Nullité de l’assignation et conséquences sur le contrat de bail

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Nullité de l’assignation et conséquences sur le contrat de bail

La signification d’un acte de procédure doit être effectuée conformément aux articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile, qui imposent que la signification soit faite à personne, et en cas d’impossibilité, à domicile ou à résidence, avec des diligences suffisantes pour vérifier l’adresse du destinataire. L’insuffisance de ces diligences constitue un vice de forme, entraînant la nullité de la signification si elle cause un grief, conformément à l’article 114 du même code. En l’espèce, l’absence de vérifications adéquates par le commissaire de justice a conduit à une irrégularité dans la signification de l’assignation, privant ainsi les destinataires de la possibilité de se défendre, ce qui justifie l’annulation de l’assignation et des actes subséquents.

L’Essentiel : La signification d’un acte de procédure doit être effectuée conformément aux articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile, imposant qu’elle soit faite à personne ou, en cas d’impossibilité, à domicile ou à résidence. L’insuffisance des diligences pour vérifier l’adresse du destinataire constitue un vice de forme, entraînant la nullité de la signification si elle cause un grief. L’absence de vérifications adéquates par le commissaire de justice a conduit à une irrégularité, privant les destinataires de la possibilité de se défendre.
Résumé de l’affaire :

Exposé du Litige

Par acte sous seing privé en date du 13 juillet 2021, un bailleur a donné à bail d’habitation à un preneur et à une preneuse un appartement pour un loyer mensuel de 653,97 euros, outre 91 euros de provisions sur charges.

Commandement de Payer

Par acte de commissaire de justice en date du 3 janvier 2022, le bailleur a délivré un commandement de payer la somme de 3 899,70 euros, en principal, au titre d’un arriéré locatif, visant la clause résolutoire contenue au contrat de bail.

Assignation en Référé

Par acte de commissaire de justice en date du 12 mai 2022, le bailleur a assigné le preneur et la preneuse devant le juge des contentieux de la protection, demandant la constatation de la clause résolutoire, l’expulsion des preneurs, le refus de tout délai de grâce, et le paiement des loyers et charges impayés.

Ordonnance du Juge

Par ordonnance en date du 1er décembre 2022, le juge a constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies et a ordonné aux preneurs de libérer les lieux dans un délai de quinze jours, sous peine d’expulsion.

Appel des Preneurs

Le preneur et la preneuse ont interjeté appel de cette décision le 25 avril 2024, demandant l’annulation de l’assignation en référé et de l’ordonnance du juge, ainsi que le déboutement du bailleur de ses demandes.

Arguments des Preneurs

Les preneurs soutiennent que l’ordonnance de référé doit être annulée en raison de la nullité de l’acte introductif d’instance, invoquant des irrégularités dans la signification de l’assignation et l’absence de notification adéquate.

Arguments du Bailleur

Le bailleur demande à la Cour de confirmer l’ordonnance, arguant que les diligences du commissaire de justice étaient suffisantes et que les preneurs n’ont pas justifié d’une résiliation du contrat de bail.

Décision de la Cour

La Cour a annulé l’assignation en référé signifiée aux preneurs, déclarant nulle l’ordonnance rendue par le juge, et a condamné le bailleur à verser une somme aux preneurs pour les frais exposés en appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la nullité de l’assignation en référé ?

La nullité de l’assignation en référé du 12 mai 2022 repose sur les dispositions des articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile.

Selon l’article 654, la signification doit être faite à personne. Si cela s’avère impossible, l’article 655 permet une signification à domicile ou à résidence, à condition que le commissaire de justice relate les diligences effectuées pour tenter de signifier à la personne concernée.

L’article 656 précise que si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l’acte, la signification est faite à domicile, avec un avis de passage à laisser.

En l’espèce, le commissaire de justice a mentionné que la signification à personne était impossible, mais cette mention était insuffisante.

En effet, le contrat de bail comportait des coordonnées permettant de vérifier l’adresse des destinataires, ce qui n’a pas été fait.

