L’Essentiel : La société exploitante de matériaux d’extraction a été confrontée à une infraction notifiée par l’administration des douanes concernant un défaut de déclaration de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour la période de mars 2015 à décembre 2017. Suite au rejet de sa contestation, la société a assigné l’administration des douanes en annulation de l’avis de mise en recouvrement, contestant la légitimité de la demande de paiement. La société a soutenu que la définition des poussières totales en suspension ne devrait inclure que celles de taille inférieure à 10 micromètres, mais la Cour a rejeté ces arguments comme non fondés.
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Contexte de l’affaireLa société exploitante de matériaux d’extraction, désignée ici comme la société Carrières de Vignats, a été confrontée à une infraction notifiée par l’administration des douanes concernant un défaut de déclaration de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour la période allant de mars 2015 à décembre 2017. Notification de l’infractionLe 13 mai 2019, l’administration des douanes a informé la société de l’infraction, suivie le 17 juin 2019 par l’émission d’un avis de mise en recouvrement (AMR) pour la TGAP éludée, ainsi que des intérêts de retard. Contestation de l’AMRSuite au rejet de sa contestation, la société Carrières de Vignats a décidé d’assigner l’administration des douanes en annulation de l’AMR et de la décision de rejet, contestant ainsi la légitimité de la demande de paiement. Arguments de la sociétéLa société Carrières de Vignats a formulé plusieurs griefs à l’encontre de l’arrêt, notamment en soutenant que la définition des poussières totales en suspension, selon l’article 266 septies du code des douanes, ne devrait inclure que les poussières de taille inférieure à 10 micromètres. Elle a également contesté l’interprétation de l’administration des douanes qui élargissait cette définition à des poussières plus grandes. Réponse de la CourLa Cour a rappelé que, selon les articles 266 septies et 266 octies du code des douanes, la TGAP est calculée sur le poids des poussières totales en suspension émises par certaines installations. Elle a conclu qu’aucune disposition ne limite l’assiette de la TGAP à des poussières d’une taille spécifique, rejetant ainsi les arguments de la société Carrières de Vignats comme non fondés. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la définition des poussières totales en suspension selon l’article 266 septies du code des douanes ?L’article 266 septies du code des douanes stipule que la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) est assise sur le poids des poussières totales en suspension émises dans l’atmosphère par certaines installations soumises à autorisation. Il n’y a aucune mention dans cet article d’une limitation de l’assiette de la TGAP à des poussières d’une taille inférieure à 10 micromètres. Ainsi, la cour d’appel a jugé que le législateur n’a pas opéré de distinction entre les différents types de poussières totales en suspension, ce qui inclut toutes les poussières, qu’elles soient sédimentables ou non. Les circulaires de l’administration des douanes peuvent-elles fonder des droits en litige ?Selon le principe général du droit, les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire ou d’une instruction des douanes ne peuvent être opposées au contribuable si l’interprétation qu’elles prescrivent méconnaît le sens ou la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elles entendent expliciter. Dans cette affaire, la cour d’appel a considéré que la circulaire du 18 avril 2016 était opposable à la société Carrières de Vignats. Cependant, si cette circulaire réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure, elle ne peut pas fonder des droits en litige. La société Carrières de Vignats a-t-elle raison de contester l’AMR émis par l’administration des douanes ?La société Carrières de Vignats a contesté l’avis de mise en recouvrement (AMR) émis par l’administration des douanes, arguant que la notion de poussières totales en suspension ne devrait pas inclure les poussières de taille supérieure à 10 micromètres. Cependant, la cour d’appel a rejeté cette contestation en se basant sur l’interprétation de l’article 266 septies du code des douanes, qui ne limite pas l’assiette de la TGAP à des poussières d’une taille spécifique. Ainsi, la cour a jugé que l’administration des douanes avait le droit de considérer toutes les poussières en suspension pour le calcul de la TGAP, ce qui a conduit à la condamnation de la société à payer la somme due. |
FM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 mars 2025
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 94 F-D
Pourvoi n° T 23-24.051
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 MARS 2025
La société Carrières de Vignats, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° T 23-24.051 contre l’arrêt rendu le 31 octobre 2023 par la cour d’appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige l’opposant :
1°/ à la direction générale des douanes et droits indirects, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la direction régionale des douanes et droits indirects de Basse-Normandie, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à la recette interrégionale des douanes et des droits indirects, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Carrières de Vignats, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects, la direction régionale des douanes et droits indirects de Basse-Normandie et la recette interrégionale des douanes et des droits indirects, après débats en l’audience publique du 17 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1.Selon l’arrêt attaqué (Caen, 31 octobre 2023), la société Carrières de Vignats a pour activité l’exploitation et la production de matériaux d’extraction.
