L’employeur est tenu, en vertu de l’article L. 4121-1 du Code du travail, d’une obligation de sécurité envers ses salariés, ce qui implique qu’il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale. Cette obligation inclut des actions de prévention des risques professionnels, d’information et de formation, ainsi que la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. En cas de manquement à cette obligation, l’employeur peut être tenu responsable des conséquences sur la santé des salariés, comme le stipule l’article L. 4121-2 du même code.
Par ailleurs, l’article L. 1152-1 du Code du travail prohibe le harcèlement moral en précisant qu’aucun salarié ne doit subir des agissements répétés qui dégradent ses conditions de travail, portent atteinte à ses droits et à sa dignité, altèrent sa santé physique ou mentale, ou compromettent son avenir professionnel. En cas de litige relatif à l’application des dispositions sur le harcèlement, l’article L. 1154-1 impose à l’employeur de prouver que les agissements contestés ne sont pas constitutifs de harcèlement, une fois que le salarié a établi des faits permettant de présumer l’existence d’un tel harcèlement. En ce qui concerne l’exécution du contrat de travail, l’article 1104 du Code civil impose que le contrat soit exécuté de bonne foi, et les articles 1231 et 1231-1 prévoient que le débiteur d’une obligation contractuelle peut être condamné à des dommages-intérêts en cas d’inexécution. |
L’Essentiel : L’employeur doit assurer la sécurité et la santé de ses salariés en prenant des mesures de prévention, d’information et de formation. En cas de manquement, il peut être tenu responsable des conséquences sur la santé des employés. Le harcèlement moral est prohibé, et l’employeur doit prouver que les agissements contestés ne constituent pas de harcèlement si le salarié établit des faits en ce sens. De plus, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi, avec des sanctions possibles en cas d’inexécution.
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Résumé de l’affaire :
Présentation de la sociétéLa société Lumen Technologies France est une société par actions simplifiée à associé unique (SASU) immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre, spécialisée dans l’exécution de prestations de service de télécommunications filaires et employant plus de 11 salariés. Engagement d’un salariéUn salarié a été engagé par la société Lumen Technologies France en qualité de desk based account manager par contrat à durée indéterminée en date du 22 décembre 2015, avec un salaire moyen brut de 3 980,14 euros par mois, assorti d’une part variable de rémunération. Arrêts de travail et inaptitudeLe salarié a été placé en arrêt de travail pour cause de maladie non-professionnelle à plusieurs reprises en 2018. Le 15 novembre 2018, la médecine du travail a déclaré le salarié inapte à tout poste de travail, indiquant que son maintien dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. Licenciement pour inaptitudeLa société a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement, et l’a licencié le 14 décembre 2018 pour inaptitude définitive, avec dispense de reclassement. Le salarié a contesté ce licenciement en saisissant le conseil de prud’hommes de Nanterre. Jugement du conseil de prud’hommesLe conseil de prud’hommes a jugé que le salarié n’avait pas été victime de harcèlement moral, mais a reconnu que la société avait manqué à son obligation de prévention du harcèlement et à son obligation d’assurer la sécurité et la santé du salarié. Le licenciement a été jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse. Appel du salariéLe salarié a interjeté appel de ce jugement, demandant la reconnaissance de harcèlement moral et la nullité de son licenciement. Il a sollicité des dommages-intérêts substantiels pour diverses raisons, y compris le harcèlement moral et le manquement à l’obligation de sécurité. Réponse de la sociétéLa société Lumen Technologies France a demandé la confirmation du jugement initial, tout en contestant les allégations de harcèlement et en soutenant qu’elle avait respecté ses obligations contractuelles et légales. Évaluation des allégations de harcèlementLe salarié a allégué des injonctions contradictoires, un défaut de formation, des transferts de projets commerciaux, une augmentation injustifiée des objectifs, ainsi que des insultes et des actes de malveillance. Cependant, le tribunal a jugé que ces allégations n’étaient pas suffisamment prouvées. Obligation de sécurité de l’employeurLe tribunal a également examiné l’obligation de sécurité de l’employeur, concluant que la société avait pris des mesures appropriées en réponse aux incidents signalés par le salarié et qu’il n’y avait pas de manquement à cette obligation. Conclusion du jugement d’appelLa cour a infirmé partiellement le jugement du conseil de prud’hommes, mais a débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité et de prévention du harcèlement. Les parties ont été condamnées aux dépens, et aucune des demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile n’a été retenue. