Le licenciement d’un salarié pour faute grave doit être justifié par des faits précis et sérieux, conformément aux articles L.1121-1 et L.1235-1 du Code du travail, qui stipulent que l’employeur doit prouver l’existence de la faute et que le doute doit profiter au salarié. La faute grave est définie comme une violation des obligations contractuelles ou légales d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. En cas de litige, le juge doit apprécier la régularité de la procédure disciplinaire et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur. De plus, selon l’article L.1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à des poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, sauf si ces faits ont donné lieu à des poursuites pénales dans le même délai. Les sanctions doivent également respecter le principe de proportionnalité, tel que prévu par l’article L.1152-2, qui protège les salariés contre les mesures prises en raison de leur dénonciation de harcèlement moral ou d’agissements illicites.
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L’Essentiel : Le licenciement pour faute grave doit être justifié par des faits précis et sérieux. L’employeur doit prouver l’existence de la faute, et le doute doit profiter au salarié. La faute grave est une violation des obligations contractuelles ou légales rendant impossible le maintien du salarié. En cas de litige, le juge apprécie la régularité de la procédure disciplinaire et le caractère réel des motifs. Aucun fait fautif ne peut donner lieu à des poursuites disciplinaires au-delà de deux mois après la connaissance des faits.
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Résumé de l’affaire :
Engagement et Arrêt MaladieUn gardien concierge a été engagé par contrat à durée indéterminée par le syndicat des copropriétaires d’un immeuble, à compter du 8 novembre 2010. À partir du 9 janvier 2019, il a été placé en arrêt maladie, qui a été renouvelé jusqu’à la rupture de son contrat de travail. Licenciement et ContestationLe gardien a saisi le conseil de prud’hommes pour diverses demandes salariales et l’annulation d’avertissements reçus. Il a été licencié pour faute grave par courrier du 11 août 2020, après ne pas s’être présenté à un entretien. Il a contesté ce licenciement devant le conseil de prud’hommes. Jugement du Conseil de Prud’hommesLe 27 juin 2022, le conseil a jugé que le licenciement était fondé sur un motif réel et sérieux, et a débouté le gardien de toutes ses demandes. Le syndicat des copropriétaires a également été débouté de sa demande reconventionnelle. Appel et Radiation de l’AffaireLe gardien a relevé appel de cette décision. Par la suite, une ordonnance a ordonné la radiation de l’affaire, mais le dossier a été réinscrit après la désignation d’un administrateur provisoire pour le syndicat des copropriétaires. Demandes en AppelDans ses dernières conclusions, le gardien a demandé à la cour de confirmer certaines décisions du conseil de prud’hommes tout en infirmant d’autres, notamment concernant le montant de son salaire et l’annulation des avertissements. Obligations de l’EmployeurLe gardien a soutenu que le syndicat des copropriétaires avait manqué à ses obligations en matière de prévoyance et de sécurité, ce qui a conduit à des demandes de dommages-intérêts pour manquement à ces obligations. Motifs de la Faute GraveLe syndicat des copropriétaires a justifié le licenciement par des faits graves, notamment la construction illégale de boxes dans les parties communes et la privatisation de celles-ci à des fins personnelles, mettant en danger la sécurité des copropriétaires. Décision de la Cour d’AppelLa cour a confirmé le jugement en ce qui concerne le licenciement, mais a annulé les avertissements et a condamné le syndicat des copropriétaires à verser des dommages-intérêts au gardien pour manquement à ses obligations de prévoyance. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique du licenciement pour faute grave ?Le licenciement pour faute grave est fondé sur les articles L.1121-1 et L.1152-2 du code du travail. L’article L.1121-1 stipule que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». L’article L.1152-2 précise que « aucune personne ayant subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou ayant, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements ne peut faire l’objet des mesures mentionnées à l’article L.1121-2 ». Ces articles établissent que l’employeur doit prouver l’existence d’une faute grave, qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Le doute doit profiter au salarié, et la faute grave doit résulter d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié, constituant une violation des obligations résultant du code du travail. Quel est le rôle de l’employeur dans l’obligation de sécurité ?L’article L.4121-1 du code du travail impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° des actions d’information et de formation ; 3° la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur doit veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. Dans le cas présent, l’employeur a été jugé avoir satisfait à son obligation de moyens en prenant des mesures nécessaires pour assurer la sécurité de son collaborateur, ce qui a été confirmé par le jugement. Quel est le cadre juridique des avertissements disciplinaires ?Les avertissements disciplinaires sont régis par les articles L.1331-1 et L.1333-2 du code du travail. L’article L.1331-1 définit une sanction comme « toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif ». L’article L.1333-2 stipule que le juge prud’homal peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou disproportionnée à la faute commise. Dans cette affaire, le premier avertissement a été annulé car il n’émanait pas de l’employeur, ce qui constitue une irrégularité de forme. Le second avertissement a été jugé disproportionné, car le salarié avait déposé son arrêt maladie dans un délai raisonnable. Quel est le régime de la prévoyance en matière de maintien de salaire ?L’article 30-1 de la convention collective, modifié par l’accord du 6 décembre 2013, prévoit que « en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident, dûment constatée, les salariés recevront 90 % de leur rémunération globale