Tribunal judiciaire de Paris, 4 février 2025, RG n° 24/58126
Tribunal judiciaire de Paris, 4 février 2025, RG n° 24/58126

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Diagnostic énergétique contesté : vers une expertise pour établir les responsabilités.

Résumé

Contexte de la Vente Immobilière

Le 25 avril 2023, un acheteur et une acheteuse ont acquis un appartement d’une surface de 99,78 m² pour un montant de 1 105 000 euros, hors frais de notaire, auprès d’un vendeur et d’une vendeuse. Le diagnostic de performance énergétique annexé à l’acte de vente, établi par une société spécialisée, classait le bien en catégorie E.

Litige sur la Classification Énergétique

Les acheteurs, estimant que le bien aurait dû être classé en catégorie G, ont assigné le vendeur, la vendeuse, la société ayant réalisé le diagnostic, ainsi qu’une agence immobilière, devant le tribunal judiciaire de Paris. Ils demandaient une expertise, une provision de 8 000 euros, ainsi qu’une indemnité de 3 000 euros pour couvrir les frais de justice.

Arguments des Parties

Lors de l’audience, les acheteurs ont soutenu que des diagnostics réalisés à leur demande classaient le bien en catégorie G, ce qui pourrait engager la responsabilité des vendeurs pour vices cachés et celle du diagnostiqueur et de l’agence immobilière pour responsabilité délictuelle. Ils ont également mentionné des préjudices liés à des travaux de mise en conformité énergétique.

En réponse, le vendeur et la vendeuse ont demandé à être mis hors de cause, arguant que la responsabilité en cas d’erreur de diagnostic ne pouvait incomber qu’au diagnostiqueur. Ils ont également contesté la demande de provision, la jugeant prématurée.

Position de la Société de Diagnostic et de l’Agence Immobilière

La société de diagnostic a également demandé à être mise hors de cause, affirmant que la demande de provision était prématurée et que les contestations étaient sérieuses. L’agence immobilière a soutenu qu’elle n’avait pas de responsabilité dans la réalisation des diagnostics et a demandé à être déboutée des demandes des acheteurs.

Décision du Tribunal

Le tribunal a ordonné une mesure d’expertise pour évaluer la classification énergétique du bien et déterminer les responsabilités potentielles des parties. Les demandes de mise hors de cause des vendeurs et de l’agence immobilière ont été rejetées. En revanche, la demande de provision des acheteurs a été jugée non fondée, car les préjudices n’étaient pas suffisamment établis à ce stade.

Conclusion et Suivi de l’Expertise

Le tribunal a désigné un expert pour réaliser l’évaluation nécessaire et a fixé une provision de 5 000 euros à consigner par les acheteurs pour couvrir les frais d’expertise. La décision a été rendue exécutoire par provision, et les parties ont été informées des modalités de suivi de l’expertise.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/58126 – N° Portalis 352J-W-B7I-C6IDX

AS M N°: 14

Assignation du :
06, 14 et 18 Novembre 2024

EXPERTISE[1]

[1] 1 copie expert +
4 Copies exécutoires
délivrées le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 04 février 2025

par Sophie COUVEZ, Vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDEURS

Madame [O] [B]
[Adresse 4]
[Localité 10]

Monsieur [Y] [E]
[Adresse 4]
[Localité 10]

représentés par Me Pierre-emmanuel BLARD, avocat au barreau de PARIS – #P0113

DEFENDEURS

Madame [K] [S]
[Adresse 7]
[Localité 8]

Monsieur [C] [N]
[Adresse 7]
[Localité 8]

représentés par Maître Michael HADDAD de la SELARL HADDAD & LAGACHE, avocats au barreau de PARIS – #C2092

S.A.S. AC BOLIVAR JOURDAIN IMMOBILIER
[Adresse 9]
[Localité 11]

représentée par Me Sébastien GARNIER, avocat au barreau de PARIS – #D1473

S.A.R.L. ATEG DIAGNOSTICS
[Adresse 6]
[Localité 11]

représentée par Maître Laurent LUCAS de la SELARL AVOX, avocats au barreau de PARIS – #P0477

DÉBATS

A l’audience du 17 Décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Sophie COUVEZ, Vice-présidente, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier,

Nous, Juge des référés, assisté de notre greffier, après avoir entendu les parties comparantes ou leurs conseils, avons rendu la décision suivante ;

Par acte authentique en date du 25 avril 2023, Mme [B] et M. [E] ont acquis de Mme [S] et M. [N] un appartement situé [Adresse 4] à [Localité 10] d’une surface de 99, 78 m2 pour la somme de 1 105 000 euros hors frais de notaire et droits de mutation.

