Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Nîmes
Thématique : Indemnisation des préjudices suite à un accident de la circulation : enjeux et responsabilités des assureurs.
→ RésuméRésumé de l’AccidentLe 7 juillet 2019, une conductrice et son époux, passager, ont été impliqués dans un accident de la circulation alors qu’ils circulaient dans leur véhicule, assuré par une compagnie d’assurance. Leur véhicule a été heurté par un autre véhicule, dont le conducteur était également assuré par une autre compagnie. Les époux ont été hospitalisés suite à l’accident. Indemnisation InitialeSuite à l’accident, la compagnie d’assurance de la conductrice a versé des sommes provisionnelles à la victime et à son époux. Cependant, l’époux est décédé en 2021, ce qui a conduit la conductrice à demander une indemnisation plus complète pour les préjudices subis. Expertises MédicalesDes experts médicaux ont été désignés par les compagnies d’assurance pour évaluer les blessures de la conductrice et de son époux. Des rapports ont été établis, mais l’offre d’indemnisation faite par la compagnie d’assurance du conducteur a été jugée insuffisante par la conductrice, qui a refusé plusieurs propositions. Actions en JusticeLa conductrice a mis en demeure la compagnie d’assurance et le conducteur responsable de lui verser une somme importante en réparation des préjudices. Elle a ensuite assigné le conducteur, ainsi que les deux compagnies d’assurance, en justice pour obtenir une indemnisation complète. Demandes d’IndemnisationDans ses conclusions, la conductrice a demandé au tribunal de reconnaître la responsabilité totale du conducteur dans l’accident et de lui verser des sommes spécifiques pour divers préjudices, y compris des pertes de gains professionnels, des souffrances endurées, et un préjudice d’affection suite au décès de son époux. Position des Compagnies d’AssuranceLa compagnie d’assurance de la conductrice a soutenu que seule la compagnie d’assurance du conducteur devait indemniser la victime. De son côté, la compagnie d’assurance du conducteur a proposé des montants d’indemnisation réduits et a demandé des justificatifs supplémentaires pour évaluer les pertes de gains professionnels. Décision du TribunalLe tribunal a statué en faveur de la conductrice, reconnaissant son droit à une indemnisation intégrale pour les préjudices subis. Il a condamné le conducteur à verser des sommes spécifiques pour les pertes de gains, les souffrances, et d’autres préjudices, tout en précisant que les provisions déjà versées seraient déduites des montants alloués. ConclusionLe tribunal a également condamné le conducteur et la compagnie d’assurance à payer les dépens de la procédure. L’exécution provisoire de la décision a été ordonnée, permettant à la conductrice de recevoir rapidement une partie de l’indemnisation. |
Copie délivrée le
à
la SCP B.C.E.P.
Me Elodie GINOT
la SCP GMC AVOCATS ASSOCIES
TRIBUNAL JUDICIAIRE Par mise à disposition au greffe
DE NIMES
Le 24 Janvier 2025
Troisième Chambre Civile
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N° RG 23/03772 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KBOM
JUGEMENT
Le Tribunal judiciaire de NIMES, Troisième Chambre Civile, a, dans l’affaire opposant :
Mme [N] [F] en son nom personnel et en sa qualité d’ayant-droit de Monsieur [R] [F]
née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 10], demeurant [Adresse 7]
représentée par Me Cyril MALGRAS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant, Me Elodie GINOT, avocat au barreau de NIMES, avocat postulant,
à :
Compagnie d’assurance SA PACIFICA entreprise régie par le Code des Assurances, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 352 358 865, dont le siège social est sis [Adresse 8], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège,, dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par la SCP GMC AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant,
S.A. AVANSSUR Sinistre Corporel Auto, dont le siège social est sis [Adresse 6]
représentée par la SCP B.C.E.P., avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant,
Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’HERAULT, dont le siège social est sis [Adresse 4]
n’ayant pas constitué avocat
M. [S] [D], demeurant [Adresse 2]
n’ayant pas constitué avocat
Rendu publiquement, le jugement réputé contradictoire suivant, en application de l’article 474 du code de procédure civile, statuant en premier ressort après que la cause a été débattue en audience publique le 12 Novembre 2024 devant Marianne ASSOUS, Vice-Président, statuant comme juge unique, assistée de Corinne PEREZ, Greffier, et qu’il en a été délibéré.
