Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Poitiers
Thématique : Reconnaissance de la maladie professionnelle et respect des procédures administratives
→ RésuméPrésentation des PartiesDans cette affaire, un dirigeant d’entreprise, exerçant en tant qu’adjoint à l’activité funéraire et ambulancier au sein de la SASU HARMONIE AMBULANCE, a déclaré une maladie professionnelle. Cette maladie, une sciatalgie par hernie discale L4-L5, a été reconnue par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Lot après un avis favorable du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP). Déclaration de Maladie ProfessionnelleLe 13 mai 2022, le dirigeant a signalé sa maladie professionnelle, soutenue par un certificat médical initial. Le 30 janvier 2023, le CRRMP a établi un lien entre la pathologie et l’activité professionnelle, entraînant une décision de prise en charge par la CPAM, notifiée à la SASU HARMONIE AMBULANCE le 1er février 2023. Contestation de la Décision de Prise en ChargeLe 31 mars 2023, la SASU HARMONIE AMBULANCE a contesté cette décision auprès de la Commission de recours amiable (CRA), qui a rejeté le recours le 4 juillet 2023. En réponse, la société a saisi le tribunal judiciaire de Poitiers le 11 août 2023 pour contester le rejet de la CRA. Procédure JudiciaireLe juge de la mise en état a organisé les échanges de conclusions et a fixé la clôture des débats pour le 18 novembre 2024, avec une audience prévue pour le 3 décembre 2024. La SASU HARMONIE AMBULANCE a demandé au tribunal de déclarer la décision de la CPAM inopposable pour plusieurs raisons, notamment le non-respect des délais de consultation et l’absence de certificats médicaux de prolongation dans le dossier. Arguments de la SASU HARMONIE AMBULANCELa société a soutenu que les certificats médicaux de prolongation devaient être inclus dans le dossier, et que le non-respect des délais de consultation avait compromis son droit à un procès équitable. Elle a également contesté la qualification de la maladie, arguant qu’elle ne correspondait pas aux critères du tableau 98 des maladies professionnelles. Réponse de la CPAMEn défense, la CPAM a affirmé que les certificats médicaux de prolongation n’étaient pas nécessaires pour la prise de décision et que les délais de consultation avaient été respectés. Elle a soutenu que la pathologie déclarée par le dirigeant était conforme aux critères réglementaires. Décision du TribunalLe tribunal a déclaré inopposable la décision de la CPAM sur la forme, en raison du non-respect du délai de consultation de 30 jours. Cependant, il a rejeté les autres demandes de la SASU HARMONIE AMBULANCE concernant la qualification de la maladie, confirmant que la pathologie était bien une sciatique par hernie discale L4-L5 avec atteinte radiculaire. La CPAM a été condamnée aux dépens. ConclusionAinsi, le tribunal a statué en faveur de la SASU HARMONIE AMBULANCE sur la question de l’inopposabilité de la décision de prise en charge, tout en rejetant ses autres demandes. La CPAM a été reconnue comme partie succombante et a été condamnée aux dépens. |
MINUTE N°25/00058
JUGEMENT DU 3 FÉVRIER 2025
N° RG 23/00306 – N° Portalis DB3J-W-B7H-GDBC
AFFAIRE : Société HARMONIE AMBULANCE C/ CPAM DU LOT
TRIBUNAL JUDICIAIRE de POITIERS
PÔLE SOCIAL
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUGEMENT DU 3 FÉVRIER 2025
DEMANDERESSE
Société HARMONIE AMBULANCE, S.A.S.U., dont le siège social est sis 1 avenue des Hauts de la Chaume – 86280 SAINT BENOÎT,
ayant pour conseil, Maître Xavier BONTOUX, avocat au barreau de LYON (qui a demandé par écrit une dispense de comparution) ;
DÉFENDERESSE
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU LOT dont le siège est sis 238 rue Hautesserre – 46015 CAHORS CEDEX 9,
non comparante, ni représentée ;
DÉBATS
A l’issue des débats en audience publique le 3 décembre 2024, le tribunal a indiqué que le jugement sera prononcé par mise à disposition au Greffe le 3 février 2025.
COMPOSITION DU TRIBUNAL
PRÉSIDENTE : Nicole BRIAL,
ASSESSEUR : Laëtitia RIVERON, représentant les employeurs, ayant uniquement voix consultative en l’absence de [S] [Z], représentant les salariés, empêché ;
GREFFIER, lors des débats et de la mise à disposition au greffe : Stéphane BASQ.
LE : 03/02/2025
Notification à :
– Société HARMONIE AMBULANCE
– CPAM DU LOT
Copie simple :
– Me Xavier BONTOUX
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [B] [K] exerce la fonction d’adjoint à l’activité funéraire et ambulancier au sein de la SASU HARMONIE AMBULANCE. Il est affilié à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Lot.
Le 13 mai 2022, Monsieur [K] a déclaré une maladie professionnelle consistant en une « sciatalgie par hernie discale L4-L5 ».
Le certificat initial établi le 27 avril 2022 par le Docteur [X] [P] mentionne « exérèse hernie discale L4 L5 droite progressive ».
Le 30 janvier 2023, le CRRMP a rendu un avis favorable à la reconnaissance de la maladie professionnelle de Monsieur [K] en retenant un lien direct entre la pathologie présentée et l’activité professionnelle réalisée.