A cet acte de vente, était annexé le diagnostic de performance énergétique établi par la société Ateg Diagnostics le 7 octobre 2022 mentionnant un classement de performance énergétique et climatique en catégorie E.

Soutenant que le bien immobilier doit être en réalité classé en catégorie G, Mme [B] et M. [E] ont, par actes en date des 14 et 26 novembre 2024, fait assigner devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé Mme [S] et Mme [N], la société Ateg Diagnostics et la société AC Bolivar Jourdain Immobilier aux fins d’obtenir, au visa des articles 145, 700 et 873 du code de procédure civile, une expertise, la condamnation solidaire des défendeurs à leur verser la somme de 8 000 euros à titre de provision ainsi que la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

A l’audience qui s’est tenue le 12 décembre 2024, Mme [B] et M. [E], représentés par leur conseil, ont maintenu leurs demandes telles que contenues dans l’acte introductif d’instance et les motifs y énoncés.

A l’appui de leurs demandes, Mme [B] et M. [E] font valoir qu’un diagnostic de performance énergétique et un audit audit énergétique qui ont été réalisés à leur demande ont classé le bien immobilier en catégorie G, de sorte qu’ils sont susceptibles d’engager une action à l’encontre des vendeurs pour vices cachés et à l’encontre du diagnostiqueur et de l’agence immobilière en responsabilité délictuelle.

Ils exposent subir du fait de cette erreur de diagnostic des préjudices tenant à la nécessité d’effectuer des travaux de mise en conformité énergétique qui réduiront la surface au sol de l’immeuble et à la facturation d’une surconsommation le temps de la réalisation des travaux.

Dans leurs conclusions déposées et soutenues oralement par leur conseil, Mme [S] et M. [N] ont sollicité :

– A titre principal, leur mise hors de cause,
– A titre subsidiaire, la limitation de la transmission de documents et la mission de l’expert à la recherche de la seule existence ou non de désordres relatifs à la catégorisation énergétique du bien immobilier prévue au diagnostic de performance énergétique du 7 octobre 2022 annexé à l’acte authentique de vente et le rejet des demandes de Mme [B] et de M. [E] au titre de la provision, des frais irrépétibles et des dépens,
– En tout état de cause, la condamnation de Mme [B] et de M. [E] à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour s’opposer aux demandes de Mme [B] et de M. [E], Mme [S] et M. [N] relèvent qu’en cas d’erreur dans le diagnostic de performance énergétique, la jurisprudence ne retient la responsabilité que du diagnostiqueur.

Ils soulignent que le diagnostic qu’ils ont fait établir par la société Ateg Diagnostics retenait le même classement énergétique que celui qui avait été établi lorsqu’ils ont acquis le bien immobilier litigieux.

Ils arguent que la demande de provision se heurtent à des contestations sérieuses, étant impossible, avant la mesure d’expertise sollicitée, de connaître la réalité des désordres.

Dans ses écritures déposées et soutenues oralement par son conseil, la société AC Bolivar Jourdain immobilier a demandé au juge des référés de :

– A titre principal, ordonner sa mise hors de cause,
– A titre subsidiaire,
o Noter ses protestations et réserves,
o Débouter Mme [B] et M. [E] de leurs demandes de provision et au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamner Mme [B] et M. [E] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société AC Bolivar Jourdain immobilier fait valoir que Mme [B] et M. [E] ne justifient pas d’un intérêt légitime à ce qu’une mesure d’expertise soit ordonnée à son encontre, dès lors que le professionnel de l’immobilier n’a aucune compétence s’agissant de la réalisation des diagnostics immobiliers et que sa responsabilité ne saurait être engagée en cas d’erreurs commises dans le diagnostic de performance immobilière.

Elle soutient, en outre, que la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses tant en son principe qu’en son quantum.

Dans ses conclusions déposées et soutenues oralement par son conseil, la société Ateg Diagnostics a sollicité qu’il lui soit donné acte de ses protestations et réserves, que Mme [B] et M. [E] soient déboutés de de leurs demandes de provision et au titre de l’article 700 du code de procédure civile et qu’ils soient condamnés à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.

La société Ateg Diagnostics fait valoir que la demande de provision de Mme [B] et M. [E] est prématurée et se heurte à des contestations sérieuses, le juge des référés n’étant pas compétent pour trancher la question de sa responsabilité.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.