N° RG 23/03772 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KBOM
EXPOSE DU LITIGE
Le 7 juillet 2019 Madame [N] [F], conductrice, et son époux Monsieur [R] [F], passager, ont été victimes d’un accident de la circulation alors qu’ils circulaient à bord de leur véhicule assuré auprès de la société PACIFICA (S.A.), heurté par le véhicule de Monsieur [S] [D], assuré auprès de la société AVANSSUR (S.A.).
Les époux [F] ont été transférés au Centre Hospitalier Universitaire de [Localité 11].
Selon procès-verbaux de transaction en date du 18 novembre 2019 la société PACIFICA a versé à Madame [F] la somme provisionnelle de 1500 euros et à Monsieur [F] la somme provisionnelle de 2 000 euros.
Monsieur [R] [F] est décédé le [Date décès 3] 2021.
Le 8 novembre 2021, les experts désignés par les compagnies d’assurance ont procédé à l’expertise médicale de Madame [F] et ont établi un rapport.
L’expert désigné par la société PACIFICA a établi un rapport d’expertise sur pièces concernant Monsieur [F] en date du 28 janvier 2022.
Par courrier du 17 février 2022 la compagnie AVANSSUR a adressé une offre d’indemnisation à Madame [F], qu’elle a refusé par courrier de son Conseil en date du 14 mars 2022 considérant qu’elle était insuffisante et qu’aucun partage de responsabilité ne pouvait lui être opposé.
Par courriers avec avis de réception de son Conseil en date du 12 octobre 2022 Madame [F] a mis en demeure la société AVANSSUR et Monsieur [D] de lui verser la somme de 128594,88 euros en réparation des préjudices subis par son époux et elle.
Par courrier du 18 octobre 2022, la société AVANSSUR a adressé une nouvelle offre d’indemnisation à Madame [F], que celle-ci a refusé par courrier de son Conseil en date du 4 novembre 2022 considérant que certains postes de préjudices n’étaient pas pris en considération et que certaines bases de calculs n’étaient pas conformes à la jurisprudence habituelle en la matière.
Par actes en dates des 4 et 7 juillet 2023, Madame [F] a assigné Monsieur [D], la société PACIFICA et la société AVANSSUR aux fins d’indemnisation des préjudices subis.
Par jugement du 24 juin 2024 la réouverture des débats a été ordonnée aux fins de mise en cause par Madame [F] de la CPAM de l’HERAULT.
Par acte délivré le 1er août 2024 Madame [F] a fait assigner la CPAM de l’HERAULT.
Les procédures ont été jointes.
La clôture a été fixée au 11 octobre 2024.
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 26 mars 2024, Madame [N] [F] demande au tribunal, de :
la DECLARER recevable en ses demandes fins et prétentions,
DECLARER entièrement responsable Monsieur [D] des préjudices subis par elle,
CONDAMNER Monsieur [D] à lui verser en réparation de ses préjudices personnels, la somme globale de 85.734,88 euros, se décomposant comme suit :
Au titre du déficit fonctionnel temporaire total : 180 euros
Au titre du déficit fonctionnel partiel
De classe 2 : 3.915 euros
De classe 1 : 489 euros
Au titre de la perte de gains professionnels : 10.670,88 euros
Au titre des souffrances endurées : 8.000 euros
Au titre de l’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique : 12.480 euros.
Au titre de son préjudice d’affection : 50.000 euros.
CONDAMNER Monsieur [D] à lui verser en sa qualité d’ayant droit de Monsieur [F], la somme globale de 42.860 euros, se décomposant comme suit :
Au titre du déficit fonctionnel temporaire total : 7.807,50 euros
Au titre du déficit fonctionnel partiel
De classe 3 : 705 euros
De classe 2 : 3.022,50 euros
Au titre des souffrances endurées : 25.000 euros
Au titre de l’assistance à tierce personne : 6.325 €
CONDAMNER Monsieur [D] à lui verser la somme de 3.000 € conformément aux dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
DECLARER le jugement opposable à la compagnie d’assurance AVANSSUR et à la compagnie d’assurance PACIFICA,
ORDONNER l’exécution provisoire.
