La demande de communication de pièces face au secret professionnel

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La demande de communication de pièces face au secret professionnel

Aux termes de l’article 142 du code de procédure civile, les demandes de production des éléments de preuve détenus par les parties sont faites et leur production a lieu, conformément aux dispositions des articles 138 et 139, lesquels énoncent notamment que “le juge, s’il estime cette demande fondée, ordonne la délivrance ou la production de l’acte ou de la pièce, en original, en copie ou en extrait selon le cas, dans les conditions et sous les garanties qu’il fixe, au besoin à peine d’astreinte”.

La communication de pièces prévue à l’article 138 du code de procédure civile ne peut être obtenue que si elle a pour but la sauvegarde d’un droit légalement reconnu ou judiciairement constaté.

En l’occurrence, les demandeurs sollicitent la production forcée de pièces dans le cadre de l’action en responsabilité engagée contre les défenderesses, et cherchent ainsi à justifier du bien-fondé d’un droit. Dès lors, la mesure sollicitée relève bien des dispositions des articles 138 et 142 du code de procédure civile précités.

En application de ces textes, les pièces réclamées doivent être utiles pour l’issue du litige. Il ne saurait être ordonné la production de pièces sans que l’existence de ces dernières et l’effectivité de leur détention par la partie auprès de laquelle la demande est faite soient établies avec certitude, ou à tout le moins vraisemblables. Il importe en outre que ces pièces soient suffisamment spécifiées.

En outre, parce que l’article 9 du code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de ses prétentions, une partie ne saurait réclamer de son contradicteur les éléments de preuve nécessaires au soutien de ses propres prétentions.

Par ailleurs, le pouvoir du juge d’ordonner cette production est limité par l’existence d’un empêchement légitime, dont peut être le secret professionnel auquel est notamment tenu l’établissement bancaire, en application de l’article L.511-33 du code monétaire et financier.

Toutefois, le secret professionnel ne saurait être un empêchement légitime, au sens des articles 10 du code civil et 11 du code de procédure civile, si la production litigieuse est indispensable à l’exercice par le demandeur de son droit à la preuve et si elle est proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.

En la cause, il revenait aux demandeurs qui recherchaient la responsabilité de la société Financière des Paiements Electronique de prouver la faute qu’elle aurait commise à leur égard en recevant les virements qu’ils ont effectués à destination d’un livre ouvert en ses comptes. Or, ils n’établissaient pas en quoi l’obtention de documents relatif à la relation contractuelle entre la banque et le titulaire du compte bénéficiaire du virement était indispensable à la démonstration de la faute ayant un lien direct avec leur préjudice.

L’Essentiel : M. [B] et Mme [G] ont assigné plusieurs banques, dont Rothschild Martin Maurel, pour manquement à leur devoir de vigilance après avoir investi via la plateforme STOCKWINE. Ils réclament des réparations pour des virements totalisant 392 519,50 euros, estimant avoir été victimes d’une escroquerie. Malgré un désistement partiel concernant Unicredit Bank et Comercni Banka, les plaignants demandent des documents prouvant la vérification des comptes de la société frauduleuse. Rothschild Martin Maurel conteste toute faute, affirmant avoir alerté Mme [G] sur les risques. Le tribunal a finalement rejeté leurs demandes, les condamnant à payer les dépens.
Résumé de l’affaire :

Contexte de l’affaire

M. [V] [B] et Mme [P] [G] ont assigné plusieurs établissements bancaires devant le tribunal judiciaire de Paris, dont la société Rothschild Martin Maurel et la société Financière des paiements électroniques. Ils sont titulaires de comptes bancaires auprès de Rothschild Martin Maurel et ont effectué des virements en 2018, pensant investir via la plateforme STOCKWINE. Les montants des virements s’élèvent à 102 999 euros pour M. [B] et 289 520,50 euros pour Mme [G]. Ils estiment que les banques ont manqué à leur devoir de vigilance et demandent réparation pour leurs préjudices.

Désistement partiel

Les demandeurs ont conclu un protocole transactionnel avec Unicredit Bank et Comercni Banka, ce qui a conduit à leur désistement d’instance et d’action à l’égard de ces sociétés, validé par le juge de la mise en état en octobre 2022. Rothschild Martin Maurel a demandé la communication de ce protocole, mais cette demande a été rejetée par le juge en juin 2023.

Demandes des plaignants

Dans leurs conclusions de septembre 2024, M. [B] et Mme [G] demandent au tribunal d’enjoindre à la société Financière des paiements électroniques de produire des documents attestant de la vérification effectuée lors de l’ouverture des comptes de la société frauduleuse. Ils soutiennent que Rothschild Martin Maurel a commis une faute de vigilance et demandent des réparations financières pour leurs pertes.

