Tribunal judiciaire de Paris, 2 janvier 2025, RG n° 24/55149
Tribunal judiciaire de Paris, 2 janvier 2025, RG n° 24/55149

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Expertise et responsabilité en matière de désordres immobiliers : enjeux et procédures.

Résumé

Contexte de l’affaire

Mme [R] a engagé une procédure en référé pour désigner un expert afin d’examiner les désordres affectant son appartement situé au 5ème étage d’un immeuble en copropriété. Ces désordres seraient liés à des travaux effectués dans l’appartement du 4ème étage, appartenant aux consorts [G]. Les assignations ont été délivrées à plusieurs parties, y compris le syndicat des copropriétaires et diverses compagnies d’assurance.

Interventions et demandes des parties

Le syndicat des copropriétaires a également déposé une assignation en intervention forcée pour contester la mesure d’expertise. Plusieurs sociétés, dont Pacifica et E2AC, ont présenté des conclusions pour intervenir dans la procédure ou pour se mettre hors de cause. Les sociétés MMA Iard ont demandé à être mises hors de cause en raison d’une résiliation présumée du contrat d’assurance de la société RBM, sans fournir de preuves suffisantes.

État des désordres

Les constatations effectuées ont révélé des fissures et un affaissement du plancher dans l’appartement de Mme [R], des problèmes qui persistent. Les documents fournis, tels que des procès-verbaux de constat, montrent que les désordres sont significatifs et nécessitent une expertise pour déterminer leur origine et les responsabilités éventuelles.

Décisions du tribunal

Le tribunal a décidé de ne pas mettre hors de cause la société E2AC et les sociétés MMA Iard, tout en mettant hors de cause M. [N] [M]. Une mesure d’expertise a été ordonnée pour examiner les désordres et évaluer les préjudices subis par Mme [R]. L’expert désigné devra fournir des informations sur la nature des travaux nécessaires pour remédier aux désordres et chiffrer les coûts associés.

Modalités de l’expertise

L’expert, M. [B] [T], devra convoquer les parties, examiner les lieux des désordres, et établir un rapport détaillé sur ses constatations. Un montant de 5.000 euros a été fixé pour les frais d’expertise, à consigner par la partie demanderesse. Le rapport définitif devra être déposé au greffe du tribunal d’ici le 2 novembre 2025.

Conclusion et implications financières

Les dépens de la procédure seront à la charge de Mme [R], et les demandes d’indemnisation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ont été rejetées. L’exécution provisoire de la décision est de droit, ce qui signifie que les mesures ordonnées doivent être mises en œuvre sans attendre l’issue finale du litige.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/55149

N° Portalis 352J-W-B7I-C5ATE

N°: 1

Assignation du :
18 juin, 3, 4, 16 juillet, 10, 14 et 15 octobre 2024

EXPERTISE[1]

[1] 7 copies exécutoires
+ 1 expert
délivrées le :

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 02 janvier 2025

par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Arnaud FUZAT, Greffier.

DEMANDERESSE

Madame [I] [C] [R]
[Adresse 14]
[Localité 15]

représentée par Maître Julien LEPLAT, avocat au barreau de PAU, plaidant, et par Maître Eléni LIPSOS, avocat au barreau de PARIS – #C0313, postulant,

DEFENDEURS

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] – [Localité 18], agissant poursuites et diligences de son syndic en exercice, la S.A.S. ORALIA CAZALIERES & ARDOUIN, dont le siège social est sis
[Adresse 4]
[Localité 20]

représenté par Maître Christophe BASSET de la SELARL SELARL CHRISTOPHE BASSET, avocats au barreau de PARIS – #A0050

La S.A.S. E2AC
[Adresse 7]
[Localité 19]

représentée par Maître Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, avocats au barreau de PARIS – #R0175

Madame [S] [G]
[Adresse 5]
[Localité 18]

