Les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi, conformément aux articles 1134 et 1135 du Code civil, qui stipulent que les obligations contractuelles engendrent des devoirs d’information et de conseil, notamment lorsque l’une des parties est un professionnel et l’autre un non-professionnel. L’article L. 111-1 du Code de la consommation impose au professionnel de fournir au consommateur les caractéristiques essentielles du bien ou du service avant la conclusion du contrat. En cas de manquement à ces obligations, le professionnel peut être tenu responsable des préjudices subis par le non-professionnel, comme le précise l’article 1147 du Code civil, qui établit la responsabilité contractuelle en cas de non-exécution des obligations. La jurisprudence, notamment l’arrêt du 28 février 1987 de la Cour de cassation, souligne que le professionnel doit informer le client des modifications réglementaires affectant l’exécution du contrat, et il lui incombe de prouver qu’il a satisfait à ses devoirs d’information et de conseil.
|
L’Essentiel : Les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi, conformément aux articles 1134 et 1135 du Code civil, qui stipulent que les obligations contractuelles engendrent des devoirs d’information et de conseil. L’article L. 111-1 du Code de la consommation impose au professionnel de fournir au consommateur les caractéristiques essentielles du bien ou du service avant la conclusion du contrat. En cas de manquement à ces obligations, le professionnel peut être tenu responsable des préjudices subis par le non-professionnel.
|
Résumé de l’affaire :
Contexte de l’affaireLe 8 novembre 1993, un syndicat de copropriétaires a signé un contrat d’assistance technique avec une société spécialisée pour l’entretien des installations de production d’eau glacée de l’immeuble. Un avenant a été ajouté en juin 1996 pour étendre les prestations de maintenance. Défaillances constatéesEn février 2017, un audit énergétique a révélé des défaillances de la société prestataire. Le syndicat a alors résilié le contrat, jugeant le coût des services disproportionné par rapport à leur qualité. Procédures judiciairesLe 23 novembre 2017, le syndicat a assigné la société Dalkia, qui avait repris les droits de la société prestataire, en référé. Une expertise judiciaire a été ordonnée, et le syndicat a ensuite assigné la société Dalkia devant le tribunal judiciaire de Perpignan en juillet 2021. Jugement du tribunalLe 22 novembre 2022, le tribunal a débouté le syndicat de sa demande de dommages et intérêts et l’a condamné à payer des frais à la société Dalkia. Le syndicat a fait appel de cette décision en avril 2023. Prétentions des partiesLe syndicat demande à la cour de réformer le jugement, d’homologuer le rapport d’expertise, et de déclarer la société Dalkia responsable des préjudices subis. La société Dalkia, quant à elle, conteste toute responsabilité et demande la confirmation du jugement initial. Éléments factuels et obligations contractuellesLe contrat initial stipulait que la société devait informer le syndicat des problèmes rencontrés. L’expertise a révélé que la société n’avait pas respecté ses obligations d’information concernant l’obsolescence des installations. Responsabilité de la société DalkiaLa société Dalkia a soutenu qu’elle avait respecté ses obligations contractuelles et que les problèmes d’obsolescence étaient survenus après la conclusion du contrat. Cependant, la cour a estimé qu’elle aurait dû informer le syndicat des évolutions réglementaires affectant le contrat. Décision de la courLa cour a infirmé le jugement initial et a condamné la société Dalkia à verser au syndicat des copropriétaires une somme pour les préjudices subis, ainsi qu’à supporter les dépens de la procédure. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de l’obligation d’information et de conseil du professionnel envers le non-professionnel ?L’obligation d’information et de conseil du professionnel envers le non-professionnel est fondée sur les articles 1134 et 1135 du Code civil, qui stipulent que les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi. Ces articles précisent que les obligations contractuelles ne se limitent pas à ce qui est expressément mentionné dans le contrat, mais incluent également toutes les conséquences que l’équité, l’usage ou la loi peuvent imposer selon la nature de l’obligation. En outre, l’article L. 111-1 du Code de la consommation impose au professionnel vendeur de biens ou prestataire de services de fournir au consommateur, avant la conclusion du contrat, les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Il est donc établi que le professionnel doit fournir un ensemble d’informations et de conseils tant avant la souscription du contrat qu’en cours d’exécution de celui-ci, afin de garantir que le non-professionnel puisse prendre des décisions éclairées. Quel est le rôle de l’expertise judiciaire dans ce litige ?L’expertise judiciaire, ordonnée par le juge des référés, a pour but d’évaluer les manquements de la société Dalkia, venant aux droits de la société Somesys, dans