2. Le 13 mai 2019, l’administration des douanes lui a notifié l’infraction de défaut de déclaration de la taxe générale sur les activités polluantes dans sa composante émissions polluantes (la TGAP) au titre de la période de mars 2015 à décembre 2017.
3. Le 17 juin 2019, l’administration des douanes a émis un avis de mise en recouvrement (AMR) de la TGAP éludée, outre les intérêts de retard.
4. Après le rejet de sa contestation, la société Carrières de Vignats a assigné l’administration des douanes en annulation de l’AMR et de la décision de rejet.
Enoncé du moyen
5. La société Carrières de Vignats fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes et de la condamner à payer à la direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 5] la somme totale de 170 931 euros en exécution de l’AMR émis le 17 juin 2019 portant sur la TGAP due sur la période de mars 2015 à décembre 2017, alors :
« 1° / que la notion de poussières totales en suspension visée par l’article 266 septies du code des douanes, à raison de l’émission desquelles la taxe générale sur les activités polluantes peut être due, ne peut désigner que les poussières d’une taille inférieure à 10 micromètres, non sédimentables, à l’exclusion des poussières plus grosses, retombant au sol à raison de la gravité ; qu’en jugeant que « le législateur n’a pas opéré de distinction entre les différents types de poussières totales en suspension, selon leur taille ou selon qu’elles demeurent en suspension dans l’atmosphère ou retombent au sol », pour en déduire que le législateur avait entendu taxer toutes les poussières en suspension, sédimentables ou non, la cour d’appel a violé l’article 266 septies du code des douanes ;
2°/ qu’en conséquence, en retenant que l’administration des douanes avait pu, dans ses différentes circulaires, retenir que la notion de poussières totales en suspension ne visait pas seulement les plus petites des poussières, dont la taille est inférieure à 10 micromètres, et visait également les poussières plus grandes, la cour d’appel a violé l’article 266 septies du code des douanes ;
3°/ qu’en tout état de cause, des droits ne sauraient être fondés sur l’interprétation que l’administration des douanes a faite d’une disposition et qu’elle entend opposer au cotisant ; que la cour d’appel, à supposer qu’elle ait considéré que la circulaire du 18 avril 2016 était opposable à la société Carrières de Vignats et pouvait fonder les droits en litige, a violé le principe selon lequel les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire ou d’une instruction des douanes ne peuvent être opposées au contribuable si l’interprétation qu’elles prescrivent soit méconnaît le sens ou la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elles entendent expliciter soit réitèrent une règle contraire à une norme juridique supérieure. »
6. Selon les articles 266 septies et 266 octies du code des douanes, la TGAP est assise sur le poids des poussières totales en suspension émises dans l’atmosphère par certaines installations soumises à autorisation.
7. Aucune des dispositions applicables ne limite l’assiette de la TGAP à des poussières en suspension d’une taille inférieure à 10 micromètres.
8. Inopérant en ses deuxième et troisième branches qui critiquent des motifs surabondants, le moyen, qui postule le contraire, n’est donc pas fondé pour le surplus.
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