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la qualification de harcèlement moralLa question se pose de savoir si le salarié a été victime de harcèlement moral au sein de la société Lumen Technologies France, en vertu des dispositions de l’article L. 1152-1 du code du travail. Cet article stipule qu’« aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » Pour établir l’existence d’un harcèlement moral, il incombe au salarié de prouver des faits laissant présumer un tel harcèlement. En l’espèce, le salarié a allégué des injonctions contradictoires, un défaut de formation, des transferts de projets commerciaux, une augmentation injustifiée des objectifs, ainsi que des insultes et des actes de malveillance. Cependant, la cour a constaté que le salarié n’a pas apporté de preuves suffisantes pour établir ces allégations. Par exemple, concernant le défaut de formation, le salarié n’a pas démontré avoir sollicité une formation spécifique. De même, les transferts de projets commerciaux n’ont pas été prouvés de manière concluante. Ainsi, la cour a conclu que le salarié n’a pas établi l’existence de harcèlement moral, ce qui a conduit à débouter sa demande de dommages-intérêts à ce titre. Sur l’obligation de sécurité de l’employeurLa question se pose de savoir si la société Lumen Technologies France a manqué à son obligation de sécurité envers le salarié, conformément à l’article L. 4121-1 du code du travail. Cet article impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. En l’espèce, le salarié a soutenu avoir alerté la direction sur sa souffrance au travail, mais la cour a relevé que les alertes n’étaient pas établies, car les pièces produites étaient rédigées en anglais sans traduction. La société a démontré avoir mis en place un document unique d’évaluation des risques et avoir pris des mesures suite aux violences subies par le salarié. Par conséquent, la cour a jugé qu’il n’y avait pas de manquement à l’obligation de sécurité, et a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts à ce titre. Sur l’exécution de bonne foi du contrat de travailLa question se pose de savoir si la société a manqué à son obligation d’exécuter le contrat de travail de bonne foi, conformément aux articles 1104 du code civil et L. 1222-1 du code du travail. Ces articles stipulent que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. Le salarié a demandé des dommages-intérêts pour manquement à cette obligation, en invoquant le harcèlement moral et le manquement à ses obligations de prévoyance. Cependant, la cour a constaté que le harcèlement n’avait pas été retenu, et que le salarié n’avait pas prouvé le manquement de l’employeur à ses obligations de prévoyance. Ainsi, la cour a confirmé le jugement ayant débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Sur l’origine de l’inaptitude et ses conséquencesLa question se pose de savoir si l’inaptitude du salarié a une origine professionnelle, ce qui aurait des conséquences sur la validité de son licenciement. En effet, le licenciement pour inaptitude doit être fondé sur une cause réelle et sérieuse, conformément à l’article L. 1232-1 du code du travail. La cour a constaté que l’inaptitude du salarié n’avait pas d’origine professionnelle, car le harcèlement moral n’avait pas été retenu et l’employeur n’avait pas manqué à son obligation de sécurité. Par conséquent, le licenciement prononcé pour inaptitude a été jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse, et la cour a débouté le salarié de ses demandes d’indemnités liées à ce licenciement. Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civileLa question se pose de savoir si les parties doivent être condamnées aux dépens et aux frais irrépétibles, conformément à l’article 700 du code de procédure civile. Cet article permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. La cour a décidé d’infirmer le jugement en ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles, en déboutant les parties de leurs demandes à ce titre. Cela signifie que chaque partie supportera ses propres frais, sans indemnisation de l’autre partie. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
Chambre sociale 4-3
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 NOVEMBRE 2024
N° RG 22/01796 –
N° Portalis DBV3-V-B7G-VHVK
AFFAIRE :
[U] [I]
C/
S.A.S.U. LUMEN TECHNOLOGIES FRANCE anciennement dénommée Société CENTURYLINK COMMUNICATIONS FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendue le 11 Avril 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE
N° Section : E
N° RG : 19/00679
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU
Me Pierre-antoine CALS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [U] [I]
né le 11 Novembre 1990 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620
Plaidant : Me Frédéric MANDEL de l’AARPI DESFILIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0367
APPELANT
****************
S.A.S.U. LUMEN TECHNOLOGIES FRANCE anciennement dénommée Société CENTURYLINK COMMUNICATIONS FRANCE
N° SIRET : 420 989 154
[Adresse 5]
[Localité 2] / FRANCE
Représentant : Me Pierre-antoine CALS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 719
Plaidant : Me Jérôme CHOMEL DE VARAGNES de la SELARL EQUIPAGE AVOCATS, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1077
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Octobre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseillère chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Laurence SINQUIN, Présidente,
Mme Florence SCHARRE, Conseillère,
Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseillère,
Greffier lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,
La société Lumen Technologies France est une société par actions simplifiée à associé unique (SASU) immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) de Nanterre, sous le n° 420 989 154.
