Rupture conventionnelle et obligations contractuelles : enjeux de la clause de non-concurrence et des astreintes non rémunérées.

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Rupture conventionnelle et obligations contractuelles : enjeux de la clause de non-concurrence et des astreintes non rémunérées.

Les contrats de travail, une fois légalement formés, engagent les parties à respecter les termes convenus, conformément à l’article 1103 du Code civil, qui stipule que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». En l’espèce, M. [O] ne peut pas revendiquer des droits non stipulés dans son contrat de travail, même si une promesse d’embauche antérieure mentionnait une évolution de poste, car cette promesse n’a pas été intégrée dans le contrat final signé.

Concernant les astreintes, les articles L3121-11 et L3121-12 du Code du travail précisent qu’un système d’astreinte doit être établi par accord collectif ou, à défaut, par l’employeur, qui doit informer les salariés concernés. Le temps d’astreinte doit donner lieu à une contrepartie financière ou en repos, comme le stipule l’article L3121-9. En l’absence d’accord collectif et de mention dans le contrat de travail, les astreintes imposées à M. [O] n’ont pas été correctement rémunérées, ce qui constitue une violation des dispositions légales.

L’article L8221-5 du Code du travail définit le travail dissimulé, notamment par la non-remise de bulletins de paie conformes. En cas de rupture de la relation de travail, l’article L8223-1 prévoit qu’un salarié victime de travail dissimulé a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. La société Ametis, en ne fournissant pas de décompte des heures de travail effectif et en rémunérant les astreintes sous forme d’indemnités non soumises à cotisations, a ainsi dissimulé une partie du travail de M. [O].

Enfin, la clause de non-concurrence, selon les stipulations contractuelles, doit être levée au plus tard à la date de rupture du contrat. La société Ametis a tardé à notifier la levée de cette clause, ce qui a conduit à une obligation de paiement d’une indemnité compensatrice, conformément aux termes de la clause elle-même. Le non-respect de cette obligation par l’employeur, qui a notifié la levée après la rupture effective, engage sa responsabilité à verser l’indemnité prévue.

L’Essentiel : Les contrats de travail engagent les parties à respecter les termes convenus. M. [O] ne peut revendiquer des droits non stipulés dans son contrat, même si une promesse d’embauche mentionnait une évolution de poste. Concernant les astreintes, en l’absence d’accord collectif, celles-ci n’ont pas été correctement rémunérées. La société Ametis a dissimulé une partie du travail de M. [O] en ne fournissant pas de décompte des heures et en rémunérant les astreintes sous forme d’indemnités non soumises à cotisations.
Résumé de l’affaire :

Engagement de M. [O] par la SASU Ametis

M. [Z] [O], né en 1971, a été engagé par la SASU Ametis en tant que responsable maintenance par un contrat de travail à durée indéterminée à partir du 14 janvier 2019. Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective des cadres du bâtiment en région parisienne.

Rupture conventionnelle

Le 15 janvier 2020, M. [O] a sollicité un entretien pour discuter d’une rupture conventionnelle. Deux entretiens ont eu lieu les 7 et 20 février 2020, aboutissant à la signature d’une convention de rupture homologuée avec effet au 10 avril 2020. M. [O] a reçu ses documents de fin de contrat le 30 avril 2020, et la clause de non-concurrence a été levée par la SASU Ametis le 4 mai 2020.

Litige et saisine du conseil de prud’hommes

M. [O] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 28 octobre 2020, invoquant diverses irrégularités durant son contrat. Le jugement du 8 avril 2022 a débouté M. [O] de toutes ses demandes et a également débouté la société Ametis de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Appel de M. [O]

Le 10 mai 2022, M. [O] a interjeté appel de cette décision. Dans ses conclusions du 18 janvier 2023, il a demandé l’infirmation du jugement et a réclamé plusieurs sommes à titre de rappel de salaire, de dommages et intérêts, ainsi que des indemnités pour travail dissimulé et pour la clause de non-concurrence.

Réponse de la SASU Ametis

La SASU Ametis, dans ses conclusions du 21 octobre 2022, a demandé la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne la demande au titre de l’article 700. Elle a également proposé des montants limités pour certaines indemnités en cas d’infirmation du jugement.

