La responsabilité contractuelle est régie par les articles 1217, 1231 et 1231-7 du Code civil, qui établissent que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté ou a été exécuté de manière imparfaite peut demander réparation des conséquences de l’inexécution. En l’espèce, la société French desserts a invoqué des manquements contractuels de la société Isor dans l’exécution des prestations de nettoyage, soutenant que ces manquements ont entraîné des préjudices, notamment la présence de Listeria monocytogenes et la nécessité de travaux de remise en état. Toutefois, le tribunal a constaté que les manquements reprochés à la société Isor n’étaient pas démontrés, ce qui a conduit à la confirmation de la validité des factures émises par la société Isor. La société French desserts a ainsi été déboutée de sa demande de dommages et intérêts, car elle n’a pas apporté la preuve suffisante des manquements contractuels allégués, ce qui est essentiel pour établir la responsabilité de l’autre partie dans le cadre d’un contrat.
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L’Essentiel : La société French desserts a invoqué des manquements contractuels de la société Isor dans l’exécution des prestations de nettoyage, soutenant que ces manquements ont entraîné des préjudices, notamment la présence de Listeria monocytogenes. Toutefois, le tribunal a constaté que les manquements reprochés à la société Isor n’étaient pas démontrés, conduisant à la confirmation de la validité des factures émises par la société Isor. La société French desserts a été déboutée de sa demande de dommages et intérêts, n’ayant pas apporté la preuve suffisante des manquements allégués.
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Résumé de l’affaire :
Présentation des SociétésLa société spécialisée dans la fabrication industrielle de pains et de pâtisserie surgelée a engagé une société spécialisée dans le nettoyage courant de bâtiment pour assurer l’entretien de ses locaux. Confiement des PrestationsLe 24 février 2020, la société de fabrication a confié à la société de nettoyage les prestations de nettoyage de ses locaux, selon un contrat d’une durée de 3 ans, pour un montant mensuel de 7.246 euros HT. Manquements ContractuelsÀ plusieurs reprises, la société de fabrication a signalé des manquements dans l’exécution des prestations de nettoyage, notamment par des courriers et courriels envoyés entre mai et juin 2020. Résiliation du ContratLe contrat a été résilié d’un commun accord le 21 juillet 2020, avec effet au 4 septembre 2020. Suite à cela, la société de fabrication a suspendu le paiement de ses factures en raison des manquements constatés. Contestation des ManquementsLa société de nettoyage a contesté les manquements, affirmant que la société de fabrication ne respectait pas le cahier des charges contractuel. Demande d’IndemnisationLa société de fabrication a informé la société de nettoyage que le coût de remise en état des sols, dû aux défauts de nettoyage, s’élevait à 118.995,36 euros. En janvier 2021, la société de nettoyage a mis en demeure la société de fabrication pour le paiement de factures impayées. Procédure JudiciaireLa société de fabrication a assigné la société de nettoyage devant le tribunal de commerce pour obtenir réparation des préjudices. En réponse, la société de nettoyage a demandé le règlement des factures impayées. Jugement du TribunalLe tribunal a débouté la société de nettoyage de sa demande de rejet d’une pièce produite par la société de fabrication et a condamné cette dernière à payer les factures impayées, tout en déboutant les deux parties de leurs demandes de dommages et intérêts. Appel de la DécisionLa société de fabrication a interjeté appel de la décision, demandant la réformation du jugement, tandis que la société de nettoyage a également formulé un appel incident. Arguments des PartiesLa société de fabrication a soutenu que la société de nettoyage n’avait pas respecté ses obligations contractuelles, tandis que la société de nettoyage a affirmé que les manquements étaient imputables à la société de fabrication. Éléments de PreuveLe tribunal a examiné les éléments de preuve fournis par les deux parties, y compris des courriels et des constats d’huissier, pour évaluer la conformité des prestations de nettoyage. Conclusion du TribunalLe tribunal a confirmé que les manquements contractuels de la société de nettoyage étaient avérés, mais a également reconnu que la société de fabrication était fondée à opposer l’exception d’inexécution, déboutant ainsi la société de nettoyage de sa demande de paiement des factures. Décision FinaleLa cour a infirmé le jugement en ce qui concerne les demandes de paiement des factures, laissant chaque partie responsable de ses propres dépens et frais irrépétibles. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les obligations contractuelles de la société Isor en vertu du contrat de nettoyage ?La société Isor, en tant que prestataire de services de nettoyage, est soumise à une obligation de résultat, comme stipulé dans l’article 1217 du code civil. Cet article précise que : « La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut : – refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ; – poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ; – obtenir une réduction du prix ; – provoquer la résolution du contrat ; – demander réparation des conséquences de l’inexécution. » Cette obligation de résultat implique que la société Isor doit exécuter les prestations de nettoyage conformément aux exigences définies dans le contrat et le cahier des charges, notamment en ce qui concerne la qualité et la fréquence des interventions. Il est également précisé que les documents annexes au contrat, bien qu’ils ne