Honoraires d’avocat : Évaluation et remboursement partiel en raison de diligences contestées.

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Honoraires d’avocat : Évaluation et remboursement partiel en raison de diligences contestées.

La contestation des honoraires d’un avocat est régie par des dispositions spécifiques qui encadrent la relation entre l’avocat et son client, notamment en matière de fixation des honoraires. En l’absence d’une convention d’honoraires signée, l’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 stipule que les honoraires doivent être déterminés selon les usages, en tenant compte de divers critères tels que la situation financière du client, la difficulté de l’affaire, les frais engagés par l’avocat, sa notoriété et les diligences effectuées. Cette règle vise à garantir une certaine équité dans la rémunération des avocats tout en protégeant les clients, notamment ceux en situation de vulnérabilité.

Concernant l’abus de l’état de vulnérabilité, il est essentiel de noter que la simple existence d’un état de vulnérabilité, tel que l’âge avancé ou des problèmes de santé, ne suffit pas à établir un abus. La jurisprudence exige des preuves concrètes démontrant que l’avocat a profité de cette vulnérabilité pour imposer des honoraires excessifs ou inappropriés. En l’espèce, bien que M. [L] [J] ait fourni des éléments attestant de son âge et de son suivi médical, ces documents ne suffisent pas à prouver que l’avocat a abusé de sa situation.

Enfin, la vérification des diligences accomplies par l’avocat est une prérogative des instances disciplinaires et judiciaires. Ces dernières ne doivent pas se prononcer sur la qualité du travail effectué ou la stratégie adoptée par l’avocat, mais seulement s’assurer que les diligences pour lesquelles le paiement est demandé ont été régulièrement effectuées. Dans le cas présent, la production d’une requête en annulation de permis de construire, bien que contestée par M. [L] [J], a été jugée suffisante pour établir que des diligences avaient été réalisées, justifiant ainsi la fixation des honoraires à un montant inférieur à celui initialement demandé.

Les articles pertinents à considérer dans ce contexte incluent l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et l’article 177 du décret du 27 novembre 1991, qui régissent respectivement la fixation des honoraires et la notification des décisions judiciaires.

L’Essentiel : La contestation des honoraires d’un avocat est encadrée par des dispositions spécifiques. En l’absence d’une convention signée, les honoraires doivent être déterminés selon les usages, en tenant compte de la situation financière du client, de la difficulté de l’affaire, des frais engagés, de la notoriété de l’avocat et des diligences effectuées. La simple existence d’un état de vulnérabilité ne suffit pas à établir un abus ; des preuves concrètes sont nécessaires. La vérification des diligences est une prérogative des instances disciplinaires et judiciaires.
Résumé de l’affaire :

Confiance en l’avocat

En juin 2023, M. [L] [J] a engagé M. [V] [E], avocat au barreau de Chartres, pour défendre ses intérêts dans une procédure d’annulation de permis de construire.

Contestations des honoraires

Le 14 décembre 2023, M. [L] [J] a contesté les honoraires de M. [V] [E] auprès de la bâtonnière du barreau de Chartres.

Absence de décision

La bâtonnière n’a pas rendu de décision en raison de l’absence d’observations de M. [E] et de l’expiration du délai prévu par le décret du 27 novembre 1971, informant M. [L] [J] par courrier le 30 avril 2024.

Saisine du premier président

M. [L] [J] a saisi le premier président par lettre recommandée le 4 mai 2024. L’affaire a été appelée à l’audience du 16 octobre 2024, où M. [E] n’a pas comparu.

Production de documents

M. [J] a été autorisé à produire en délibéré la copie de sa première requête de 2021, mais a indiqué ne pas l’avoir retrouvée par courrier du 17 octobre 2024.

Arguments de M. [L] [J]

M. [L] [J] soutient que l’avocat a abusé de sa vulnérabilité en raison de son âge et de sa maladie, et qu’il a payé 3600 euros pour une requête qui n’était qu’un copier-coller de la première, pour laquelle il avait déjà payé 480 euros.