brute mensuelle contractuelle pendant 110 jours après 8 ans de présence dans l’entreprise ». Cette garantie s’entend déduction faite des allocations que l’intéressé perçoit de la sécurité sociale et des régimes complémentaires de prévoyance. L’employeur est subrogé dans les droits du salarié auprès de ces organismes. Dans ce cas, l’employeur a manqué à son obligation d’information, ce qui a conduit à un défaut de maintien de salaire durant l’arrêt maladie. Quel est le cadre juridique concernant le logement de fonction ?L’article 20 de la convention collective stipule que « la réfection des embellissements (peintures, revêtements muraux) dans le logement de fonction, incombant à l’employeur, interviendra tous les 5 ans si nécessaire, et au plus tard tous les 7 ans lorsque le logement comprend une pièce unique et tous les 10 ans dans les autres cas ». Dans cette affaire, le syndicat des copropriétaires a été jugé non responsable du manque d’entretien du logement de fonction, car le salarié n’a pas justifié avoir avisé l’employeur de la nécessité de cette réfection. Le jugement a confirmé que l’employeur n’avait pas commis de faute en matière d’entretien du logement. Quel est le principe de l’exécution déloyale du contrat de travail ?L’article L.1222-1 du code du travail stipule que « le contrat de travail est exécuté de bonne foi ». Dans cette affaire, le salarié a fait valoir une exécution déloyale de son contrat de travail en raison de la surcharge de travail et des agissements subis. Cependant, le tribunal a jugé que les griefs afférents à la surcharge de travail avaient déjà été examinés et rejetés, et que les doléances postérieures au licenciement ne concernaient pas l’exécution de la relation de travail. Ainsi, aucune exécution déloyale n’a été retenue. Quel est le cadre juridique de la prescription des faits fautifs ?L’article L.1332-4 du code du travail énonce qu’« aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance ». Il appartient à l’employeur d’apporter la preuve d’avoir connu les faits reprochés moins de 2 mois avant l’engagement de ses poursuites. Dans cette affaire, le tribunal a jugé que l’employeur avait suffisamment justifié avoir été avisé des faits reprochés dans le délai imparti, ce qui a permis de ne pas considérer ces faits comme prescrits. Le syndicat a donc pu engager des poursuites disciplinaires sur la base de faits non prescrits. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
Chambre sociale 4-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 FEVRIER 2025
N° RG 24/02554 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WYFA
AFFAIRE :
[X] [M]
C/
Me [R] [N] – Administrateur judiciaire de S.D.C. SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE DE L’ ORME
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Juin 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTMORENCY
N° Chambre :
N° Section : C
N° RG : F20/00055
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Vanessa DARGUEL
Me Julien SEMERIA de la SELARL 9 JANVIER
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT FEVRIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [X] [M]
né le 01 Août 1969 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentant : Me Vanessa DARGUEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1728
APPELANT
****************
Me [N] [R] –
Administrateur judiciaire de S.D.C. SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE [Adresse 11]
[Adresse 7]
[Localité 9]
S.D.C. SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE [Adresse 11] représenté par Maître [R] [N] de la SELARL [N] & ASSOCIES, ès qualité de syndic provisoire/administrateur provisoire
[Adresse 6]
[Localité 10]
Représentant : Me Julien SEMERIA de la SELARL 9 JANVIER, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 211 –
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Janvier 2025 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseillère chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Nathalie COURTOIS, Présidente,
Madame Véronique PITE, Conseillère,
Madame Odile CRIQ, Conseillère,
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
M. [X] [M] a été engagé par contrat à durée indéterminée, à compter du 8 novembre 2010, en qualité de gardien concierge, catégorie B coefficient 275, par le syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à [Localité 10], qui emploie moins de onze salariés et relève de la convention collective des gardiens concierges et employés d’immeubles.
A compter du 9 janvier 2019, M. [M] a été placé en arrêt maladie, renouvelé jusqu’à la rupture du contrat de travail.
Il a saisi le 31 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Montmorency, de diverses demandes salariales et indemnitaires, en poursuivant par ailleurs l’annulation des avertissements reçus.
Convoqué le 20 juillet à un entretien prévu le 3 août auquel il ne se présenta pas, M. [M] a été licencié par courrier du 11 août 2020, signifié le 17 août suivant, énonçant une faute grave.
Il a saisi de nouveau, le 31 décembre 2020, le conseil de prud’hommes en contestation de son licenciement.
Dans le dernier état de ses demandes, il entendait voir fixer le montant de son salaire, annuler les avertissements du 2 février 2018 et du 18 mai 2019, prononcer la nullité du licenciement et, à titre subsidiaire, requalifier son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et poursuivait le versement des indemnités afférentes en plus de dommages-intérêts de différents motifs, ce à quoi le syndicat de copropriétaires s’opposait.
Par jugement rendu le 27 juin 2022, et notifié le 23 août suivant, le conseil a statué comme suit :
Ordonne la jonction des instances répertoriées sous les numéros de registre général 20/55 et 20/597
Dit que le licenciement de M. [M] est fondé sur un motif réel et sérieux, constitutif d’une faute grave.
Déboute M. [M] de l’intégralité de ses demandes
Déboute le syndicat des copropriétaires de [Adresse 11], représenté par son syndic, le Cabinet Frequel [B] [Y] de sa demande reconventionnelle.
Met les dépens à la charge de M. [M]
Le 21 septembre 2022, M. [M] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Par ordonnance du 26 juin 2024, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la radiation de l’affaire.