La société Lumen Technologies France a pour activité l’exécution de prestations de service de télécommunications filaires.
Elle emploie plus de 11 salariés.
Par contrat à durée indéterminée en date du 22 décembre 2015, M. [U] [I] a été engagé par la société Lumen Technologies France, venant aux droits de la société Level 3 Communications, en qualité de desk based account manager, statut cadre, groupe E, seuil 3, à compter du 1er mars 2016.
Au dernier état de la relation de travail, M. [I] exerçait des fonctions commerciales et percevait un salaire moyen brut de 3 980,14, euros par mois, assorti d’une part variable de rémunération.
Les relations contractuelles étaient régies par les dispositions de la convention collective nationale des télécommunications.
M. [I] a été placé en arrêt de travail pour cause de maladie non-professionnelle du 3 au 5 juillet 2018, du 9 au 15 juillet, du 25 juillet au 14 novembre et du 16 novembre au 14 décembre 2018.
Par avis de la médecine du travail en date du 15 novembre 2018, M. [I] a été déclaré inapte à tout poste de travail en ces termes : « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. »
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 27 novembre 2018, la société Lumen Technologies France a convoqué M. [I] à un entretien préalable à un éventuel licenciement, prévu le 11 décembre 2018.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 14 décembre 2018, la société Lumen Technologies France a notifié à M. [I] son licenciement pour inaptitude définitive, avec dispense de reclassement.
Par requête introductive reçue au greffe le 13 mars 2019, M. [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre d’une demande tendant à ce que son licenciement pour inaptitude soit jugé comme étant sans cause réelle et sérieuse et à faire reconnaître l’existence d’une situation de harcèlement moral.
Par jugement en date du 11 avril 2022, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Nanterre a :
– dit et jugé que M. [U] [I] n’a pas été victime de harcèlement moral au sein de la société Lumen Technologies France venant aux droits de la société Centurylink Communications ;
– dit et jugé que la société Lumen Technologies France a manqué à son obligation de prévention du harcèlement ;
– dit et jugé que la société Lumen Technologies France a manqué à son obligation d’assurer la sécurité et la santé de M. [I] ;
– dit et jugé que la société Lumen Technologies France n’a pas exécuté de mauvaise foi le contrat de travail qui la liait à M. [U] [I] ;
– dit et jugé que le licenciement de M. [U] [I] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
– fixé le salaire mensuel brut moyen de M. [I] à 3 980,14 euros ;
En conséquence,
– condamné la société Lumen Technologies France à verser à M. [U] [I] les sommes suivantes :
* 24 000 euros de dommages-intérêts, à titre subsidiaire, pour manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat ;
* 3 980,14 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de prévention du harcèlement telle que prévue à l’article L. 1152-4 code du travail ;
– condamné la société Lumen Technologies France à verser à M. [I] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Lumen Technologies France aux entiers dépens ;
– débouté M. [I] du surplus de ses demandes ;
– débouté la société Lumen Technologies France de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté la société Lumen Technologies France du surplus de ses demandes.
Par déclaration remise au greffe de la cour d’appel de Versailles, le 8 juin 2022, M. [U] [I] a interjeté appel de ce jugement.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 18 septembre 2024.
