Tribunal judiciaire d’Amiens, 26 novembre 2024, RG n° 24/00148
Tribunal judiciaire d’Amiens, 26 novembre 2024, RG n° 24/00148

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire d’Amiens

Thématique : Capacité de remboursement et bonne foi en situation de surendettement : enjeux et perspectives.

Résumé

Monsieur [F] [B] a déposé une demande de traitement de surendettement le 29 avril 2024, déclarée recevable le 28 mai. La commission a proposé un rééchelonnement du passif, fixant sa capacité de remboursement à 1.426 euros. Contestant cette évaluation, Monsieur [F] [B] a demandé une audience pour réduire cette capacité, arguant de son loyer élevé et d’une dette contestée. Le juge a constaté un passif de 50.803,38 euros face à des ressources de 3.032 euros, confirmant son incapacité à rembourser. Un plan de désendettement a été établi, interdisant de nouvelles dettes sans accord préalable.

TRIBUNAL JUDICIAIRE d’AMIENS
[Adresse 12]
[Localité 5]
Service surendettement des particuliers

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 24/00148 – N° Portalis DB26-W-B7I-IB64

Jugement du 26 Novembre 2024

Minute n°

[F] [B]

C/

S.A. [16], Société [11], S.A. [10], S.A. [10]

Expédition délivrée aux parties par LRAR
le 26.11.2024

JUGEMENT

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sous la Présidence de Céline BARTHOU, Vice-Présidente chargée de la Chambre de la proximité et de la protection, assistée de Agnès LEROY, Greffière ;

Après débats à l’audience publique du 15 Octobre 2024, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2024.

Sur la contestation formée par :

Monsieur [F] [B]
[Adresse 2], [Localité 6], Présent

à l’encontre des mesures imposées élaborées par la Commission de Surendettement des Particuliers de la Somme.

Créanciers :

S.A. [16]
[Adresse 15], [Localité 7], Absente

Société [11]
[Adresse 8], [Localité 4], Absente

S.A. [10]
Agence siège [Adresse 13], 75204 PARIS CEDEX 13, Absente

S.A. [10]
Chez [11] – [Adresse 8], [Localité 4], Absente

EXPOSE DE LA SITUATION

Monsieur [F] [B] a saisi le 29 avril 2024 la commission de surendettement des particuliers de la Somme d’une demande de traitement de sa situation de surendettement qui a été déclarée recevable le 28 mai 2024.

Dans sa séance du 13 août 2024, la commission de surendettement a élaboré des mesures imposées consistant en un rééchelonnement du passif en retenant une capacité de remboursement de 1.426 euros.

Suivant courrier recommandé avec accusé de réception expédié le 29 août 2024, Monsieur [F] [B] a formé un recours contre ces mesures, considérant la capacité de remboursement inadaptée à sa nouvelle situation et contestant le remboursement du crédit [16].

Le débiteur et les créanciers ont été convoqués à l’audience par lettres recommandées avec accusé de réception à la diligence du greffe.

Monsieur [F] [B] comparaît en personne et sollicite une diminution de la capacité de remboursement et le placement de la société [16] au dernier rang des créanciers. Le débiteur expose vivre désormais à [Localité 14] et supporter un loyer plus élevé.

S’agissant de la dette [16], il fait valoir que celle-ci a été souscrite par son ancien compagnon à son insu et qu’il a déposé plainte. Il précise que son ancien compagnon bénéficie quant à lui d’une suspension de l’exigibilité de ses dettes, dont la dette litigieuse et qu’il n’entend pas dans ce cas payer à sa place pour une dette dont il n’avait pas connaissance.

L’affaire a été mise en délibéré au 26 novembre 2024.

MOTIVATION

Le juge peut vérifier, même d’office, que le débiteur se trouve dans une situation de surendettement.

Il peut prescrire toute mesure d’instruction qu’il estime utile et nonobstant toute disposition contraire, il peut également obtenir la communication de tout renseignement lui permettant d’apprécier la situation du débiteur et l’évolution possible de celle-ci.

La situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l’impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir, en ce compris le cautionnement ou l’acquittement solidaire de la dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société.