Motifs de la décision

La cour a examiné les arguments de M. [O] concernant le non-respect des engagements pris à l’embauche, les astreintes non rémunérées, le non-respect des durées maximales de travail, le travail dissimulé, et la clause de non-concurrence. Elle a confirmé le jugement sur plusieurs points tout en condamnant la SASU Ametis à verser des dommages et intérêts pour non communication des temps de travail effectif, une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, et une indemnité compensatrice pour la clause de non-concurrence.

Conclusion de la cour

La cour a confirmé le jugement sauf en ce qui concerne les demandes de M. [O] pour les dommages et intérêts, l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, et l’indemnité compensatrice pour la clause de non-concurrence. La SASU Ametis a été condamnée à verser des sommes spécifiques à M. [O] ainsi qu’à couvrir les dépens de première instance et d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Le non-respect des engagements pris à l’embauche

Le responsable maintenance soutient que la société Ametis n’a pas respecté la promesse d’embauche stipulant qu’il devait occuper un poste de directeur de maintenance après la période d’essai.

La société Ametis rétorque que cet engagement n’a pas été inclus dans le contrat de travail à durée indéterminée, signé le 14 janvier 2019, ni dans l’avenant signé en mars 2020.

Selon l’article 1103 du code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

En l’espèce, la promesse d’embauche mentionnait un poste de directeur de maintenance, mais le contrat signé ne faisait aucune référence à cette évolution.

Le responsable maintenance ayant accepté les termes de son contrat ne peut donc reprocher à l’employeur de ne pas avoir respecté la promesse d’embauche.

Le jugement est donc confirmé sur ce point.

Les astreintes

Le responsable maintenance affirme qu’il a effectué des astreintes non prévues par son contrat, imposées unilatéralement par l’employeur, et non rémunérées.

La société Ametis soutient qu’il s’agissait d’astreintes téléphoniques rémunérées sous forme d’indemnités de grands déplacements.

Les articles L 3121-11 et L 3121-12 du code du travail stipulent qu’un système d’astreinte peut être mis en place par accord collectif, fixant l’organisation et les compensations.

L’article L 3121-9 précise que le temps d’astreinte doit donner lieu à une contrepartie financière ou en repos, indépendamment du paiement des heures d’intervention.

Il est établi que le contrat de travail ne prévoit aucune astreinte et qu’aucun accord collectif n’a été justifié.

Le responsable maintenance a été d’astreinte durant 17 semaines, mais il ne justifie pas avoir été amené à répondre au téléphone en dehors des heures d’ouverture des magasins clients.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté le responsable maintenance de ses demandes de rappel de salaire pour les temps d’astreinte, mais la société Ametis est condamnée à payer 4 000 euros pour non-communication des temps de travail effectif.

La demande de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales du travail et des temps de repos

Le dépassement de la durée maximale du travail et des temps de repos n’étant pas établi, le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté le responsable maintenance de sa demande à ce titre.

L’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

L’article L 8121-5 du code du travail définit le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, notamment par la soustraction à l’accomplissement de la formalité de délivrance d’un bulletin de paie.

L’article L 8223-1 précise qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires.

La société Ametis a intentionnellement dissimulé une partie du travail accompli par le responsable maintenance, en ne fournissant pas de décompte des heures de travail effectif.

Par conséquent, la société Ametis est condamnée à payer 26 400 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

La clause de non-concurrence

Le responsable maintenance soutient que la clause de non-concurrence n’a été levée que le 4 mai 2020, ce qui lui ouvre droit à une contrepartie financière.

La société Ametis affirme que la tardiveté de la renonciation est imputable au responsable maintenance, qui a tardé à fixer un rendez-vous.

Il est constant qu’en cas de rupture conventionnelle, l’employeur doit renoncer à la clause de non-concurrence au plus tard à la date de rupture.

La société Ametis n’a libéré le responsable maintenance de la clause de non-concurrence que le 4 mai 2020, soit après la rupture effective.