A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 4 février 2025.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire en premier ressort,

Donnons acte des protestations et réserves formées par les défendeurs représentés ;

Ordonnons une mesure d’expertise ;

Désignons en qualité d’expert :

Monsieur [V] [F]
[Adresse 5]
[Localité 12]
☎ :[XXXXXXXX03]

lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,

avec mission, les parties régulièrement convoquées, après avoir pris connaissance du dossier, s’être fait remettre tous documents utiles, et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant, de :

– Se rendre sur les lieux sis [Adresse 4] à [Localité 10], après y avoir convoqué les parties ;
– Décrire les désordres allégués dans l’assignation relatifs à la catégorisation énergétique du bien immobilier prévue au diagnostic de performance énergétique du 7 octobre 2022 ; et le cas échéant, sans nécessité d’extension de mission, examiner tous désordres connexes, ayant d’évidence la même cause mais révélés postérieurement à l’assignation, sans préjudice par ailleurs des dispositions de l’article 238, alinéa 2, du code de procédure civile ;
– Les décrire, en indiquer la nature, l’importance, la date d’apparition, en retracer l’historique et en décrire l’évolution prévisible ; Préciser notamment si les travaux entrepris par Mme [B] et M. [E] ont pu avoir une incidence sur le classement énergétique du bien immobilier litigieux ;
– Procéder à la réalisation d’un nouveau diagnostic de performance énergétique ;
– Fournir tout renseignement de fait permettant au tribunal de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues et sur les comptes entre les parties, notamment sur le fait que ces désordres aient pu être connus du vendeur, de l’acheteur, du diagnostiqueur et/ou de l’agence immobilière au moment de la vente ;
– Après avoir exposé ses observations sur la nature des mesures propres à remédier aux désordres, et leurs délais d’exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d’un maître d’œuvre, le coût de ces travaux ;
– Fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état ;
– Dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l’aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l’affirmative, à la demande d’une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible ;
– Faire toutes observations utiles au règlement du litige ;

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :

✏ convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;

✏ se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés;

✏ se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis;

✏ à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
→ en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;

→ en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent ;

→ en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;

→ en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

✏ au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations ;
→ fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;

→ rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du Code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai.

Fixons à la somme de 5 000 euros le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par Mme [B] et M. [E] à la régie du tribunal judiciaire de Paris au plus tard le 4 avril 2025 ;

Disons que faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l’article 271 du code de procédure civile ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Disons que le terme du délai fixé par l’expert pour le dépôt des dernières observations marquera la fin de l’instruction technique et interdira, à compter de la date à laquelle il est fixé, le dépôt de nouvelles observations, sauf les exceptions visées à l’article 276 du code de procédure civile ;

Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 255, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe du tribunal judiciaire de Paris (contrôle des expertises) avant le 4 décembre 2025, pour le rapport définitif, sauf prorogation de ces délais dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

Disons que, dans le but de favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée et le coût de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme OPALEXE et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Rejetons les demandes de mise hors de cause de Mme [S] et de M. [N] et de la société AC Bolivard Jourdain immobilier au contradictoire desquels l’expertise aura donc lieu ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de Mme [B] et de M. [E] de provision sur l’indemnisation de leurs préjudices ;

Condamnons Mme [B] et M. [E] aux dépens ;

Disons n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons toutes les autres demandes des parties ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.

Fait à Paris le 04 février 2025.

Le Greffier, Le Président,

Anne-Sophie MOREL Sophie COUVEZ

Service de la régie :
Tribunal de Paris, [Adresse 14]
☎ [XXXXXXXX02]
Fax [XXXXXXXX01]
✉ [Courriel 15]

Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :

➢ virement bancaire aux coordonnées suivantes :
IBAN : [XXXXXXXXXX013]
BIC : [XXXXXXXXXX016]
en indiquant impérativement le libellé suivant :
C7 « Prénom et Nom de la personne qui paye » pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + Numéro de RG initial

➢ chèque établi à l’ordre du régisseur du Tribunal judiciaire de Paris (en cas de paiement par le biais de l’avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)

Le règlement doit impérativement être accompagné d’une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courriel ou fax).

Expert : Monsieur [V] [F]

Consignation : 5000 € par Madame [O] [B]
Monsieur [Y] [E]

le 04 Avril 2025

Rapport à déposer le : 04 Décembre 2025

Juge chargé du contrôle de l’expertise :
Service du contrôle des expertises
Tribunal de Paris, [Adresse 14].

 


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