Tribunal judiciaire de Nîmes, 6 janvier 2025, RG n° 23/02015
Tribunal judiciaire de Nîmes, 6 janvier 2025, RG n° 23/02015

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nîmes

Thématique : Confusion sur la consistance d’un bien immobilier et ses conséquences contractuelles

Résumé

Contexte de l’Affaire

En 2011, la société Avenir Finance Gestion Privée a proposé aux époux [D] un investissement locatif à [Localité 12], dans un ancien bâtiment. Ils ont acquis un appartement par acte authentique le 7 août 2012, mais ont ensuite été confrontés à une revendication de propriété sur une cave par un copropriétaire, M. [Z], en novembre 2019.

Procédure Judiciaire

Les époux [D] ont assigné plusieurs parties, dont la SCP [E]-Ducros-Audemard et la SAS Advenis Value ADD, devant le tribunal judiciaire de Nîmes pour annuler l’acte de vente. En septembre 2021, les défendeurs ont contesté la recevabilité de l’action des époux [D], invoquant la prescription. Cependant, en avril 2023, la cour d’appel a déclaré leurs demandes recevables et a condamné les défendeurs à verser des dommages-intérêts.

Arguments des Époux [D]

Les époux [D] soutiennent avoir été victimes d’une erreur sur la consistance du bien, croyant acquérir un appartement avec une cave. Ils affirment que cette erreur était excusable et qu’ils ont été induits en erreur par les documents fournis lors de la vente. Ils demandent l’annulation de la vente et des dommages-intérêts pour divers préjudices.

Responsabilité des Parties

Les époux [D] accusent le vendeur, la société Advenis Value ADD, de manquement à ses obligations d’information et de conseil. Ils reprochent également au notaire d’avoir omis de relever l’ambiguïté dans la désignation du bien. La société Avenir Finance Gestion Privée est également critiquée pour ne pas avoir fourni des conseils adéquats.

Décision du Tribunal

Le tribunal a rejeté la demande de nullité de la vente, considérant que l’erreur sur la consistance du bien n’était pas inexcusable. Toutefois, il a reconnu la responsabilité du vendeur et du notaire pour la confusion créée. Les époux [D] ont été indemnisés pour leur préjudice moral, mais leurs autres demandes de dommages-intérêts ont été rejetées.

Conclusion

Le tribunal a condamné in solidum la société Advenis Value ADD et la SCP [E] Ducros Audemard à verser une somme pour le préjudice moral des époux [D], tout en rejetant les autres demandes. L’exécution provisoire a été ordonnée, et les défendeurs ont été condamnés aux dépens.

Copie ❑ exécutoire
❑ certifiée conforme
délivrée le
à
Me Ludivine CAUVIN
la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI
Me Périne FLOUTIER

TRIBUNAL JUDICIAIRE Par mise à disposition au greffe
DE NIMES
Le 06 Janvier 2025
1ère Chambre Civile
————-
N° RG 23/02015 – N° Portalis DBX2-W-B7H-J6TO
Minute n° JG24/

JUGEMENT

Le Tribunal judiciaire de NIMES, 1ère Chambre Civile, a, dans l’affaire opposant :

M. [U] [D]
né le 12 Septembre 1967 à [Localité 14],
demeurant [Adresse 7] – [Localité 6]
représenté par la SELARL GOETHE AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, et par Me Périne FLOUTIER, avocat au barreau de NIMES, avocat postulant,

Mme [Y] [C] épouse [D]
née le 02 Mai 1966 à [Localité 11], demeurant [Adresse 7] – [Localité 6]
représentée par la SELARL GOETHE AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, et par Me Périne FLOUTIER, avocat au barreau de NIMES, avocat postulant,

à :

S.C.P. [E], DUCROS, AUDEMARD Notaires Associés,
dont le siège social est sis [Adresse 13] – [Localité 9]
représentée par la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant,

S.A.S.U. ADVENIS VALUE ADD ADVENIS VALUE ADD
(anciennement dénommée AVENIR FINANCE IMMOBILIER),
société par actions simplifiée à associé unique au capital de 1 600 000 euros, inscrite au RCS de LYON sous le n°412 576 589, dont le siège social est sis [Adresse 3] – [Localité 4], prise en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;, dont le siège social est sis [Adresse 3] – [Localité 5]
représentée par Me Ludivine CAUVIN, avocat au barreau de NIMES, avocat postulant et par la SELARL VIAJURIS CONTENTIEUX, avocats au barreau de Lyon, avocat plaidant,

