Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer
Thématique : Violation des droits procéduraux et irrégularités dans le traitement d’un ressortissant étranger en rétention administrative
→ RésuméMonsieur [B] [L], de nationalité marocaine, a été placé en rétention administrative suite à une obligation de quitter le territoire français. Le Préfet de l’Oise a demandé une prolongation de cette rétention au-delà des quatre jours initiaux. L’intéressé a exprimé son souhait d’être assisté par un avocat, évoquant ses liens familiaux en France. L’avocate a soulevé des irrégularités dans la procédure, notamment le non-respect des droits de Monsieur [B] [L]. Le tribunal a constaté ces irrégularités et a rejeté la demande de maintien en rétention, ordonnant sa remise en liberté dans un délai de vingt-quatre heures.
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER
ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE MAINTIEN EN RETENTION
MINUTE : 24/1883
Appel des causes le 01 Décembre 2024 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 24/05408 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76BT3
Nous, Monsieur MARLIERE Maurice, Premier Vice Président au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assisté de Madame LOGET Angèle, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;
Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;
Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;
Monsieur [B] [L]
de nationalité Marocaine
né le 02 Septembre 1991 à [Localité 2] (MAROC), a fait l’objet :
d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 27 novembre 2024 par M LE PREFET DE L’OISE, qui lui a été notifié le 27 novembre 2024 à 14h40.
– d’un arrêté de placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 27 novembre 2024 par M LE PREFET DE L’OISE, qui lui a été notifié le 27 novembre 2024 à14h50.
Par requête du 30 Novembre 2024 reçue au greffe à 11h53, Mme PREFET DE L’OISE invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de quatre jours, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de VINGT SIX jours maximum.
En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Sohil BOUDJELLAL, avocat au Barreau de Paris et substitué par Maître Cécile LANNOY, avocat au barreau de Boulogne-sur-mer, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations.
L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. J’ai eu un visa en 2015. Je suis resté parce que j’ai travaillé, il y a mes parents ici et toute ma famille. J’ai une demande qui est en cours à la Préfecture. Mon avocat a tous les papiers. Mon passeport est toujours valable. J’ai un passeport et j’ai trois enfants. Ma femme a tous ses papiers. J’ai ma mère qui est là, mes enfants sont là, ils pleurent et c’est moi qui m’en occupe. Mes enfants sont traumatisés. J’ai rien fait, j’ai pas volé, j’étais à la sortie de l’hôpital avec mes enfants. C’est mon avocat qui a mon passeport ou ma femme parce que c’est ma femme qui a pris tous les papiers. Ma femme est en situation régulière. Mes enfants ont des papiers français, ils sont scolarisés en France; J’ai un contrat pour la maison avec ma femme depuis 2020. J’ai fait des bêtises avant mais maintenant je suis sur le bon chemin.
Me Cécile LANNOY entendu en ses observations :
Sur les moyens de nullités :
-non respect de la notification des droits en garde à vue : Monsieur n’a pas eu la possibilité d’appeler un tiers et de pouvoir être assisté de l’avocat de son choix.
-défaut d’habilitation du fonctionnaire qui a consulter visabio : sur le PV le fonctionnaire n’est pas nommément désigné donc on ne peut pas contrôler de manière expresse l’habilitation JP CCASS 14 octobre 2020.
Je vous demande de constater l’irrégularité de la procédure et de remettre Monsieur en liberté.
MOTIFS
Attendu qu’il y a lieu d’observer que la notification des droits reconnus par la loi à la personne placée en garde à vue ne satisfait pas aux prescriptions des dispositions du code de procédure pénale applicables en la matière dans leur rédaction résultant de la réforme opérée par la loi n°2024-364 du 22 avril 2024 ; qu’en effet, il n’a pas été expressément indiqué à l’intéressé qu’il pouvait faire aviser de la mesure de garde à vue prise à son encontre une personne de son choix autre qu’un membre de sa famille ou son employeur ; que cette irrégularité fait nécessairement grief aux droits de l’intéressé et qu’il convient en conséquence de faire droit au premier moyen de nullité soulevé par la défense ;
Qu’en outre la procédure présente une seconde irrégularité, source d’une nullité d’ordre public qui ne nécessite pas la démonstration d’une atteinte portée aux droits de l’intéressé, à savoir qu’il n’est pas établi en procédure que le fonctionnaire ayant consulté le fichier visabio était spécialement habilité à cet effet étant observé qu’aucun procès-verbal spécifique ne mentionne la consultation de ce fichier nonobstant la présence à la procédure de documents qui en sont extraits ; qu’au bénéfice de ces observations le second moyen de nullité doit également être accueilli ;
PAR CES MOTIFS
REJETONS la demande de maintien en rétention administrative de Mme PREFET DE L’OISE
ORDONNONS que Monsieur [B] [L] soit remis en liberté à l’expiration d’un délai de vingt quatre heures suivant la Notification à Monsieur le Procureur de la République de BOULOGNE SUR MER de la présente ordonnance sauf dispositions contraires prises par ce magistrat.
INFORMONS Monsieur [B] [L] qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République et le cas échéant, jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’effet suspensif de l’appel ou la décision au fond, que pendant ce délai il peut contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.
RAPPELONS à l’intéressé qu’il a l’obligation de quitter le territoire national.
NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et l’avisons de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 1] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.
L’Avocat, Le Greffier, Le Juge,
décision rendue à 11 h 48
L’ordonnance a été transmise ce jour par mail à Mme PREFET DE L’OISE et au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 24/05408 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76BT3
Ordonnance notifiée à Monsieur le procureur de la République à 11 h 54
Décision notifiée à …h…
L’intéressé,
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