l’exécution de ses obligations contractuelles. Le rapport d’expertise, déposé par l’expert, a mis en lumière plusieurs éléments cruciaux. Il a notamment constaté que les prestations convenues dans le contrat initial de 1993 étaient indispensables et auraient pu suffire, tandis que l’avenant de 1996, qui a étendu les prestations, n’était pas nécessaire et s’est révélé inapproprié. L’expert a également souligné que la société Somesys n’a pas fourni d’informations suffisantes au syndicat concernant l’évolution de la réglementation, ce qui a eu un impact direct sur la capacité du syndicat à prendre des décisions éclairées concernant l’entretien et le remplacement des installations. Ainsi, l’expertise a permis d’établir un lien de causalité entre les manquements de la société Somesys et le préjudice subi par le syndicat, renforçant ainsi la demande de réparation formulée par ce dernier. Quel est l’impact de la réglementation européenne sur le contrat d’entretien ?La réglementation européenne, notamment le règlement n°2037/2000, a eu un impact significatif sur le contrat d’entretien entre le syndicat et la société Somesys. Cette réglementation a programmé l’élimination des fluides frigorigènes de type HCFC, dont le R22, avec des étapes précises : l’arrêt de production des appareils utilisant ce fluide à partir de 2004, l’arrêt de production du fluide R22 vierge pour la maintenance en 2010, et l’arrêt définitif de la fourniture de ce fluide en 2015. Il en résulte que, dès 2000, la société Somesys aurait dû s’interroger sur la viabilité du contrat de type P3, qui devenait obsolète en raison de l’évolution de la réglementation. Le fait de ne pas informer le syndicat des conséquences de cette réglementation sur l’exécution du contrat constitue un manquement à son obligation d’information, ce qui a conduit à des préjudices financiers pour le syndicat, qui n’a pas pu anticiper le coût du remplacement de ses installations. Quel est le principe de la charge de la preuve en matière d’obligation d’information ?En matière d’obligation d’information, le principe de la charge de la preuve repose sur le professionnel, qui doit démontrer qu’il a satisfait à ses devoirs de conseil et d’information envers le non-professionnel. Cela signifie que la société Dalkia, en tant que professionnelle, devait prouver qu’elle avait bien informé le syndicat des copropriétaires des risques liés à l’obsolescence des installations et des conséquences de la réglementation sur le contrat. Le rapport d’expertise a révélé que la société Somesys n’avait pas fourni d’éléments probants démontrant qu’elle avait respecté cette obligation d’information. Ainsi, le manquement à cette obligation a été établi, ce qui a conduit à la reconnaissance de la responsabilité de la société Dalkia dans le préjudice subi par le syndicat. Quel est le montant des dommages et intérêts réclamés par le syndicat et sur quel fondement ?Le syndicat des copropriétaires a réclamé un montant de 130 000 € en réparation de ses préjudices, ainsi que des sommes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, s’élevant à 10 000 € en première instance et 5 000 € en appel. Cette demande de dommages et intérêts est fondée sur l’article 1147 du Code civil, qui stipule que le débiteur d’une obligation est tenu de réparer le préjudice causé par son manquement à cette obligation. Le syndicat a démontré qu’il avait exposé des frais importants en raison des manquements de la société Dalkia, notamment en ce qui concerne le coût des prestations de maintenance et le remplacement des installations, qui n’auraient pas été nécessaires s’il avait été correctement informé des risques liés à l’obsolescence des équipements. Ainsi, le montant réclamé vise à compenser les pertes financières subies par le syndicat en raison de l’absence d’information et de conseil de la part de la société Dalkia. |
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 27 FEVRIER 2025
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 23/01935 – N° Portalis DBVK-V-B7H-PZEA
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 22 novembre 2022
Tribunal judiciaire de PERPIGNAN
N° RG 21/01739
APPELANTE :
Syndic. de copro. Résidence Espace Méditérranée-Bureaux représenté par son syndic en exercice, la SAS Foncia Roussillon, prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Philippe NESE de la SELARL NESE, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant
INTIMEE :
S.A Dalkia – S.A. au capital social de 220 047 504 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LILLE METROPOLE sous le n°456.500.537, prise en la personne de son directeur général,
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, substituant sur l’audience Me Pascal CERMOLACCE de la SELARL CABINET CERMOLACCE-GUEDON, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 décembre 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
M. Philippe BRUEY, Conseiller
Mme Marie-José FRANCO, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, prévue le 13 février 2025 et prorogée au 27 février 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.