S.A.S.U. ADVENIS GESTION PRIVEE ADVENIS GESTION PRIVEE (anciennement dénommée AVENIR FINANCE GESTION PRIVEE), société par actions simplifiée à associé unique, au capital de 325 230 euros, inscrite au RCS de PARIS sous le n°431 974 963, dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 8], prise en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est sis 12, Rue Médéric – 75017 PARIS
représentée par Me Ludivine CAUVIN, avocat au barreau de NIMES, avocat postulant et par la SELARL VIAJURIS CONTENTIEUX, avocats au barreau de Lyon, avocat plaidant,

Rendu publiquement, le jugement contradictoire suivant, statuant en premier ressort après que la cause a été débattue en audience publique le 4 Novembre 2024 devant Nina MILESI, Vice-Présidente, Antoine GIUNTINI, Vice-président, et Margaret BOUTHIER-PERRIER, magistrat à titre temporaire, assistés de Aurélie VIALLE, greffière, et qu’il en a été délibéré entre les magistrats ayant assisté aux débats.

EXPOSE DU LITIGE

En 2011, la société Avenir Finance Gestion Privée a proposé aux époux [D] un investissement locatif permettant une réduction de leur imposition, à [Localité 12], dans l’ancien [Adresse 10].

Par acte authentique du 7 août 2012, reçu par Maître [P] [E], notaire, les époux [D] ont ainsi acquis un appartement au sein de l'[Adresse 10] correspondant aux lots n°38 et 02.02.

Le 29 novembre 2019, leur copropriétaire M. [Z] revendiquant la propriété de la cave qu’ils occupent, la société Adevnis Facility Management leur a adressé une mise en demeure de restituer les lieux sous un délai de 15 jours.

Par acte en date du 24 décembre 2020, M. et Mme [D] ont fait assigner la SCP [E]-Ducros-Audemard, notaires associés, la SAS Advenis Value ADD (anciennement dénommée Avenir Finance Immobilier), et la SAS Advenis Gestion Privée (anciennement dénommée Avenir Finance Gestion Privée) devant le tribunal judiciaire de Nîmes en annulation de l’acte de vente passé le 7 août 2012.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 22 septembre 2021, la SAS Advenis Gestion Privée et la SAS Advenis Value Add demandent au juge de la mise en état de déclarer les époux [D] irrecevables à agir en l’absence de publication de leur assignation et en raison de la prescription de leur action.