Le seul fait d’être propriétaire de sa résidence principale ne peut être tenu comme empêchant que la situation de surendettement soit caractérisée.

La possession de biens de valeur, notamment d’un bien immobilier, ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement dès lors qu’ils ne peuvent pas être réalisés à court terme, dans des conditions ordinaires, pour désintéresser les créanciers.
La bonne foi du débiteur, sa situation de surendettement et ses capacités de remboursement s’apprécient au jour où le juge statue.

Sur la situation de surendettement :

Les éléments recueillis par la commission et complétés par les débats à l’audience permettent de retenir que le passif de Monsieur [F] [B] s’élève à 50.803,38 euros, ainsi que cela ressort de l’état détaillé des dettes dressé par la commission;

Par ailleurs, les ressources mensuelles de Monsieur [F] [B] ont été appréciées à la somme de 3.032 euros pour un patrimoine ne se composant d’aucun actif réalisable à court terme.

Au regard de ces éléments financiers, Monsieur [F] [B] est manifestement dans l’impossibilité de faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir.

Sur la bonne foi :

La bonne foi du débiteur est présumée et il appartient au créancier qui excipe de sa mauvaise foi de le démontrer. La simple négligence ou imprévoyance du débiteur ne permet pas de caractériser sa mauvaise foi qui est constituée par la volonté systématique et irresponsable de recourir au crédit, pour réaliser des dépenses somptuaires ou mener un train de vie dispendieux.

La notion de bonne foi s’apprécie au travers de la personne de chacun des débiteurs. Ainsi, la mauvaise foi d’un membre du couple ne peut justifier l’irrecevabilité de la demande de son conjoint.

La bonne foi du débiteur s’apprécie au jour où le juge statue.

Enfin, les faits constitutifs de la mauvaise foi doivent être en lien direct avec la situation de surendettement.

En l’espèce, aucun élément ne permet de remettre en cause la bonne foi de Monsieur [F] [B].

Sur les mesures imposées :

La commission de surendettement a retenu des ressources de 3.032 euros et des charges pour 1.606 euros en retenant divers forfaits pour une personne, un loyer de 530 euros et des frais de transport de 210 euros.

Monsieur [F] [B] a perçu au titre de l’année 2024 un revenu moyen de 3.430,18 euros en retenant le cumul imposable figurant sur le bulletin de salaire de septembre 2024.

Ayant déménager pour se rapprocher de son lieu de travail, il n’expose plus d’abonnement TER. Il supporte un abonnement Navigo de 86,40 euros pris en charge par son employeur à hauteur de 50%.
Son nouveau loyer s’élève à la somme de 945 euros hors provision sur charges.

Les charges courantes peuvent être retenues sur la base des différents forfaits déterminés par la Banque de France en l’absence de dépassement justifié de ceux-ci. Ainsi seront retenus:
– le forfait de base de 625 euros
– le forfait chauffage de 121 euros
– le forfait habitation de 120 euros

La commission de surendettement a omis de retenir les impôts supportés par Monsieur [F] [B] alors qu’il fait l’objet d’un taux personnalisé de 10,70 %, soit une somme mensuelle de 367,03 euros.

Ainsi, les charges de Monsieur [F] [B] peuvent être évaluées à la somme de 2.221,23 euros.

La quotité saisissable s’élève, selon le barème des saisies des rémunérations à la somme de 1.888,61 euros. Pour autant, la capacité réelle de remboursement de Monsieur [F] [B] s’élève à 1.208,95 euros, somme qui sera retenue pour l’élaboration de son plan de désendettement.

En outre, Monsieur [F] [B] justifie avoir déposé plainte contre son ancien concubin suite à la conclusion d’un contrat de crédit auprès de l’organisme [16] en son nom, en usurpant son identité. En l’état, aucun élément ne permet de dispenser le débiteur du règlement de cette créance. Néanmoins, au regard de l’existence de cette plainte dont l’issue est indéterminée, il convient de reporter le paiement de cette créance à la fin du plan afin de permetre de connaître les suites réservées à cette démarche.

Monsieur [F] [B] devra donc rembourser ses dettes selon les modalités définies en annexe de la présente décision.

