Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bobigny
Thématique : Hospitalisation sous contrainte : enjeux de consentement et de surveillance médicale.
→ RésuméMadame [E] [K], née le 04 avril 1994, est hospitalisée à la Maison de Santé d'[Localité 6] depuis le 15 novembre 2024, suite à une décision du directeur de l’établissement. Son hospitalisation complète a été validée par le juge des libertés et de la détention, qui a reconnu la nécessité de soins immédiats en raison de troubles mentaux significatifs. Bien que son avocat conteste la date de début de l’hospitalisation contrainte, il a été établi que celle-ci a effectivement commencé le 15 novembre 2024, rendant la requête valide. Les dépens sont à la charge de l’État.
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TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY
ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D’UNE MESURE D’HOSPITALISATION COMPLÈTE
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DÉLAI DE 12 JOURS
ADMISSION A LA DEMANDE D’UN TIERS OU EN CAS DE PÉRIL IMMINENT
N° RG 24/09669 – N° Portalis DB3S-W-B7I-2HPV
MINUTE: 24/2326
Nous, Kara PARAISO, juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de BOBIGNY, assisté de Lucie BEAUROY-EUSTACHE, greffier, avons rendu la décision suivante concernant:
LA PERSONNE EN SOINS PSYCHIATRIQUES :
Madame [E] [K]
née le 04 Avril 1994 à [Localité 4]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Etablissement d’hospitalisation: MAISON DE SANTE D’[Localité 6], sis [Adresse 1] – [Localité 6]
présente assistée de Me SOUKOUNA Magou, avocat commis d’office
PERSONNE A L’ORIGINE DE LA SAISINE
Monsieur le directeur de MAISON DE SANTE D’[Localité 6]
Absent
TIERS A L’ORIGINE DE L’HOSPITALISATION
Monsieur [G] [K]
Absent
MINISTÈRE PUBLIC
Absent
A fait parvenir ses observations par écrit le 25 novembre 2024
Le 15 novembre 2024 , le directeur de MAISON DE SANTE D’[Localité 6] a prononcé la décision d’admission en soins psychiatriques de Madame [E] [K].
Depuis cette date, Madame [E] [K] fait l’objet d’une hospitalisation complète au sein de MAISON DE SANTE D’[Localité 6].
Le 21 Novembre 2024, le directeur de l’établissement a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète de Madame [E] [K].
Le ministère public a fait connaître son avis par conclusions écrites du 25 novembre 2024
A l’audience du 26 Novembre 2024, Me Magou SOUKOUNA, conseil de Madame [E] [K], a été entendu en ses observations.
L’affaire a été mise en délibéré à ce jour.
MOTIFS
Sur la tardiveté de la requête.
Madame [E] [K] fait valoir qu’elle est hospitalisée depuis le 15 octobre 2023, non en soins libres comme indiqué, mais contre sa volonté, après que son père ait appelé les pompiers, sans que personne ne lui ait expliqué qu’elle était en soins libres ;
Son conseil fait grief de la tardiveté de la requête en poursuite de l’hospitalisation contrainte, soutenant que contrairement aux indications de l’établissement, Madame [K] est en réalité hospitalisée sous contrainte depuis le 17 octobre 2024, et non pas depuis moins de douze jours avant ladite requête ; elle fait valoir à cet égard les certificats médicaux des 24 puis 72 heures mentionnant une date d’hospitalisation du 17 octobre ; ce en contradiction avec le certificat d’admission, la demande du tiers et la décision d’admission en soins contraints, tous datés du 15 novembre 2024 ; elle y ajoute le placement en isolement de sa cliente, à une date antérieure à la décision d’admission, comme évoqué dans l’avis motivé du 20 novembre 2024 ;
Elle en déduit l’irrégularité de la procédure.
L’article L. 3211-12-1 du même code dispose que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure, avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ou à compter de la décision par laquelle le directeur de l’établissement a modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète.
Toutefois, une mesure d’hospitalisation contrainte peut suivre une hospitalisation en soins libres, en considération de l’évolution des troubles de la personne.
En l’espèce, si le certificat d’admission est du 15 novembre 2024 à 14 h 32, les certificats d’examens des 24 et 72 heures, mentionnent une hospitalisation le 17 octobre 2024, de même que l’avis motivé du 20 novembre 2024, lequel ajoute “nécessécité d’un isolement thérapeutique de 48 heures”. Il résulte toutefois des pièces contradictoirement transmises par l’établissement en délibéré, que ce n’est qu’à partir du 15 novembre 2024, date à partir de laquelle son hospitalisation libre a été transformée en hospitalisation contrainte, que Madame [E] [K] a fait l’objet d’une mesure d’isolement (laquelle nécessitait effectivement une hospitalisation contrainte par application des dispositions de l’article L 3222-5-1 du code de la santé publique) ;
La seule circonstance que les pièces médicales évoquées font état d’une hospitalisation à une date antérieure à celle de la décision d’admission, est sans influence sur le fait que cette hospitalisation ait pu être initialement sans contrainte. De plus, u regard de son état médical, les déclarations de la patiente selon laquelle on ne lui avait pas précisé qu’il s’agissait d’une hospitalisation libre antérieurement au 15 novembre 2024, n’apparait pas davantage de nature à prouver qu’il s’agissait alors, avant le 15 novemnre 2024, d’une première hospitalisation contrainte.
La tardiveté de la requête n’est ainsi pas établie.
MOTIFS
Sur la poursuite de la mesure de soins psychiatriques
Aux termes de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1.
Il résulte des pièces du dossier, que Madame [E] [K] a été hospitalisée sous contrainte en urgence et à la demande de tiers, à l’issue d’un passage à l’acte agressif sur ses parents et les soignants dans l’établissement où elle était déjà en soins libres, étant en outre relevé un risque de nouveau passage à l’acte et de fugue, danger immédiat pour elle et pour les autres ;
L’examen des 72 heures faisait état d’un syndrome de persécution, troubles du comportement à type passage à l’acte hétéro agressif, déni des troubles, discordance idéo affectives, relâchement des associations, persévérations, méfiance et rigidité de la pensée, sans critique du passage à l’acte, avec important risque de récidive ;
L’avis motivé déjà évoqué, relevait le 20 novembre 2024 plus de calme, peu d’expression, imprévisibilité persistante, projet de foyer à préciser, vulnérabilité, impossible retour au domicile familial ;
A l’audience, Madame [K] énonce ne pas être contre la poursuite de l’hospitalisation, admet avoir une maladie à soigner ;
Il résulte de l’ensemble, que Madame [E] [K] présente des troubles mentaux qui rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.
Il y a lieu d’en autoriser la poursuite.
PAR CES MOTIFS
Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bobigny, après débats tenus en audience publique dans la salle d’audience aménagée à l’établissement public de santé de [7], au centre Henri Duchêne situé [Adresse 2] – [Localité 5], statuant au tribunal par décision susceptible d’appel,
Autorise la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de Madame [E] [K]
Laisse les dépens à la charge de l’Etat.
Dit que cette ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire,
Fait et jugé à Bobigny, le 26 Novembre 2024
Le Greffier
Lucie BEAUROY-EUSTACHE
Le vice-président
Juge des libertés et de la détention
Kara PARAISO
Ordonnance notifiée au parquet le à
le greffier
Vu et ne s’oppose :
Déclare faire appel :
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