscrit auprès de la SA CA Consumer Finance le 3 novembre 2015.

Ils soutiennent que la banque a commis une faute en libérant les fonds, que le procès-verbal de réception ne faisait état que de la réception de travaux réalisés par la SARL ADSTE qui n’était pas partie au contrat de travaux financés par le crédit affecté et que la demande de financement ne l’autorisait pas à débloquer les fonds. Ils font également valoir que les travaux ont commencé en janvier 2016 de sorte qu’ils n’étaient pas achevés lors de la signature de ce procès-verbal de réception et de la demande de financement. Ils indiquent que les travaux sont grevés de très nombreuses malfaçons, que la banque ne s’était pas assurée de l’exécution complète des travaux ce qui est constitutif d’une faute et, conformément à l’article L. 312-48 du code de la consommation, la prive de son droit à restitution du capital. Ils affirment que compte tenu de ces fautes imputables à la banque, celle-ci doit être condamnée à rembourser toutes les mensualités payées au titre de l’exécution du contrat de prêt, soit la somme de 32 485,12 euros au titre des échéances de prêt payées pour la période de juillet 2016 à mars 2023.

M. et Mme [J] soutiennent avoir subi un préjudice puisque les travaux financés par la SA CA Consumer n’ont pas été exécutés correctement par la SARL Valentin Despierre et que le coût des réfections s’élève à la somme de 52 000 euros.

La SA CA Consumer Finance conteste la nullité et/ou la résiliation du contrat de prêt affecté souscrit le 3 novembre 2015 par M. et Mme [J].

Elle soutient que M. et Mme [J] ont signé un procès-verbal de réception sans réserve des travaux, déterminant la banque à verser les fonds à la société venderesse, et qu’ils ne peuvent pas invoquer, par la suite, des non-conformités ou une inexécution par le vendeur à ses obligations contractuelles pour solliciter la résolution du contrat de prêt affecté.

Elle affirme n’avoir commis une faute la privant de son droit à restitution du capital, déduction faite des remboursements effectués, en cas de nullité ou de résolution du contrat principal. Elle précise que cette restitution est la conséquence de l’annulation ou la résolution du contrat principal et qu’il importe peu que les fonds aient été versés directement entre les mains du vendeur. Elle ajoute qu’avant le déblocage des fonds, son obligation se limitait d’avoir la preuve de la livraison du bien ou de l’exécution de la prestation de service au moyen du procès-verbal de réception des travaux ou d’un document certifiant la livraison du bien et qu’elle n’avait pas à mener des investigations plus poussées quant à la réalisation des travaux. Elle souligne que M. et Mme [J] ont bien signé le procès-verbal de réception ainsi que la demande de financement. La SA CA Consumer indique également ne pas être tenue d’une obligation de s’assurer de la régularité du contrat principal signé par M. et Mme [J].

Enfin, à titre infiniment subsidiaire, la SA CA Consumer indique, dans l’hypothèse où sa faute serait démontrée la privant de son droit à restitution du capital prêté, que M. et Mme [J] sont défaillants dans l’administration de la preuve de leur préjudice qui serait lié à sa faute puisque ces derniers ne contestent pas que les travaux aient bien été réalisés et que les dysfonctionnements invoqués ne sont pas démontrés. Elle souligne que M. et Mme [J] conserveront l’installation des biens commandés et des travaux exécutés et qu’ainsi ils n’ont subi aucun préjudice avec la faute imputée à la SA CA Consumer. Elle précise également qu’aucun préjudice est justifié en lien avec un comportement prétendu fautif du prêteur. Elle fait valoir que le préjudice subi par l’emprunteur du fait du manquement du banquier a son devoir d’information ou de mise en garde ne peut s’analyser qu’en une perte de chance de ne pas contracter et qu’elle ne peut donner lieu à une réparation intégrale.

Sur la nullité du contrat de crédit

En application du principe de l’interdépendance des contrats consacré par l’article L.311-32 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 applicable, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il convient en conséquence de réformer le jugement et de constater l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 3 novembre 2015 M. et Mme [J] et la SA CA Consumer.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat de crédit

Il est rappelé que les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. La nullité du contrat de vente et du contrat de prêt affecté impose de remettre les parties dans l’état qui était le leur avant leur conclusion. Les contrats ayant été partiellement ou totalement exécutés, chacun doit donc restituer ce qu’il a reçu.