Après la désignation par ordonnance du 19 avril 2024 du tribunal judiciaire de Pontoise de la société d’exercice libéral à responsabilité limitée [N] prise en la personne de Maître [N] en qualité d’administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires, le dossier a été réinscrit au rôle.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 4 octobre 2024, M. [M] demande à la cour de :
Le déclarer recevable et bien fondé en son appel
Confirmer le jugement entrepris en ce que le conseil de prud’hommes a :
Ordonné la jonction des instances répertoriées sous les numéros de registre général 20/55 et 20/597
Débouté le syndicat des copropriétaires de [Adresse 11], représenté par son syndic, le Cabinet Frequel [B] [Y] de sa demande reconventionnelle
Infirmer le jugement entrepris pour le surplus,
En conséquence, statuant à nouveau :
Au titre de l’exécution du contrat de travail
A défaut de concertation avec l’employeur (Avenant n°86 du 12 février 2015 de la convention collective) : fixer le coefficient conventionnel à 634 à compter du 1er mars 2016 et à tout le moins du 1er février 2017
Fixer le salaire conventionnel de base à la somme de :
2.095,22 euros à compter du 1er février 2017
2.106,94 euros à compter du 1er juin 2017
2.131,33 euros à compter du 1er janvier 2019
2.168,07 euros à compter du 1er octobre 2019
2.196,18 euros à compter du 1er septembre 2020
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser un rappel de salaire (1er février 2017 ‘décembre 2018) : 150,72 euros
Annuler l’avertissement du 2 février 2018 (articles L.1333-1 et L.1333-2 du code du travail)
Annuler l’avertissement du 18 mai 2019 (articles L.1333-1 et L.1333-2 du code du travail)
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de dommages et intérêts pour sanction abusive et pour avertissement nul (articles L.1333-1 et L.1333-2 du code du travail) : soit 2.000 euros au total
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation d’assurer la santé et la sécurité des salariés (article L.4121-1 du code du travail) : 10.000 euros
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser des dommages et intérêts pour non-respect des obligations de l’employeur en matière de prévoyance : 10.345,37 euros
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser des dommages et intérêts pour non-respect des dispositions de la convention collective relatives à la réfection du logement de fonction (article 20 de la convention collective ‘ article « L226212 » du code du travail) : 8.000 euros
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (article L.1222-1 du code du travail) : 15.000 euros
Au titre de la rupture du contrat de travail :
A titre principal :
Juger que les faits reprochés ne constituent pas le vrai motif du licenciement
Juger que le licenciement prononcé est illicite au regard des dispositions des articles L.1121-1 et L.1152-2 du code du travail
Prononcer la nullité de son licenciement
En l’absence de réintégration
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser :
Préavis : 8.160,53 euros
Congés payés sur préavis : 816,05 euros
Indemnité légale de licenciement : 6.800,40 euros
Indemnité pour licenciement nul : 27.000 euros
A titre infiniment subsidiaire :
Juger que le signataire de la lettre de licenciement ne justifie pas d’un pouvoir valable et de la qualité pour représenter le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11]
Juger que les faits reprochés sont prescrits
Juger que le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] a épuisé son pouvoir disciplinaire à son égard par la notification de plusieurs avertissements antérieurs à la procédure de licenciement
Juger que le licenciement n’est pas fondé
Requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser :
Rappel au titre du solde de tout compte (congés payés) : pour mémoire
Préavis : 8.160,53 euros
Congés payés sur préavis : 816,05 euros
Indemnité légale de licenciement : 6.800,40 euros
Indemnité pour licenciement abusif : 27.000 euros
En tout état de cause :
Ordonner la rectification et la délivrance des documents de fin de contrat conformes (certificat de travail et attestation Pôle Emploi) sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du mois suivant la notification de la décision à intervenir et se réserver la liquidation de l’astreinte
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à lui verser une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 3 600 euros
Juger que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter de l’introduction de l’affaire RG F20/00055 pour les demandes formulées au titre de l’exécution du contrat de travail et à compter de l’introduction de l’affaire RG F20/00597 pour les demandes formulées au titre de la rupture du contrat de travail
Ordonner la capitalisation des intérêts
Débouter le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] de tout appel incident et de toute demande reconventionnelle, même formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamner le Syndicat des copropriétaires de [Adresse 11] à supporter les dépens de l’entière procédure.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 17 mars 2023, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :
Le déclarer recevable et bien fondé.
En conséquence,
Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
En conséquence,
Débouter purement et simplement M. [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
A titre reconventionnel,
Condamner M. [M] à lui payer une somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
A titre infiniment subsidiaire,
Si une condamnation devait être prononcée à son encontre, dire que les intérêts de retard sur ladite somme courront à compter de la décision rendue par la cour d’appel et non à la date de saisine comme sollicité par M. [M].
Condamner M. [M] à l’ensemble des dépens en cause d’appel.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
Par ordonnance rendue le 4 décembre 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 14 janvier 2025.
Par note du 11 février 2025, la cour mit dans le débat le moyen d’office que le dommage dérivant du manquement du syndicat à son obligation d’information du salarié sur la prévoyance pourrait tenir d’une perte de chance d’éviter le risque qui s’est réalisé de ne pas percevoir la garantie de 80% prévue à l’article 6-3 de l’accord du 6 décembre 2013, laquelle doit être mesurée à la chance perdue.
Par note du 18 février suivant, M. [M] soulignait le double manquement de l’employeur ayant manqué d’une part à l’informer, d’autre part à accomplir les démarches lui incombant pour lui permettre de bénéficier de ses droits en sa qualité de souscripteur de l’assurance. Il conclut avoir perdu, en son intégralité, le gain résultant du contrat.
Sur l’exécution du contrat de travail
Sur la rémunération
Sur la base de l’article L.2262-12 du code du travail, M. [M] se prévaut de l’application dès le 1er mars 2016 d’une nouvelle classification non mise en ‘uvre, et sollicite la fixation judiciaire de son coefficient au regard de la nouvelle grille comme l’ajustement de son salaire, revalorisé, en déniant la justesse du rattrapage effectué par l’employeur au niveau 625 le 1er février 2017, alors qu’il aurait dû bénéficier du coefficient 634.