soient pas signés, ont une valeur contractuelle car ils contiennent des informations essentielles sur les procédures de nettoyage spécifiques au domaine de l’agroalimentaire. Quels manquements ont été reprochés à la société Isor dans l’exécution de ses prestations ?La société French desserts a signalé plusieurs manquements dans l’exécution des prestations de nettoyage, notamment par des courriers et courriels datés des 28 mai, 10 et 18 juin 2020. Ces manquements incluent : – L’absence de nettoyage adéquat des zones critiques, comme le tapis de la crêpière et la doseuse à crème, qui ont été signalés comme non conformes. – La présence de moisissures et de saleté dans les locaux, ce qui a été constaté par un huissier de justice le 8 septembre 2020, après la résiliation du contrat. – La non-conformité des prestations de nettoyage, qui a conduit à la détection de Listeria monocytogenes dans les analyses microbiologiques, indiquant que la désinfection n’avait pas été effectuée correctement. Ces éléments démontrent que la société Isor n’a pas respecté ses obligations contractuelles, ce qui a été confirmé par le tribunal. Comment la société Isor a-t-elle justifié ses manquements ?La société Isor a tenté de justifier ses manquements en arguant que les documents annexés au contrat n’avaient pas été signés et n’avaient donc pas de valeur contractuelle. Elle a également soutenu que certains manquements étaient imputables à la société French desserts, notamment en ce qui concerne le rangement et le dégrossissage, qui étaient de sa responsabilité. De plus, la société Isor a affirmé que les exigences de la société French desserts excédaient les limites contractuelles et que l’état vétuste des locaux ne permettait pas une exécution conforme des prestations. Cependant, ces arguments n’ont pas été retenus par le tribunal, qui a constaté que les manquements étaient bien établis. Quelles sont les conséquences des manquements contractuels de la société Isor ?Les manquements contractuels de la société Isor ont conduit à plusieurs conséquences, notamment : – La société French desserts a été fondée à opposer l’exception d’inexécution, ce qui lui a permis de suspendre le paiement des factures en raison des manquements constatés. – Le tribunal a débouté la société Isor de sa demande de paiement des factures impayées, en raison de l’absence de preuve de l’exécution conforme des prestations. – La société French desserts a également demandé des dommages et intérêts pour les préjudices subis, bien que cette demande ait été en grande partie rejetée par le tribunal. Ces conséquences soulignent l’importance du respect des obligations contractuelles et les risques associés à une exécution défaillante des prestations. Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du code de procédure civile stipule que : « La partie qui succombe dans ses prétentions peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles exposés par elle. » Dans ce litige, le tribunal a condamné la société French desserts à payer à la société Isor une somme de 200 euros au titre de l’article 700, ainsi qu’une somme de 4.000 euros pour les frais d’avocat. Cependant, le jugement a été infirmé en ce qui concerne les dépens, chaque partie conservant la charge de ses propres frais. Cela montre que même si une partie est déboutée de ses demandes principales, elle peut néanmoins être condamnée à rembourser les frais d’avocat de l’autre partie, en fonction des circonstances du litige. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 56C
Chambre commerciale 3-1
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 05 MARS 2025
N° RG 22/05066 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VLH6
AFFAIRE :
S.A.S.U. FRENCH DESSERTS
C/
S.A.S.U. ISOR EXPLOITATION
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Juin 2022 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 1
N° RG : 2021F00506
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Sophie ROJAT
Me Julie GOURION-RICHARD
TAE NANTERRE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ MARS DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S.U. FRENCH DESSERTS
RCS Angoulême n° 329 814 008
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Sophie ROJAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 427 et Me Jean-Paul POLLEUX de la SELARL Cabinet Valois, Plaidant, avocat au barreau de Charente
APPELANTE
****************
S.A.S.U. ISOR EXPLOITATION venant aux droits de la société ISOR HOLDING, anciennement dénommée ISOR, à la suite d’un apport partiel d’actif soumis au régime des fusions scissions
RCS Nanterre n° 844 841 403
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Julie GOURION-RICHARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 et Me Laure DE MONTGOLFIER, Plaidant, avocat au barreau de Lyon
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 Janvier 2025 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère,
Madame Bérangère MEURANT, Conseillère,
Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,
La société French desserts est spécialisée dans la fabrication industrielle de pains et de pâtisserie surgelée.
La société Isor exploitation, ci-après dénommée la société Isor, est spécialisée dans le nettoyage courant de bâtiment.
Le 24 février 2020, la société French desserts a confié à la société Isor les prestations de nettoyage des locaux de son site à [Localité 1], selon le cahier des charges défini au contrat, pour une durée déterminée de 3 ans à compter du 30 mars 2020 moyennant le prix de 7.246 euros HT par mois.
Par différents courriers et courriels notamment des 28 mai, 10 et 18 juin 2020, la société French desserts a fait part à la société Isor de plusieurs manquements dans l’exécution de ses prestations.
