Opposition tardive à une contrainte : irrecevabilité confirmée.

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Opposition tardive à une contrainte : irrecevabilité confirmée.

L’Essentiel : Le travailleur indépendant, exerçant une activité artisanale d’isolation-peinture, a été affilié à l’URSSAF entre le 1er avril 2017 et le 30 novembre 2018. L’organisme de recouvrement a notifié une mise en demeure le 23 février 2023, demandant le règlement d’une somme de 50 781 euros. Le 1er juin 2023, l’URSSAF a émis une contrainte, signifiée le 7 juin, pour un montant total de 51 113,92 euros. En réponse, le travailleur indépendant a formé opposition le 21 septembre 2023. Par ordonnance du 4 mars 2024, le président du pôle social a déclaré l’opposition manifestement irrecevable.

Contexte de l’affaire

Le cotisant, exerçant une activité artisanale d’isolation-peinture sous le statut d’auto-entrepreneur, a été affilié à l’URSSAF en tant que travailleur indépendant entre le 1er avril 2017 et le 30 novembre 2018. L’URSSAF, représentant l’organisme de recouvrement des cotisations sociales, a notifié au cotisant une mise en demeure le 23 février 2023, lui demandant de régler une somme de 50 781 euros pour le 4ème trimestre 2018.

Procédure de contrainte

Le 1er juin 2023, l’URSSAF a émis une contrainte à l’encontre du cotisant, signifiée le 7 juin 2023, pour un montant total de 51 113,92 euros. En réponse, le cotisant a formé opposition à cette contrainte le 21 septembre 2023.

Décision du tribunal

Par ordonnance du 4 mars 2024, le président du pôle social a déclaré l’opposition du cotisant manifestement irrecevable et l’a condamné aux dépens. Le cotisant a ensuite interjeté appel de cette décision le 22 mars 2024.

Arguments des parties

Dans ses conclusions, le cotisant a demandé à la cour d’infirmer l’ordonnance et de condamner l’URSSAF aux dépens, tout en réclamant une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. De son côté, l’URSSAF a soutenu que l’appel du cotisant était mal fondé et a demandé le déboutement de ses demandes, tout en réclamant également 1 000 euros en application de l’article 700.

Analyse de l’irrecevabilité

La cour a examiné la question de l’irrecevabilité de l’opposition à la contrainte. Selon l’URSSAF, le cotisant avait formé son opposition après le délai légal de 15 jours, ce qui justifiait la forclusion. Le cotisant a tenté de justifier son retard en affirmant avoir saisi une juridiction incompétente, mais n’a pas fourni de preuves suffisantes pour étayer ses allégations.

Conclusion de la cour

La cour a confirmé l’ordonnance initiale en toutes ses dispositions, rejetant la demande du cotisant au titre de l’article 700 et le condamnant à payer 1 000 euros à l’URSSAF, ainsi qu’aux dépens d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Sur l’irrecevabilité de l’opposition à contrainte

Le président de la formation de jugement a déclaré l’opposition formée par le cotisant manifestement irrecevable en vertu de l’article R. 142-10-2 du code de la sécurité sociale, qui stipule que le président peut rejeter les requêtes manifestement irrecevables par ordonnance motivée.

Le cotisant soutient avoir formé son opposition dans les délais, mais l’URSSAF conteste cette affirmation, arguant que l’opposition a été faite après le délai de 15 jours requis, comme précisé dans l’article R. 133-3 du code de la sécurité sociale. Cet article précise que la contrainte doit être signifiée au débiteur avec mention du délai d’opposition.

En l’espèce, le délai pour former opposition à la contrainte signifiée le 7 juin 2023 expirait le 22 juin 2023. Le cotisant a envoyé son opposition le 21 septembre 2023, soit bien après le délai imparti, rendant son recours manifestement irrecevable.

Le cotisant a tenté de justifier son retard en invoquant une saisine d’une juridiction incompétente, se prévalant de l’article 2241 du code civil, qui prévoit que la demande en justice interromp le délai de prescription. Cependant, il n’a produit aucune preuve de cette saisine, ce qui a conduit la cour à confirmer la décision du premier juge.

Sur les demandes accessoires

La cour a confirmé la décision relative aux dépens, en vertu des dispositions applicables en matière de frais de justice. L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais d’avocat, mais la cour a rejeté la demande du cotisant à ce titre.

En conséquence, le cotisant a été condamné à payer à l’URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1 000 euros en application de l’article 700, ainsi qu’aux dépens d’appel. Cette décision est conforme aux principes de la procédure civile, qui prévoient que la partie perdante supporte les frais de la procédure.

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 24/02683 – N° Portalis DBVX-V-B7I-PSG6

[G]

C/

Etablissement Public URSSAF RHONE ALPES

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Pole social du TJ de BOURG EN BRESSE

du 04 Mars 2024

RG : 2300903

AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU 11 MARS 2025

APPELANT :

[K] [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Deniz CEYHAN de la SELAS LEX EDERIM, avocat au barreau de LYON substituée par Me Volkan UYSAL, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Etablissement Public URSSAF RHONE ALPES

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Charlotte GINGELL, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Février 2025

Présidée par Nabila BOUCHENTOUF, Conseillère, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Anais MAYOUD, Greffière et en présence de [H] [R], Greffier stagiaire.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

– Delphine LAVERGNE-PILLOT, présidente

– Nabila BOUCHENTOUF, conseillère

– Anne BRUNNER, conseillère

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 11 Mars 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Magistrate, et par Anais MAYOUD, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [G] (le cotisant), qui a exercé une activité artisanale d’isolation-peinture sous le statut d’auto-entrepreneur, a été affilié du 1er avril 2017 au 30 novembre 2018 en qualité de travail indépendant auprès de l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de la région Rhône-Alpes (l’URSSAF), venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants (le RSI).