Il y a donc lieu de condamner la société Ametis à payer 13 200 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence.

Les autres demandes

Le responsable maintenance a dû exposer des frais pour faire valoir ses droits en appel, ce qui justifie une condamnation de la société Ametis à lui payer 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en plus des dépens.

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRET DU 29 OCTOBRE 2024

(n° 2024/ , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/05184 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFW3P

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Avril 2022 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LONGJUMEAU – RG n° F20/01059

APPELANT

Monsieur [Z], [K] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne LEVEILLARD, avocat au barreau de MEAUX

INTIMEE

S.A.S.U. AMETIS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE, toque : 137

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Catherine VALANTIN, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme LECOQ-CARON Isabelle, présidente de chambre

Mme HARTMANN Anne, présidente de chambre

Mme VALANTIN Catherine, conseillère rédactrice

Greffier, lors des débats : Mme Clara MICHEL

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre et par Monsieur Jadot TAMBUE, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [Z] [O] né en 1971, a été engagé par la SASU Ametis, par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 14 janvier 2019 en qualité de responsable maintenance.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des cadres du bâtiment (région parisienne).

Le 15 janvier 2020, M. [O] a demandé un entretien à la SASU Ametis en vue d’une rupture conventionnelle de son contrat de travail.

Le 7 et 20 février 2020 se sont tenus deux entretiens à l’issue desquels les parties ont signé la convention de rupture conventionnelle qui a été homologuée à effet du 10 avril 2020.

M. [O] a reçu par courrier ses documents de fin de contrat le 30 avril 2020.

Par courrier du 4 mai 2020, la SASU Ametis a délié M. [O] de la clause de non-concurrence inscrite dans son contrat de travail.

Constatant différentes irrégularités durant l’exécution de son contrat de travail M. [O] a saisi 28 octobre 2020 le conseil de prud’hommes de Paris qui, par jugement du 8 avril 2022 auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

– déboute M. [O] de l’ensemble de ses demandes,

– déboute la société Ametis de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chaque partie supportera la charge de ses éventuels dépens.

Par déclaration du 10 mai 2022, M. [O] a interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 12 avril 2022.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 janvier 2023, M. [O] demande à la cour de :

– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

– débouté M. [O] de sa demande de condamnation de la société Ametis à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal capitalisés :

à titre principal :

– 33.597,61 € bruts à titre de rappel de salaire au titre du paiement de l’intégralité des temps d’astreinte,

– 3.359,76 € bruts au titre des congés payés y afférents,

– 17.628,61 € nets au titre de l’absence d’information sur la contrepartie obligatoire en repos,

à titre subsidiaire :

– 20.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour absence de compensation financière ou en repos des astreintes et non-communication des temps de travail effectif ,

en toute hypothèse :

– 3.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect des obligations contractées à l’embauche et préjudice de carrière,

– 3.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales du travail et des temps de repos,

– 26.400 € nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

– 13.200 € bruts à titre d’indemnité compensatrice au titre de la clause de non-concurrence,

– 3.000 € nets au titre des frais irrépétibles,

– débouté M. [O] de sa demande de voir ordonner à société Ametis de lui remettre un bulletin de paie et une attestation pôle emploi rectifiés sous astreinte de 25 € par document et jour de retard,

– débouté M. [O] de sa demande de condamnation de la société Ametis aux dépens, en ce compris les frais éventuels d’exécution par huissier de justice,

– débouté M. [O] de sa demande d’exécution provisoire,

statuant à nouveau, de :

– condamner la société Ametis à payer à M. [O], les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal capitalisés :

à titre principal :

– 33.597,61 € bruts à titre de rappel de salaire au titre du paiement de l’intégralité des temps d’astreinte,

– 3.359,76 € bruts au titre des congés payés y afférents,

– 17.628,61 € nets au titre de l’absence d’information sur la contrepartie obligatoire en repos

A titre subsidiaire :

– 20.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour absence de compensation financière ou en repos des astreintes et non-communication des temps de travail effectif,

en toute hypothèse :

– 3.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect des obligations contractées à l’embauche et préjudice de carrière,