Le syndicat des copropriétaires, qui précise que la valorisation s’attache aux tâches confiées, fait valoir la carence probatoire de son colitigant sur les items qui les opposent afférents à l’autonomie et au niveau de formation, en relevant la régularisation de sa situation au 1er juin 2017, versée en août 2020.
D’emblée, c’est justement que le syndicat conteste l’application de l’avenant n°89, qui fut étendu par arrêté du 4 mai 2017 à effet le premier jour du mois suivant la publication, avant le 1er juin 2017.
Ensuite, sur l’autonomie que détaille la nouvelle grille, M. [M] se prévaut du nombre de points (112) supposant des instructions précises et détaillées des activités, sans contrôle fréquent par le syndic, par le gérant d’immeuble ou par un de leurs salariés qu’ils ont mandaté et dont la réalisation fait appel à des compétences spécifiques en matière d’organisation et de planification, alors que le syndicat considère n’y avoir aucune compétence spécifique convoquée (107).
Cela étant, l’intéressé ne justifie pas précisément de ces compétences spécifiques en matière d’organisation et de planification qu’il ne précise d’ailleurs pas en renvoyant seulement à l’annexe de son contrat contenant la surveillance de l’ascenseur, de la chaufferie, la surveillance générale, le contrôle des tâches des préposés extérieurs, diverses petites tâches administratives (affichage, tenue d’un cahier etc.), la propreté et l’entretien des parties communes (ordures ménagères, vide-ordures, encombrants) et des espaces libres (trottoir, cour, parking, espace vert).
Vu ces éléments, le coefficient 107, retenu par l’intimé, sera admis.
Sur le niveau de formation, M. [M] retient que le poste exige un niveau correspondant a minima à un diplôme équivalent au niveau V de l’éducation nationale (CAP hors branche) ou à un CQP de la branche (niveau I) (87), alors que le syndicat estime que le poste requiert seulement une maîtrise des savoirs de base (lire, écrire, compter) (83).
Cependant, il ne dérive des tâches conventionnelles aucun savoir particulier, et c’est à tort que M .[M] fait valoir le diplôme obtenu, que ne commandait pas le poste, et les travaux d’électricité faits à l’occasion, et qui ne participent pas de ses tâches convenues.
Le coefficient 83, retenu par l’intimé, sera admis.
Les calculs établis par l’employeur sur la base de 625 n’étant pas sérieusement critiqués, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de M. [M] d’un rappel de 150,72 euros, de ce motif.
Sur les avertissements
L’avertissement du 2 février 2018
M. [M], critiquant ses conditions de travail, relève que le syndic, seul habile à représenter le syndicat, n’en fut pas l’auteur, et le syndicat des copropriétaires qui le concède, estime, de ce motif, la demande mal dirigée.
L’article L.1331-1 du code du travail dit que « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération », l’article L.1333-2 que le juge prud’homal peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou disproportionnée à la faute commise.
Cela étant, le « premier avertissement pour non-réalisation des tâches de votre contrat » émané du conseil syndical de la résidence sous la signature de Mme [E] et reprochant à l’intéressé diverses négligences n’étant pas issu de l’employeur doit être annulé, faute de qualité. Le jugement sera infirmé dans son expression contraire, étant observé que, contrairement à ce qu’il suggère, le conseil syndical n’a pas la personnalité morale et ne pouvait être mis en cause.
L’avertissement du 18 mai 2019
M. [M] conteste avoir dû travailler alors qu’il était placé en arrêt maladie.
Le syndicat des copropriétaires lui oppose sa reprise le 15 mai, et son absence sans explications ni justificatif le 16. Il souligne que l’arrêt ne fut déposé qu’après l’avertissement, une fois le délai de 48 heures dépassé.
L’article L.1333-1 du code du travail dit que « en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.
L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.
Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. »
Le courrier du 18 mai 2019 reproche à M. [M] son absence injustifiée le 16 mai.
Cependant, du moment que M. [M], absent pour maladie du 10 avril au 15 mai inclus, reconnait avoir déposé le 20 mai dans les bureaux du syndic l’arrêt maladie pris du 15 mai au 30 juin, sans démontrer par les pièces versées aux débats son impossibilité de le faire avant, c’est sans se méprendre que le syndicat put lui reprocher son absence injustifiée au moment de l’envoi de son courrier, au regard des dispositions de l’article L.1226-1 du code du travail obligeant le salarié à informer l’employeur sous 48 heures de son incapacité.
Néanmoins, M. [M] ayant déposé cet arrêt dans les 4 jours contenant un week end, la sanction doit être tenue comme disproportionnée, et doit être annulée, étant précisé que contrairement à ce qu’énonce l’intimé, M. [M] n’avait nullement repris son activité le 15 mai. Le jugement sera infirmé dans son expression contraire.
Les dommages-intérêts pour sanction abusive
M. [M] fait valoir la violence des propos et des méthodes de son contradicteur, la première sanction lui ayant été signifiée sur son lieu de travail et l’employeur s’étant refusé à les retirer de son dossier personnel.
Cela étant, la signification d’un acte n’est pas fautive. Au reste, le copropriétaire qui agit au nom du conseil syndical n’est pas le mandataire du syndicat, et ce dernier n’a pas à répondre de ses actes.
Pour le surplus, le salarié ne justifie d’aucun dommage juridiquement relevant, et le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages-intérêts.
Sur l’obligation de sécurité
M. [M] fait valoir les violences et le harcèlement moral subi de la part des copropriétaires ou des membres du conseil syndical sans que l’employeur, avisé, ne l’en protège, et qui, aggravées par la surcharge de son activité, conduisirent à son arrêt de travail pour trouble dépressif.
Le syndicat des copropriétaires, relevant l’ancienneté des faits reprochés, précise avoir chaque fois réagi.