* *
FAITS ET PROCÉDURE
1- Le 8 novembre 1993, le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence « Espace Méditerranée ‘ Bureaux » (ci-après le syndicat) a conclu un contrat d’assistance technique portant l’entretien des installations de production d’eau glacée des bureaux de l’immeuble avec la S.A Somesys.
2- Un avenant au contrat du 6 juin 1996 (dit contrat P3) est venu étendre les prestations de ladite société.
3- En février 2017, le syndicat a sollicité la réalisation d’un audit énergétique non-contradictoire qui a fait état de défaillances de la société Somesys.
Le syndicat a alors notifié à la société Somesys la résiliation de leur contrat à compter du 30 septembre 2017, estimant que le coût de la prestation était disproportionné au vu de sa qualité.
4- Le 23 novembre 2017, le syndicat a assigné en référé la société Dalkia, venant aux droits de la société Somesys.
Par ordonnance du 21 février 2018, le juge des référés a ordonné une mesure d’expertise judiciaire confiée à Mme [E], qui a déposé son rapport le 21 janvier 2019.
5- C’est dans ce contexte que par acte d’huissier de justice du 8 juillet 2021, le syndicat a assigné la société Dalkia devant le tribunal judiciaire de Perpignan.
6- Par jugement du 22 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Perpignan a :
– Débouté le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence «Espace Méditerranée ‘ Bureaux » de sa demande de dommages et intérêts,
– Condamné le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence «Espace Méditerranée ‘ Bureaux » à payer à la société Dalkia la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
– Débouté le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence «Espace Méditerranée ‘ Bureaux » de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamné le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence «Espace Méditerranée ‘ Bureaux » aux entiers dépens,
– Constaté l’exécution provisoire de droit du présent jugement.
7- Le syndicat a relevé appel de ce jugement le 12 avril 2023 (soit presque 6 mois après le jugement).
PRÉTENTIONS
8- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 15 novembre 2023, le syndicat demande en substance à la cour, au visa des articles 1103, 1104, 1112, 1112-1 et 1194 du Code civil (1134 et 1135 ancien) et L.111-1 du Code de la consommation, de:
– Réformer en totalité le jugement du tribunal judiciaire de Perpignan du 22 novembre 2022,
Statuant à nouveau,
– Homologuer le rapport d’expertise de Mme [E],
– Déclarer la société Dalkia responsable des préjudices subis par le syndicat des copropriétaires de la résidence « Espace Méditerranée-Bureaux » pour manquement à son obligation d’information et de conseil en application de l’article 1147 du Code Civil (article 1231-1 nouveau du code civil),
– Condamner en conséquence la société Dalkia à lui payer :
> La somme de 130 000 € en réparation de ses préjudices avec intérêts légaux à compter de l’acte introductif d’instance,
> La somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile en première instance outre 5 000 € en cause d’appel,
Très subsidiairement, si la Cour ne s’estimait pas assez informée, au visa des articles 143 et 144 du Code de procédure civile,
– Ordonner une mesure d’expertise financière à l’effet de déterminer et chiffrer le coût du maintien du contrat P3 de 2007 à 2017, le surcoût du prix de remplacement des groupes de froid entre 2007 et 2018 et le manque à gagner en terme d’économie d’énergie électrique entre 2007 et 2018,
– Débouter la société Dalkia de toutes ses demandes,
– Condamner la société Dalkia aux entiers dépens en ce compris les frais de référé et d’expertise judiciaire de Mme [E] dont distraction au profit de la SELARL Nese, avocat, dans les formes et conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.
9- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 8 novembre 2023, la société Dalkia demande en substance à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du Code Civil, de :
– Juger que la société Somesys, à laquelle vient aux droits la société Dalkia, a parfaitement exécuté les obligations mises à sa charge au titre du contrat liant les parties ;
En conséquence,
– Confirmer purement et simplement le jugement entrepris dans l’ensemble de ses dispositions hormis en ce qu’il a jugé que la société Dalkia était responsable d’un manquement à son devoir de bonne foi au titre de l’information de l’obsolescence programmée des installations et, en conséquence, l’infirmer sur ce point,
Statuant à nouveau,
– Juger que la société Dalkia n’a pas manqué à une quelconque obligation d’information au titre de l’obsolescence programmée des installations,
En conséquence,
– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté le syndicat de sa demande de dommages et intérêts, l’a condamné à payer à la société Dalkia la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, l’a débouté de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et l’a condamné aux enters dépens,
– Débouter purement et simplement le syndicat de sa demande d’expertise financière,
Y ajoutant,
– Condamner le syndicat à verser à la société Dalkia la somme de 5000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédue civile ainsi qu’aux entiers dépens conformément aux dispositions des articles 695 et suivants du Code de procédure civile.
10- Vu l’ordonnance de clôture en date du 13 novembre 2024.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
11- Il résulte des articles 1134 et 1135 du code civil dans leur rédaction alors en vigueur que les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi et qu’elles obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature.
Selon l’article L. 111-1 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à compter du 27 juillet 1993, tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
Il est constant au visa des articles 1134 et 1135 ancien du code civil que le professionnel sachant doit au non-professionnel ignorant un ensemble d’information et de conseil tant avant la souscription du contrat qu’en cours d’exécution de celle-ci. Ainsi, il est jugé par arrêt du 28 février 1987 n°87-14731 de la première chambre civile de la Cour de cassation qu’un contrat d’entretien d’une installation soumise à réglementation oblige celui qui y a procédé à informer le client des modifications intervenues dans celle-ci de manière à lui permettre de les respecter, sauf à manquer à son obligation de renseignements…
Tout au long de l’exécution contractuelle, le professionnel reste débiteur envers le non-professionel d’un devoir de conseil portant sur le fait pertinent et utile qui n’est pas connu de tous.
C’est enfin au professionnel qu’il appartient de démontrer qu’il a satisfait aux devoirs de conseil et d’information dont il est débiteur envers le non-professionnel.
12- Une bonne lecture du dossier nécessite de rappeler les éléments factuels suivant dans leur ordre chronologique :
– 8 novembre 1993 : signature du contrat d’assistance technique, de type P2, entre le syndicat et la société Somesys ayant pour objet l’entretien des installations de production des eaux glacées des bureaux de l’immeuble, consistant en la maintenance périodique des matériels listés (cinq visites par an sur les installations de climatisation, une visite par an sur les caissons de VMC), stipulant notamment qu’au titre de l’assistance technique, l’entreprise doit informer le client des problèmes rencontrés (rapport) et pourra également suggérer des solutions d’amélioration de l’installation.
– 6 juin 1996 : signature de l’avenant concernant des prestations de maintenance du matériel de type P3 étendant les prestations de maintenance de la pompe à chaleur à des visites mensuelles et étendant les prestations à la prise en charge en garantie totale du matériel listé en annexe (prestations dites de type P3).