Par ordonnance du 25 juillet 2022, le juge de la mise en état a :
constaté la publication au service de la publicité foncière de Nîmes 1, le 4 mars 2021, de l’assignation ;dit ne plus y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de publication de l’assignation ;déclaré irrecevables comme prescrites les demandes formées par M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D],condamné M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D], solidairement, à payer à la SCP Lapyre Ducros Audemard, à la SAS Advenis Gestion Privée et à la SAS Advenis Value Add, au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 800 euros chacun,condamné M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D] aux dépens.
Par un arrêt du 6 avril 2023, la cour d’appel de Nîmes a :
infirmé l’ordonnance du juge de la mise en état en ce qu’elle a déclaré les demandes des époux [D] comme étant prescrites ; déclaré recevables les demandes de M. et Mme [D], condamné la SAS Advenis Gestion Privée, la SAS Advenis Value Add et la SCP [E] Ducros Audemard à payer à M. et Mme [D] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 17 octobre 2024, M. et Mme [D] demandent au tribunal judiciaire de :
à titre principal :juger nul l’acte de vente conclu entre eux et la société Advenis Value Add par acte authentique du 7 août 2012 portant sur un local à usage d’habitation situé à [Localité 12] au [Adresse 2] ; ordonner la publication du jugement au service de publicité foncière de Nîmes aux frais de la société Advenis Value Add ; en conséquence de la nullité prononcée : condamner la société Advenis Value Add à leur restituer la somme de 186.000 euros correspondant au prix payé, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation ; condamner la société Advenis Value Add à leur rembourser : 8.499 euros au titre des taxes foncières, 7.223,92 euros au titre des charges de copropriété, 414.624,36 euros au titre des travaux de réhabilitation ; dire qu’ils ne seront tenus de restituer le bien immobilier qu’à compter du jour où la société Advenis Value Add aura restitué le prix ainsi que le montant des taxes foncières et des charges de copropriété ; condamner la société Advenis Value Add à garantir les sommes qu’ils devront éventuellement reverser à l’administration fiscale ; condamner le notaire à rembourser les émoluments perçus sur la vente ; condamner in solidum la société Advenis Value Add, la société Advenis Finance Gestion Privée et la SCP [E], Ducros, Audemard, notaires associés, à leur payer la somme de 10.000 euros au titre de la réparation de préjudices que l’annulation de la vente laisse subsister avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation ; juger que les loyers perçus et les indemnités de carence locative resteront à leur bénéfice à titre de dommages-intérêts complémentaires. à titre subsidiaire : condamner in solidum, à titre principal, la société Advenis Value Add, la société Advenis Finance Gestion Privée et la SCP [E], Ducros, Audemard, notaires associés la somme de 582.306,98 euros, à parfaire au titre de la réparation des préjudices découlant de la perte de chance de conclure un autre investissement, à liquider selon un taux de pondération de 99 % ; condamner in solidum, à titre subsidiaire, la société Advenis Value Add, la société Advenis Finance Gestion Privée et la SCP [E], Ducros, Audemard, notaires associés la somme forfaitaire de 78.278 euros, à parfaire au titre de la réparation du préjudice direct en raison du fait qu’ils ne sont pas propriétaires de la cave ; dire que les sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement avec capitalisation ; condamner in solidum la société Advenis Value Add, la société Advenis Finance Gestion Privée et la SCP [E], Ducros, Audemard, notaires associés, à leur payer la somme de 10.000 euros au titre de leurs préjudices moraux ; en tout état de cause : débouter la société Advenis Value Add, la société Advenis Finance Gestion Privée et la SCP [E], Ducros, Audemard, notaires associés de leurs demandes ; condamner la société Advenis Value Add, la société Advenis Finance Gestion Privée et la SCP [E], Ducros, Audemard, notaires associés au paiement de la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ; ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Les époux [D] estiment avoir été victimes d’une erreur sur la consistance du bien vendu et soutiennent qu’ils ont cru, en toute bonne foi, qu’ils achetaient un appartement et une cave jusqu’à ce qu’ils découvrent leur erreur six ans plus tard, le nouveau syndic désigné en 2019 ayant attiré l’attention des copropriétaires sur cette difficulté.

Ils exposent qu’ils ont visité le lot 02.02 composé d’un appartement de type T3 de 115 m² et d’une cave de 52 m² et ont acquis le bien sur la base des plans qui leur ont été communiqués avant le compromis de vente, lesquels faisaient mention de la cave. Ils précisent que le plan établi par la SARL indiquait « Lot 02.02 – type T3 + cave » et que pendant les travaux de réhabilitation de l’immeuble, ils ont échangé avec l’étude sur la base de ce plan. Ils indiquent que le projet de restructuration a été pensé et conçu sur la base des plans établis par les différents intervenants avec l’attribution d’une cave au lot 02.02.

Ils font valoir que le compromis de vente du 14 novembre 2011 portait sur le lot 02.02, tel que défini par les documents du chantier et les plans établis dans le cadre du projet de réhabilitation ; que les acquisitions des différents lots de l’immeubles ont été réalisées sur la base des lots commerciaux et des plans portant le projet de restauration ; qu’ils ont donc légitimement pensé avoir acquis un lot comprenant une cave et relèvent que M. et Mme [Z] ont pensé acquérir un bien sans cave.

Les époux [D] soutiennent que l’acte authentique est équivoque car il se réfère au « lot 02.02 au plan », comprenant la cave, ainsi qu’au lot 38 qui ne correspond qu’à l’appartement.

Ils exposent que l’erreur provoquée par le caractère équivoque de la désignation du bien dans l’acte de vente portait sur un élément déterminant de leur consentement, à savoir une grande cave ; que ce caractère déterminant est établi par le fait que Mme [D] a pris en photo la cave.

Ils affirment enfin que cette erreur était excusable et relèvent à cet égard que M. [Z] a découvert être propriétaire de la cave en septembre 2019, soit six ans après l’acquisition de son bien et que la clef de la cave litigieuse leur a été remise par le vendeur.

Au soutien de leur demande de dommages-intérêts, M. et Mme [D] estiment avoir subi un préjudice résultant du stress de la procédure de référé intentée par les époux [Z].

Sur la responsabilité du vendeur (la SAS Advenis Value ADD), les époux [D] font valoir qu’il a manqué à ses obligations d’information et de conseil et se trouve tenu par les fautes commises par le démarcheur qu’il a mandaté dans le cadre de l’opération, à savoir la SAS Advenis Finance.