Le contrat a été résilié d’un commun accord des parties le 21 juillet 2020, à effet au 4 septembre 2020.
Par courrier du 10 septembre 2020, la société French desserts a informé la société Isor de la suspension du paiement de ses factures en raison des manquements contractuels.
Par courrier du 17 septembre 2020, la société Isor a contesté les manquements en expliquant que la société French desserts ne respectait pas le cahier des charges contractuel.
Par courrier du 6 novembre 2020, le conseil de la société French desserts a indiqué à la société Isor que le coût de la remise en peinture des sols de l’unité de production rendue nécessaire par les défauts de nettoyage s’élevait à la somme de 118.995,36 euros.
Par courrier recommandé du 19 janvier 2021, la société Isor a mis la société French desserts en demeure d’avoir à régler la somme de 36.569,94 euros au titre de 5 factures impayées pour la période courant de mai à septembre 2020.
La société French desserts s’y est opposée en invoquant les multiples manquements contractuels dénoncés.
Par acte du 22 février 2021, la société French desserts a fait assigner la société Isor devant le tribunal de commerce de Nanterre, en réparation des préjudices consécutifs aux inexécutions contractuelles.
La société Isor a sollicité à titre reconventionnel le règlement des factures impayées.
Par jugement du 8 juin 2022, le tribunal a :
– débouté la société Isor de sa demande de voir écarter des débats la pièce n°30 produite à la société French desserts ;
– débouté la société French desserts de sa demande de dommages et intérêts ;
– condamné la société French desserts à payer à la société Isor la somme de 36.569, 94 euros, avec intérêts contractuels de 10% par an à compter des échéances de chacune des factures, avec anatocisme, outre celle de 200 euros au titre de l’article L 441-6 du code de commerce ;
– débouté la société Isor de sa demande de dommages et intérêts ;
– condamné la société French desserts au paiement à la société Isor de la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Le tribunal a considéré que les manquements reprochés à la société Isor dans l’exécution des prestations de nettoyage n’étaient pas démontrés et qu’en conséquence, les factures étaient dues.
Par déclaration du 29 juillet 2022, la société French desserts a interjeté appel de l’ensemble des chefs du jugement hormis ceux ayant débouté la société Isor de sa demande de voir écarter des débats sa pièce n°30 et de sa demande de dommages et intérêts.
Par ordonnance du 22 février 2024, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable les conclusions notifiées par la société French desserts le 9 novembre 2023 en ce qu’elles répondent à l’appel incident formé par la société Isor.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 4 mars 2024, la société French desserts demande à la cour de réformer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société Isor de sa demande de voir écarter des débats sa pièce n°30 et de sa demande de dommages et intérêts, et statuant à nouveau, de condamner la société Isor à lui verser la somme de 121.059,36 euros à titre de dommages et intérêts, de la débouter de l’ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 14 juin 2024, la société Isor demande à la cour de :
– déclarer la société Isor Exploitation, venant aux droits de la société Isor holding, anciennement dénommée Isor recevable et fondée en son appel incident ;
– réformer le jugement en ce qu’il a maintenu dans les débats la pièce n°30 produite par la société French desserts et statuant à nouveau de ce chef, l’écarter des débats ;
– confirmer le jugement sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts et statuant à nouveau de ce chef, condamner la société French desserts à lui payer la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice distinct du seul retard de paiement ;
– subsidiairement, si la cour retenait l’existence d’une créance au profit de la société French desserts, ordonner la compensation des créances ;
– en toute hypothèse, débouter la société French desserts de toutes ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Julie Gourion-Richard.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 27 juin 2024.
Par l’effet de la déclaration d’appel et de l’appel incident, tous les chefs du jugement sont déférés à la cour.
Sur la demande de rejet de la pièce n°30 produite par la société French dessert
La société Isor sollicite le rejet des débats de la pièce n°30 produite par la société French desserts correspondant à l’attestation établie par M. [X], compte tenu de son manque d’objectivité, puisqu’après l’avoir engagé le 20 avril 2020, elle a mis fin à sa période d’essai le 16 juillet 2020.
Cependant, l’attestation en cause respecte les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile et si le manque d’objectivité attribué à M. [X] peut, le cas échéant, affecter le caractère probant de son témoignage, il n’est pas susceptible de justifier le rejet de cette pièce des débats.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté la société Isor de sa demande de rejet de la pièce n°30 communiquée par la société French desserts.