Selon l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° des actions d’information et de formation ; 3° la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
Ces mesures sont mises en ‘uvre selon les principes définis aux articles L. 4121-2 et suivants du même code.
La surcharge de travail
Par les pièces produites aux débats notamment les devis d’intervention de prestataires pour des tâches précises de nettoyage, le contrat de travail de la femme de ménage, la convention de stage d’un tiers et les attestations de témoins disant qu’il était aidé, M. [M] ne justifie pas de la surcharge de son travail dont ne sauraient témoigner non plus ses arrêts de travail ou les prescriptions et certificats de ses médecins de ville, cette aide aurait-elle été moindre à un certain moment, d’autant que le mauvais entretien de la copropriété n’est pas contesté.
La violence
S’il résulte des pièces versées aux débats que M. [M] a déposé plainte et diverses mains courantes à plusieurs reprises du 2 janvier 2014 au 28 août 2017, essentiellement contre M. [J], copropriétaire, pour des menaces et en février 2014, un coup, et avisait le syndic par lettre du 1er août 2016 de ses difficultés récurrentes avec ce copropriétaire, il est aussi établi que le syndicat des copropriétaires saisissait le 3 mars 2014 le ministère public de ces faits, qu’il écrivait le 16 août 2016 à M. [J] pour le mettre en garde et, par l’intermédiaire de son avocat, en septembre 2016, pour l’aviser de son intervention aux côtés du gardien.
Etant précisé que M. [J] nia les faits, que le parquet classa l’affaire en décembre 2016, il s’avère que l’employeur, dès qu’avisé, prit les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de son collaborateur, en sorte qu’il satisfit à son obligation de moyens.
Ensuite, l’affichage suivant les constatations de l’huissier en juin 2020, avisant les copropriétaires du mauvais usage des sous-sols de la copropriété notamment du fait de l’appelant en leur demandant de vérifier le non-détournement de leurs biens, que reproche l’appelant à l’employeur, n’est pas fautif puisqu’il appartient au syndic de faire respecter le règlement de la copropriété.
Par ailleurs, les difficultés évoquées par M. [M] après son licenciement sont sans portée, puisque l’employeur n’est plus obligé, ainsi qu’il le relève.
Enfin, la seule circonstance que M. [M] fut placé en arrêt maladie au printemps 2014, se vit prescrire divers traitements médicamenteux à cette époque, et fut placé finalement en arrêt maladie en 2018 puis continûment en 2019, ne saurait nullement témoigner d’un manquement de l’employeur.
C’est ainsi à bon droit que le conseil de prud’hommes a rejeté cette demande, le jugement sera confirmé à cet égard.
Sur la prévoyance
M. [M] soutient que l’employeur manqua à son obligation de maintien de salaire durant son arrêt maladie en 2019, alors qu’il lui appartient de lui fournir une prévoyance dont il doit l’aviser en veillant à lui réclamer les documents utiles.
Le syndicat des copropriétaires, qui précise l’avoir affilié le 1er juin 2015, lui oppose sa carence dans l’envoi du décompte des indemnités journalières ayant empêché le calcul du maintien de salaire, et voit dans sa faute la cause exclusive de son dommage.
L’article 30-1 de la convention collective modifié par l’accord du 6 décembre 2013 étendu le 17 février 2015 prévoit qu’en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident, dûment constatée, les salariés recevront 90 % de leur rémunération globale brute mensuelle contractuelle pendant 110 jours après 8 ans de présence dans l’entreprise mais que cette garantie s’entend déduction faite des allocations que l’intéressé perçoit de la sécurité sociale et des régimes complémentaires de prévoyance alimentés par les cotisations patronales, l’employeur étant subrogé dans les droits du salarié auprès de ces organismes.
Alors que, comme l’a justement relevé le conseil de prud’hommes, les bulletins de paie versés aux débats et l’attestation de l’assureur témoignent de l’affiliation du salarié à la prévoyance auprès de la compagnie Humanis, le syndicat des copropriétaires ne justifie nullement avoir remis au salarié la notice d’information conformément à l’article 15 de l’accord.
Ayant ainsi manqué à son obligation générale d’information et ayant manqué de l’aviser, ensuite, de la nécessité de fournir le relevé des indemnités journalières en vue du paiement dont il était personnellement comptable, il a engagé sa responsabilité contractuelle dans la production du dommage tenant au défaut de maintien de salaire durant 110 jours, dont le quantum réclamé n’est pas critiqué.
Le syndicat des copropriétaires sera condamné au paiement de 462,33 euros de dommages-intérêts, de ce motif.
M. [M] fait ensuite valoir son bénéfice au maintien de 80% de son salaire, prévu à l’article 6-3 de l’accord à titre de garantie durant l’incapacité de travail, sous déduction des versements de la sécurité sociale, ces prestations venant en relais des dispositions de l’article 30-1 précité.
Faute d’information, M. [M] a perdu une chance d’éviter le risque qui s’est réalisé de ne percevoir la garantie due par l’assureur, qui, devant être mesurée à la chance perdue sans pouvoir égaler l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée, sera justement évaluée à la somme de 2.000 euros, étant précisé qu’une fois informé notamment à l’occasion de son action, il n’entama aucune démarche sans justifier de sa forclusion. En effet, il n’est nullement justifié que seul le souscripteur de l’assurance conclue pour le compte d’autrui soit tenu des démarches indemnitaires alors que le salarié a la qualité d’assuré.
Le jugement sera infirmé dans son expression contraire.
Sur le logement de fonction
M. [M] reproche à l’employeur d’avoir manqué à son obligation d’entretien du logement de fonction prévue à l’article 20 de la convention collective, qui était, selon lui, vétuste et dégradé par la moisissure faute d’une aération fonctionnelle.