L’URSSAF lui a notifié une mise en demeure du 23 février 2023, réceptionnée le 24 février 2023, d’avoir à régler la somme de 50 781 euros de cotisations et contributions sociales au titre du 4ème trimestre 2018.

Le 1er juin 2023, l’URSSAF a décerné à l’encontre du cotisant une contrainte, signifiée le 7 juin 2023, pour un montant de 51 113,92 euros de cotisations et contributions sociales au titre du 4ème trimestre 2018.

Le 21 septembre 2023, le cotisant a formé opposition à ladite contrainte.

Par ordonnance du 4 mars 2024, le président du pôle social :

– déclare l’opposition formée le 21 septembre 2023 par le cotisant contre la contrainte datée du 1er juin 2023 qui lui a été signifiée le 7 juin 2023 manifestement irrecevable,

– condamne le cotisant aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 22 mars 2024, le cotisant a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 31 octobre 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, il demande à la cour de :

– infirmer l’ordonnance en toutes ses dispositions,

– condamner l’URSSAF aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Deniz Ceyhan, avocat, sur son affirmation de droit,

– condamne l’URSSAF à lui payer la somme de 1 000 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières écritures reçues au greffe le 5 décembre 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, l’URSSAF demande à la cour de :

– déclarer mal fondé l’appel interjeté par le cotisant à l’encontre de l’ordonnance d’irrecevabilité,

– débouter le cotisant de ses demandes en toutes ses dispositions,

– condamner le cotisant à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l’article 700

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR L’IRRECEVABILITÉ DE L’OPPOSITION A CONTRAINTE

Aux termes de l’article R. 142-10-2 du code de la sécurité sociale applicable à compter du 1er janvier 2019, le président de la formation de jugement peut, par ordonnance motivée, rejeter les requêtes manifestement irrecevables.

Pour soutenir sa demande d’infirmation de l’ordonnance sur l’irrecevabilité de l’opposition tirée de la forclusion, M. [G] expose qu’il a formé opposition dans les délais, en l’orientant toutefois, dans un premier temps, devant une juridiction territorialement incompétente, avant de saisir, dans le délai imparti compte tenu de la suspension du délai de prescription, la juridiction compétente. Il en déduit que la forclusion doit être écartée et son recours déclaré recevable.

Au soutien de sa demande de confirmation du jugement sur ce point, l’URSSAF réplique que M. [G] a formé opposition à la contrainte signifiée le 7 juin 2023, par courrier daté du 27 juillet 2023 posté le 21 septembre 2023, soit au-delà du délai de 15 jours requis. Elle relève que le cotisant ne justifie pas de la saisine d’une juridiction incompétente devant laquelle il se serait désisté et considère que la tardiveté de l’opposition à contrainte justifie de prononcer sa forclusion.

Selon l’alinéa 1 de l’article R. 133-3 du code de la sécurité sociale si la mise en demeure reste sans effet au terme du délai d’un mois à compter de sa notification, le directeur de l’organisme créancier peut décerner une contrainte. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d’huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. À peine de nullité, l’acte d’huissier ou la lettre recommandée mentionne notamment le délai dans lequel l’opposition doit être formée, l’adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.

Selon l’article R. 133-3 du même code, si la mise en demeure ou l’avertissement reste sans effet au terme du délai d’un mois à compter de sa notification, les directeurs des organismes créanciers peuvent décerner, dans les domaines mentionnés aux articles L. 161-1-5 ou L. 244-9, une contrainte comportant les effets mentionnés à ces articles. La contrainte est notifiée au débiteur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception ou lui est signifiée par acte d’huissier de justice. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d’huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. À peine de nullité, l’acte d’huissier ou la notification mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l’opposition doit être formée, l’adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.

Ici, le premier juge a très justement relevé que le délai de 15 jours ouvert à M. [G] pour former opposition à la contrainte qui lui avait été signifiée le 7 juin 2023 expirait le jeudi 22 juin suivant, de sorte qu’en adressant son opposition par lettre recommandée du 21 septembre 2023, il était manifestement irrecevable en son recours.

A hauteur de cour, M. [G] produit l’accusé de réception de la lettre recommandée qui confirme la date d’envoi de son recours au 21 septembre 2023. Il indique avoir précédemment régularisé son opposition devant le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon avant de se désister pour saisir le pôle social territorialement compétent et se prévaut ainsi des dispositions de l’article 2241 du code civil qui prévoit que la demande en justice, même portée devant une juridiction incompétente, emporte interruption du délai de prescription.

Or, il ne produit strictement aucune pièce corroborant ces allégations de sorte que la cour ne peut que confirmer la décision déférée.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

La décision attaquée sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens.

La cour rejette la demande de M. [G] formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et le condamne à payer en cause d’appel à l’URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1 000 euros. Il sera également condamné aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [G] et le condamne à payer en cause d’appel à l’URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1 000 euros,

Condamne M. [G] aux dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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