– règlement européen n°2037/2000 du 29 juin 2000 relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, programmant l’élimination du fluide frigorigène de type HCFC (fluide R22) à compter du 1er janvier 2015 avec les étapes suivantes : 2004, arrêt de production des appareils utilisant le fluide R22 ; 2010 : arrêt de production du fluide R22 vierge pour la maintenance ; 2015 : arrêt de fourniture du fluide R22.
– publication au journal officiel du 10 juillet 2007 d’un avis destiné aux détenteurs d’équipements de réfrigération et de climatisation contenant de HCFC dont le R22 rappelant les étapes du règlement européen et préconisant des actions de conversion ou de remplacement dès aujourd’hui.
13- Il n’est pas sérieusement contestable que le société Somesys est un professionnel spécialisé en matière d’installations de chauffage et climatisation tandis que le syndicat est profane en la matière.
14- Du rapport d’expertise de Mme [E], dont les travaux précis, circonstanciés et dépourvus d’équivoque méritent une pleine approbation, il ressort que :
* les prestations convenues en 1993 de type P2 pour un coût de 21 600 € pour une durée de 3 ans étaient indispensables et auraient pu être suffisantes. Le contrat de type P3 (extension des prestations de maintenance à une visite mensuelle faisant passer le contrat initial de 21 600 € HT à 34 234 € HT et ajoût d’une garantie totale du matériel pour un montant annuel de 35 620 € HT) n’était pas indispensable et s’est révélé rapidement (2000) non approprié.
* la réglementation a eu pour effet d’entraîner une augmentation significative du prix du R22, la fourniture du fluide se raréfiant et un risque augmenté de devoir arrêter une installation pour des problèmes de livaison d’un fluide devenu rare.
* la société Somesys n’a pu fournir à l’expert les éléments qui prouveraient qu’elle a informé le syndicat avec suffisamment d’avance, seul un devis non détaillé d’avril 2014 (soit 8 mois avant l’interdiction d’utilisation) et un courriel d’août 2015 par lequel la société intérrogeait le syndic alors en place sur les avancées au sujet du remplacement des groupes de climatisation.
* entre 2009 et 2017, à travers les bilans comptables et les factures de Somesys, le syndicat a versé 150 592,04 € HT à la société Somesys dont 76 036,75 € HT au titre de la partie P3 du contrat qui servait uniquement à la garantie de remplacement des machines, somme qui correspond en grande partie au prix de remplacement des groupes froids.
* depuis 2007, il était inutile d’investir dans un contrat de garantie de renouvellement de machines qui ne pourraient être remplacées en cas de panne. L’argent mis dans le contrat de maintenance pour le surcoût du contrat P3 aurait permis de provisionner une grande partie des sommes pour le remplacement des machines.
15- La société Dalkia venant aux droits de la société Somesys conteste toute responsabilité s’agissant de l’utilité de l’avenant de type P3, soulignant que la reglementation européenne est postérieure à la conclusion du contrat, laquelle était appropriée à l’époque puisque les machines pouvaient être remplacées en cas de panne.
Elle fait valoir les termes du contrat de 1993 selon lequel il est stipulé qu’elle pouvait simplement suggérer des solutions d’amélioration de l’installation pour exclure tout engagement au titre d’une obligation d’information. En l’absence de preuve de problèmes rencontrés sur les installations, elle n’était pas tenue d’une telle obligation. Elle dénie toute responsabilité au titre de l’information de l’obsolesence programmée de l’installation dès lors qu’en fin de contrat, le matériel était en bon état de fonctionnement et la société n’étant pas responsable de l’évolution technique de ce denier, la prestation P3 obligeant seulement au remplacement du matériel en cas de panne. Elle a effectué en 2014 et 2015 des devis aux fins de changer le groupe froid et le caisson d’extraction, la proposition de tels devis ne relevant pas des dispositions contractuelles. Sans plus de développement, elle approuve les premiers juges d’avoir exclu sa responsabilité au titre du conseil de provisionnement. Elle conteste enfin le préjudice allégué en soulignant que faire droit à la réclamation du syndicat reviendrait à lui rembourser son intervention totale pendant 12 ans alors qu’elle a parfaitement respecté le contrat et a rendu les machines en l’état où elles se trouvaient sans aucun dysfonctionnement.