Monsieur [U] [G]
[Adresse 5]
[Localité 18]

représentés par Maître Bérangère MONTAGNE de la SELARL GAUD MONTAGNE, avocats au barreau de PARIS – #P0430

La société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
[Adresse 8]
[Localité 17]

représentée par Maître Guillaume AKSIL de la SELARL LINCOLN AVOCATS CONSEIL, avocats au barreau de PARIS – #P0293

Monsieur [K] [G]
[Adresse 6]
[Localité 26]

représenté par Maître Sophie TESSIER de la SELARL PARINI-TESSIER, avocats au barreau de PARIS – #G0706

La S.A AXA FRANCE IARD
[Adresse 13]
[Localité 25]

représentée par Maître Amandine LAGRANGE de l’AARPI FLORENT AVOCATS, avocats au barreau de PARIS – #E0549

La société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)
[Adresse 10]
[Localité 20]

Monsieur [L] [J]
[Adresse 24]
[Localité 19]

La S.A. EUROMAF ASSURANCE DES INGENIEURS ET ARCHITECTES EUROPEENS
[Adresse 10]
[Localité 20]

La société RBM
[Adresse 11]
[Localité 25]

La S.A. CREDIT LYONNAIS – LCL
[Adresse 9]
[Localité 16]

Monsieur [N] [M]
ès qualité d’architecte au sein de la S.A.R.L. [M] ET [Z] ARCHITECTES
[Adresse 12]
[Localité 18]

non représentés

INTERVENANTES VOLONTAIRES

La S.A. PACIFICA
[Adresse 23]
[Localité 21]

représentés par Maître Bérangère MONTAGNE de la SELARL GAUD MONTAGNE, avocats au barreau de PARIS – #P0430

La S.A.R.L. [M] ET [Z] ARCHITECTES
[Adresse 12]
[Localité 18]

représentée par Maître Oz Rahsan VARGUN de la SELARL OZ & IZ, avocats au barreau de PARIS – #E2072

La société MMA IARD

représentée par Maître Guillaume AKSIL de la SELARL LINCOLN AVOCATS CONSEIL, avocats au barreau de PARIS – #P0293

DÉBATS

A l’audience du 27 novembre 2024, tenue publiquement, présidée par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier,

Nous, président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Vu l’assignation en référé délivrée les 18 juin, 3, 4 et 16 juillet 2024 par Mme [R] aux consorts [G], au syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 5] [Localité 18], à la société LCL Crédit Lyonnais, à la société Axa France Iard et à M. [N] [M], aux fins de voir désigner un expert concernant les désordres allégués affectant son appartement situé au 5ème étage de l’immeuble en copropriété du [Adresse 5] [Localité 18] ;

Vu l’assignation en intervention forcée délivrée les 10, 14 et 15 octobre 2024 par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 5] [Localité 18] aux fins d’ordonnance commune et de protestations et réserves sur la mesure d’expertise sollicitée ;

Vu la jonction des dossiers enregistrés sous les numéros de RG 24/55149 et 24/57186 ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience du 27 novembre 2024 par la société Pacifica, en qualité d’assureur habitation des consorts [G], et les consorts [G], aux fins d’intervention volontaire de la société Pacifica et de protestations et réserves ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par la société E2AC aux fins de mise hors de cause ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par M. [G], architecte, aux fins de protestations et réserves ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par la société [M] et [Z] architectes aux fins d’intervention volontaire, de mise hors de cause de M. [N] [M], de protestations et réserves et de suppression de deux chefs de la mission ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par la société Axa France Iard, en qualité d’assureur du syndicat des copropriétaires, aux fins de protestations et réserves ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard aux fins de mise hors de cause de la société MMA Iard assurances mutuelles, de condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et, subsidiairement, d’intervention volontaire de la société MMA Iard en qualité d’assureur de la société RBM et de protestations et réserves ;

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

L’application de ce texte, qui subordonne le prononcé d’une mesure d’instruction à la seule démonstration d’un intérêt légitime à établir ou à préserver une preuve en vue d’un litige potentiel, n’implique aucun préjugé sur la recevabilité et le bien-fondé des demandes formées ultérieurement, ni sur la responsabilité des personnes appelées comme partie à la procédure ou sur les chances du procès susceptible d’être engagé.