Recevabilité du recours

Le recours de M. [L] [J] est déclaré recevable, ayant été introduit moins d’un mois après le courrier de la bâtonnière.

Absence de convention d’honoraires

Il est noté qu’aucune convention d’honoraires n’a été signée entre M. [L] [J] et M. [V] [E], mais cela ne prive pas l’avocat du droit de percevoir des honoraires pour ses diligences.

État de vulnérabilité

M. [J] a fourni des documents attestant de son âge et de son suivi médical, mais ceux-ci ne prouvent pas à eux seuls un abus de l’état de vulnérabilité.

Diligences effectuées

M. [J] a payé une première facture de 480 euros pour des diligences en 2021, et une note de frais de 3600 euros a été émise en 2023. Il a produit une requête de 7 pages pour annuler un permis de construire, mais n’a pas pu prouver que cette requête était un simple copier-coller de la précédente.

Différences entre les procédures

Les procédures de 2021 et 2023 étaient différentes, la première ayant été initiée par la mairie et la seconde devant le tribunal administratif.

Honoraires fixés

Les honoraires de M. [V] [E] sont fixés à 2000 euros TTC, et M. [E] est condamné à rembourser 1600 euros TTC à M. [L] [J].

Condamnation aux dépens

M. [V] [E] est également condamné aux dépens de la procédure.

Notification de la décision

La décision sera notifiée aux parties par le greffe de la cour par lettre recommandée avec avis de réception.

Q/R juridiques soulevées :

La recevabilité du recours de l’acheteur

Le recours de l’acheteur est déclaré recevable puisqu’il a été introduit le 4 mai 2024, soit moins d’un mois après le courrier de la bâtonnière du barreau de Chartres du 30 avril 2024.

Cette recevabilité est conforme aux dispositions de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, qui stipule que le client peut contester les honoraires d’un avocat dans un délai raisonnable après notification de la décision de la bâtonnière.

La fixation des honoraires en l’absence de convention

Il est rappelé que la procédure spécifique de contestation des honoraires est limitée à la fixation des honoraires. En l’espèce, aucune convention d’honoraires n’a été régularisée entre l’acheteur et l’avocat.

Le défaut de signature d’une convention ne prive pas l’avocat du droit de percevoir des honoraires pour ses diligences, dès lors que celles-ci sont établies.

Selon l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, à défaut de convention entre l’avocat et son client, l’honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences accomplies par celui-ci.

L’abus de l’état de vulnérabilité

L’acheteur prétend que l’avocat a abusé de son état de vulnérabilité. Il est établi par la carte d’identité versée au dossier que l’acheteur est né en 1940, ce qui le rend âgé de 83 ans en 2023.

De plus, il justifie par un compte rendu médical qu’il a eu un suivi médical. Cependant, ces documents n’établissent pas à eux seuls ni l’état de vulnérabilité ni un abus de cet état.

Les diligences accomplies par l’avocat

Il ressort des débats et des pièces versées au dossier que l’acheteur a payé une première facture de 480 euros pour des diligences en matière d’urbanisme. Cette somme n’est pas contestée.

Une note de frais et honoraires a été envoyée à l’acheteur d’un montant de 3600 euros TTC pour des diligences en matière d’urbanisme.

L’acheteur prétend que cette requête est un copier-coller de la première requête de 2021. Or, il n’a pu fournir cette requête, de sorte qu’il ne prouve pas que les diligences accomplies en 2023 n’étaient qu’une reprise de celles de 2021.

En outre, il résulte du dossier que les procédures étaient différentes. En 2021, la mairie a retiré le premier permis de construire à la demande du bénéficiaire, tandis qu’en 2023, la procédure est engagée devant le tribunal administratif.

La qualité du travail effectué par l’avocat

L’acheteur prétend que la procédure était inutile. Toutefois, il n’appartient ni au bâtonnier ni au premier président saisis en matière de contestation d’honoraires d’avocat de se faire juge de la qualité du travail effectué ni de la stratégie choisie par le conseil.