Sur la demande indemnitaire de la société French desserts
Au visa des articles 1217, 1231 et 1231-7 du code civil, la société French desserts soutient que la société Isor était tenue d’une obligation contractuelle étendue à l’ensemble des documents contractuels, y compris ceux présentant l’équipe et les moyens mis en place par la société Isor pour l’exécution de ses prestations, quand bien même ils n’ont pas été paraphés ; que ces documents renvoient d’ailleurs au cahier des charges, qui n’a pas été respecté en ce qui concerne l’organisation, la formation et le niveau de compétence de l’équipe de personnels mise à disposition, les moyens matériels mis en place sur le site et le volume horaire d’intervention ; qu’elle a en outre réalisé des prestations inadaptées à un site de production agroalimentaire, ce qui a été constaté lors des contrôles des 15, 19, 28 mai et 10 juin 2020 et notifié à la société Isor par courriels et courrier des 28 mai, 10 et 18 juin 2020, un avertissement ayant été notifié au prestataire par ce dernier courrier ; qu’en raison de ces manquements, deux rapports de prélèvements effectués les 12 juin et 10 juillet 2020 ont révélé la présence de listeria monocytogène, ce qui démontre que la prestation de nettoyage était non conforme puisque la désinfection n’a pas été réalisée ; que les manquements ont été constatés par constat d’huissier du 8 septembre 2020 ; qu’elle est à nouveau contrainte de repeindre le sol de son unité de production, qui l’avait été pendant le confinement.
La société Isor répond que l’obligation de résultat à laquelle elle était tenue était cantonnée au cahier des charges, les autres documents annexés au contrat n’ayant pas été signés ni paraphés et n’ayant ainsi vocation qu’à informer le client sur ses compétences générales dans un but essentiellement commercial ; que la société French desserts ne rapporte pas la preuve des manquements par la production d’annotations lapidaires, imprécises, non datées et non contradictoires portées sur le cahier des charges ; que certaines prestations comme le nettoyage du surgélateur n’étaient pas prévues au contrat ; que les notes internes, les comptes rendus et photos réalisés par la société French desserts, non contresignés ou paraphés par son responsable de site ne revêtent aucun caractère probant ; que le constat d’huissier a été établi non contradictoirement le 8 septembre 2020 alors que le contrat était résilié depuis une semaine, de sorte qu’il n’est pas démontré que les prestations dues n’ont pas été effectivement exécutées avant le 4 septembre ; que certains griefs sont imputables à la société French desserts en ce qu’elles relèvent de prestations préalables (rangement et « dégrossissage ») qu’elle devait accomplir ou d’un autre prestataire ; que l’attitude et les exigences de la société French desserts ont excédé les limites contractuelles quant à la teneur des prestations et aux heures d’intervention et ont complètement désorganisé son intervention et affecté la qualité de ses prestations ; qu’elle a tout mis en ‘uvre pour remplir ses obligations contractuelles ; qu’elle n’était tenue concernant la qualité du nettoyage que d’une obligation de moyens et que la société French desserts ne rapporte pas la preuve de l’insuffisance des moyens matériels mis à disposition, ni de l’imputabilité de l’apparition de la listéria aux prestations de nettoyage qu’elle a réalisées, alors que le site était vétuste ; que la preuve des détériorations matérielles qui lui sont attribuées n’est pas rapportée, pas plus que le lien de causalité avec l’exécution de ses prestations.
Sur ce,
L’article 1217 du code civil dispose que :
« La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter ».
Sur les manquements contractuels de la société Isor
Le contrat conclu entre la société French desserts et la société Isor le 24 février 2020 est composé de différents documents. Aux « contrat de prestations de services » et « cahier des charges », paraphés et signés par les parties, sont joints d’autres documents, non signés, descriptifs de « l’équipe Isor », « la phase de démarrage », « le déploiement », « les moyens », « la traçabilité », « la formation », « la politique RSE », « notre expertise en agroalimentaire », la « présentation Isor » et des « attestations ».
Contrairement à ce que soutient la société Isor, il ne peut être considéré que ces pièces sont purement commerciales et ne revêtent pas de caractère contractuel, dès lors d’une part, qu’elles sont insérées, avec le contrat de prestations de services et le cahier des charges, dans un ensemble documentaire unique intitulé en première page « contrat de collaboration » et d’autre part, que tous ces documents contiennent des informations claires et détaillées au vu desquelles la société French desserts a manifestement décidé de contracter avec la société Isor, puisqu’elles décrivent de manière très avantageuse les procédures de nettoyage spécifiques au domaine de l’agroalimentaire, le suivi et la qualité de la prestation, les moyens matériels et humains mis en ‘uvre par le prestataire, le niveau de formation et de compétence des personnels encadrant et exécutant, en particulier dans le domaine exigeant de l’agroalimentaire. Bien que non signés, tous ces documents volontairement joints par la société Isor au contrat, qui décrivent les prestations promises, par la confiance qu’ils inspirent, n’ont pour but que de déterminer le client à contracter. Il ne saurait par conséquent être considéré qu’ils n’ont aucune valeur contractuelle.
Il ressort tant de l’article I du contrat de prestations de services que de l’article 2 des conditions générales que la société Isor est soumise à « une obligation de résultat ».
Les prestations de nettoyage, consistant en un prélavage, moussage, rinçage et vapeur sèche, ainsi que leur périodicité sont décrites, par zone, au cahier des charge inséré au contrat.