Sur la responsabilité du notaire, M. et Mme [D] indiquent que l’erreur sur la contenance du bien résulte de la distorsion entre le compromis « lot 02.02 » avant la modification de l’état de division et l’acte de vente « lot 38 » ; qu’il appartenait à Me [E] de relever cette distorsion d’une part, au titre de son obligation d’information et de conseil, d’autre part au titre de son obligation de s’assurer de l’efficacité juridique de l’acte rédigé et enfin car il est l’auteur de la modification de l’état descriptif de division.

Les demandeurs reprochent également au notaire de ne pas leur avoir remis l’état descriptif de division contenant le règlement de copropriété et l’acte modificatif du règlement.

Sur la responsabilité de la SAS Avenir Finance Gestion Privée, M. et Mme [D] exposent que reposent sur cette société les obligations d’information et de conseil incombant au conseiller en gestion de patrimoine, s’agissant d’une opération immobilière de défiscalisation. Ils font valoir que la SAS Avenir Finance Gestion Privée n’a pas fait ressortir le caractère aléatoire des données fournies et qu’aucune information ne leur a été donnée sur la structuration de l’investissement proposé, ce qui les a privés de la possibilité d’évaluer le risque.
En outre, ils reprochent à la SAS Avenir Finance Gestion Privée de ne pas avoir exécuté ses obligations précontractuelles auprès du tiers au terme d’un document écrit, de ne pas avoir analysé leur situation, de ne pas leur avoir fait signer de lettre de mission et de ne pas avoir formalisé les conseils préconisés dans un document écrit.

M. et Mme [D] font valoir que leur préjudice consiste en une perte de chance de ne pas avoir souscrit à un investissement plus avantageux ; qu’ils ont acquis le lot dans un objectif de rentabilité économique ; qu’un appartement avec cave présente une rentabilité supérieure à un appartement sans cave.

Ils ajoutent que s’ils avaient eu connaissance du fait que le lot acquis ne comprenait pas de cave, ils ne l’auraient pas acquis pour un montant de 186.000 euros TTC et n’auraient pas exposé les frais de rénovation pour une somme de 414.624,36 euros. Ils indiquent qu’ils n’auraient pas eu à financer le coût du crédit immobilier (146.157,70 euros), les frais liés à l’assurance locative (1.340 euros), les charges de copropriété (7.223,92 euros), les taxes foncières (8.299 euros).

Ils soulignent que la perte de chance doit être fixée à 99 %, ce qui correspond à une somme de 582.306,98 euros.

Subsidiairement, les époux [D] soutiennent que leur préjudice est constitué par la valeur de la cave d’une superficie de 52 m² qu’ils évaluent à la somme de 78.278,20 euros.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 19 octobre 2024, la société Advenis Wealth Management (anciennement Avenir Finance Gestion Privée) et la société Advenis Value ADD demandent au tribunal judiciaire de :
débouter M. et Mme [D] de toutes leurs demandes ; prendre acte qu’elle se réservent la faculté d’exercer un pourvoi en cassation avec la décision sur le fond contre l’arrêt du 6 avril 2023 de la cour d’appel de Nîmes ; condamner in solidum M. et Mme [D] à leur payer à chacune la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d’instance et d’exécution de la décision à intervenir.
Pour s’opposer à la demande de nullité de la vente, la société Advenis Wealth Management et la société Advenis Value ADD exposent qu’avant la signature du compromis, un plan de la première version du lot 02.02 a été remis aux époux [D], auquel était attaché une cave ; qu’à la suite de la modification de l’état descriptif de division du 6 décembre 2011, le compromis a porté sur un appartement sans cave (le lot 38) ; que l’acte de vente du 7 août 2012 ne laisse aucun doute quant à l’absence de cave attachée au lot acquis par les époux [D].
Elles ajoutent que le plan dont se prévalent les demandeurs est antérieur au compromis et à l’acte de vente et mentionne expressément son caractère non-contractuel.
Elles affirment que les deux premiers contrats de bail conclu par les époux [D] ne font pas référence à une cave, ces derniers ayant parfaitement compris que leur lot en était dépourvu ; qu’ainsi, la remise involontaire des clefs de la cave litigieuse au moment de la remise des clefs de l’appartement n’est pas significative.

Elles en concluent qu’aucune erreur sur l’objet du contrat n’a vicié le consentement de M. et Mme [D] ; qu’en outre, la présence d’une cave attachée à l’appartement n’était pas une condition essentielle et déterminante de leur engagement ; qu’en effet, l’acquisition s’inscrivait dans un projet de rénovation d’un immeuble éligible au dispositif de défiscalisation relatif aux monuments historiques.