Ainsi, l’absence de diligences suffisantes pour permettre une délivrance de l’assignation à personne cause un grief aux appelants, qui n’ont pas pu se défendre.

Par conséquent, l’assignation en référé doit être annulée, entraînant la nullité de tous les actes et décisions qui en découlent.

Quel est l’impact de la nullité de l’assignation sur l’ordonnance rendue ?

La nullité de l’assignation en référé a un impact direct sur l’ordonnance rendue le 1er décembre 2022 par le juge des contentieux de la protection.

En effet, selon le principe énoncé dans l’article 562 du code de procédure civile, lorsque l’appel tend à l’annulation d’une décision, la dévolution s’opère pour le tout.

Cela signifie que si l’acte introductif d’instance est entaché d’irrégularité, l’appel est, en principe, dépourvu d’effet dévolutif.

Dans ce cas, la cour ne peut pas statuer sur les demandes de condamnation au paiement de loyers et de dommages et intérêts présentées par le bailleur.

Ainsi, la nullité de l’assignation entraîne ipso facto la nullité de l’ordonnance, ce qui annule toutes les décisions qui en découlent.

Cela souligne l’importance de respecter les règles de procédure pour garantir le droit à un procès équitable.

Quel est le rôle de l’article 700 du code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement des frais exposés pour la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure judiciaire.

Dans cette affaire, le bailleur a été débouté de sa demande fondée sur cet article, ce qui signifie qu’il n’a pas réussi à prouver que ses frais étaient justifiés.

En revanche, la cour a condamné le bailleur à verser une somme de 1 500 euros aux locataires pour les frais exposés en appel, en application de l’article 700.

Cela reflète le principe selon lequel la partie qui succombe doit supporter les dépens, mais également que l’équité peut justifier une compensation pour les frais engagés par la partie gagnante.

Ainsi, l’article 700 joue un rôle crucial dans la répartition des frais de justice et dans la protection des droits des parties en litige.

Cette décision souligne l’importance de la bonne foi et de la diligence dans la conduite des procédures judiciaires.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 27 FEVRIER 2025

N° 2025/98

Rôle N° RG 24/05474 – N° Portalis DBVB-V-B7I-BM6JS

[I] [E]

[W] [N]

C/

[U] [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Alexis REYNE

Me Sébastien BADIE

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Juge des contentieux de la protection de MARSEILLE en date du 01 Décembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/03110.

APPELANTS

Monsieur [I] [E]

né le 20 Avril 1978 à [Localité 4],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Alexis REYNE de la SELARL AVOCATIA, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [W] [N]

née le 21 Novembre 1998 à [Localité 5],

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Alexis REYNE de la SELARL AVOCATIA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉ

Monsieur [U] [B]

né le 05 Novembre 1932 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Patrick ITEY de la SELARL CABINET PATRICK ITEY, avocat au barreau de MARSEILLE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Séverine MOGILKA, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mr Gilles PACAUD, Président

Mme Séverine MOGILKA, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Caroline VAN-HULST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Février 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Février 2025,

Signé par Mr Gilles PACAUD, Président et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE:

Par acte sous seing privé en date du 13 juillet 2021, monsieur [U] [B] a donné à bail d’habitation à madame [W] [N] et monsieur [I] [E] un appartement sis [Adresse 6] pour un loyer mensuel de 653,97 euros, outre 91 euros de provisons sur charges.

Par acte de commissaire de justice en date du 3 janvier 2022, monsieur [B] a fait délivrer à madame [N] et monsieur [E] un commandement de payer la somme de 3 899,70 euros, en principal, au titre d’un arriéré locatif, visant la clause résolutoire contenu au contrat de bail.