Les annotations manuscrites qui figurent sur le contrat et qui auraient été portées par Mme [H], responsable qualité au sein de la société French desserts, ne suffisent pas à elles seules à rapporter la preuve des manquements reprochés à la société Isor concernant notamment l’encadrement du personnel, son manque de formation et la mise à disposition du matériel.
Par ailleurs, il n’est pas démontré que les pièces n°4, 12, 28 et 29 produites par la société French desserts consistant en des constats ou comptes rendus unilatéraux de prestations des 19, 28 mai, 6 et 24 juillet 2020 ont été établis à cette date, ni qu’ils ont été communiqués au prestataire afin qu’il puisse formuler ses observations.
En revanche, la société French desserts produit un courriel que Mme [H] a adressé le 28 mai 2020 à M. [X], responsable d’équipe au sein de la société Isor, et par lequel elle a signalé plusieurs manquements dans la prestation de nettoyage s’agissant du tapis de la crêpière sur lequel il restait « encore » de la pâte à tartiner, de la doseuse à crème « toujours non conforme » à l’intérieur de laquelle il restait de la crème, des « couloir / lainière / escalier / sol de la salle de pause et vestiaire / couloir de gauche », du quai de réception et du quai extérieur non nettoyés.
Dans son message en réponse du 29 mai 2020, M. [X] a certes signalé que la société French desserts n’avait pas réalisé la prestation de « dégrossissage » due en exécution du contrat concernant la doseuse à crème, mais n’a pas remis en cause les défaut de nettoyage.
La société French desserts produit également un courriel de Mme [H] du 10 juin 2020 par lequel elle a à nouveau alerté M. [X] à propos de manquements constatés :
«Bonjour [E],
Je ne comprends pas ‘
Mon sms d’hier soir n’était pas suffisamment alertant ‘ Hier soir vous avez eu du temps au vu du planning MAIS : (cf photos)
Zone alertée lors du début de semaine dernière ‘ aujourd’hui elles ne sont plus entretenues !
Magasin pas fait
Réception pas fait
Couloir partiellement ‘ (mur hauteur d’homme)
Derrière porte rouge pas fait
SAS d’entrée partiellement ‘ sol qui se noircit et porte toujours sale !
Canol ok sauf le sol sous les chariots ( ‘)
(‘)
Plonge ok pour hier soir sauf toujours pas de solen dans les bouches d’égouts ‘ mais plonge de vendredi 05.06 constat ce matin non satisfaisant (cf photo).
Demain, visite client, l’état du site n’est pas à la hauteur de la prestation attendue.
Je n’ai pas le temps de surveiller votre prestation tous les jours, je dois avoir confiance, aujourd’hui ce n’est pas le cas.
La prestation est réalisée partiellement. Certains points se sont améliorés mais d’autres [se sont] nettement dégradées.
Comment dois-je m’exprimer pour que les alertes soient entendues ‘ ».
La société Isor ne justifie pas avoir remis en cause les manquements dénoncés dont le caractère récurrent ressort de la teneur du message.
Par courrier du 18 juin 2020, Mme [H] a notifié un « avertissement de non-respect du contrat » à la société Isor en ces termes :
« Par la présente, je vous informe d’un avertissement de dérive sur prestation transmis à M. [E] [X] ce jour par mail.
Suite à notre entretien bilan du mercredi 03 Juin 2020, les améliorations attendues n’ont pas été uniformes et insuffisantes. De nombreuses dérives ont été signalées à M. [X] pour action immédiate.
Nous tenons à votre disposition les inspections avec photos des points non conformes relevés.
De plus, nous vous informons avoir reçu ce jour un résultat partiel d’analyse non conforme. avec suspicion de Listéria monocytogènes (dénombrement
Cette alerte est la conséquence de la dérive de la désinfection de la ligne Canol (machine ou environnement) que nous avons signalée à plusieurs reprises.
Nous vous demandons une remise en état du site hors prestation classique et à vos frais ce vendredi 19 juin (pas de production sur le site) et si besoin vendredi 26 juin (pas de production sur le site).
Cet avertissement fait office de non satisfaction de la prestation de votre entreprise dans nos locaux. Nous vous rappelons votre obligation de résultat et l’application du cahier des charges signés ensemble.
De plus, vous vous êtes engagés à un suivi qualité 4h par mois. Depuis le début du contrat le 23/04 2020, je n’ai reçu aucun retour dans ce sens.
Nous comptons sur votre réactivité afin que nous puissions poursuivre une collaboration efficace et collaborative ».
A nouveau, la société Isor n’a pas contesté les termes de cet avertissement.
Pour justifier ses dires concernant la présence de Listeria, la société French desserts communique trois rapports d’analyses des 23 mai, 20 juin et 20 juillet 2020 dont il ressort que l’analyse de prélèvements de jésuite amande et jésuite pâtissier réalisés respectivement les 15 mai, 12 juin et 10 juillet a révélé la présence de Listeria monocytogènes. Les rapports concluent tous trois à une « qualité microbiologique non satisfaisante ».