Arguments des plaignants

M. [B] et Mme [G] affirment avoir été en contact avec des conseillers de STOCKWINE et avoir été victimes d’une escroquerie. Ils reprochent à la société Financière des paiements électroniques d’avoir manqué à son obligation de vigilance lors de l’ouverture du compte, en soulignant que le compte a été ouvert rapidement sans vérification adéquate. Ils estiment également que Rothschild Martin Maurel aurait dû détecter les anomalies dans les virements.

Réponse de Rothschild Martin Maurel

Rothschild Martin Maurel conteste avoir manqué à son obligation de vigilance, affirmant avoir alerté Mme [G] sur le caractère potentiellement frauduleux des virements. La banque soutient que les demandeurs n’ont pas prouvé leur préjudice et que le protocole transactionnel avec les autres banques n’a pas été communiqué, ce qui complique l’évaluation de la situation.

Réponse de la société Financière des Paiements Électroniques

La société Financière des paiements électroniques demande le rejet des demandes des plaignants, arguant qu’elle n’est responsable que des virements effectués par M. [B]. Elle affirme avoir respecté les obligations de vérification lors de l’ouverture du compte et conteste avoir manqué à son devoir de vigilance.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté l’ensemble des demandes de M. [B] et Mme [G], concluant qu’ils n’ont pas prouvé la faute des sociétés défenderesses. Il a également condamné les plaignants à payer les dépens et des frais de justice aux défenderesses, tout en maintenant l’exécution provisoire du jugement.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les obligations de vigilance des établissements bancaires lors de l’ouverture d’un compte ?

Les obligations de vigilance des établissements bancaires lors de l’ouverture d’un compte sont principalement régies par l’article R.312-2 du code monétaire et financier. Cet article stipule que :

« Préalablement à l’ouverture d’un compte, le banquier doit vérifier le domicile et l’identité du postulant, qui est tenu de présenter un document officiel comportant sa photographie. »

Dans le cas présent, la société Financière des Paiements Electroniques a produit un procès-verbal d’huissier attestant que l’identité et l’adresse de la personne ayant ouvert le compte ont été vérifiées.

Ainsi, il n’y a pas de manquement à l’obligation de vigilance lors de l’ouverture du compte, car la société a respecté les exigences légales en matière de vérification d’identité.

Les établissements bancaires ont-ils une obligation de vigilance lors du fonctionnement des comptes ?

Oui, les établissements bancaires ont une obligation de vigilance lors du fonctionnement des comptes, qui découle de l’article L. 133-6 du code monétaire et financier. Cet article précise que :

« Une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution. »

Cependant, le banquier doit également contrôler la régularité de l’ordre de virement, afin de déceler toute anomalie.

Dans cette affaire, les demandeurs reprochent à la société Rothschild Martin Maurel de ne pas avoir alerté sur des virements significatifs et inhabituels. Toutefois, le simple caractère inhabituel d’une opération ne signifie pas nécessairement qu’elle soit illicite ou frauduleuse.

La banque a justifié avoir demandé des renseignements sur l’objet des virements, et a même refusé d’exécuter un virement après l’inscription de STOCK WINE sur la liste noire de l’AMF.

Ainsi, la banque a respecté son obligation de vigilance.

Quelles sont les conséquences de la violation des obligations de vigilance par les banques ?

Les conséquences d’une violation des obligations de vigilance par les banques peuvent inclure la responsabilité civile pour les dommages causés aux clients. Cependant, selon les articles L.561-1 et suivants du code monétaire et financier, ces dispositions visent principalement la protection de l’intérêt général et ne peuvent pas fonder une demande de dommages-intérêts.

Ces textes imposent aux banques une obligation de surveillance, mais ne leur confèrent pas un devoir de protection envers leurs clients. Par conséquent, même si une banque ne respecte pas ses obligations de vigilance, cela ne peut pas nécessairement entraîner une responsabilité civile envers les clients.

Dans le cas présent, les demandeurs n’ont pas réussi à prouver que la société Rothschild Martin Maurel ou la société Financière des Paiements Electroniques avaient manqué à leurs obligations de vigilance, ce qui a conduit à un rejet de leurs demandes.

Comment le secret bancaire influence-t-il la production de documents en justice ?

Le secret bancaire est protégé par l’article L.511-33 du code monétaire et financier, qui stipule que :

« Les établissements de crédit sont tenus au secret professionnel. »

Ce secret peut constituer un empêchement légitime à la production de documents en justice. Toutefois, ce secret ne peut être opposé si la production des documents est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée aux intérêts en présence.

Dans cette affaire, les demandeurs ont demandé la production de documents relatifs à la vérification effectuée lors de l’ouverture des comptes. Cependant, leur demande n’était pas suffisamment spécifiée et portait atteinte au secret bancaire.

Le tribunal a donc rejeté cette demande, considérant que les pièces demandées n’étaient pas indispensables à l’exercice du droit à la preuve.