PAR CES MOTIFS
Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en premier ressort.

Déclare Monsieur [F] [B] en sa contestation des mesures imposées.

Dit que Monsieur [F] [B] devra apurer ses dettes selon les mesures et conditions d’exécution définies en annexe à la présente décision à compter du 1er janvier 2025.

Dit que Monsieur [F] [B] devra :
effectuer à bonne date les paiements prévus dans le cadre des mesures adoptées par la présente juridiction (tableau en annexe), à défaut celles-ci seront caduques 1 MOIS après une mise en demeure restée infructueuse d’exécuter ses obligations, adressée par lettre recommandée avec avis de réception ;ne pas contracter de nouvelles dettes ou de nouveaux crédits, ou plus largement aggraver sa situation personnelle et financière ou diminuer leur patrimoine, sans l’accord des créanciers, de la commission ou du juge, sous peine de déchéance du bénéfice de la procédure de surendettement ;mettre tout en œuvre pour diminuer ses charges courantes, notamment celles qui ne sont pas nécessaires à la vie courante ;informer les créanciers et la commission de leurs changements éventuels d’adresse et de domiciliation bancaire ;informer la commission de toute modification significatives de sa situation financière ayant des incidences notables sur ses capacités de remboursement, notamment un retour à meilleure fortune
Dit que les éventuelles économies réalisées par Monsieur [F] [B] supérieures à 1 500 euros ou toutes rentrées d’argent supérieures à 1 500 euros, autres que des salaires, prestations familiales ou aides sociales (donations, successions, primes, indemnités de licenciement, indemnités diverses, épargne entreprise etc) devront être affectées en priorité au paiement de ses dettes et qu’elles ne pourront être employées sans l’accord préalable de la commission ou du juge sous peine de déchéance du bénéfice de la procédure.

Dit que les créanciers auxquels les mesures adoptées par la présente juridiction sont opposables :
ne peuvent exercer des procédures d’exécution à l’encontre des biens des débiteurs pendant la durée d’exécution de ces mesures.doivent actualiser leur tableau d’amortissement en fonction des mesures adoptées et en donner connaissance au débiteur.doivent informer, dans les meilleurs délais, les débiteurs des nouvelles modalités de recouvrement de leur créance, notamment de la date du premier règlement.
Rappelle que la présente décision sera communiquée au Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) géré par la Banque de France aux fins d’inscription de la situation du débiteur ;

Invite Monsieur [F] [B] à solliciter une mesure d’aide ou d’action sociale pour la gestion de leur budget, notamment auprès d’un Conseiller en économie sociale et familiale en se rapprochant des services du Conseil départemental de la Somme, [Adresse 3] à [Localité 9] ;

Rappelle qu’est déchue du bénéfice de la procédure de surendettement :

1° Toute personne qui aura sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts ;

2° Toute personne qui aura détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens ;

3° Toute personne qui, sans l’accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aura aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l’exécution du plan ou des mesures imposées ou recommandées ;

Dit n’y avoir lieu à condamnation aux dépens ;

Rappelle que la présente décision est immédiatement exécutoire.

La greffière Le juge

PLAN DE SURENDETTEMENT

DEBITEUR : Monsieur [F] [B]
Jugement du tribunal judiciaire d’Amiens, chambre de la proximité du 26 novembre 2024
RG n° 11 24 148

RANG
Créancier / Dette
Restant dû début
Taux
Mensualité du 01/01/2025 au 01/03/2025
Mensualité du 01/04/2025 au 01/08/2027
Mensualité du 01/09/2027 au 01/07/2028
Restant dû fin
R1
[10] / 21192551358
1 390,98 €
0,00%
463,66 €

0,00 €
R1
[11] / 44216329661100
1 950,28 €
0,00%
650,09 €

0,00 €
R2
[10] / 44216329669002
34 228,67 €
0,00%

1 180,30 €

0,00 €
R3
[16] / CFR2019121523QKWM0
13 233,45 €
0,00%

1 203,04 €
0,00 €
Total des mensualités

1 113,75 €
1 180,30 €
1 203,04 €

La Greffière, La Juge,

 


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