Si la société Isor considère qu’il n’est pas démontré que la présence de la bactérie lui est imputable, la société French desserts justifie de rapports d’analyses similaires réalisés en février et avril 2020 n’ayant relevé aucun problème : « Listeria monocytogène dans 25 g : Non détectée », « qualité microbiologique satisfaisante ». Par ailleurs, il a été rappelé précédemment qu’à partir du mois de mai 2020, la société French desserts a signalé des problèmes récurrents concernant l’exécution des prestations de nettoyage des locaux, dont la société Isor était seule en charge depuis le 30 mars 2020.
Enfin, la société French desserts verse aux débats un procès-verbal de constat d’huissier réalisé le mardi 8 septembre 2020, soit 4 jours après la prise d’effet de la résiliation du contrat le vendredi 4 septembre 2020.
Il en résulte que de nombreuses prestations n’ont pas été réalisées par la société Isor.
Ainsi, alors qu’en vertu du cahier des charges, les plafonds de la zone de préparation doivent être nettoyés 4 fois par an, l’huissier a constaté des traces de moisissures au plafond.
De même, le lave-botte, qui devait être nettoyé une fois par semaine, est apparu « très sale ».
De manière plus générale, l’huissier a constaté la présence de moisissures sur les murs en différents endroits, de restes alimentaires voire de moisissure sur plusieurs machines, de traces noires et restes alimentaires au sol et de saleté sous les machines.
La société Isor considère qu’il appartenait à la société French desserts en exécution du cahier des charges d’assurer le rangement et le dégrossissage. Cependant, cette obligation ne peut expliquer la présence de moisissures. Par ailleurs, hormis le mail précité de M. [X] du 29 mai 2020 faisant état de l’absence de dégrossissage de la doseuse à crème, la société Isor ne justifie d’aucune alerte sur cette difficulté en cours d’exécution du contrat.
La société Isor soutient encore que la société French desserts a sollicité des prestations qui n’étaient pas prévues au cahier des charges. Elle évoque le nettoyage des congélateurs, sans toutefois justifier ses dires et celui du surgélateur qui ne peut cependant expliquer l’ampleur des inexécutions constatées. Elle prétend également que certains manquements sont liés à la fréquence insuffisante des prestations prévue au cahier des charges, sans fournir de précision concernant les prestations en cause, étant souligné qu’il lui appartenait, en sa qualité de professionnelle, de prévoir les cadences nécessaires au nettoyage rigoureux de ce site de production agroalimentaire. Elle indique encore que la société French desserts n’a cessé de modifier les heures d’intervention du personnel de nettoyage, mais ne communique à nouveau aucun élément probant sur ce point puisqu’aucun planning d’intervention n’est produit.
Elle considère que l’état décrit par l’huissier de justice doit être apprécié au regard de la prise d’effet de la résiliation du contrat le 4 septembre 2020. Cependant, seuls 4 jours s’étaient écoulés à la date de réalisation du constat, dont un week-end au cours duquel la production est arrêtée.
En outre, il doit être rappelé que la société Isor était tenue d’une obligation de résultat. Même à s’en tenir strictement aux prestations figurant au cahier des charges, la société Isor ne justifie d’aucun élément permettant d’établir qu’elle a réalisé les prestations de nettoyage lui incombant dans le respect d’une part, des procédures décrites dans la partie « Notre expertise en agroalimentaire » du contrat et d’autre part, des fréquences prévues au contrat jusqu’au 4 septembre 2020. Elle ne fournit de surcroît aucun élément concernant le suivi de ses prestations, alors qu’il est prévu au contrat un contrôle quotidien des prestations par le référent du site et l’établissement par ce dernier d’un cahier de liaison et de fiches de contrôle interne, ainsi qu’un contrôle contradictoire mensuel dont l’absence lui avait été signalée dans le courrier d’avertissement du 18 juin 2020.
L’argument de la société Isor tiré de l’état de vétusté des locaux, tant lors du démarrage des prestations qu’à la prise d’effet de la résiliation du marché, est inopérant, dès lors d’une part, qu’il ne fait pas obstacle à leur nettoyage et d’autre part, qu’il appartenait à la société Isor de pas contracter avec la société French desserts si elle estimait que l’état de ses locaux n’était pas compatible avec les prestations commandées.
Enfin, comme le souligne la société French desserts, la société Isor ne justifie pas de la formation du personnel mis à disposition sur le site s’agissant tant du chef d’équipe, M. [X], que du personnel d’exécution dans le domaine exigeant de l’agroalimentaire, alors qu’aux termes du contrat, le chef d’équipe devait disposer d’une « formation appropriée obligatoire » ou d’une « expérience validée » et que les agents devaient bénéficier d’une formation initiale et continue spécifique au domaine d’intervention et au site.