Il résulte des articles 1147 du code civil devenu 1231-1, L.311-31 et L.311-32 devenus L.312-48 et L.312-55 du code de la consommation que l’annulation du contrat de vente ou de prestation de services emporte celle du contrat et que l’emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l’emprunteur établit l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute.

Il est constant que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur prouve avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Ainsi, sauf à démontrer l’existence de faute en lien de causalité avec leur préjudice, M. et Mme [J] doivent reverser à la SA CA Consumer le solde du capital emprunté, déduction faite de la part du capital versé dans les échéances acquittées, tandis que cette dernière doit pour sa part lui faire retour de la part des intérêts comprise dans les échéances du prêt déjà acquittées.

En l’espèce, en versant les fonds au vendeur sans avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal, alors que l’irrégularité du bordereau de rétractation et partant, du contrat de vente était manifeste et que les vérifications qui lui incombent lui auraient permis de constater que le contrat principal était entaché de nullité, la société SA CA Consumer Finance a commis une faute dans le déblocage des fonds.

M. et Mme [J] soutiennent également que la société SA CA Consumer Finance a commis une faute en débloquant les fonds sans s’être assurée de l’exécution complète des travaux financés et que ces derniers sont entachés de malfaçons.

Dans la logique de l’opération commerciale unique, l’emprunteur ne saurait être tenu d’un engagement financier qui n’aurait pas pour contrepartie la livraison d’un bien ou l’exécution d’une prestation de service. Il est donc justifié que le prêteur s’enquière de l’exécution complète du contrat principal et ne délivre les fonds qu’après une telle exécution, sous peine de commettre une faute.

A ce titre, il est produit au débat un document intitulé « procès-verbal de réception » daté du 5 janvier 2016. Dans ce document, il est mentionné : « Je soussigné M. Valentin Despierre après avoir procédé à la visite des travaux effectués par la SARL ADSTE déclare que la réception est prononcée sans réserve avec effet à la date du’/’/’ ». Ce document est signé par M. [B] [J] et par M Valentin Despierre. Cette société ADSTE ne figure pas dans le contrat de crédit de la société SA CA Consumer Finance qui est affecté aux travaux réalisés par la SARL Valentin Despierre. Ce document n’est donc pas propre à caractériser l’exécution complète du contrat principal.

Il est également produit un document intitulé « demande de financement à adresser au prêteur après livraison et/ou exécution de la prestation », signé par la SARL Valentin Despierre et M. [B] [J] le 5 janvier 2016.

M. et Mme [J] produisent un constat d’huissier réalisé le 4 août 2016, soit 8 mois après la fin des travaux, et un rapport d’audit de la société MAQUARIE réalisé le 19 octobre 2016. Il est indiqué dans le constat d’huissier : « les travaux ont débuté en janvier 2016, que par la suite la société Valentin Despierre a quitté le chantier sans avoir terminé les travaux ».

Le rapport d’audit précise : « En partant de l’hypothèse que l’entreprise Despierre ait attendu l’acceptation du crédit par SOFINCO et que cette acceptation ne soit intervenue après et que le délai de rétractation n’ait pas été pris en compte : cela représente une date de fin de travaux dans la première quinzaine de février 2016 dans le meilleur des cas. Sans tenir compte de la période entre Noël et le 1er janvier. Néanmoins, le déblocage des fonds de la totalité du crédit a été effectué le 5 janvier 2017, permettant à la société Despierre de percevoir directement cette somme. Aucun document ne porte date du commencement du chantier. Les échanges (sms, courriels, appels l) attestent que les travaux n’ont commencé que mi-janvier 2016 ».

Le constat d’huissier et le rapport d’audit font état de désordres et de malfaçons affectant les travaux effectués par la SARL Valentin Despierre.