Quelles sont les implications des articles 700 et 696 du code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme pour couvrir les frais de justice non compris dans les dépens. Cet article stipule que :

« Le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés. »

L’article 696, quant à lui, précise que les dépens sont à la charge de la partie perdante.

Dans ce litige, M. [B] et Mme [G] ont été condamnés in solidum au paiement des entiers dépens, ainsi qu’à verser 5 000 euros à chacune des sociétés défenderesses au titre de l’article 700. Cela signifie qu’ils doivent couvrir les frais de justice engagés par les défenderesses en raison de leur action en justice.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :

9ème chambre 1ère section

N° RG 21/10721

N° Portalis 352J-W-B7F-CU6BC

N° MINUTE :

Contradictoire

Assignation du :
05 août 2021

JUGEMENT
rendu le 29 janvier 2025
DEMANDEURS

Monsieur [V] [B]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représenté par Me Goce NOVAKOV, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #E1045

Madame [P] [G]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représentée par Me Goce NOVAKOV, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #E1045

DÉFENDERESSES

S.C.S. ROTHSCHILD MARTIN MAUREL
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentée par Maître Gabriel DURAND de la SCP PIGOT SEGOND – ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0172

S.A.S. FINANCIERE DE PAIEMENTS ELECTRONIQUES
[Adresse 1]
[Adresse 1]

représentée par Maître Nicolas BAUCH-LABESSE de l’AARPI TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #R0010

Décision du 29 Janvier 2025
9ème chambre 1ère section
N° RG 21/10721 – N° Portalis 352J-W-B7F-CU6BC

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Anne-Cécile SOULARD, Vice-présidente,
Monsieur Patrick NAVARRI, Vice-président,
Madame Marine PARNAUDEAU, Vice-présidente,

assistés de Madame Sandrine BREARD, Greffière

DÉBATS

A l’audience du mercredi 18 décembre 2024 tenue en audience publique devant Madame Anne-Cécile SOULARD, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE
Par actes d’huissier du 5 août 2021, M. [V] [B] et Mme [P] [G] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris :
– la société en commandite simple Rothschild Martin Maurel,
– la société par actions simplifiée Financière des paiements électroniques,
– la société de droit tchèque Unicredit Bank Czech Republique and Slovakia A.S.,
– la société de droit tchèque Comercni Banka A.S.
Ils exposent qu’ils sont titulaires de comptes bancaires ouverts auprès de l’établissement bancaire Rothschild Martin Maurel et que, dans le courant de l’année 2018, ils ont effectué divers virements depuis ces comptes pensant effectuer des investissements depuis la plateforme STOCKWINE. Ils précisent avoir effectué, pour M. [B], quatre virements d’un montant total de 102 999 euros en faveur de sociétés domiciliées auprès des banques Financière des Paiements Electroniques et Unicredit Bank, et pour Mme [G], sa mère, trois virements d’un montant total de 289 520,50 euros en faveur de sociétés domiciliées auprès des banques Unicredit Bank et Comercni Banka.
Ils considèrent que ces établissements bancaires ont manqué à leur devoir de vigilance et sollicitent leur condamnation in solidum à réparer leur préjudice financier et moral.