Elles affirment enfin que si la juridiction considérait que la preuve d’une erreur sur les qualités substantielles était rapportée, cette erreur devrait être jugée inexcusable dans la mesure où la simple lecture des documents contractuels aurait dû permettre aux acquéreurs de s’apercevoir de l’absence de cave attachée à l’appartement.

Les sociétés défenderesses estiment qu’aucune nullité ne peut être prononcée sur le fondement du dol ; que le seul manquement à une obligation d’information de la part du vendeur ne saurait s’analyser en une volonté de tromper.

La société Advenis Wealth Management et la société Advenis Value ADD affirment avoir respecté leurs obligations d’information respectives.
En qualité de gestionnaire de patrimoine, la société Advenis Wealth Management devait s’assurer que l’investissement était conforme aux objectifs des époux [D], ce qui a été le cas puisqu’ils ont bénéficié de l’avantage fiscal découlant de l’opération.

En qualité de vendeur, la société Advenis Value ADD rappelle qu’elle a donné toutes les informations nécessaires à la compréhension des éléments essentiels de la vente et notamment que l’acquisition portait sur un appartement sans cave.

Subsidiairement, la société Advenis Wealth Management et la société Advenis Value ADD soutiennent que les époux [D] n’ont subi aucun préjudice au titre de la perte de chance. Elles indiquent que les époux [D] ne démontrent pas avoir fait connaître leur souhait de disposer d’une cave à titre de condition sine qua non ; qu’ils ont témoigné de leur souhait de bénéficier d’un dispositif de défiscalisation, ce qu’ils ont effectivement obtenu.
En outre, M. et Mme [D] ne rapportent pas la preuve que l’investissement leur a causé une quelconque perte.

Enfin, la société Advenis Wealth Management et la société Advenis Value ADD affirment que les époux [D] n’ont subi aucun préjudice au titre de la perte de valeur de la cave car le prix de vente payé est celui d’un appartement sans cave ; que la comparaison des ventes conclues avec les époux [D] et les époux [Z] montrent que ces derniers ont acquis leur bien plus cher au m² car il incluait une cave.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 8 juin 2023, la SCP [E] Ducros Audemard demande au tribunal judiciaire de :
débouter les époux [D] de toutes leurs prétentions à son égard ; condamner solidairement les époux [D] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
La SCP [E] Ducros Audemard soutient que l’état descriptif de division modificatif a été adressé au notaire des acquéreurs le 5 juillet 2012 ; que le compromis de vente ne fait pas état d’une cave quant à la contenance du bien vendu ; que la procuration signée par les acquéreurs pour l’acte authentique de vente mentionne clairement que le bien immobilier correspond à un appartement sans cave.
En cas d’annulation de la vente, la SCP [E] Ducros Audemard fait valoir que la restitution du prix n’est pas un préjudice indemnisable qu’il est possible de mettre à la charge du notaire qui n’est pas partie à l’acte ; qu’il en est de même des frais de mutation.
La SCP [E] Ducros Audemard soutient que la perte de chance dont se prévalent les demandeurs n’est pas réelle et sérieuse, qu’ils ont acquis le bien en vue de bénéficier d’une défiscalisation qu’ils ont effectivement obtenue ; que l’absence de cave n’a pas remis en cause cet élément.

Par ordonnance du 13 juin 2024, la clôture de l’instruction a été fixée au 21 octobre 2024. A l’audience du 4 novembre 2024, la décision a été mise en délibéré au 6 janvier 2025.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort :

REJETTE la demande de nullité de la vente conclue entre, d’une part, M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D] et, d’autre part, la société Advenis Value Add par acte authentique du 7 août 2012 ;

CONDAMNE in solidum la SA Advenis Value ADD et la SCP [E] Ducros Audemard à payer à M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D] la somme de 8.000 euros au titre de leur préjudice moral ;

REJETTE les autres demandes de dommages-intérêts de M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D] ;

CONDAMNE in solidum la SA Advenis Value ADD et la SCP [E] Ducros Audemard à payer à M. [U] [D] et Mme [Y] [C] épouse [D] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum la SA Advenis Value ADD et la SCP [E] Ducros Audemard aux dépens ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

Le présent jugement a été signé par Nina MILESI, Vice Présidente, et par Aurélie VIALLE, greffière présente lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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