A l’audience de plaidoiries du 14 octobre 2024, le conseiller rapporteur a proposé aux parties d’entrer en médiation et sollicité leur réponse par le RPVA le 21 octobre 2024 au plus tard.
Par message RPVA adressé par le conseil de M. [I] le 22 octobre 2024, il a été indiqué à la cour qu’il ne souhaitait pas entrer en voie de médiation.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 24 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et prétentions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, M. [I], appelant et intimé à titre incident, demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre le 11 avril 2022 ;
Statuant à nouveau :
– juger que M. [U] [I] a été victime de harcèlement moral au sein de la société Lumen Technologies France ;
– juger que la société Lumen Technologies France a manqué à son obligation d’assurer la sécurité et la santé de M. [U] [I] ;
– juger que Lumen Technologies France a exécuté de mauvaise foi le contrat de travail qui la liait à
M. [U] [I] ;
– juger que le licenciement de M. [U] [I] est nul et à titre subsidiaire sans cause réel et sérieuse ;
En conséquence,
– condamner la société Lumen Technologies France à verser à M. [U] [I] les sommes suivantes sur la base d’un salaire mensuel brut moyen de 3 980,14 euros :
* 72 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse correspondant à 18 mois de salaire ;
* 47 760 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et à titre subsidiaire manquement à l’obligation de sécurité de résultat correspondant à 12 mois de salaire ;
* 7 960 euros à titre de dommages intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de prévention du harcèlement telle que prévue à l’article L. 1152- 4 code du travail ;
* 23 880 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’exécution de bonne foi du contrat de travail correspondant à 6 mois de salaire ;
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les conséquences du défaut de paiement des cotisation prévoyance ;
* 11 940,42 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;
* 1 194,04 euros au titre des congés payés y afférents ;
* 3 567,72 euros à titre de rappel d’indemnité spéciale de licenciement ;
* 5 000 euros en application de l’article 700 code de procédure civile.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 28 mars 2024, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et prétentions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la société Lumen Technologies France, venant aux droits de la société Centurylink Communications France, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre le 11 avril 2022, en ce qu’il a jugé que M. [I] n’avait pas été victime de harcèlement moral, qu’elle n’avait pas exécuté de mauvaise fois le contrat de travail, que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et l’a ainsi débouté de ses demandes à ces titres ;
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre le 11 avril 2022 pour le surplus et en ce qu’il a jugé qu’elle avait manqué à son obligation de prévention du harcèlement et à son obligation d’assurer la sécurité et la santé de M. [I] et, en conséquence, l’a condamnée à lui verser diverses sommes à ces titres, ainsi qu’au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau :
– débouter M. [I] de l’ensemble de ses demandes ; et subsidiairement les réduire à de plus justes proportions ;
En tout état de cause :
– condamner M. [I] à lui verser la somme de 2 500 euros à titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [I] aux entiers dépens.
Sur le harcèlement moral
M. [I] sollicite la somme de 47 760 euros de dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral subi de la part de l’employeur, ce que ce dernier conteste.
L’article L. 1152-1 du code du travail dispose qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon l’article L. 1154-1, en sa version applicable au litige (du 1er mai 2008 au 10 août 2016) : « Lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ».
Il revient donc au salarié d’établir la matérialité des faits, à charge pour le juge d’apprécier si ces faits, pris en leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral. Dans la négative, le harcèlement moral ne peut être reconnu. Dans l’affirmative, il revient à l’employeur de prouver que ces faits sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l’espèce, à l’appui du harcèlement moral, M. [I] allègue les faits suivants:
A/ Des injonctions contradictoires : la direction faisait pression pour la réalisation des objectifs en le privant délibérément des moyens de les atteindre et alors qu’il n’avait reçu aucune formation initiale et a été laissé livré à lui-même
Le défaut de formation
Le salarié, qui ne conteste pas avoir participé à une semaine d’intégration lors de son engagement, ne produit aucun élément à ce titre, et ne démontre pas davantage avoir sollicité de son employeur une formation spécifique sur le poste. Cet élément n’est donc pas établi.