Par acte de commissaire de justice en date du 12 mai 2022, dénoncé à la préfecture des Bouches du Rhône le 19 mai suivant, monsieur [B] a fait assigner madame [N] et monsieur [E] , devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille, statuant en référé, aux fins de voir :

– constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 ;

– ordonner l’expulsion des preneurs et de tout occupant de leur chef avec le concours de la force publique et d’un serrurier si besoin est ;

– refuser tout délai de grâce ;

– condamner solidairement madame [N] et monsieur [E] à lui payer les loyers et charges impayés au 10 mai 2022, soit la somme de 7 257,42 euros ainsi qu’une indemnité d’occupation jusqu’à libération effective des lieux d’un montant mensuel égal au double du loyer et des charges, soit la somme de 1 489,94 euros ;

– condamner solidairement madame [N] et monsieur [E] à payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ceux compris le coût du commandement de payer. `

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 1er décembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille statuant en référé a :

– constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 13 juillet 2021 entre monsieur [B], madame [N] et monsieur [E] concernant le logement situé au [Adresse 6] étaient réunies à la date du 3 mars 2022 ;

– ordonné, en conséquence, à madame [N] et monsieur [E] de libérer les lieux et de restituer les clés dans un délai de quinze jours à compter de la signification de son ordonnance ;

– dit qu’à défaut pour madame [N] et monsieur [E] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, monsieur [B] pourrait, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de leur chef, conformément à l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

– rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

– condamné solidairement madame [N] et monsieur [E] à verser à monsieur [B], à titre provisionnel, la somme de 10.983,97 euros, décompte arrêté au 17 octobre 2022, incluant la mensualité d’octobre 2022, correspondant à l’arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation, avec les intérêts au taux légal sur la somme de 3 899,70 euros à compter du 3 janvier 2022 et à compter du prononcé de sa décision pour le surplus ;

– condamné solidairement madame [N] et monsieur [E] au paiement, à titre provisionnel, d’une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant correspondant au loyer actuel avec charge soit 744,97 euros à compter du 1er novembre 2022 et jusqu’à la date de la libération effective des lieux ;

– condamné solidairement madame [N] et monsieur [E] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer ;

– condamné solidairement madame [N] et monsieur [E] à verser à monsieur [B] une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rappelé que l’ordonnance est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Ce magistrat a, notamment, considéré que :

– la demande en résiliation est recevable ;

– le commandement de payer étant demeuré infructueux pendant plus de deux mois, la clause résolutoire figurant au contrat de bail est acquise ;

– les cotitulaires du contrat de bail sont tenus solidairement à la dette locative.

Par déclaration en date du 25 avril 2024, monsieur [E] et madame [N] ont interjeté appel de cette décision, l’appel portant sur toutes ses dispositions dûment reprises.

Par conclusions transmises le 14 août 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, monsieur [E] et madame [N] demandent à la Cour de:

– sur l’appel principal:

* à titre principal:

– annuler l’assignation en référé du 12 mai 2022, faute de signification conforme aux exigences prévues aux articles 655, 656, 657 et 658 du code de procédure civile;

Et par conséquent :

– annuler l’ordonnance rendue par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 2 décembre 2022 ;

* à titre subsidiaire :

– infirmer l’ordonnance rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille en date du 2 décembre 2022, en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

– débouter monsieur [B] de sa demande de constatation d’acquisition de la clause résolutoire et d’expulsion du logement sis [Adresse 6], comme étant sans objet ;

– débouter monsieur [B] de ses demandes de condamnations provisionnelles au titre de loyers et/ou indemnité d’occupation du logement sis [Adresse 6], comme étant sans objet, qui souffrent de contestations sérieuses ;

– débouter monsieur [B] de l’ensemble des demandes, fins et prétentions ;

* en tout état de cause:

– condamner monsieur [B] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

– sur l’appel incident :

– débouter monsieur [B] de l’ensemble des demandes, fins et prétentions formulées à titre d’appel incident, comme étant irrecevables, infondées et injustifiées.