Par courrier du 1er février 2023, la CPAM a notifié à la SASU HARMONIE AMBULANCE une décision de prise en charge de la maladie de Monsieur [K] du 21 janvier 2022 au titre de la législation sur les risques professionnels, conformément à l’avis rendu par le CRRMP.
Par courrier du 31 mars 2023, la SASU HARMONIE AMBULANCE a saisi la Commission de recours amiable (CRA) de la CPAM en contestation de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Monsieur [K].
Par décision du 4 juillet 2023, la CRA a rejeté le recours de Monsieur [K].
Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 août 2023, la SASU HARMONIE AMBULANCE a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Poitiers en contestation de la décision explicite de rejet de la CRA.
Par ordonnance du 21 mars 2024, le juge de la mise en état a organisé les échanges de conclusions et pièces entre les parties, et a fixé la clôture des débats au 18 novembre 2024 ainsi que les plaidoiries à l’audience du 3 décembre 2024.
Lors de cette audience, les parties ont donné leur accord pour que le tribunal statue à juge unique en l’absence de l’un des assesseurs le composant.
La SASU HARMONIE AMBULANCE, représentée par son conseil, a, au terme de sa requête introductive d’instance, demandé au tribunal de :
Juger que la décision de la CPAM de reconnaître le caractère professionnel de la maladie est inopposable à la société HARMONIE AMBULANCE, les dispositions de l’alinéa 3 de l’article R. 441-14 du code de la sécurité sociale n’ayant pas été respectées, dans la mesure où les certificats médicaux de prolongation n’ont pas été mis à la disposition de l’employeur ; Juger que la décision prise par la CPAM de reconnaître le caractère professionnel de la maladie est inopposable à la société HARMONIE AMBULANCE au motif que les dispositions de l’article R. 461-10 du code de la sécurité sociale n’ont pas été respectées, l’employeur n’ayant pas disposé d’un délai suffisant pour consulter les pièces du dossier avant transmission au CRRMP ; Juger que la décision prise par la CPAM de reconnaître le caractère professionnel de la maladie est inopposable à la société HARMONIE AMBULANCE au motif qu’elle n’entre pas dans les prévisions de tableau 98 des maladies professionnelles, les conditions médicales n’étant pas remplies.
A l’appui de ses prétentions, la SASU HARMONIE AMBULANCE s’est d’abord fondée sur les articles R. 461-9 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale ainsi que sur la jurisprudence pour soutenir que le dossier mis à la disposition de l’employeur devait comprendre les certificats médicaux de prolongation, et qu’à défaut, la décision de prise en charge devait lui être déclarée inopposable.
Elle a également invoqué l’article R. 461-10 du même code ainsi que la jurisprudence pour soutenir que la CPAM n’avait pas respecté le délai de 30 jours francs dont devait bénéficier l’employeur pour enrichir et consulter le dossier avant de formuler ses observations dans le cadre de la transmission du dossier au CRRMP. Elle a précisé que s’agissant du décompte de ce délai, il ne courait qu’à compter du lendemain de la réception de l’information par son destinataire.
Elle s’est enfin référée aux articles L. 461-1, L. 461-5 et R. 461-9 du code de la sécurité sociale, au tableau 98 des maladies professionnelles, ainsi qu’à la jurisprudence pour soutenir que la CPAM devait s’assurer, avant toute prise en charge, que la maladie décrite par le médecin sur le certificat médical correspondait précisément à l’une des maladies énoncées dans le tableau. Or, la SASU HARMONIE AMBULANCE allègue que la caractérisation de la maladie de Monsieur [K] était incomplète dès lors qu’aucune précision n’avait été apportée quant à l’existence d’une atteinte radiculaire de topographie concordante.
En défense, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Lot, valablement représentée, a conclu au débouté.
Au soutien de ses intérêts, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Lot s’est fondée sur les articles R. 441-14 et R. 461-9 du code de la sécurité sociale ainsi que sur la jurisprudence pour affirmer que les certificats médicaux de prolongation n’avaient pas à figurer dans le dossier consultable par l’employeur puisqu’ils ne lui font pas grief.
Elle s’est également référée à l’article R. 461-10 du code de la sécurité sociale pour soutenir que seul le non-respect du délai de 10 jours francs pour formuler des observations avant transmission du dossier au CRRMP pouvait être sanctionné par l’inopposabilité de la décision de prise en charge ; et pour faire valoir qu’en tout état de cause, le délai de 30 jours pour enrichir le dossier débutait à compter de la saisine du CRRMP, laquelle s’était matérialisée par l’envoi aux parties d’un courrier les informant de cette saisine et des dates d’échéance.
La CPAM du Lot a enfin invoqué l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ainsi que le tableau n° 98 des maladies professionnelles pour faire valoir que le constat figurant sur le certificat médical ne liait pas le médecin conseil, lequel avait valablement pu reconnaitre que toutes les conditions réglementaires du tableau étaient remplies dès lors qu’une IRM permettait de s’assurer de l’atteinte radiculaire de topographie concordante.
A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 3 février 2025, par mise à disposition au greffe.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal judiciaire, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
DECLARE inopposable sur la forme à la SASU HARMONIE AMBULANCE la décision de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Lot en date du 1er février 2023 de prise en charge de la maladie de Monsieur [B] [K] du 21 janvier 2022 ;
REJETTE les autres demandes de chacune des parties ;
CONDAMNE la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Lot aux dépens.
Ainsi dit et jugé les jour, mois et an susdits.
Le Greffier, La Présidente,
Stéphane BASQ Nicole BRIAL
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