Par conclusions communiquées par voie électronique le 28 mars 2022, les demandeurs ont indiqué avoir conclu un protocole transactionnel avec les sociétés Unicredit Bank Czech Republique and Slovakia et Comercni Banka et sollicité du juge de la mise en état que soit constaté leur désistement d’instance et d’action à l’encontre de ces sociétés.
Par ordonnance du 19 octobre 2022, le juge de la mise en état a déclaré parfait le désistement d’instance et d’action de M. [V] [B] et Mme [P] [G] à l’égard des sociétés Unicredit Bank Czech Republique and Slovakia et Comercni Banka et dit qu’il emportait extinction de l’instance à l’égard de ces dernières.
La société Rothschild Martin Maurel a sollicité du juge de la mise en état d’enjoindre aux demandeurs de communiquer le protocole transactionnel conclu avec les sociétés Unicredit Bank Czech Republique and Slovakia A.S. et Comercni Banka A.S.
Par ordonnance du 14 juin 2023, le juge de la mise en état a rejeté cette demande.
Demandes et moyens de M. [B] et de Mme [G]
Dans leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique le 9 septembre 2024, M. [B] et Mme [G] demandent au tribunal de :
« AVANT DIRE DROIT, ENJOINDRE à la société FINANCIÈRE DES PAIEMENTS ÉLECTRONIQUES de produire :
– Tout document attestant la vérification et le contrôle effectué, conformément aux règles applicables, lors de l’ouverture des comptes de la société fraudeuse, relatives à l’identité des représentants et des bénéficiaires effectifs, à son activité, à sa conformité avec la réglementation financière (production de la preuve de l’exercice du devoir de vigilance lors de l’ouverture du compte bancaire) ;
– Tout document attestant l’exercice du devoir de vigilance des banques bénéficiaires des virements lors du fonctionnement du compte, en particulier les relevés des comptes bancaires de leur clientes susmentionnées (production de la preuve de l’exercice du devoir de vigilance lors du fonctionnement du compte bancaire).
Au fond :
JUGER que la société ROTSCHILD MARTIN MAUREL a commis une faute de vigilance et surveillance lors du fonctionnement du compte bancaire de Monsieur [V] [B] et Madame [P] [G] à l’origine des préjudices subis par ceux-ci concernant la perte des fonds investis sur la plateforme de trading en ligne STOCK WINE ;
JUGER que la société FINANCIÈRE DES PAIEMENTS ÉLECTRONIQUES a commis une faute lors de l’ouverture et du fonctionnement du compte bancaire de la société de courtage frauduleuse à l’origine des préjudices subis par Monsieur [V] [B] concernant la perte des fonds investis sur la plateforme de trading en ligne STOCK WINE ;
En conséquence,
CONDAMNER in solidum ou l’une à défaut de l’autre, la société ROTCHILD MARTIN MAUREL et la société FINANCIÈRE DES PAIEMENTS ÉLECTRONIQUES, ou l’une à défaut de l’autre, à payer à Monsieur [V] [B] la somme de 53.999,00 Euros en réparation de son préjudice financier ;
CONDAMNER la société ROTSCHILD MARTIN MAUREL à payer à Monsieur [V] [B] la somme de 49.000,00 Euros en réparation de son préjudice financier ;
CONDAMNER la société ROTSCHILD MARTIN MAUREL à payer à Madame [P] [G] la somme de 70.800,00 Euros, de 60,984.00 USD et de 197.600,00 USD, correspondant aux trois virements qu’elle a effectués, soit la somme totale en euros de 289.520,5 en réparation de son préjudice financier ;
CONDAMNER les sociétés ROTSCHILD MARTIN MAUREL et FINANCIÈRE DES PAIEMENTS ÉLECTRONIQUES au paiement des intérêts légaux à partir du 1 juin 2021, date de l’envoi des courriers de mise en demeure ;
CONDAMNER in solidum, ou une à défaut de l’autre les sociétés ROTSCHILD MARTIN MAUREL, FINANCIÈRE DES PAIEMENTS ÉLECTRONIQUES, à payer à Monsieur [V] [B] et Madame [P] [G] la somme de 10 000 Euros chacun en réparation de leur préjudice moral ;
ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir ;
CONDAMNER tout succombant à payer à Monsieur [V] [B] et Madame [P] [G] la somme de 4 000 Euros au titre de l’article 700 du CPC ;
CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens. »
M. [B] et Mme [G] exposent qu’ils ont réalisé les virements litigieux en pensant investir dans des bouteilles de vin par l’intermédiaire de la plateforme Stock Wine tout en étant en contact régulier avec les conseillers de cette plateforme. Ils précisent qu’ils n’ont plus eu accès à leur compte sur cette plateforme à compter du mois de février 2019 et que celle-ci figure sur la liste noire de l’AMF.
M. [B] et Mme [G] indiquent s’être constitués partie civile dans la procédure d’instruction ouverte au tribunal judiciaire de Nanterre.
M. [B] et Mme [G] reprochent à la société Financière des Paiements Electronique d’avoir manqué à son obligation de vigilance lors de l’ouverture du compte bancaire sur lequel M. [B] a effectué trois virements. Ils observent que le compte ouvert est un compte dit « NICKEL » qui peut être ouvert en cinq minutes depuis un bureau de tabac et estiment que la société Financière des Paiements Electronique n’aurait pas dû procéder à l’ouverture de ce compte sur la seule foi d’une carte d’identité sans vérifier l’adresse de la personne physique par l’envoi d’une « lettre d’accueil ».
Ils affirment que la société Financière des Paiements Electronique a également manqué à son obligation de vigilance en ce qui concerne le fonctionnement du compte alors que les montants importants reçus pour le compte d’une personne morale, en l’espèce STOCK WINE, sur le compte d’une personne physique auraient dû attirer son attention.
M. [B] et Mme [G] allèguent que la société Rotschild Martin Maurel aurait dû détecter le caractère anormal des virements litigieux et notamment les sommes inhabituellement élevées, la fréquence des virements sur une brève période et leur destination vers l’étranger. Ils ajoutent que la banque aurait dû avoir connaissance de l’activité illicite de la plateforme STOCK WINE, inscrite sur la liste noire de l’AMF, et faisant l’objet d’accusations publiques par d’autres victimes. Ils précisent qu’ils sont profanes en matière d’investissements spéculatifs. En ce qui concerne plus particulièrement Mme [G], ils soulignent que la banque aurait dû réagir face à l’abus de faiblesse qu’elle a subi.
M. [B] et Mme [G] reconnaissent l’existence d’une mise en garde de leur banque mais relèvent que celle-ci est intervenue tardivement alors qu’ils ne pouvaient pas croire qu’il s’agissait d’une escroquerie. Ils observent également que la banque aurait dû déceler le caractère illicite de l’activité de Stock Wine, notamment lorsqu’elle a eu en sa possession des documents commerciaux émanant de cette entité.
Demandes et moyens de la société Rothschild Martin Maurel
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 14 juin 2024, la société Rothschild Martin Maurel demande au tribunal de :
« DÉBOUTER Monsieur [V] [B] et Madame [P] [G] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
– CONDAMNER Monsieur [V] [B] et Madame [P] [G] à payer à la Société ROTHSCHILD MARTIN MAUREL la somme de 10 000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– CONDAMNER Monsieur [V] [B] et Madame [P] [G] aux entiers dépens. »
La société Rotschild Martin Maurel conteste avoir manqué à son obligation de vigilance. Elle remarque au contraire qu’elle a alerté Mme [G] sur le caractère potentiellement frauduleux des virements mais que celle-ci a persisté dans son intention de les réaliser.
La société Rotschild Martin Maurel conteste le préjudice des demandeurs, celui-ci ne pouvant être qu’un préjudice de perte de chance et relève que les demandeurs refusent toujours de communiquer le protocole transactionnel conclu avec les banques Unicredit Bank et Komercni Banka, ce qui ne permet pas de s’assurer que leur préjudice n’a pas déjà été réparé.