Contrairement aux prévisions contractuelles, le poste de M. [I] n’était pas un poste sédentaire
Selon l’article 4 du contrat, le lieu de travail du salarié engagé en qualité de desk based account manager, statut cadre, ayant comme mission de vendre des produits et solutions de Level Communications aux entreprises :
– était « basé au siège social, à [Localité 2] »,
– « Si l’intérêt de son fonctionnement ou l’exercice des fonctions l’exige, la société pourra à tout moment modifier le lieu de travail de M. [I], pour le fixer en tout autre lieu de la région Ile de France sans que cela ne constitue une modification de son contrat de travail, ce que M. [I] accepte expressément, y compris si cela entraîne un changement de résidence »,
– « En outre, l’exercice des fonctions de M. [I] nécessite des déplacements en France et à l’étranger, pour des durées plus ou moins longues ».
Il ne résulte pas des dispositions contractuelles précitées que le poste de M. [I] était sédentaire, puisque des déplacements étaient expressément prévues, de sorte que les 8 déplacements dont 3 en Province justifiés par le salarié s’inscrivent en conformité avec les dispositions précitées prévoyant des déplacements en France et à l’étranger.
L’élément allégué n’est donc pas établi.
L’obligation de consacrer du temps (70 %) à des tâches relevant de la compétence d’autres services de Lumen Technologies
En vertu de l’article 3 du contrat, le salarié, ayant pour mission de conclure des contrats commerciaux avec des clients afin de leur vendre les produits de la société Level Communications, avait pour fonction :
« De communiquer avec les clients en utilisant son réseau, la prospection, les emails et les réseaux sociaux. Le Desk based manager doit être capable d’atteindre et de dépasser les objectifs de ventes en concluant des affaires commerciales par téléphone. Il doit également avoir une attitude positive et déterminée afin de construire d’excellentes relations avec les clients et de « concluer » (sic) des affaires.
De manière générale, M. [I] pourra se voir demander par son supérieur hiérarchique ou toute personne se substituant à lui, tous travaux complémentaires en rapport avec sa qualification, et nécessités par les impératifs du service.
Il est précisé que ces attributions ne présentant aucun caractère exhaustif, la société se réserve le droit de pouvoir modifier le contenu dans le respect de la qualification de M. [I] sans que cette modification ne constitue pour autant une modification du contrat de travail, ce que M. [I] accepte expressément par la signature des présentes.
Ces attributions seront exercées par M. [I] sous l’autorité et dans le cadre des instructions données par son supérieur hiérarchique, ou toute personne qui pourrait lui être substituée, auquel il sera subordonné et auprès duquel il rendra compte de son activité ».
M. [I] établit qu’il est intervenu ponctuellement au titre de la facturation, pour la gestion du déploiement et des incidents et s’agissant des pénalités contractuelles, en rapport avec le suivi des contrats commerciaux signés et conformément à ses attributions contractuelles précitées.
Néanmoins, il ne justifie pas qu’il était privé d’accès aux fonctions support comme il le soutient puisque les pièces versées aux débats établissent au contraire qu’il en était l’intermédiaire et était consulté au regard de sa connaissance des dossiers clients. Il n’est donc pas démontré qu’il effectuait des tâches ne relevant pas de ses attributions contractuelles, ni qu’il y consacrait 70 % de son temps. Cet élément de fait n’est donc pas établi.
En définitive, le salarié n’établit pas l’existence du fait allégué portant sur les injonctions contradictoires (la direction faisait pression pour la réalisation des objectifs en le privant délibérément des moyens de les atteindre et alors qu’il n’avait reçu aucune formation initiale et a été livré à lui-même).
B/ Les transferts de projets commerciaux
M. [I], qui explique que l’activité commerciale de Lumen Technologies est répartie sur deux départements, le Whosale (dirigé par M. [T]) et le département Entreprise (dirigé par M. [X]), sur lequel il avait été affecté, soutient que des projets commerciaux du département sur lesquels il travaillait ont été transférés vers d’autres ingénieurs commerciaux et il en justifie aux termes de ses pièces concernant les clients STG interactive et Comuto.
Il justifie également aux termes des courriels versés aux débats que deux transferts de clients lui ont été imposés au motif qu’ils incombaient au département « Wholesale », ce que le salarié a contesté auprès de son employeur (« on m’enlève des comptes sur lesquels je travaille depuis des mois » pièce 25, « black shadow ne fait pas partie des comptes wholesale ! Est-ce que je peux récupérer ce compte ‘ Je connais bien le contact ancien CTO de BlaBlaCar » pièce 28), mais la pièce 29 établit que certains comptes Wholesale lui étaient conservés par ailleurs afin de ne pas altérer la relation client.