– 3.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales du travail et des temps de repos,

– 26.400 € nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

– 13.200 € bruts à titre d’indemnité compensatrice au titre de la clause de non-concurrence,

– 3.000 € nets au titre des frais irrépétibles,

-ordonner à la société Ametis de remettre à M. [O] un bulletin de paie et une attestation pôle emploi rectifiés sous astreinte de 25 € par document et jour de retard,

-condamner la société Ametis aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais éventuels d’exécution par huissier de justice,

-juger la société Ametis mal fondée en son appel incident et la débouter de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 21 octobre 2022, la SASU Ametis demande à la cour de :

à titre principal,

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le débouté de la société Ametis au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-réformer le jugement de ce chef et condamner M. [O] à 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire en cas d’infirmation du jugement,

statuant à nouveau, de :

– limiter la condamnation au titre de l’indemnité compensatrice des temps d’astreinte à 1.615 € nets,

– limiter la contrepartie financière à la clause de non concurrence à la somme de 10.895 € bruts,

en toute hypothèse,

– condamner l’appelante à payer au concluant la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, en ce compris les frais éventuels d’exécution par huissier de justice.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 juin 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience du 12 septembre 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le non-respect des engagements pris à l’embauche:

Pour infirmation du jugement M. [O] soutient que la société Ametis n’a pas respecté la promesse d’embauche aux termes de laquelle il devait à l’issue de la période d’essai occuper un poste de directeur de maintenance.

La société Amétis réplique que cet engagement n’a pas été repris dans le contrat de travail à durée indéterminée et que les parties ont en définitive signé, pas plus que dans l’avenant qui a été signé en mars 2020 aux termes duquel M. [O] était confirmé à son poste de Responsable avec réduction de son temps de travail. Elle ajoute que M. [O] éprouvait des difficultés à tenir son poste.

Aux termes de l’article 1 103 du code civil les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En l’espèce si la promesse d’embauche du 19 novembre 2018 stipulait que M. [O] occuperait un poste de responsable Maintenance le temps de son intégration puis à l’issue de la période d’essai un poste de Directeur de la maintenance, les parties ont signé un contrat de travail le 14 janvier 2019 qui ne faisait aucunement référence à l’évolution du salarié sur un poste de Directeur du développement, un avenant rappelant les fonctions de Responsable Maintenance du salarié ayant en outre été signé le 28 mars 2019 par les parties.

M. [O] qui a ainsi accepté sans réserve les termes de son contrat de travail et de l’avenant au contrat ne peut en conséquence reprocher à son employeur de ne pas avoir respecté les conditions de la promesse d’embauche qui prévoyait en tout état de cause que le salarié deviendrait Directeur de développement qu’à l’issue d’une période d’essai qui laissait ainsi à l’employeur la possibilité d’apprécier si cette éventuelle évolution était adaptée.

Le jugement est en conséquence confirmé sur ce point.

Sur les astreintes:

Pour infirmation, M. [O] soutient qu’il effectuait régulièrement des astreintes qui n’étaient pas prévues par le contrat de travail, qui lui ont été imposées sans respect des dispositions légales et qui n’étaient pas rémunérées. Il ajoute qu’ elles étaient imposées de manière unilatérale par l’employeur. Il demande à ce que ce temps d’astreinte soit requalifié en temps de travail effectif.

A titre subsidiaire, le salarié demande des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

La société réplique qu’il s’agissait d’astreintes téléphoniques en dehors de la plage d’ouverture de la société mais dans les limites de celle de ses clients (soit du lundi au vendredi de 18 heures à 20 heures et le samedi de 10 heures à 20 heures) et que ces astreintes étaient rémunérées sous la forme d’indemnités de grands déplacements, une semaine d’astreinte ouvrant droit à 3 indemnités de grand déplacement soit 190,80 euros. Par ailleurs, la société fait valoir que le salarié ne produit aucune pièce justifiant qu’il ait eu à faire des interventions au cours des astreintes et ne quantifie pas le temps d’intervention.