Il s’agit simplement de vérifier que les diligences dont il est demandé paiement ont été régulièrement effectuées.

La requête produite par l’acheteur, avec deux moyens d’illégalité soulevés, correspond à un travail de prise en charge du dossier, d’analyse et de rédaction.

Le montant des honoraires fixés

Ainsi, compte tenu de la nature du litige, de sa difficulté et des diligences accomplies, la procédure n’ayant pas été menée à son terme, il y a lieu de fixer les honoraires de l’avocat à la somme de 2000 euros TTC.

L’acheteur ayant réglé la somme de 3600 euros TTC, l’avocat sera condamné à rembourser à l’acheteur la somme de 1600 euros TTC.

Les frais du procès

L’avocat, qui succombe, sera condamné aux dépens.

COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 97J

N° RG 24/03232 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WRPP

Du 13 Novembre 2024

Copies

délivrées le :

à :

M. [J]

Me [E]

ORDONNANCE

LE TREIZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

prononcé par mise à disposition au greffe,

Nous, Nathalie BOURGEOIS-DE RYCK, Première présidente de chambre à la cour d’appel de VERSAILLES, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière de contestations d’honoraires et de débours relatifs à la profession d’avocat vu les articles 176 et 178 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, assistés de [P] [K], Greffière stagiaire en préaffectation, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [L] [J]

[Adresse 4]

[Localité 3]

comparant

DEMANDEUR

ET :

Maître [V] [E]

[Adresse 2]

[Localité 1]

non comparant

DEFENDEUR

à l’audience publique du 16 Octobre 2024 où nous étions Nathalie BOURGEOIS-DE RYCK, Première présidente de chambre assistée de Rosanna VALETTE, Greffier, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

En juin 2023, M. [L] [J] a confié à M. [V] [E] du cabinet MRKG, avocat au barreau de Chartres, la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure d’annulation de permis de construire.

M. [L] [J] a saisi la bâtonnière du barreau de Chartres d’une contestation des honoraires de M. [V] [E] le 14 décembre 2023.

Faute d’observations de M. [E] et le délai prévu par le décret du 27 novembre 1971 ayant expiré, la bâtonnière de l’ordre des avocats du barreau de Chartres n’a pas rendu de décision et en a informé le requérant par courrier du 30 avril 2024.

Cette décision a été notifiée à M. [L] [J].

M. [L] [J] a saisi le premier président par lettre recommandée avec accusé de réception, expédiée le 4 mai 2024.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 16 octobre 2024 à laquelle l’intimé quoique régulièrement convoqué n’a pas comparu. L’affaire a été mise en délibéré au 13 novembre 2024.

M. [J] a été autorisé à produire en délibéré la copie de la première requête de 2021.

Par courrier du 17 octobre 2024, il a indiqué ne pas avoir retrouvé cette requête.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

À l’appui de son recours, M. [L] [J] soutient qu’après une première intervention en 2021 qui avait abouti à l’annulation du permis, une nouvelle demande de permis a été déposée par sa voisine et que l’avocat n’a fait qu’un copier-coller de la première requête pour laquelle il avait payé 480 euros TTC alors qu’il a payé 3600 euros de provision et de frais pour la seconde requête qui de surcroit a été mal orientée. Il prétend que l’avocat a profité de son état de vulnérabilité en raison de son âge et de sa maladie. Il s’est référé oralement à ses écritures aux termes desquelles il demande le remboursement de la somme de 3600 euros.

SUR CE

Le recours de M. [L] [J] est déclaré recevable puisqu’étant intervenu le 4 mai 2024 soit moins d’un mois après le courrier de la bâtonnière de [Localité 1] du 30 avril 2024.

Sur le fond

Il est rappelé que la procédure spécifique de contestation des honoraires est limitée à la fixation des honoraires.

En l’espèce, aucune convention d’honoraires n’a été régularisée entre M. [L] [J] et M. [V] [E], avocat.