En revanche, les pièces produites (92 à 95) n’établissent pas que son employeur lui aurait transféré des clients (le Parisien, la Banque de France, Yoplait et Perenco) comportant des difficultés à gérer et un faible potentiel.
Le fait allégué est donc partiellement établi.
C/ Une augmentation injustifiée des objectifs
Les pièces versées aux débats établissent que M. [I] s’est vu fixer des objectifs de 4 500 euros de mensualités contractuelles en 2017, puis de 4 725 euros pour 2018. Au soutien de son allégation d’une augmentation injustifiée et de « la perversité du management », tenant à l’attribution de comptes sans aucun potentiel, M. [I] n’apporte aucun élément probant aux débats, étant précisé que la fixation des objectifs relève du pouvoir de direction de l’employeur, et que le salarié ne démontre pas que ceux-ci n’étaient pas réalisables.
Cet élément de fait n’est donc pas établi.
D/ Des insultes et des actes de malveillance
Il est établi que M. [I] a été victime de violences le 7 décembre 2017 lors d’une soirée de Noël organisée par l’entreprise dans un bar de la part d’un salarié exerçant les mêmes fonctions, pour lesquels il a alerté son employeur le 8 décembre 2017 et déposé plainte le même jour, et a été placé en arrêt de travail jusqu’au 15 décembre 2017.
Il ressort également du courriel produit par M. [I] que l’entreprise a effectué une enquête à l’issue de ces faits, notifié une mise à pied à titre conservatoire à l’auteur des faits de violences le 12 décembre, avant le retour de M. [I] dans l’entreprise à l’issue de son arrêt maladie, puis l’a licencié pour faute grave le 5 janvier 2018.
M. [I] n’établit cependant pas aux termes de ses pièces, dont une partie rédigée en anglais n’est pas traduite en français (notamment les pièces 38 à 40), comme il le soutient, que M. [T] a donné consigne de taire l’incident sous menace de licenciement, qu’il a empêché M. [Y] d’alerter les secours, ni que M. [S], son supérieur hiérarchique, ait tenté d’étouffer l’affaire, puisqu’il a au contraire indiqué aux services de police qu’il avait, avec d’autres collègues, appelé un « Uber » pour lui permettre de rentrer chez lui,. La demande de paiement de la facture faite par M. [S] au salarié ne suffit pas à prouver les allégations de ce dernier.
Le salarié n’établit pas d’avantage avoir été convoqué par M. [X] à son retour d’arrêt maladie afin de lui indiquer qu’il était tenu pour responsable des faits et du licenciement d’un cadre très apprécié et de lui demander de démissionner en 2019 s’il ne réalisait pas ses objectifs 2019 ou à défaut qu’il s’occuperait de le faire partir.
Par ailleurs, M. [I], qui soutient avoir été victime d’insultes dès avant cette agression de la part de ses collègues, telles « rouquemoute, poil de carotte’ » et des actes de malveillances, qui se seraient intensifiées après ces faits de violences, et terminées par une mise à l’écart, produit deux attestations de salariés de l’entreprise, M. [Y], ingénieur, et Mme [L], exerçant les mêmes fonctions que M. [I] sur l’équipe « wholesales ». Néanmoins, la cour relève que ces deux témoignages ne sont pas probants puisque ces deux salariés ont saisi la juridiction prud’homale de procédures à l’encontre de la société en dénonçant des faits de harcèlement, dont ils ont été déboutés, et qu’ils se sont mutuellement délivrés des attestations dans le cadre de ces contentieux.
Enfin, si le salarié indique avoir, à plusieurs reprises, tenté d’alerter la hiérarchie, notamment M. [X], sans succès, de la situation de harcèlement vécue, il ne l’établit pas aux termes de ses pièces, la cour relevant que celles-ci sont rédigées en langue anglaise, et ne sont pas traduites en français, ce qui a été relevé par les premiers juges.