Au vu des moyens développés par Mme [R] et des documents produits, notamment, les procès-verbaux de constat des 24 juillet 2023 et 25 avril 2024, le compte-rendu de la visite de l’appartement de Mme [R] du 17 novembre 2023 et les photographies dudit appartement, il apparaît que celui-ci a subi des désordres importants, qui seraient liés aux travaux de rénovation et de restructuration entrepris dans l’appartement situé au-dessous, au 4ème étage, et appartenant aux consorts [G], des fissurations étant apparues sur les murs et le plancher s’étant affaissé.

Les désordres perdurent à ce jour puisqu’ils étaient encore présents lors du procès-verbal de constat du 25 avril 2024.

Le motif légitime requis par l’article 145 du code de procédure civile est donc établi, un procès étant « en germe » et non manifestement voué à l’échec entre, d’une part, Mme [R], les consorts [G] et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble, en présence d’une possible atteinte aux parties communes, d’autre part, l’ensemble des intervenants aux travaux ainsi que leurs assureurs.

La société E2AC demande sa mise hors de cause au motif qu’elle n’est pas intervenue sur le chantier et s’est bornée à procéder à des constatations et à formuler des recommandations qui n’auraient pas été retenues par le syndicat des copropriétaires. Mais il est en l’état prématuré de la mettre hors de cause dès lors qu’il résulte des pièces n° 5 et 9 du syndicat des copropriétaires qu’elle est intervenue en amont des travaux dans l’appartement des consorts [G] et a réalisé des sondages afin de proposer une étude de reprise du plancher de cet appartement. Les responsabilités n’étant pas établies à ce stade, sa présence aux opérations d’expertise est nécessaire.

Les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard sollicitent également leur mise hors de cause en qualité d’assureur de la société RBM, chargée des travaux de renforcement du plancher haut, en application de l’article L. 124-5, alinéa 3, du code des assurances, au motif que le contrat d’assurance de la société RBM a été résilié le 1er janvier 2023 et que la réclamation leur a été adressée tardivement, le 15 octobre 2024, date de l’assignation en intervention forcée du syndicat des copropriétaires. Elles soutiennent que seul le nouvel assureur de la société RBM est susceptible d’être concerné par le litige.

Mais elles ne produisent aucune pièce attestant d’une résiliation du contrat d’assurance de la société RBM, de sorte que leur demande de mise hors de cause n’est pas fondée en l’état.

La société [M] et [Z] architectes intervient en revanche au litige en lieu et place de M. [N] [M], qui sera mis hors de cause.

Il en est de même de la société Pacifica, qui intervient en qualité d’assureur habitation des consorts [G] en lieu et place de la société LCL Crédit Lyonnais.

Pour le surplus, l’origine des désordres décrits par Mme [R] devant être identifiée par l’expert, ainsi que les préjudices subis, la mesure d’instruction sollicitée est justifiée à l’égard de l’ensemble des parties et elle sera ordonnée dans les termes du dispositif aux frais avancés de la demanderesse, dans l’intérêt de laquelle l’expertise est ordonnée.

Il appartiendra à l’expert de donner tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature subis par les parties et, au premier chef, par Mme [R] et de faire toutes observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres.

La partie défenderesse à une mesure ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne peut être considérée comme une partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile (2e Civ., 10 février 2011, pourvoi n° 10-11.774, Bull. 2011, II, n° 34). En effet, les mesures d’instruction sollicitées avant tout procès le sont au seul bénéfice de celui qui les sollicite, en vue d’un éventuel procès au fond, et sont donc en principe à la charge de ce dernier.

La partie demanderesse sera donc tenue aux dépens, sans qu’il y ait lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

 


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