Demandes et moyens de la société Financière des Paiements Electroniques
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 1er octobre 2024, la société Financière des Paiements Electroniques demande au tribunal de :
« DEBOUTER Madame [P] [G] et Monsieur [V] [B] de l’intégralité de leurs demandes ;
CONDAMNER Madame [P] [G] et Monsieur [V] [B] au paiement de la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER Madame [P] [G] et Monsieur [V] [B] à supporter l’intégralité des dépens.
En toute hypothèse,
ECARTER l’exécution provisoire de la décision à intervenir ou subsidiairement, la subordonner à la constitution par Madame [P] [G] et Monsieur [V] [B] d’une garantie émanant d’un établissement bancaire de premier ordre et d’un montant suffisant pour répondre de toutes restitutions dues en cas d’infirmation du jugement. »
La société Financière des Paiements Electronique observe que seul M. [B] a effectué des virements vers un compte ouvert dans ses livres tandis que Mme [G] a effectué des virements vers d’autres banques. Elle en conclut qu’elle ne saurait être condamnée que pour les préjudices liés à ces seuls virements et au seul bénéfice de M. [B].
La société Financière des Paiements Electronique précise que le compte vers lequel M. [B] a effectué trois virements a été ouvert le 7 mai 2018 au profit d’une personne physique et non de la société STOCK WINE.
S’agissant de la demande de communication de pièces, la société Financière des Paiements Electronique soutient qu’elle ne peut communiquer les informations relatives à son client ou au fonctionnement de son compte, de telles informations étant couvertes par le secret bancaire. Elle soutient qu’elle a procédé aux vérifications requises en demandant la carte d’identité du titulaire du compte et relève qu’elle n’est en rien responsable de la falsification ultérieure du RIB tel que l’a reçu M. [B] et sur lequel la société STOCK WINE apparaît comme titulaire du compte.
La société Financière des Paiements Electronique conteste avoir manqué à son devoir spécial de vigilance, résultant des dispositions de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. S’agissant du devoir général de vigilance, la société Financière des Paiements Electronique fait valoir qu’elle avait l’obligation en tant que prestataire de services de paiement du bénéficiaire de créditer le compte de son client.
* * *
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé des moyens et arguments venant au soutien de leurs demandes et de leurs défenses.
Le juge de la mise en état a clôturé l’instruction de l’affaire par ordonnance du 2 octobre 2024 et fixé l’affaire pour être plaidée à l’audience tenue en juge rapporteur du 18 décembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur la demande de communication de pièces

Aux termes de l’article 142 du code de procédure civile, les demandes de production des éléments de preuve détenus par les parties sont faites et leur production a lieu, conformément aux dispositions des articles 138 et 139, lesquels énoncent notamment que “le juge, s’il estime cette demande fondée, ordonne la délivrance ou la production de l’acte ou de la pièce, en original, en copie ou en extrait selon le cas, dans les conditions et sous les garanties qu’il fixe, au besoin à peine d’astreinte”.

La communication de pièces prévue à l’article 138 du code de procédure civile ne peut être obtenue que si elle a pour but la sauvegarde d’un droit légalement reconnu ou judiciairement constaté.