Il résulte des articles L 3121-11 et L 3121-12 du code du travail qu’un système d’astreinte peut être mis en place par accord collectif (accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, un accord de branche) qui fixe l’organisation, les modalités d’information, les délais de prévenance et les compensations. À défaut, les conditions sont fixées unilatéralement par l’employeur qui doit engager un processus d’information-consultation du comité social et économique (CSE) et informer l’inspection du travail. Le planning des périodes d’astreinte doit être communiqué à chaque salarié concerné quinze jours à l’avance.

L’article L 3121-9 dispose que le temps d’astreinte doit donner lieu à une contrepartie financière ou sous forme de repos, indépendamment du paiement des heures d’intervention.

Il est constant que le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles que constitue une astreinte la période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif.

En l’espèce, le contrat de travail ne prévoit aucune astreinte et il n’est justifié d’aucun accord collectif fixant les conditions d’organisation et de rémunération des astreintes ni d’aucune information donnée par l’employeur aux salariés sur ces questions.

M. [O] justifie des planning démontrant que les salariés responsables de maintenance dont lui même étaient à tour de rôle d’astreinte pour résoudre les problèmes de maintenance et les parties reconnaissent que M. [O] a été d’astreinte durant 17 semaines.

Elles reconnaissent également qu’il s’agissait d’une astreinte téléphonique qui s’exerçait en dehors des horaires d’ouverture de la société AMETIS, cette dernière affirmant qu’elle était limitée aux heures d’ouverture des magasins clients soit de 18 à 20 heures en semaine et de 10 heures à 20 heures le samedi , alors que M. [O] prétend qu’il s’agissait d’une astreinte qui durait de 24 heures sur 24 , 7 jours sur 7.

La cour relève d’une part que le salarié ne peut être considéré comme étant d’astreinte durant ses heures de travail effectif et prétendre en conséquence à une double rémunération à ce titre et d’autre part qu’il ne justifie pas avoir été amené à répondre au téléphone en dehors des heures d’ouverture des magasins clients.

Si M. [O] verse aux débats un mail du 21 février 2019 adressé par la société à un certain nombre de salariés concernant ‘ les systèmes d’alarme des magasins que ces salariés devaient gérer lors des interventions de nuit’, ce mail ne lui est pas adressé ni à aucun des responsables de maintenance dont le nom figure sur les plannings d’astreinte et la cour en déduit qu’il s’adressait ainsi à une autre catégorie de salariés.

Il est encore relevé que le salarié ne conteste pas avoir pu vaquer durant ces temps à des occupations personnelles .

Il ressort par ailleurs des bulletins de paie versés aux débats que M. [O] a perçu l’équivalent de 17X3 indemnités de ‘grand déplacement’ correspondant donc malgré l’intitulé inapproprié au règlement des 17 semaines d’astreintes qu’il a accomplies étant relevé que M. [O] ne démontre pas ni n’allègue qu’il était amené à se déplacer et que ces indemnités pouvaient donc être la contrepartie de déplacements qu’il aurait été amené à faire pour la société.

C’est en conséquence en vain que M. [O] fait valoir que le non respect des dispositions des articles précités justifie la requalification des astreintes en heures de travail effectif qui doivent être rémunérées en tant que tel alors qu’il ne présente, à l’appui de sa demande, aucun élément quant aux heures de travail effectif qu’il prétend avoir accomplies, heures qu’il ne chiffre d’ailleurs pas.

Le fait que ces dispositions n’aient pas été respectées et qu’aucun décompte des interventions de maintenance faites téléphoniquement par le salarié au cours des astreintes et correspondant à du temps de travail effectif n’ait été établi par l’employeur a néanmoins causé au salarié un préjudice dont il est droit de demander réparation et que la cour évalue à 4 000 euros.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté M. [O] de ses demandes de rappel de salaire au titre du paiement de l’intégralité des temps d’astreinte, des congés payés afférents et de l’absence d’information sur la contrepartie obligatoire en repos .

La société AMETIS est par infirmation du jugement condamnée à payer à M. [O] la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non communication des temps de travail effectif.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non respect des durées maximales du travail et des temps de repos:

Le dépassement de la durée maximale du travail et des temps de repos n’étant pas établi, le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté M. [O] de la demande faite à ce titre.