Sur la responsabilité de Monsieur [D], Madame [F] constate que la compagnie AVANSSUR reconnaît désormais la pleine responsabilité de Monsieur [D] dans l’accident, contrairement à ses premières allégations tenant au partage de responsabilité. Elle fait observer que le rapport de police du 17 janvier 2020 a établi qu’elle était totalement exonérée de toute responsabilité dans l’accident.
Madame [F] sollicite la condamnation de Monsieur [D] à l’indemniser des préjudices subis à titre personnel, au titre du déficit fonctionnel temporaire en retenant une base d’indemnisation de 30 euros, au titre de la perte de gains professionnels à partir de la cessation des indemnités journalières de prévoyance en exposant qu’elle occupait un poste d’aide comptable en CDI à temps plein, au titre des souffrances endurées en se fondant sur la cotation de 3/7 retenu par l’expert, au titre du déficit fonctionnel permanent en se fondant sur le taux de 8% retenu par l’expert, l’âge de 58 ans et une valeur de point à 1560 selon le référentiel MORNET 2021.
Elle sollicite également l’indemnisation de son préjudice d’affectation en sa qualité de victime indirecte suite au décès de son époux qui a été victime de l’accident.
Sur les préjudices subis par Monsieur [F], la demanderesse sollicite l’indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées retenues à hauteur de 4,5/7, ainsi qu’au titre de l’assistance par tierce personne nécessaire telle que retenu par l’expert en retenant un taux horaire à 23 euros.
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 20 mars 2024, la société PACIFICA demande au tribunal, de :
A titre principal,
DIRE ET JUGER la compagnie AVANSSUR seule tenue à indemnisation au titre des préjudices subis par Madame [F] agissant à titre personnel et en sa qualité d’ayant-droit de Monsieur [F],
Subsidiairement,
DECLARER son offre au titre des seuls préjudices subis par Madame [F] à titre personnel satisfactoire,
DEDUIRE la somme provisionnelle de 1 500 euros versée,
En toute état de cause,
CONDAMNER la SA AVANSSUR à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER la SA AVANSSUR aux entiers dépens d’instance.
La société PACIFICA reconnaît le droit à indemnisation intégrale de Madame [F], aucune faute ne pouvant à la lecture du procès-verbal d’enquête lui être reprochée en application de l’article 4 de la loi du 5 juillet 1985, ainsi que le droit à indemnisation de Monsieur [F] en qualité de passager en se fondant sur l’article 2 de la même loi, aucune faute ne pouvant lui être opposée.
A titre principal, la société PACIFICA soutient que seule la compagnie AVANSSUR est tenue à indemnisation au titre des préjudices subis par Madame [F] agissant à titre personnel et en sa qualité d’ayant droit de Monsieur [F].
A titre subsidiaire, elle soutient que l’offre de 14 229,26 euros au titre des seuls préjudices subis par Madame [F] à titre personnel est satisfactoire. Elle argue de ce que la garantie conducteur indemnise limitativement les postes de préjudices visés en page 14 des conditions générales, et de ce qu’elle ne peut être tenue au règlement des postes qui ne sont pas prévus contractuellement, dont le déficit fonctionnel temporaire et le préjudice d’affection.