Le syndicat des copropriétaires, en rappelant la rénovation en 2010, précise n’avoir pas été ensuite interpelé sur son état qu’explique par ailleurs son mésusage, pour conclure qu’en plus, M. [M], qui ne l’occupait pas et en fut expulsé en août 2020, n’en a subi nul dommage.
L’article 20 de la convention collective dit que « la réfection des embellissements (peintures, revêtements muraux) dans le logement de fonction, incombant à l’employeur, interviendra tous les 5 ans si nécessaire, et au plus tard tous les 7 ans lorsque le logement comprend une pièce unique et tous les 10 ans dans les autres cas. La réfection des revêtements de sol interviendra si nécessaire. »
Cependant, le logement comprend plusieurs pièces ainsi qu’il ressort du constat d’huissier du 18 février 2015 en sorte que l’employeur n’était tenu de le rénover que tous les 10 ans, quand l’intéressé fut engagé, de novembre 2010 à août 2020, moins de 10 ans, et il ne peut se prévaloir, faute d’en réunir les conditions, de ce droit.
Par ailleurs, si sa réfection doit intervenir si nécessaire tous les 5 ans, M. [M] ne justifie pas avoir avisé l’employeur de cette nécessité, l’article 20 ne créant aucune obligation pour le syndicat de s’enquérir de son état.
Dès lors que le syndicat n’a pas commis de faute, il ne s’ensuit aucun principe de responsabilité et c’est à bon droit que le conseil de prud’hommes a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par l’appelant.
Sur l’exécution déloyale
M. [M] fait valoir sa surcharge de travail par manque de moyens mis à sa disposition, l’insuffisance de sa rémunération, les agissements subis au quotidien, les circonstances vexatoires de son licenciement.
Le syndicat des copropriétaires lui oppose l’aide apportée par une autre salariée et un prestataire, l’identité de manquements fondant d’autres prétentions empêchant sa double indemnisation et dénie le surplus.
Le contrat de travail s’exécute de bonne foi.
Cependant, comme le relève l’intimé, M. [M] a déjà fait valoir, sous d’autres demandes, les griefs afférents à sa surcharge de travail ou à l’insuffisance de sa rémunération, qui n’ont pas été retenus.
Ses doléances postérieures à son licenciement, notamment sur la coupure d’électricité dans son logement de fonction en septembre 2020, ses relations délétères avec son remplaçant dont il occupait d’ailleurs le logement dont il avait été expulsé en octobre 2020, ou l’acharnement procédural dont il aurait été l’objet, selon lui, ne concernent pas l’exécution de la relation de travail.
S’il argue d’un dénigrement, il ne le détaille nullement.
Enfin, la signification de son licenciement que rend légitime la nature de l’acte ne peut être tenue pour vexatoire.
Aucun manquement ne s’enduisant des éléments versés aux débats, les prétentions de M. [M] seront rejetées par confirmation du jugement.
Sur la rupture du contrat de travail
La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :
« (‘) De ce fait, nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour faute grave, compte tenu des éléments suivants :
Nous sommes intervenus le 17 Juillet 2020 à [Adresse 11], pour constater des signalements de constructions de boxes sauvages au sein des parkings du sous-sol de la copropriété, où vous exercez votre rôle de gardien d’immeuble.
Nous avons été accompagnés pour ce constat, des forces de l’ordre, d’un Huissier de Justice ainsi que de l’Avocat de la copropriété.
Lors de ce constat, vous vous êtes présenté et vous avez déclaré que vous êtes l’auteur de ces constructions illégales et sauvages sur les parties communes de la copropriété.
Vous avez présenté des documents attestant que vous percevez des loyers au titre de la location des parkings.
Aussi, nous avons également constaté que vous avez émis un bail de location en date du 26 Juin 2017 à Monsieur [H] (commerçant de la ville de [Localité 10]) au titre des parties communes que vous avez privatisées et vous percevez de plus des loyers à cet effet à titre personnel et à l’insu des copropriétaires.
Non seulement, nous avons constaté que vous avez construit sur les parties communes, mais [qu’en] plus vous avez dérobé 6 places de parkings qui ne vous appartiennent pas, afin de créer un entrepôt de vêtements et de stockages à des fins commerciales au bénéfice de certains commerçants de la ville, tout cela sans droit ni titre et en votre qualité de gardien d’immeuble.
L’ensemble des faits qui vous sont reprochés et qui empêchent le maintien de votre contrat de travail, sont les suivants :
-Construction illégale des boxes.
-Privatisation des parties communes
-Mise en location illégale des parkings et des parties communes sans acte de propriété
-Mise en danger de la vie d’autrui par la transformation des sous-sols en entrepôt de vêtement et de stockage divers sans prendre en compte les normes de sécurité d’incendie, des stockages pouvant prendre feu à tout moment et mettre en péril la vie de tous les copropriétaires en fragilisant également les infrastructures de l’immeuble
-Utilisation illégale de la loge pendant que vous êtes en arrêt maladie depuis janvier 2019, empêchant votre remplaçant d’effectuer correctement son travail.
Or vous avez un logement de fonction et une sortie indépendante de cette loge pour accéder à votre logement à l’arrière du jardin, dont vous seul possédez les clés d’accès.
– Organisation de réunions au sein de la loge que vous n’êtes pas censé occuper compte tenu de votre arrêt de travail. Vous propagez également durant votre arrêt une campagne de dénigrement et d’incitation à la haine. Vous tenez des propos diffamatoires à l’encontre de votre employeur, compte tenu des diverses remontées d’informations émanant des copropriétaires.
Or, vous n’êtes pas sans savoir que votre fonction en qualité de gardien d’immeuble malgré votre arrêt de travail, joue un rôle essentiel dans le bon fonctionnement de la copropriété, ce qui n’est pas le cas.
Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, et du désordre engendré par ces nombreux faits que vous avez commis, votre maintien à votre poste en qualité de gardien d’immeuble au sein de la copropriété de l’orme « [Adresse 6] » s’avère impossible.
Votre licenciement intervient donc à la première présentation de cette lettre, sans préavis ni indemnité de licenciement.
Conformément à l’article 6 (logement de fonction) alinéa 6.1 de votre contrat de travail signé le 28 Octobre 2010.
Celui-ci précise :
«’En conséquence, l’occupation des locaux doit cesser en même temps que le contrat de travail, la résiliation des contrats d’abonnements et la remise en état éventuellement seront à la charge de l’employé… »
Par conséquent, nous vous laissons jusqu’au 22 août 2020 pour quitter le logement qui vous a été attribué comme un avantage accessoire à votre contrat de travail et de remettre les clés de votre logement et de tous les bâtiments en votre possession au gardien remplaçant.
Votre solde de tout compte et vos documents y afférents seront tenus à votre disposition.
Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de nos sentiments distingués.
[B] [Y] »
La cause
Se basant sur les articles L.1121-1, L.1152-2 et L.1152-4 du code du travail, M. [M], qui conteste les griefs reprochés tout en soulignant la chronologie des faits, considère que licenciement trouve sa cause dans les démarches judiciaires qu’il entreprit, dans sa liberté d’expression et dans le harcèlement moral subi ou dénoncé.
Pour dire le licenciement infondé, il dispute la qualité du signataire de la lettre issu du syndic dont le contrat n’avait pas été renouvelé, soulève la prescription des faits anciens et ostensibles et fait valoir l’épuisement du pouvoir disciplinaire de l’employeur, qui l’avait sanctionné à deux reprises après leur survenance. Il soutient par ailleurs la licéité des constructions entreprises sur des parcelles dont il était propriétaire. Il dément avoir fait obstruction aux fonctions de son remplaçant, ou avoir dénigré son employeur. Il conclut que les faits reprochés sont étrangers au contrat de travail mais le concernent en sa qualité de copropriétaire.
Le syndicat des copropriétaires plaide le bien-fondé du licenciement, qui n’est pas en lien, selon lui, avec la saisine préalable du conseil de prud’hommes par le salarié.
Soutenant les griefs exprimés dans la lettre de licenciement, il fait valoir, sur la base du constat d’huissier du 17 juillet 2020, la violation par le gardien du droit de propriété, du règlement de la copropriété, et affirme qu’il mit en danger les personnes, en soulignant n’avoir pas été avisé notamment par l’intéressé de ces constructions, qu’il découvrit en juin 2020.
Le syndicat lui reproche encore l’appropriation de la loge, adjacente au logement de fonction dont son remplaçant n’eut l’usage, en dénonçant par ailleurs son comportement anormal et violent envers l’employeur et le nouveau gardien.
Selon l’article L.1121-1 du code du travail, « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
Selon l’article L.1152-2, « aucune personne ayant subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou ayant, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements ne peut faire l’objet des mesures mentionnées à l’article L.1121-2 ».
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du code du travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. L’employeur doit rapporter la preuve de l’existence d’une telle faute, et le doute profite au salarié.
Sur le bien-fondé du licenciement
Le signataire
Si M. [M] querelle la qualité du signataire de la lettre de licenciement, qui est le représentant légal du cabinet Fréquel, il produit néanmoins l’arrêt du 15 novembre 2023 de cette cour, opposant les mêmes parties, d’où il résulte que l’assemblée générale du 9 mai 2019 renouvela le contrat de syndic dudit cabinet. Par ailleurs, l’ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Pontoise du 25 janvier 2023, entre les mêmes, porta le même constat en relevant singulièrement que M. [M] avait assigné lui-même le syndicat par l’intermédiaire du cabinet Fréquel le 2 décembre 2021. Au demeurant, M. [M] a formé requête puis appel contre le syndicat précisément représenté par ce syndic.
Etant relevé que M. [M], également copropriétaire et ainsi destinataire des procès-verbaux de l’assemblée du syndicat, convint sans discontinuer de la qualité du cabinet Fréquel en se comportant comme son interlocuteur sous l’ensemble des affaires les liant de sorte qu’il en fit toujours aveu même judiciaire, il se déduit suffisamment de ces éléments l’habileté de M. [Y] à signer la lettre de licenciement, le contrat de syndic joint à la convocation à l’assemblée du 9 mai 2019 aurait-il comporté une erreur relevée par l’arrêt du 15 novembre 2023 dont l’autorité de la chose jugée n’est au reste pas soulevée.
La prescription
L’article L.1332-4 du code du travail énonce qu’« aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales » et il appartient à l’employeur d’apporter la preuve d’avoir connu les faits reprochés moins de 2 mois avant l’engagement de ses poursuites.
Toutefois, si l’employeur ne peut fonder le licenciement sur des faits prescrits en application de cette disposition, il en va autrement si ces faits procèdent d’un comportement fautif de même nature que celui dont relèvent les faits non prescrits donnant lieu à l’engagement des poursuites disciplinaires.
Cela étant, le syndicat saisit le ministère public pour l’informer de constructions illicites dans les sous-sols de la résidence y compris sur les parties communes privant les copropriétaires de leurs emplacements de stationnement par lettre du 25 juin 2020, disant enquêter sur les responsabilités et craindre des représailles.
Le procès-verbal d’huissier du 17 juillet 2020, les décrivant, précise qu’au cours des opérations, le preneur de l’une des places closes occupée par un stock de vêtements fournit son titre d’occupation mentionnant pour bailleur M. [M].