M. [X] confirme dans son attestation que le personnel affecté au marché ne disposait d’aucune formation aux procédures de nettoyage dans le domaine de l’agroalimentaire.
Si la société Isor remet en cause l’objectivité de cette attestation dès lors qu’elle a mis fin à la période d’essai de M. [X], les manquements ressortant des différentes pièces produites par la société French desserts permettent néanmoins de corroborer le témoignage quant à l’absence de formation des personnels. En outre, par courriel du 28 juillet 2020, Mme [H] a signalé à la société Isor avoir été contrainte pendant plusieurs jours d’assurer un accompagnement des agents d’exécution en raison d’un manque de formation et de l’absence de chef d’équipe, corroborant ainsi les dires de M. [X].
Le témoin indique également qu’il ne disposait que d’un matériel vétuste, précisant avoir dû amener sa propre machine à haute pression.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les manquements contractuels reprochés à la société Isor sont démontrés.
Sur l’indemnisation des préjudices
La société French desserts réclame par conséquent le paiement d’une somme de 121.059,36 à titre de dommages et intérêts décomposée comme suit :
– 3.382 euros au titre du coût de l’accompagnement de sa responsable qualité, Mme [H] ;
– 2.173 euros au titre du temps passé par Mme [H] pour remettre le site en état à l’issue du contrat ;
– 3.855,96 euros au titre du coût d’achat de la peinture de sol pour l’unité de production ;
-17.894,40 euros au titre de la remise en état des sols dégradés à la suite de l’intervention de la société Isor ;
– 2.261 euros au titre du coût de démontage et d’enlèvement du matériel des zones où les sols ont été endommagés ;
– 91.493 euros au titre de la perte d’exploitation durant les 15 jours ouvrés de chantier.
La société Isor conteste les différents préjudices invoqués par la société French desserts, considérant qu’ils ne sont justifiés ni dans leur principe, ni dans leur quantum. Subsidiairement, la société Isor sollicite la compensation de la somme qui pourrait être mise à sa charge avec celle dont elle est créancière au titre des factures impayées.
– Sur la demande au titre de l’accompagnement de la responsable qualité
La société French dessert sollicite le paiement à titre de dommages et intérêts de la contrepartie de 121,55 heures de salaire de Mme [H].
Il résulte du courrier du 10 juin 2020 et de la lettre d’avertissement du 18 juin suivant dont les termes ont été rappelés précédemment que Mme [H], en tant que responsable qualité de la société French desserts, a été amenée à réaliser un suivi particulièrement lourd de l’exécution du marché en raison des manquements nombreux et récurrents.
Par ailleurs, le courriel que Mme [H] a adressé à la société Isor le 28 juillet 2020 établit qu’elle a été contrainte pendant plusieurs jours d’assurer un accompagnement des agents d’exécution en raison d’un manque de formation et de l’absence de chef d’équipe.
Néanmoins, la société French desserts n’établit pas avoir dû supporter, au-delà du salaire dû à Mme [H] au titre de son contrat de travail, le paiement d’heures supplémentaires ou d’une prime, ni avoir subi un préjudice financier du fait de l’inexécution par la responsable qualité d’autres missions du fait de sa mobilisation sur le suivi de l’exécution du marché de nettoyage.
En l’absence de démonstration du préjudice financier, la demande indemnitaire de la société French dessert ne peut prospérer.
– Sur la demande au titre du temps passé par Mme [H] pour remettre le site en état à l’issue du contrat
La société French desserts sollicite le paiement de la somme de 2.173 euros au titre de 78,13 heures que Mme [H] aurait consacrées à la remise en état du site après la prise d’effet de la résiliation du contrat de la société Isor. Cependant, comme le relève cette dernière, aucun élément de preuve n’est produit au soutien de cette affirmation et aucun justificatif ne permet d’étayer le volume horaire allégué.
La société French desserts doit donc être déboutée de sa demande au titre de ce poste de préjudice.
– Sur les demandes au titre des sols endommagés
La société French desserts sollicite une somme totale de 24.011,36 euros au titre du coût d’achat de la peinture de sol pour l’unité de production, de la remise en état des sols dégradés à la suite de l’intervention de la société Isor et du coût de démontage et d’enlèvement du matériel des zones où les sols ont été endommagés.
S’il ressort des photographies versées aux débats, notamment de celles insérées au procès-verbal de constat d’huissier que la peinture des sols de l’unité de production est dégradée, aucun élément probant ne permet d’imputer de façon certaine à l’intervention de la société Isor cette détérioration, qui peut également être due à la qualité de la peinture incompatible avec les produits de nettoyage utilisés dans le domaine de l’agroalimentaire ou encore aux conditions de son application. La cour observe d’ailleurs que les courriers et courriels que Mme [H] a adressés à la société Isor au cours de l’exécution du contrat pour signaler les manquements n’en font aucune mention et que le dommage est évoqué pour la première fois dans le procès-verbal de constat du 8 septembre 2020.