En l’occurrence, les demandeurs sollicitent la production forcée de pièces dans le cadre de l’action en responsabilité engagée contre les défenderesses, et cherchent ainsi à justifier du bien-fondé d’un droit. Dès lors, la mesure sollicitée relève bien des dispositions des articles 138 et 142 du code de procédure civile précités.

En application de ces textes, les pièces réclamées doivent être utiles pour l’issue du litige. Il ne saurait être ordonné la production de pièces sans que l’existence de ces dernières et l’effectivité de leur détention par la partie auprès de laquelle la demande est faite soient établies avec certitude, ou à tout le moins vraisemblables. Il importe en outre que ces pièces soient suffisamment spécifiées.
En outre, parce que l’article 9 du code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de ses prétentions, une partie ne saurait réclamer de son contradicteur les éléments de preuve nécessaires au soutien de ses propres prétentions.
Par ailleurs, le pouvoir du juge d’ordonner cette production est limité par l’existence d’un empêchement légitime, dont peut être le secret professionnel auquel est notamment tenu l’établissement bancaire, en application de l’article L.511-33 du code monétaire et financier.

Toutefois, le secret professionnel ne saurait être un empêchement légitime, au sens des articles 10 du code civil et 11 du code de procédure civile, si la production litigieuse est indispensable à l’exercice par le demandeur de son droit à la preuve et si elle est proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.

M. [B] et Mme [G] demandent d’enjoindre à la société Financière des Paiements Electronique de produire
« – Tout document attestant la vérification et le contrôle effectué, conformément aux règles applicables, lors de l’ouverture des comptes de la société fraudeuse, relatives à l’identité des représentants et des bénéficiaires effectifs, à son activité, à sa conformité avec la réglementation financière (production de la preuve de l’exercice du devoir de vigilance lors de l’ouverture du compte bancaire) ;
– Tout document attestant l’exercice du devoir de vigilance des banques bénéficiaires des virements lors du fonctionnement du compte, en particulier les relevés des comptes bancaires de leur clientes susmentionnées (production de la preuve de l’exercice du devoir de vigilance lors du fonctionnement du compte bancaire) ».
Cette demande, qui vise « tout document » sans préciser davantage la nature du document dont la production est sollicitée, n’est pas suffisamment spécifiée.
En outre, cette demande porte atteinte au secret bancaire auquel le tiers bénéficiaire n’a pas renoncé. Il revient donc à M. [B] et Mme [G] de justifier que leur demande est indispensable à l’exercice de leur droit à la preuve et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.

Sur le fond, il revient aux demandeurs qui recherchent la responsabilité de la société Financière des Paiements Electronique de prouver la faute qu’elle aurait commise à leur égard en recevant les virements qu’ils ont effectués à destination d’un livre ouvert en ses comptes.
Ils n’établissent pas en quoi l’obtention de documents relatif à la relation contractuelle entre la banque et le titulaire du compte bénéficiaire du virement serait indispensable à la démonstration de la faute ayant un lien direct avec leur préjudice.
Au surplus, la société Financière des Paiements Electronique produit des éléments concernant l’ouverture du compte bancaire qui a reçu les virements.
Il en résulte que les pièces demandées ne sont pas indispensables à l’exercice du droit à la preuve ni proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.
Par conséquent, la demande de production de pièces sera rejetée.
2. Sur la responsabilité des sociétés défenderesses
2.1. Sur l’obligation de vigilance lors de l’ouverture du compte bancaire
Aux termes de l’article R.312-2 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur du 5 septembre 2009 au 14 février 2020, le banquier doit, préalablement à l’ouverture d’un compte, vérifier le domicile et l’identité du postulant, qui est tenu de présenter un document officiel comportant sa photographie.
La société Financière des Paiements Electronique produit un procès-verbal rédigé par un huissier de justice aux termes duquel celui-ci constate que l’identité de la personne physique qui a ouvert le compte de même que son adresse ont été vérifiées.
Par conséquent, aucun manquement ne saurait être relevé à l’encontre de la société Financière des Paiements Electronique dans le cadre de l’ouverture du compte bancaire.
2.2. Sur l’obligation de vigilance spéciale résultant des dispositions relatives à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme
Les dispositions des articles L.561-1 et suivants du code monétaire et financier, insérés au chapitre Ier du titre 6, concernant les obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, ont pour seul objet la protection de l’intérêt général et ne peuvent donc fonder, à les supposer violées, une dette de dommages-intérêts.
Ces textes, qui constituent des règles professionnelles, ont pour seule finalité la détection de transactions visant à blanchir de l’argent issu d’activités criminelles et ne peuvent pas être invoqués par la prétendue victime d’un manquement allégué à une obligation de vigilance.
Ils ont en outre pour objet de mettre à la charge de la banque une obligation de surveillance à l’égard de son client et non un devoir de protection à son profit. Il s’agit de règles professionnelles poursuivant un objectif d’intérêt général qui ne peuvent servir de fondement à une action en responsabilité civile.
Par conséquent, M. [B] et Mme [G] ne peuvent se prévaloir de ces dispositions pour engager la responsabilité de la société Rotschild Martin Maurel et de la société Financière des Paiements Electronique.
2.3. Sur l’obligation générale de vigilance
L’article L. 133-6 du code monétaire et financier dispose qu’une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution.
En application de l’article 1231-1 du code civil, le principe de la non-ingérence du banquier dans les affaires de son client cède devant son obligation de vigilance portant sur la régularité apparente du fonctionnement d’un compte.
Ainsi, dans l’hypothèse d’un virement autorisé, le banquier demeure tenu de contrôler la régularité de l’ordre de virement, afin de déceler toute anomalie tant matérielle qu’intellectuelle susceptible de l’affecter.
S’il ne lui appartient pas, sauf à porter atteinte à la vie privée du dépositaire des fonds, d’effectuer des recherches ou réclamer des justifications pour s’assurer que les opérations de son client, dont il n’a pas à rechercher la cause, sont régulières, opportunes et exemptes de danger, il doit néanmoins déceler le caractère manifestement anormal de mouvements de fonds par référence au fonctionnement habituel du compte ou en considération de leur bénéficiaire.