Dès lors, l’employeur justifie suffisamment avoir été avisé dans les 2 mois de la poursuite initiée le 20 juillet 2020, si bien que ce fait et ceux de même nature ne sont pas prescrits.
L’utilisation illégale de la loge étant continue, n’encourt pas la prescription disciplinaire.
Enfin, M. [W], président du conseil syndical, ayant reproché le 15 juillet 2020 à l’intéressé « ses manigances et propos diffamatoires » et le mettant en demeure de cesser immédiatement ses agissements, nécessairement en cours, il est avéré que le dénigrement reproché n’était pas prescrit quand les poursuites furent engagées.
Le pouvoir disciplinaire
Il s’en déduit que lorsque M. [M] fut averti le 18 mai 2019, ces faits, pour partie, n’étaient pas connus, pour partie, n’étaient pas advenus, en sorte que par cette sanction, l’employeur n’a pas épuisé son pouvoir disciplinaire.
L’occupation illicite
Le syndicat des copropriétaires justifie par le constat d’huissier que M. [M] louait un emplacement clos correspondant aux numéros [Cadastre 2] à [Cadastre 3], [Cadastre 4] à [Cadastre 5] alors qu’il ressort des titres produits par ce dernier qu’il n’en était pas propriétaire, le relevé cadastral pour l’année 2019 n’en témoignant pas plus.
De ce seul motif, il a commis une faute grave qui doit être rattachée à ses fonctions dont il abusa pour soustraire aux copropriétaires leurs biens et les faire fructifier à son profit puisqu’il percevait un loyer de 490 euros « charges » comprises, le syndic précisant au reste que l’emprise de la construction empiétait sur les parties communes.
Des vêtements étant entreposés en nombre dans cet espace grand d’environ 100 mètres carrés, il commit encore un manquement en n’en avisant personne faute de démontrer le contraire, alors que cet entreposage au sous-sol modifie la destination des lieux et donc potentiellement la sécurité contre l’incendie de l’ensemble immobilier à usage d’habitation comprenant, selon le contrat de travail, 218 lots, grand de 11 étages sur les parkings souterrains selon la plainte de M. [W] du 17 juillet 2020.
Au reste, si M. [M], qui, étant copropriétaires de plusieurs emplacements, ne conteste pas occuper de telles constructions au sous-sol, prétend avoir agi en conformité avec le droit, la résolution adoptée le 16 juin 2008 n’autorisait que le boxage d’emplacement d’une certaine dimension avec l’accord des voisins adjacents et M. [M] n’établit nullement que les emplacements fermés répondait à ces conditions, étant ajouté que sont sans portée les attestations ou certifications, d’ailleurs souvent évasives, de personnes sans qualité pour contredire cette règle, comme le président du conseil syndical ou le représentant légal du syndic, à supposer qu’ils le firent.
Du moment que M. [M] était chargé de la surveillance générale des bâtiments si bien que le contrat de travail lui impartissait à chaque prise de fonction une ronde avec rapport et l’obligeait à relater tout dysfonctionnement anormal, et qu’il se devait de faire respecter le règlement de copropriété (« assurer la surveillance générale relative à la bonne tenue de l’immeuble, à la propreté, à l’entretien des parties communes et à la sécurité ; application du règlement »), ces agissements ne concernent nullement sa vie privée, ainsi qu’il le soutient à tort.
Ils justifient à eux seuls le licenciement pour faute grave, puisque l’abus ainsi commis dans l’exercice de ses fonctions rendait impossible le maintien du contrat durant le préavis quand bien même le contrat de travail de l’intéressé était suspendu depuis le mois de janvier 2019, sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner le surplus des motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
Sur la nullité du licenciement
S’il est vrai que M. [M] déposa le 31 janvier 2020 une requête devant le conseil de prud’hommes pour réclamer diverses sommes en exécution du contrat de travail, la gravité de la faute découverte durant l’été 2020 contredit le lien entre ces deux événements, que M. [M] ne justifie autrement qu’au travers de leur succession, sans établir, comme il le prétend, avoir adressé ses conclusions au fond pour l’audience du 1er mars 2021 juste avant son licenciement, le calendrier de la procédure l’y invitant le 10 mai.
Par ailleurs, s’il signa avec d’autres copropriétaires une lettre adressée au maire le 20 juillet 2020 dénonçant le nouveau gardien, M. [Z], accusé d’avoir « un souci au niveau de sa santé mentale » ensuite détaillé sans délicatesse, le lien entre cette missive, dont il n’explique au reste pas la connaissance contemporaine du syndic qui entama le même jour la procédure disciplinaire, est d’autant moins établi qu’il ressort de l’ensemble du dossier que M. [M] était au c’ur de multiples accusations de violences, menaces, détournements et abus, e
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté les demandes de M .[X] [M] en annulation des deux avertissements et sur les dommages-intérêts réclamés pour manquement à la prévoyance ;
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;
Annule les avertissements des 2 février 2018 et 18 mai 2019 ;
Condamne le syndicat des copropriétaires [Adresse 11] à [Localité 10] à payer à M. [X] [M] :
462,33 euros de dommages-intérêts pour manquement à garantir sa rémunération durant 110 jours après son arrêt maladie, augmentés des intérêts au taux légal dès ce jour ;
2.000 euros de dommages-intérêts pour perte de chance d’éviter le risque qui s’est réalisé de ne bénéficier de la garantie proposée par l’assureur augmentés des intérêts au taux légal dès ce jour ;
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;
Rejette la demande de M. [X] [M] en nullité du licenciement ;
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Laisse à la charge de chacune des parties les sommes qu’elles ont engagées au titre des dépens.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente et par Madame FIORE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
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