La demande indemnitaire ne peut par conséquent aboutir.
– Sur la demande au titre de la perte d’exploitation
La société French desserts sollicite une somme de 91.493 euros au titre de la perte d’exploitation subie du fait de la réalisation de travaux programmés pendant 15 jours ouvrés.
Cependant, au soutien de sa demande, la société French desserts ne communique ni le détail des travaux à réaliser, ni le devis et la facture correspondants, ni encore le calendrier de travaux. Elle ne justifie pas davantage de l’arrêt de l’exploitation pendant 15 jours, ni de l’existence d’une perte d’exploitation, puisque seule une partie du bilan de l’année 2019 est communiquée. L’attestation de l’expert-comptable du 6 mars 2023 ne permet pas plus de l’établir puisqu’elle se limite à évaluer le montant de la perte d’exploitation « pour une période de travaux de 15 jours », sans la confirmer et alors que les bilans complets des années 2019 et 2020 ne sont pas produits.
La demande ne peut donc prospérer.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a débouté la société French dessert de l’intégralité de sa demande indemnitaire.
Sur la demande de paiement des factures
La société Isor se prévaut d’une créance de 36.569,94 euros au titre de 5 factures impayées pour la période courant de mai à septembre 2020. Elle explique que les prestations ont été exécutées, que la preuve des manquements invoqués par la société French desserts n’est pas rapportée, que le refus de paiement est injustifié et que les factures sont par conséquent dues. Elle estime que constitue une double sanction prohibée la dispense du paiement de la facture du prestataire et sa condamnation à indemniser intégralement le client ; qu’en application du contrat la créance doit produire intérêt au taux de 10 % et qu’elle est fondée à obtenir paiement d’une somme de 40 euros à titre d’indemnité forfaitaire de recouvrement par facture impayée soit 200 euros au total.
La société French desserts considère qu’au regard de la mauvaise exécution des prestations, elle est bien fondée à ne pas régler les factures. Elle souligne l’incohérence de la facture du 31 mai 2020 dont le libellé est « fin de contrat le 04/09/2020 ».
Les dispositions de l’article 1217 du code civil ont été rappelées précédemment.
Pour les motifs précités, il est établi que la société Isor a manqué, de manière récurrente et importante, à ses obligations contractuelles, tant en ce qui concerne la qualité et la fréquence des prestations, qu’à l’égard de l’équipe de personnels devant être affectée au marché, du matériel mis à disposition et du suivi de l’exécution des prestations, alors que le contrat promettait des prestations de qualité dans ce domaine particulièrement exigeant sur le plan sanitaire de l’agroalimentaire.
En conséquence, la société French desserts est bien fondée à opposer à la société Isor l’exception d’inexécution, de sorte que par infirmation du jugement, cette dernière sera déboutée de sa demande en paiement des factures émises de mai à septembre 2020.
Sur la demande indemnitaire de la société Isor au titre du préjudice distinct
La société Isor estime que la société French desserts a retenu la somme due au titre des factures, soit la quasi-totalité du marché de manière illégitime et déloyale ; qu’elle n’a pas pu encaisser la marge escomptée et a été contrainte de financer sur sa trésorerie pendant 4 mois les salaires des salariés affectés au site et les mensualités et amortissements des machines, équipements, consommables et matériels affectés au contrat ; qu’elle a subi cette pression financière dans le contexte difficile de la crise sanitaire consécutive à l’épidémie de Covid19 ; que ce comportement n’est pas celui d’un partenaire loyal et de bonne foi et contrevient manifestement aux usages du commerce ; que lors de la résiliation du contrat, la société French dessert n’a pas satisfait à ses obligations consistant à mettre en relation l’entreprise sortante et l’entreprise entrante, de sorte que les salariés affectés puissent faire l’objet d’une reprise par le repreneur. Elle réclame par conséquent une somme de 10.000 euros de dommages et intérêts.
Toutefois, la société Isor a été déboutée de sa demande en paiement des factures en raison des manquements dont elle est responsable dans l’exécution du contrat.
En outre, la société Isor ne communique aucun élément comptable justifiant des conséquences sur sa trésorerie du défaut de paiement des factures.
Enfin, elle ne justifie pas plus du préjudice ayant résulté de l’absence de reprise de son personnel par la société Arc en ciel.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Isor de sa demande indemnitaire.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Compte tenu de la solution du litige, le jugement sera infirmé des chefs des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile et chaque partie conservera la charge de ses dépens et frais irrépétibles de première instance et d’appel.
La Cour, statuant par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a débouté la société Isor exploitation de sa demande de voir écarter des débats la pièce n°30 produite à la société French desserts et débouté la société French desserts et la société Isor exploitation de leur demande de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute la société Isor exploitation de sa demande de paiement des factures ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens de première instance et d’appel ;
Déboute les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier La Présidente
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