N° RG 23/03772 – N° Portalis DBX2-W-B7H-KBOM
Suivant dernières conclusions signifiées par RPVA le 21 février 2024, la société AVANSSUR demande au tribunal, de :
concernant le préjudice de Madame [F]
REDUIRE le montant des préjudices alloués à Madame [F] à de plus justes proportions, à savoir :
3 728,75 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,
629,23 € au titre de la perte de gains professionnels,
6 110 € au titre des souffrances endurées,
11 360 € au titre de l’AIPP,
DEBOUTER Madame [F] de sa demande formulée au titre du préjudice d’affection,
très subsidiairement s’agissant de la perte de gains professionnels, RESERVER ce poste de préjudice et ENJOINDRE avant dire droit à Madame [F] de produire les justificatifs permettant de déterminer et de chiffrer l’éventuelle perte de salaire, à savoir :
les feuilles de paie à partir du 01/05/2019 (2 mois avant l’accident) au 31/05/2021,
les déclarations d’impôt sur le revenu des années 2018, 2019, 2020 et 2021,
les bordereaux d’indemnités journalières de la CPAM pour la période d’arrêts de travail retenue par le médecin expert du 07/07/2019 au 31/05/2021,
les bordereaux d’indemnités versées par la prévoyance VIVALYS,
tout autre document qui pourrait permettre de calculer la perte de salaire réelle,
concernant le préjudice de Monsieur [F]
REDUIRE le montant des préjudices alloués à Madame [F] en sa qualité d’ayant-droit de Monsieur [F] à des plus justes proportions, à savoir :
6 537,5 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,
14 000 € au titre des souffrances endurées,
4 740,57€ au titre de l’assistance par tierce personne,
en toute hypothèse,
DEDUIRE le montant des provisions déjà versées soit 1 500 euros au titre du préjudice de Madame [F] et 2000 euros au titre du préjudice de Monsieur [F],
DEBOUTER Madame [F] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions.
La société AVANSSUR reconnaît le droit à indemnisation de Madame [F].
Sur les préjudices de Madame [F], la société AVANSSUR suggère des indemnisations réduites au titre du déficit fonctionnel temporaire en retenant un taux horaire à 25 euros, au titre des souffrances endurées, au titre du déficit fonctionnel permanent en retenant le taux retenu par l’expert, 60 ans le jour de la consolidation et un point à 1420 euros. S’agissant de la perte de gains professionnels elle propose une indemnisation moindre à titre principal en faisant valoir que la demanderesse a bénéficié d’un maintien de salaire du 7 juillet au 12 septembre 2019 et que la prévoyance de la société VIVALYS lui a versé des indemnités du 10 octobre 2019 au 31/10/2021.
Elle ajoute que la créance définitive de la CPAM produite détaille une période d’hospitalisation et une période d’indemnités journalières erronées et que certains frais sollicités par la CPAM ne sont en outre pas imputables à l’accident.
Concernant la demande de Madame [F] formulée au titre de son préjudice d’affection la société AVANSSUR soutient que rien ne vient établir que le décès de Monsieur [F] serait lié à l’accident.
Sur les préjudices de Monsieur [F], la société AVANSUR propose des indemnisations réduites concernant le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, et l’assistance par tierce personne en retenant un taux horaire de 17 euros.
Régulièrement assigné le 4 juillet 2023, Monsieur [S] [D] n’a pas constitué avocat. Le présent jugement sera donc réputé contradictoire.
A l’audience du 12 novembre 2024 l’affaire a été mise en délibéré au 24 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
Dit la S.A AVANSSUR seule tenue à indemnisation au titre des préjudices subis par Madame [N] [F] agissant à titre personnel et en sa qualité d’ayant-droit de Monsieur [R] [F],
Condamne Monsieur [S] [D] à verser à Madame [N] [F] en réparation de son préjudice corporel consécutif à l’accident de la circulation dont elle a été victime le 7 juillet 2019 les sommes suivantes :
8 457,24 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels,2 213,64 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,8 000 euros au titre des souffrances endurées,4 135,05 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,12 480 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,Dit que les provisions versées viendront en déduction des sommes allouées,
Condamne Monsieur [S] [D] à verser à Madame [N] [F] en qualité d’ayant-droit de Monsieur [R] [F] en réparation de son préjudice corporel consécutif à l’accident de la circulation dont il a été victime le 7 juillet 2019 les sommes suivantes :
6 325 euros au titre de l’assistance tierce personne temporaire,7 175,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,20 000 euros au titre des souffrances endurées,Dit que les provisions versées viendront en déduction des sommes allouées,
Condamne Monsieur [S] [D] à payer à Madame [N] [F] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne in solidum Monsieur [S] [D] et la S.A. AVANSSUR aux dépens,
Rappelle que l’exécution provisoire de la décision est de droit,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
Le Greffier, Le Président,
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