En conséquence de l’ensemble de ces éléments, les insultes et actes de malveillance allégués ne sont pas établis.
Les documents médicaux versées aux débats établissent que M. [I] a été placé en arrêt de travail à compter du 3 juillet 2018 pour maladie non-professionnelle et le 15 novembre 2018, il a été déclaré inapte à tout poste en ces termes : « le maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ». Le salarié produit des factures d’ostéopathie datées de 2017 et 2018 et précise à ce titre avoir engagé un suivi pour des douleurs dorsales avant son engagement au sein de la société Lumen Technologie. Il justifie également de factures justifiant de séances de psychothérapie entre juillet et octobre 2018 et d’un courrier par lequel M. [N], psycho-praticien, adresse M. [I] au Docteur [P], psychiatre, en lui indiquant suivre depuis le 9 août 2018 le salarié dans sa consultation de souffrance au travail, relate les dires du salarié : « un comportement agressif de la part de la hiérarchie et de certains collègues depuis son arrivée et particulièrement depuis qu’il a reçu un coup de boule de la part d’un manager, mi-décembre alors qu’il lui signifiait de ne plus tenter de dérober ses clients (‘). Le manager a été renvoyé et du coup il a subi depuis l’agressivité des employés proches de lui. Il a envoyé des alertes à plusieurs reprises, au service des RH, sans résultat concret », et précise que « devant l’altération de son état de santé : stress continu, puis crises d’angoisse, troubles du sommeil, douleurs du rachis cervico-lombaire’ il a dû consulter fin juillet 2018 son médecin traitant, qui lui prescrit un anxiolytique en cas de crise et un AT de 2 semaines (‘). Le dernier motif d’AT a été celui : « anxio-dépression réactionnelle ». Ces éléments établissent la dégradation de l’état de santé de M. [I], mais ne sont pas de nature à établir à eux-seuls le lien de causalité entre les fonctions professionnelles et cette dégradation.
Le seul élément établi s’agissant du transfert de projets commerciaux ne suffit pas, même en tenant compte des éléments médicaux, à caractériser des faits laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral.
En conséquence, M. [I] sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral, par voie de confirmation du jugement entrepris et, par suite, de celle formulée au titre de la nullité du licenciement.
Sur l’obligation de sécurité
A titre subsidiaire, M. [I] sollicite 47 760 euros de dommages-intérêts au titre du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, outre une somme de 7 960 euros pour manquement de l’employeur à son obligation de prévention du harcèlement.
En application de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers ses salariés, prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l’article L. 4121-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure et postérieure à l’ordonnance n°2017-1389 du 22 septembre 2017 et de l’article L. 4121-2 du même code dans sa rédaction antérieure et postérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, est distincte de la prohibition du harcèlement moral instituée par l’article L. 1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle.
Tenue d’une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, la société a manqué à cette obligation dès lors que M. [I] a été victime sur le lieu de travail d’agissements de harcèlement moral exercés par l’un ou l’autre de ses salariés et qu’elle ne justifie pas avoir respecté l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, à défaut de justifier avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et 4121-2 du code du travail, notamment par la mise en ‘uvre d’actions d’information et de prévention propres à en prévenir la survenance.
M. [I] énonce avoir alerté la direction sur sa souffrance au travail et en particulier sur l’hostilité dont il était l’objet de la part de ses collègues et de ses supérieurs, notamment les 31 mai et 4 juillet 2018, mais que ses alertes écrites n’ont suscité aucune réaction de sa direction.
Il convient de souligner d’une part que les faits de violences du 7 décembre 2017 ont été traités avec diligence par la société, puisque cette dernière, qui en a été informée le 8 décembre par M. [I], a mis à pied l’auteur des violences dès le 12 décembre, soit avant le retour de M. [I] dans l’entreprise le 15 décembre 2017 à l’issue de son arrêt maladie, et qu’elle l’a licencié le 5 janvier 2018 pour faute grave.
La cour relève d’autre part que les alertes restées sans réponse, énoncées par le salarié, ne sont pas établies puisque le salarié produit aux débats à ce titre les pièces 39 et 40 rédigées en langue anglaise dont il ne propose pas de traduction en français, ce qui a été relevé en première instance, de sorte qu’elles ne sont donc pas nature à démontrer les faits allégués.