Sur l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé:

L’article 8121-5 du code du travail dispose quant à lui que est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur

– soit de soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité relative à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli

– soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires et aux cotisations sociales.

Aux termes de l’article L8223-1 du code du Travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L 8122-3 ou en commettant les faits prévus à l’article 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires.

En l’espèce la société qui s’est abstenue d’établir un décompte permettant de faire ressortir le nombre d’heures de travail effectif accompli par le salarié pendant les temps d’astreintes et qui a rémunéré ces astreintes sous forme ‘d’indemnité de grand déplacement’ non soumises à cotisations sociales, a intentionnellement dissimulé une partie du travail accompli par le salarié et s’est intentionnellement soustraite aux déclarations relatives aux salaires et aux cotisations sociales.

Par infirmation du jugement la société Amétis est en conséquence condamnée au paiement de la somme de 26 400 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Sur la clause de non-concurrence:

Le salarié soutient que la clause de non-concurrence qui aurait du être levée au plus tard le 10 avril ne l’ a été que le 4 mai 2020 ce qui lui ouvre droit au paiement de la contrepartie financière de cette clause.

La société soutient que la tardiveté de la renonciation est imputable à M. [O] qui a tardé à fixer un rendez-vous , a refusé de prendre son solde de tout compte ainsi que le courrier de levée de la clause lors du rendez-vous qui s’est tenu le 30 avril. Elle ajoute que l’homologation a, en raison de la période sanitaire, pris plus de temps que prévu. La société affirme avoir fait preuve de célérité et que le salarié ne justifie d’aucun préjudice.

Il est constant que dans le cadre d’une rupture conventionnelle, l’employeur qui entend renoncer à la clause de non concurrence doit le faire au plus tard à la date de la rupture fixée par la convention nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires.

En l’espèce le contrat de travail liant les parties prévoyait une clause de non concurrence d’une durée d’un an à compter de la date de la rupture effective du contrat, aux termes de laquelle M. [O] devait percevoir à compter de cette rupture et pendant la durée d’application de la clause, une indemnité mensuelle brute d’un montant égal à 25 % du salaire moyen brut de base des 3 derniers mois précédant la rupture.

Cette clause stipulait que l’entreprise se réservait le droit de libérer M. [O] de son

obligation de non concurrence, sans que celui-ci puisse prétendre au paiement d’une quelconque indemnité, notification devant être faite par recommandé avec accusé de réception, au moment de la rupture, quel qu’en soit l’auteur.

La rupture conventionnelle signée entre les parties le 4 mars 2020 fixait la date envisagée de la rupture au 10 avril 2020, date à laquelle la société Amétis a établi tous les documents de fin de contrat. Cette rupture a été homologuée le 27 avril 2020.

Il ressort des documents versés aux débats que la société AMETIS n’a libéré M. [O] de la clause de non concurrence que par courrier adressé en recommandé au salarié le 4 mai 2020 soit postérieurement à la rupture effective du contrat de travail.

Le salaire de base moyen des 3 derniers mois s’élevant à 4 400 euros il y a lieu par infirmation du jugement de condamner la société AMETIS à payer à M. [O] la somme de 13 200 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non concurrence .

Sur les autres demandes:

Pour faire valoir ses droits en cause d’appel, M. [O] a dû exposer des frais qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge.

La société AMETIS sera en conséquence condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 outre les dépens de 1ère instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour ,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu’il a débouté M. [Z] [O] de ses demandes de :

– dommages et intérêts pour non communication des temps de travail effectif,

– indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

– indemnité compensatrice au titre de la clause de non concurrence

et statuant à nouveau des chefs du jugement infirmés, et y ajoutant

CONDAMNE la SASU Amétis à payer à M. [Z] [O] les sommes de :

– 4 000 euros de dommages et intérêts pour non communication des temps de travail effectif,

– 26 400 euros d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

– 13 200 euros d’indemnité compensatrice au titre de la clause de non concurrence

– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SASU Amétis aux dépens de 1ère instance et d’appel

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


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