Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Résiliation du contrat de travail et contestation des indemnités : enjeux de la garantie légale.
→ RésuméContexte de l’affaireLe litige concerne un salarié, en l’occurrence un maçon, qui a été embauché par une société de construction. Ce dernier a saisi le Conseil des prud’hommes pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi que diverses demandes d’indemnités et de salaires. L’affaire a été plaidée en décembre 2014. Jugement initialLe Conseil des prud’hommes a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à compter de mars 2015 et a condamné l’employeur à verser plusieurs sommes au salarié. Ces montants incluent des rappels de salaire, des indemnités compensatrices de préavis, une indemnité de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu’une indemnité pour travail dissimulé. L’employeur a également été contraint de fournir des documents conformes à cette décision. Procédure de liquidation judiciairePeu après le jugement, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’égard de la société employeur, désignant un mandataire liquidateur. Cette procédure a été close pour insuffisance d’actif, et un mandataire ad hoc a été nommé pour gérer les besoins de la procédure. Requête en tierce oppositionL’association Unédic, en tant que délégation de garantie, a refusé de prendre en charge les créances fixées par le jugement. Elle a formé une requête en tierce opposition contre le jugement de juin 2015, soutenant qu’elle n’avait pas été représentée lors de l’audience initiale. Décision du Conseil des prud’hommesLe Conseil des prud’hommes a rejeté la requête de l’association, confirmant que le jugement de juin 2015 devait être appliqué et reconnu comme opposable à l’association. Cette décision a été contestée par l’association, qui a interjeté appel. Appel et conclusions des partiesDans ses conclusions, l’association a demandé que la tierce opposition soit jugée recevable et que la date de rupture du contrat de travail soit fixée à la date du jugement. De son côté, le mandataire liquidateur a demandé l’infirmation du jugement et a soutenu que la rupture du contrat était intervenue plus tôt, dans le cadre d’un licenciement oral. Arguments du salariéLe salarié a également interjeté appel, demandant la confirmation des dispositions du jugement initial et la reconnaissance de l’opposabilité de la décision à l’association. Il a également demandé des indemnités supplémentaires en vertu de l’article 700 du code de procédure civile. Décision de la cour d’appelLa cour d’appel a déclaré recevable la tierce opposition de l’association et a confirmé les sommes dues au salarié, tout en rectifiant une erreur matérielle concernant l’indemnité pour travail dissimulé. Elle a également déclaré que le jugement était opposable à l’association dans les limites de sa garantie légale. Les parties ont été déboutées de leurs demandes supplémentaires, et chacune a été chargée de ses propres dépens. |
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 12 MARS 2025
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02333 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDJWN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° F 19/01206
APPELANTE – INTIMEE INCIDENTE
Association AGS CGEA ILE DE FRANCE EST, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean-charles GANCIA, avocat au barreau de PARIS, toque : T07
INTIME
Monsieur [M] [B]
Chez Mme [V]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Christian LE GALL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0754
INTIMEE – APPELANTE INCIDENT
Maître [Z] [G] Es qualité de Mandataire Ad Hoc de la SARL ARC
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Jean PRINGAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2539
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique MARMORAT, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Véronique MARMORAT, présidente
Fabienne Rouge, présidente
Christophe BACONNIER, président
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Véronique MARMORAT, Présidente de chambre et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [M] [B], né le 24 septembre 1959, a été embauché par la société Arc le 24 septembre 2012 en qualité de maçon.
Le salarié a saisi le Conseil des prud’hommes de Créteil en résiliation judiciaire et en diverses demandes indemnitaires et salariales. Cette affaire a été plaidée le 5 décembre 2014.
Par jugement du 26 juin 2015, ce conseil des prud’hommes a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à compter du 13 mars 2015 et a
Condamné l’employeur aux dépens et à lui verser les sommes suivantes :
– 19 800 euros à titre de rappel de salaire d’avril 2014 à février 2015outre celle de 1 980 euros pour les congés payés afférents
– 3 600 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 360 euros pour les congés payés afférents
– 900 euros à titre d’indemnité de licenciement
– 15 000 à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 10 8000 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé
Ordonné la remise d’un bulletin de paie d’avril 2014 au 6 mars 2015, certificat de travail, attestation Pôle Emploi conformes à cette décision sous quinzaine de la notification sous astreinte de 15 jours par document et jour de retard
En cours de délibéré, le tribunal de commerce de Créteil a ouvert par jugement du 6 mai 2015 une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Arc et a désigné maître [Z] [G] en qualité de mandataire liquidateur. Cette procédure a été close sous les même formes le 15 mars 2017 pour insuffisance d’actif. Par ordonnance rendue le 20 décembre 2018, maître [G] a été nommé en qualité de mandataire ad hoc pour les besoins de la présente procédure.