La société démontre pour sa part avoir établi le document unique d’évaluation des risques daté du 18 avril 2018 et proposé une formation sur le « code de conduite » figurant un volant « santé et sécurité » spécifique aux actes ou menaces de violence.
Il n’est dès lors pas établi de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, ni à celle de prévention du harcèlement, de sorte que M. [I] sera débouté de ses demandes à ce titre, par voie d’infirmation de la décision rendue.
Sur les dommages-intérêts pour manquement au devoir de loyauté
M. [I] sollicite une somme de 23 880 euros de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à l’exécution de bonne foi du contrat de travail, et 10 000 euros de dommages-intérêts pour les conséquences du défaut de paiement des cotisations prévoyance.
Aux termes des articles 1104 du code civil et L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Il ressort des articles 1231 et 1231-1 du code civil qu’en cas d’inexécution d’une obligation contractuelle, le débiteur peut être condamné au paiement de dommages-intérêts.
Il incombe au salarié d’apporter des éléments de preuve pour le justifier le préjudice qu’il invoque, et dont l’existence et l’évaluation relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond (Soc., 13 avril 2016, pourvoi n° 14-28.293, Bull. 2016, V, n° 72 ; Soc., 13 septembre 2017, pourvoi n° 16-13.578, Bull. 2017, V, n° 136 ; Soc., 9 décembre 2020, n° 19-13.470).
A l’appui de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, M. [I] invoque d’une part le harcèlement moral, qui n’a pas été retenu par la cour et ne peut donc établir un manquement de la société à son obligation de loyauté à son égard.
D’autre part, M. [I] allègue le manquement de l’employeur à ses obligations contractuelles à l’égard de l’organisme de prévoyance, l’ayant privé d’indemnités complémentaires à compter du 106ème jour d’absence. Néanmoins, le courriel adressé par M. [I] le 4 mars 2019 par lequel l’appelant a communiqué à l’organisme de prévoyance les arrêts de travail et les indemnités journalières perçues n’est pas de nature à établir un manquement de l’employeur à ses obligations au titre de la prévoyance puisque d’abord il n’est pas contesté que M. [I] a bénéficié d’un maintien de son salaire de juillet à décembre 2018, et ensuite la société a transmis la déclaration de portabilité des droits du salarié au titre de la prévoyance faisant suite au licenciement de M. [I] le 14 décembre 2018 signée par le salarié le 7 janvier 2019 et par la société le 14 décembre 2018.
En conséquence, il n’est pas établi de manquement de l’employeur au titre de son obligation de loyauté, de sorte qu’il convient de confirmer le jugement ayant débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts. Par ailleurs, le salarié n’établit pas la preuve du défaut de paiement des cotisations de prévoyance alléguées, et sera débouté de sa demande de dommages-intérêts afférentes, par voie de confirmation de la décision déférée.
Sur l’origine de l’inaptitude et ses conséquences
Il n’est pas établi que l’inaptitude ait une origine professionnelle, le harcèlement moral n’ayant pas été retenu, ni le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Par conséquence, le licenciement prononcé pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé sur une cause réelle et sérieuse de sorte que la demande d’indemnité formulée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse sera rejetée, par voie de confirmation du jugement entrepris.
L’inaptitude étant d’origine non-professionnelle, il y a lieu également de débouter M. [I] de ses demandes au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents et de l’indemnité spéciale de licenciement, par voie de confirmation.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Il y a lieu d’infirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance. Il convient de condamner en outre le salarié aux dépens en cause d’appel.
L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de sorte que les parties seront déboutées de leurs demandes tant en première instance qu’en appel.
La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :
INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre du 11 avril 2022, mais seulement en ce qu’il a condamné la société Lumen Technologies France au paiement de dommages-intérêts au titre du manquement à l’obligation de sécurité et à l’obligation de prévention du harcèlement, sur le fondement des frais irrépétibles et des dépens,
Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,
DÉBOUTE M. [I] de sa demande de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,
DÉBOUTE M. [I] de sa demande de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de prévention du harcèlement,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d’appel,
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
CONDAMNE M. [I] aux dépens de première instance et d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Laurence SINQUIN, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
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