Au soutien de leurs prétentions, monsieur [E] et madame [N] exposent, notamment, que:

* à titre principal:

– l’ordonnance de référé doit être annulée en raison de la nullité de l’acte introductif d’instance;

– l’assignation a été délivrée à étude sans mention par le commissaire de justice de diligences suffisantes pour tenter de les retrouver ou leur remettre l’acte en main propre ;

– le commissaire de justice disposait pourtant du numéro de téléphone et de l’adresse email du concluant et connaissait le lieu de travail de celui-ci ;

– le commissaire de justice n’a pu laisser un avis de passage en l’absence de mention du nom des concluants sur une boîte aux lettres de l’immeuble où est situé l’appartement ;

– ayant restitué les clés de l’appartement avant même d’avoir emmenagé en août 2022, la signification de l’assignation a été faite à une adresse que monsieur [B] savait fausse ;

– ces irrégularités leur causent griefs dans la mesure où ils n’ont pas été en mesure de se défendre ;

– le juge de l’excution du tribunal judiciaire de Marseille, par jugement du 18 juin 2024, a d’ailleurs considéré que la signification de l’ordonnance de référé était nulle et a annulé le commandement de payer signifié le 28 avril 2023 et la saisie attribution pratiquée le 5 mai 2023 suite à cette ordonnance, après avoir considéré que « les diligences effectuées par le commissaire de justice instrumentaire qui doit privilégier la signification à personne et peut effectuer une remise à personne en tout lieu, sont insuffisantes et que cette irrégularité cause incontestablement à M. [E] un grief » ;

* à titre subsidiaire:

– les conditions d’application de la clause résolutoire ne sont pas réunies dans la mesure où le commandement de payer n’a pas été signifié régulièrement pour des raisons similaires à celles invoquées pour la nullité de l’assignation ;

– ils n’ont jamais occupé les lieux en raison de l’importance des travaux à réaliser pour rendre le logement décent et ont restitué les clés ;

* sur l’appel incident:

– la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier présentée par monsieur [B] est nouvelle et doit donc être déclarée irrecevable;

– une telle demande est injsutifiée en l’absence de mauvaise foi des appelants.

Par conclusions transmises le15 juillet 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, monsieur [B] demande à la Cour de :

– débouter monsieur [E] et madame [N] de leur appel et confirmer l’ordonnance entreprise ;

* à titre principal :

– juger que les diligences des commissaires de justices ont été suffisantes et que les actes de procédure sont réguliers ;

– confirmer l’ordonnance de référé du 1er décembre 2022 ;

* titre subsidiaire: par application du pouvoir d’évocation de la cour :

– condamner solidairement monsieur [E] et madame [N] au paiement des loyers ayant couru entre la date d’effet du bail soit du 06 août 2021 au 18 janvier 2023, date du procès-verbal de reprise des lieux, auxquels s’ajouteront les frais d’huissier et les intérêts ;

* sur l’appel incident :

– condamner solidairement monsieur [E] et madame [N] à réparer le préjudice moral et financier de monsieur [B] et au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– condamner solidairement monsieur [E] et madame [N] au paiement de la somme de 3 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

A l’appui de ses prétentions, monsieur [B] fait valoir, notamment, que :

– le commissaire de justice a effectué les diligences d’usage pour signifier l’assignation à monsieur [E] et madame [N] ;

– les appelants ont signé un contrat de bail ainsi qu’un état de lieux et ont versé un dépôt de garantie ;

– ceux-ci ne démontrent pas avoir informer le bailleur ou son représentant de leur renonication à la location du logement ;

– dans un tel contexte, les diligences effectuées par le commissaire de justice apparaissent suffisantes ;

– en l’absence de preuve d’une résiliation du contrat de bail, monsieur [E] et madame [N] sont tenus par les termes du contrat ;

– ces derniers n’ont pas réglé les loyers dus et ne justifient pas d’une insalubrité des lieux ;

– la mauvaise foi des appelants lui cause préjudice.

L’instruction de l’affaire a été close par ordonnance en date du 6 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION:

– Sur la nullité de l’assignation en référé du 12 mai 2022:

Aux termes de l’article 654 du code de procédure civile, la signification doit être faite à personne.

En vertu de l’article 655 de ce code, si la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence; le commissaire de justice doit relater dans l’acte les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification ; la copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire ; la copie ne peut être laissée qu’à condition que la personne présente l’accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité ; le commissaire de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l’avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l’acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise.