16- La cour peut convenir avec la société que lors de la souscription de l’avenant de 1996, la prestation P3 n’était pas inappropriée en ce qu’elle apportait une garantie de prise en charge totale du matériel en situation de maintenance dont le surcoût a été librement consenti par le syndicat.
17- La société se devait en revanche de s’interroger dès 2000, date du règlement européen, sur le devenir et l’utilité d’un tel contrat qui, à terme, rendait l’installation obsolète et partant le contrat de type P3 qu’elle ne pourrait plus honorer dès 2004 en raison de l’arrêt de production de appareils utilisant le fluide R22, le contrat ne pouvant recevoir qu’une exécution partielle à compter de cette date en ce qui concerne l’alimentation en fluide R22, rendue encore plus difficile à partir de 2010 par l’arrêt de la production de ce fluide et définitivement impossible à partir de 2015.
18- Détentrice en sa qualité de professionnelle des informations déterminantes quant à l’évolution de la réglementation technique, qui devenaient des informations essentielles à la poursuite voire à la survie du contrat, elle se devait d’en informer son client profane qui pouvait alors déterminer les mesures seules appropriées, à savoir provisionner le coût de remplacement de son installation de climatisation.
Ainsi, à partir de 2004, la société Somesys savait qu’elle se trouvait dans l’impossibilité d’assurer l’exécution du contrat de type P3, lequel n’était plus approprié, et n’en a pas informé le syndicat, préférant poursuivre le contrat au prix fort alors qu’elle se savait dans l’impossibilité de l’exécuter en cas de nécessité de renouveler les machines, ne pouvant s’abriter, comme elle le fait, sur le fait que cette situation ne s’est pas présentée en l’absence de dysfonctionnement.
19- Ce n’est au mieux que huit mois avant l’interdiction définitive d’utiliser toute installation utilisant le fluide R22 que la société aurait adressé au syndicat, qui conteste l’avoir reçu, un devis peu détaillé qui en toute hypothèse n’a pas permis au syndicat de prendre les mesures appropriées de remplacement de l’installation de climatisation dans des circonstances de temps propices à une décision réfléchie et nécessairement moins onéreuse si elle avait pu intervenir auparavant.
20- Les manquements commis par la société Somesys dans ses obligations d’exécution loyale et de bonne foi du contrat de 1996 alors qu’elle connaissait les informations déterminantes du maintien du consentement du syndicat et sans soutenir qu’elles pouvaient être connues par tous à partir au moins de 2007, sont en lien causal avec le préjudice subi par le syndicat. Entre 2007 et 2017, date à laquelle la résiliation du contrat a été notifiée par le syndicat, celui-ci a exposé en vain, la prestation de type P3 ne pouvant plus être exécutée, une somme de 95 045,94 € HT, soit 114 055,13€ TTC, étant entendu que le syndicat n’est pas assujeti à la TVA et ne la récupère donc pas, peu important au demeurant que la société Somesys ait assuré en partie le contrat en ses obligations de visite annuelle dont elle ne justifie pas de surcroît.
21- Le surplus du préjudice n’est pas justifié.
22- La société Dalkia, partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile, supportera les dépens de première instance, en ceux compris les frais de référé et d’expertise, et d’appel, avec application des dispositions de l’article 699 du même code, l’infirmation du jugement inversant la charge de l’article 700 du même code.
Statuant contradictoirement,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Dalkia à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Espace Méditerranée-Bureaux la somme de 114 055,13 € TTC.
Condamne la société Dalkia aux dépens de première instance et d’appel, y compris les frais de référé et d’expertise, distraits au profit de la SELARL Nese, sur son affirmation de droit.
Condamne la société Dalkia à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Espace Méditerranée-Bureaux la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et celle de 5 000 € en appel sur le même fondement.
Le Greffier Le Président
Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?