Le défaut de signature d’une convention ne prive pas l’avocat du droit de percevoir des honoraires pour ses diligences, dès lors que celles-ci sont établies. Selon l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, à défaut de convention entre l’avocat et son client, l’honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences accomplies par celui-ci.

Sur l’abus de l’état de vulnérabilité

M. [J] prétend que l’intimé a abusé de son état de vulnérabilité.

Il est établi par la carte d’identité versée au dossier que M. [J] est né en 1940 et qu’il était donc âgé en 2023 de 83 ans. De même, il justifie par un compte rendu médical en date du 26 octobre 2023 qu’il a eu un suivi médical.

Pour autant, ces documents n’établissent pas à eux seuls ni l’état de vulnérabilité ni un abus de cet état.

Sur les diligences accomplies

Il ressort des débats et des pièces versées au dossier par l’appelant seulement, que M. [J] a payé une première facture de 480 euros du 17 mai 2021 pour des diligences en matière d’urbanisme à M. [E]. Cette somme n’est pas contestée.

Une note de frais et honoraires n°230985 a été envoyée le 13 juillet 2023 à M. [J] d’un montant de 3600 euros TTC pour diligences en matière d’urbanisme.

A l’audience, M. [J] produit une requête introductive d’instance devant le tribunal administratif datée du 10 août 2023 pour une annulation de permis de construire. Cette requête de 7 pages vise 9 pièces et soulève deux exceptions d’illégalité.

M. [J] prétend que cette requête est un copier-coller de la première requête de 2021 pour laquelle il a déjà payé 480 euros. Il a été autorisé à l’audience à fournir cette première requête alléguée en cours de délibéré. Or, il n’a pu fournir cette requête de sorte qu’il ne prouve pas que les diligences accomplies en 2023 n’auraient été, comme il l’affirme, que la reprise de celles de 2021.

En outre, il résulte du dossier que les procédures étaient différentes.

En 2021, la mairie a retiré le premier permis de construire à la demande du bénéficiaire ainsi que cela résulte de l’arrêté lui-même du 11 mai 2021 produit par l’appelant. Il n’est pas fait état d’une requête de l’appelant.

En 2023, la procédure est engagée devant le tribunal administratif.

M. [J] prétend que cette procédure était inutile. Toutefois, il n’appartient ni au bâtonnier, ni au premier président saisis en matière de contestation d’honoraires d’avocat de se faire juge de la qualité du travail effectué ni de la stratégie choisie par le conseil mais simplement de vérifier que les diligences dont il est demandé paiement ont été régulièrement effectuées.

Or, la requête produite par l’appelant, de 6 pages, avec 2 moyens d’illégalité soulevés correspond à un travail de prise en charge du dossier, d’analyse et de rédaction, à tout le moins.

Ainsi, compte tenu de la nature du litige, de sa difficulté et des diligences accomplies, la procédure n’ayant pas été menée à son terme, il y a lieu de fixer les honoraires de M. [E] du cabinet MRKG à la somme de 2000 euros TTC.

M.[J] ayant réglé la somme de 3600 euros TTC, M. [E] sera condamné à rembourser à M. [J] la somme de 1600 euros TTC.

Sur les frais du procès

M. [V] [E] qui succombe sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe et par ordonnance réputée contradictoire,

Le magistrat délégué par le premier président,

– Déclare M. [L] [J] recevable en son recours

– Fixe les honoraires de M. [V] [E], du cabinet MRKG, avocat au barreau de Chartres à la somme de 2000 € TTC

– Condamne M. [V] [E] à rembourser à M. [L] [J] la somme de 1600 € TTC

– Rejette le surplus des demandes

– Dit que les dépens de la présente procédure seront supportés par M. [V] [E]

– Dit qu’en application de l’article 177 du décret du 27 novembre 1991, la présente décision sera notifiée aux parties par le greffe de la cour par lettre recommandée avec avis de réception.

Prononcé par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et ont signé la présente ordonnance :

La Greffière, La Première présidente de chambre,


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