Suivant les dispositions de l’article 656 du même code, si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l’acte et s’il résulte des vérifications faites par le commissaire de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, la signification est faite à domicile ; dans ce cas, le commissaire de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l’article 655 ; cet avis mentionne, en outre, que la copie de l’acte doit être retirée dans le plus bref délai à l’étude du commissaire de justice, contre récépissé ou émargement, par l’intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

En application de l’article 114 du code de procédure civile, l’insuffisance de mention des diligences du commissaire de justice constitue un vice de forme qui n’entraîne la nullité de la signification que sur la démonstration par celui qui l’invoque d’un grief.

En l’espèce, l’assignation en date du 12 mai 2022 dont il est sollicité la nullité a été signifiée à monsieur [E] et madame [N] à étude.

Une telle signification impose au commissaire de justice de procéder à des vérifications sur la réalité du domicile des destintaires, qui doivent être mentionnées dans l’acte.

A cette fin, le commissaire de justice a précisé dans son acte que la signification à personne, à domicile, s’est avérée impossible en raison de l’absence des destinataires lors de son passage et que l’adresse a été confirmée par un voisin.

Cependant, cette seule mention de la vérification de l’adresse par un voisin apparaît inusuffisante comme diligence pour vérifier l’adresse des destinataires.

Une telle insuffisante apparaît d’autant plus caractérisée que, d’une part, le contrat de bail comporte une adresse mail et un numéro de téléphone que monsieur [B] était en mesure de communiquer au commissaire de justice afin de vérifier l’adresse des destinataires de l’acte et d’autre part, que le commandement de payer en date du 3 janvier 2022, signifié à étude par le même commissaire de justice, mentionne la présence du nom des destinataires sur la boite aux lettres lors de son passage alors que tel n’est pas le cas lors de la délivrance de l’assignation.

L’acte de signification de l’assignation remis à étude est ainsi entaché d’une irrégularité qui est susceptible d’entraîner la nullité de l’acte dès lors que celle-ci cause un grief à monsieur [E] et madame [N] .

L’absence de diligences suffisantes pour permettre une délivrance de l’assignation à personne cause un grief indéniable aux appelants qui n’ont pu avoir connaissance de la procédure initiée par monsieur [B] et présenter une défense en première instance.

Par conséquent, l’assignation en référé signifiée le 12 mai 2022 à monsieur [E] et madame [N] doit être annulée.

Cette nullité entraîne ipso facto la nullité de tous les actes et décisions en découlant, et notamment de l’ordonnance rendue le 1er décembre 2022 par le juge du pôle de proximité du tribunal judiciaire de Marseille, statuant en référé.

– Sur la demande de réformation de l’ordonnance:

S’il résulte du dernier alinéa de l’article 562 du code de procédure civile que la dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel tend à l’annulation de la décision, il est admis que, dès lors que la demande d’annulation, sollicitée par l’appelant, procède d’une irrégularité affectant l’acte introductif d’instance devant le premier juge, l’appel est, en principe, dépourvu d’effet dévolutif. Cette exclusion de l’effet dévolutif concerne tous les actes d’irrégularité de l’acte introductif d’instance.

Subséquemment, la cour ne peut évoquer l’affaire et statuer sur les demandes de condamnation au paiement de loyers et de dommages et intérêts présentées par monsieur [B].

– Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens:

Monsieur [B], qui succombe, devra supporter la charge des dépens de première instance et d’appel.

En outre, l’équité commande de le condamner à verser à monsieur [E] et madame [N] la somme de 1 500 euros pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [B] sera débouté de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Annule l’assignation en référé signifiée le 12 mai 2022 à monsieur [I] [E] et madame [W] [N] ;

Déclare nulle et de nul effet l’ordonnance rendue le 1er décembre 2022 par le juge du pôle de proximité du tribunal judiciaire de Marseille, statuant en référé ;

Rappelle l’absence d’effet dévolutif de l’appel tendant à l’annulation de l’acte de saisine de la juridiction ;

Condamne monsieur [U] [B] à payer à monsieur [I] [E] et madame [W] [N] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute monsieur [U] [B] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne monsieur [U] [B] aux dépens de première instance et d’appel.

La greffière, Le président,


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