L’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est a refusé la prise en charge des créances ainsi fixées.
Le 2 août 2019, l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est a formé devant le Conseil des prud’hommes de Créteil une requête en tierce opposition à l’encontre du jugement rendu le 26 juin 2015.
Par jugement du 29 janvier 2021, le Conseil des prud’hommes de Créteil a rejeté cette requête, rectifié une erreur matérielle portant sur le montant de l’indemnité pour travail dissimulé ramenée la somme de 10 800 euros, a reconnu que ce jugement doit être appliqué et opposable à l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est, a dit que les sommes accordées sont des créances envers maître [G], pris en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Arc, a déclaré le jugement est opposable à l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est et a mis les éventuels dépens à la charge de l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est.
L’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est a interjeté appel de cette décision le 3 mars 2021.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 19 mai 2021, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est demande à la cour de
À titre principal
Juger sa tierce opposition recevable
Réformer le jugement du 29 janvier 2021
Fixer la date de rupture du contrat de travail le 26 juin 2015
Déclarer que les indemnités de rupture lui soient inopposables
Débouter monsieur [B] de l’ensemble de ses demandes
À titre subsidiaire
Juger que s’il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale
Juger que le jugement lui est opposable dans les termes et conditions de l’article L 3253-19 du code du travail,
Dire et juger qu’en tout état de cause, sa garantie prévue aux dispositions de l’article L 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens de l’article L 3253-8 du code du travail,
Dire et juger qu’en tout état de cause sa garantie ne pourra excéder, toutes créances confondues, sous déduction des sommes déjà versées, l’un des trois plafonds fixés en vertu des dispositions de l’article L 3253-17 et D 3252-5 du code du travail
Exclure son opposabilité à la créance fixée en application de l’article 700 du code de procédure civile et de la délivrance des documents sociaux
Dire ce que de droit quant aux dépens sans qu’ils ne puissent être mis à sa charge.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 3 août 2021, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, maître [G] pris en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Arc demande à la cour d’infirmer le jugement, statuant de nouveau
Dire et juge la tierce opposition formée par l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est recevable
Juger que la rupture du contrat de travail est intervenue le 13 mars 2014 dans le cadre d’un licenciement oral
Constater que ce licenciement est abusif
Juger que le montant du solde de tout compte dû à monsieur [B] s’élève aux sommes suivantes :
– 1 800 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 180 euros pour les congés payés afférents
– 540 euros à titre d’indemnité légale de licenciement
Ramener à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts pour rupture abusive
Débouter monsieur [B] du surplus de ses demandes
Le condamner aux dépens.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 10 août 2021, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [B] demande à la cour d’infirmer le jugement
À titre principal
Confirmer l’ensemble des dispositions de la décision entreprise
Débouter l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est et maître [G] de leurs demandes
Déclarer opposable à l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est la décision à intervenir
Condamner l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est à lui verser 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile
À titre subsidiaire
Confirmer la décision rendue le 26 juin 2015
Dire que les sommes retenues devront être fixées au passif de la société Arc
À titre très subsidiaire
Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de monsieur [B]
Requalifier le licenciement verbal en licenciement sans cause réelle et sérieuse
Fixer au passif de la société Arc les sommes suivantes
– 19 800 euros à titre de rappel de salaire d’avril 2014 à février 2015outre celle de 1 980 euros pour les congés payés afférents
– 3 600 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 360 euros pour les congés payés afférents
– 900 euros à titre d’indemnité de licenciement
– 15 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 10 800 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé
– 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En tout état de cause
Déclarer opposable à l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf Est la décision à intervenir
Condamner l’association Unédic délégation Ags Cgea Idf aux dépens et à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l’article 450 du code de procédure civile,
Infirme le jugement ;
Déclare recevable la tierce opposition de l’association Ags Cgea Idf Est ;
Confirme les sommes retenues par le jugement du 26 juin 2015 rendu par le Conseil des prud’hommes de Créteil ;
Rectifie la somme fixée à titre l’indemnité pour travail dissimulé à la somme de 10 800 euros ;
Fixe au passif de la société Arc les sommes suivantes au profit de monsieur [B]
– 19 800 euros à titre de rappel de salaire d’avril 2014 à février 2015 outre celle de 1 980 euros pour les congés payés afférents,
– 3 600 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 360 euros pour les congés payés afférents,
– 900 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 15 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 10 800 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé ;
Déclare le présent arrêt opposable à l’association Ags Cgea Idf Est dans les limites légales et réglementaires de sa garantie ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens.
Le greffier La présidente
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