Entre la date de la signature du contrat de crédit, soit le 3 novembre 2015 et la date du procès-verbal de réception et de la demande de financement, soit le 5 janvier 2016, il n’y a que 8 semaines. Or, il est mentionné dans le contrat de crédit affecté, un délai de 12 semaines pour la réalisation des travaux. Il s’agissait de travaux importants, à savoir des travaux de plâtrerie, d’isolation, de cloisonnement et de second ‘uvre, il n’est donc pas possible qu’au 5 janvier 2016, les travaux étaient achevés, d’autant plus qu’il y avait la période de fêtes de fin d’année.

Ainsi, en débloquant les fonds en janvier 2016 en se fondant uniquement d’un procès-verbal de réception faisant état des travaux d’une entreprise qui ne figurait pas dans le contrat principal litigieux et d’une demande de financement du 5 janvier 2016, la société SA CA Consumer Finance ne s’était pas assurée de l’exécution complète des travaux et a donc commis une faute.

Si les fautes commises par la banque sont caractérisées, il appartient à M. et Mme [J] de démontrer le lien de causalité entre celles-ci et le préjudice qu’ils invoquent. Ils affirment subir les malfaçons dont sont grevés les travaux et qu’ils doivent payer les travaux de reprise, d’un montant de 52 000 euros, montant évalué par le rapport d’audit. Or, s’ils démontrent l’existence de ce préjudice, qui est réel, il ne se rattache pas aux fautes de la banque dans le déblocage irrégulier des fonds réalisé en janvier 2016. Il se rattache exclusivement aux manquements contractuels de la SARL Valentin Despierre.

Dès lors, M. et Mme [J] échouent à démontrer le lien de causalité entre le dommage subi par eux et les fautes reprochées à la banque. Celle-ci conserve donc son droit au remboursement du capital du prêt.

M. et Mme [J] seront déboutés de leur demande tendant à voir la banque privée de son droit à restitution du capital et aux intérêts et seront condamnés à lui verser le solde du capital restant dû déduction faite de la part du capital correspondant aux échéances acquittées au jour du présent arrêt.

En conséquence, par le jeu des restitutions, il en résulte que M. et Mme [J] doivent reverser à la SA CA Consumer le solde du capital emprunté, déduction faite de la part du capital versé dans les échéances acquittées, tandis que cette dernière doit pour sa part lui faire retour de la part des intérêts comprise dans les échéances du prêt déjà acquittées.

La demande de condamnation de la SA CA Consumer à payer des dommages et intérêts à M. et Mme [J] est donc rejetée.

La demande de la SA CA Consumer Finance à ordonner à M. et Mme [J] de poursuivre le règlement des échéances du prêt est rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé de ce chef.

La société SA CA Consumer Finance est condamnée aux entiers dépens et à payer à M. et Mme [J] la somme de 3 000 euros, au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 22 novembre 2022 en ce qu’il a :

débouté M. et Mme [J] de l’ensemble de leurs demandes ;

condamné M. et Mme [J] solidairement aux dépens ;

débouté M. et Mme [J] ainsi que la société CA Consumer Finance Département Sofinco de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DÉCLARE irrecevable l’action initiée par M. et Mme [J], par acte d’huissier du 25 mai 2018, à l’encontre de Me [T] [I], en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Valentin Despierre,

ANNULE le devis n° DE00034 du 28 octobre 2015 et le bon de commande du 3 novembre 2015 conclus entre M. [B] [J] et la SARL Valentin Despierre ;

CONSTATE la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 3 novembre 2015 entre M. et Mme [J] d’une part, et la société SA CA consumer Finance département Sofinco, d’autre part,

CONDAMNE M. et Mme [J] à restituer à la société SA CA CONSUMER Finance département Sofinco le capital emprunté d’un montant de 41 374,47 euros, sous déduction de l’ensemble des sommes versées par M. et Mme [J] à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit,

REJETTE les demandes de dommages et intérêts formulées à l’encontre de la SA CA Consumer Finance département Sofinco,

CONDAMNE la société SA CA Consumer Finance aux entiers dépens, engagés en première instance et en appel,

CONDAMNE la société SA CA Consumer Finance à payer à M. et Mme [J] la somme de 3 000 euros, au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et en appel.

Le greffier

Anaïs Millescamps

La présidente

Catherine Courteille


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