Le banquier, gestionnaire de compte et établissement de paiement, n’est pas tenu à une obligation d’information et de conseil à l’égard de son client, sauf convention contraire.
Il ressort des relevés bancaires de M. [B] que celui-ci a effectué les virements suivants :
– un virement de 1 639 euros le 22 août 2018 au bénéfice de STOCK WINE vers un compte ouvert auprès de la société Financière des Paiements Electronique,
– un virement de 9 360 euros le 30 août 2018 au bénéfice de STOCK WINE vers un compte ouvert auprès de la société Financière des Paiements Electronique,
– un virement de 43 000 euros le 4 septembre 2018 au bénéfice de STOCK WINE vers un compte ouvert auprès de la société Financière des Paiements Electronique,
– un virement de 49 000 euros le 11 septembre 2018 au bénéfice de SIPETINA vers un compte ouvert auprès de la Unicredit Bank.
Il ressort des relevés bancaires de Mme [G] que celle-ci a effectué les virements suivants :
– un virement de 70 800 euros le 24 septembre 2018 au bénéfice de SIPETINA vers un compte ouvert auprès de la Unicredit Bank,
– un virement de 60 984 dollars le 11 octobre 2018 au bénéfice de SIPETINA ouvert auprès de la Unicredit Bank,
– un virement de 197 600 dollars le 2 novembre 2018 au bénéfice de SIPETINA ouvert auprès de la KOMERCNI BANKA.
M. [B] et Mme [G] demandent chacun les mêmes sommes aux deux sociétés défenderesses. Cependant, il résulte des virements mentionnés précédemment que seul M. [B] a effectué des virements en direction d’un compte ouvert auprès de la société Financière des Paiements Electronique. Par conséquent, la responsabilité de la société Financière des Paiements Electronique ne saurait être engagée qu’en ce qui concerne le préjudice subi par M. [B].
M. [B] et Mme [G] reprochent à la société Rotschild Martin Maurel de ne pas les avoir alertés alors que les virements litigieux représentent des montants significatifs sur une brève période de temps, à destination de l’étranger, en rupture avec le fonctionnement habituel de leur compte.
Cependant, pour le banquier, non alerté par des éléments extérieurs tangibles, le simple caractère inhabituel d’une opération n’implique pas nécessairement qu’elle soit illicite ou frauduleuse.
L’obligation de l’établissement de crédit consistait en l’occurrence à assurer la bonne exécution des ordres de virement reçus conformément à l’article L. 133-6 du code monétaire et financier.
M. [B] ne peut reprocher à la société Rotschild Martin Maurel de ne pas l’avoir alerté sur des opérations de placement dont elle ne connaissait pas la finalité et sur lesquelles elle n’avait pas à l’interroger.
La société Rotschild Martin Maurel justifie qu’elle a demandé des renseignements à Mme [G] sur l’objet des virements qu’elle a demandés. C’est ainsi que Mme [G] a transmis à la société Rotschild Martin Maurel, le 26 octobre 2018, une facture et un bon de commande établis par la société SIPETINA SRO. Puis, le 30 octobre 2018, la société Rotschild Martin Maurel a reçu un mail de STOCK WINE pour justifier de ses liens commerciaux avec la société SIPETINA. Le 16 novembre 2018, Mme [G] a transmis un nouvel ordre de virement à la société Rotschild Martin Maurel pour un montant de 230 000 dollars. La société Rotschild Martin Maurel a refusé d’exécuter ce virement en transmettant à Mme [G] le justificatif de l’inscription de STOCK WINE sur la liste noire de l’AMF à compter du 5 novembre 2018 ainsi qu’un article paru le 21 septembre 2018 sur le site internet waming-trading présentant les investissements STOCK WINE comme frauduleux.
Ainsi, la société Rotschild Martin Maurel a refusé l’exécution d’un ordre de virement postérieur à l’inscription de STOCK WINE sur la liste noire de l’AMF. Il ne peut lui être reproché d’avoir exécuté les instructions antérieures alors que STOCK WINE ne figurait pas encore sur cette liste noire. De même, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir alerté les demandeurs de l’article précité dès lors qu’il ne s’agit pas d’une information émanant d’une autorité administrative.
Après les avertissements de la société Rotschild Martin Maurel, Mme [G] a persisté dans son souhait de procéder aux virements ainsi que le montre les deux mails qu’elle a envoyés à la banque et la retranscription d’une conversation téléphonique du 21 novembre 2018 entre Mme [G] et sa conseillère bancaire. Lors de cette conversation, Mme [G] réitère à plusieurs reprises sa volonté de réaliser le virement refusé par la banque :
« Bon vous faites quand même le virement … c’est moi qui demande et puis c’est tout vous faites le virement (…) C’est quand même mon argent vous le faites et puis c’est tout ! (…) vous faites comment on dit vous suivez la décision que j’ai prise je veux faire ce virement vous faites ce virement point barre, c’est tout ! (…) Je m’en fous je continue (…) Alors là c’est quand même fort de café hein qu’on ne puisse pas disposer de son argent comme on veut ! (…) mais une banque n’a pas à se substituer à mes décisions ».
Il en résulte que l’action de Mme [G], qui ne justifie d’aucun état de faiblesse exclusif de la compréhension devant être celle de tout gestionnaire normalement avisé de son propre patrimoine, était particulièrement déterminée et autonome. Confrontée aux alertes de la banque et à l’inscription du bénéficiaire des virements sur la liste noire de l’AMF, Mme [G] a réitéré son souhait de poursuivre les investissements litigieux.
La société Rotschild Martin Maurel a refusé à juste titre les demandes de virement postérieures à l’inscription de STOCK WINE sur la liste noire de l’AMF mais ne pouvait antérieurement s’opposer aux ordres de virement de ses clients, en l’absence d’autre anomalie décelable. Elle avait au contraire une obligation de résultat dans l’exécution des ordres donnés et en tant que simple mandataire de ses clients n’avait pas à contrôler l’usage des fonds dont ils avaient la libre disposition.
En conséquence, M. [B] et Mme [G] n’établissent pas la faute qu’aurait commise la société Rotschild Martin Maurel en tant que banque émettrice des virements litigieux.
S’agissant de la société Financière des Paiements Electronique, celle-ci a agi en tant que banque réceptrice de trois virements effectués par M. [B]. En tant que prestataire de services de paiement du bénéficiaire des virements, la société Financière des Paiements Electronique est tenue de créditer le compte de son client du montant des sommes figurant sur les virements, conformément aux articles L.133-11 à L.133-14 du code monétaire et financier.
Elle n’est tenue d’aucune obligation de vigilance à l’égard de l’ordonnateur des virements.
Par conséquent, M. [B] et Mme [G] ne sont pas fondés à se prévaloir d’un manquement de la société Financière des Paiements Electronique à son obligation de vigilance à leur égard.
3. Sur les frais du procès
L’article 695 du code de procédure civile énumère les frais du procès qui entrent dans la catégorie des dépens. Il est de principe que les dépens sont à la charge de la partie perdante, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
Parties perdantes au procès, M. [B] et Mme [G] seront condamnés in solidum au paiement des entiers dépens, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
Ils seront également condamnés in solidum à payer à chacune des sociétés défenderesses la somme de 5 000 euros afin de compenser les frais de justice non compris dans les dépens qu’elles ont dû exposer afin d’assurer la défense judiciaire de leurs intérêts, en application de l’article 700 du code de procédure civile.
4. Sur l’exécution provisoire
Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire, en application de l’article 514 du code de procédure civile.
Le juge peut toutefois écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire, conformément à l’article 514-1 du code de procédure civile.
Aucune circonstance du présent litige n’impose d’écarter l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
REJETTE l’ensemble des demandes de M. [V] [B] et de Mme [P] [G] ;
CONDAMNE M. [V] [B] et de Mme [P] [G] in solidum au paiement des entiers dépens ;
CONDAMNE M. [V] [B] et de Mme [P] [G] in solidum à payer à la société Rotschild Martin Maurel la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [V] [B] et de Mme [P] [G] in solidum à payer à la société Financière des Paiements Electronique la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire ;
RAPPELLE que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.

Fait et jugé à Paris le 29 janvier 2025.

La Greffière La Présidente


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