Rupture brutale du Contrat de coproduction audiovisuelle : l’affaire On est pas couché

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Rupture brutale du Contrat de coproduction audiovisuelle : l’affaire On est pas couché
En cas de non-reconduction de production d’une émission audiovisuelle (On est pas couché) attention à bien respecter les durées de préavis.

L’article L. 442-1, II, du code de commerce, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, applicable au jour de la rupture de la relation, dispose qu’engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.

Ce texte précise qu’en cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois.

Une relation commerciale établie présente un caractère suivi, stable et habituel et permet raisonnablement d’anticiper pour l’avenir une certaine continuité du flux d’affaires entre les partenaires commerciaux, ce qui implique, notamment qu’elle ne soit pas entachée par des incidents susceptibles de remettre en cause sa stabilité, voire sa régularité.

Le préavis suffisant s’apprécie en tenant compte notamment de la durée de la relation commerciale, mais également des autres circonstances notamment de l’état de dépendance économique de l’entreprise évincée (Com., 20 mai 2014, n° 13-16.398, publié au Bulletin).

Lorsque le préavis accordé est insuffisant, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugé nécessaire (Com., 9 juillet 2013 n° 12-20.468, publié au Bulletin).

Sont seuls indemnisables, sur le fondement de l’article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce, les préjudices découlant de la brutalité de la rupture et non la rupture elle-même (Com., 10 février 2015, n° 13-26.414, publié au Bulletin).

Le préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture s’évalue en considération de la marge brute escomptée, c’est-à-dire la différence entre le chiffre d’affaires hors taxe escompté et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d’insuffisance de préavis, différence dont pourra encore être déduite, le cas échéant, la part des coûts fixes non supportés du fait de la baisse d’activité résultant de la rupture, durant la même période (Com., 28 juin 2023, pourvoi n° 21-16.940, publié au Bulletin).

En l’espèce, la société TSE pouvait légitimement s’attendre à poursuivre sa collaboration avec la société Ruq, et anticiper pour l’avenir une certaine continuité du flux d’affaires avec son partenaire commercial. La Cour dira, en conséquence, que la relation entre la société TSE et la société Ruq présentait un caractère suivi, stable et significatif, et qu’elle était établie depuis dix-neuf ans (à 780.340 euros de préjudice).

La durée du préavis qui aurait du être respecté a été estimée à dix mois En concédant un préavis d’une durée inférieure à ce délai, la société Ruq s’est ainsi rendue responsable d’une rupture brutale de la relation commerciale établie ouvrant droit à indemnisation.

Il résulte des pièces versées aux débats et des explications des parties que les relations entre celles-ci ont débuté à compter de l’été 2001, et se sont poursuivies, sans interruption, jusqu’au 24 avril 2020, date à laquelle M. [A] a notifié, par courriel, à la société TSE la fin de leur collaboration.

Celle-ci a donné lieu à la conclusion de trente-cinq contrats en vue de la production, puis de la coproduction, à compter de l’année 2009, de diverses émissions quotidiennes ou hebdomadaires, telles que notamment « ;On a tout essayé ;», « ;On n’a pas tout dit ;», « ;On n’demande qu’à en rire ;», et « ;On n’est pas couché ;», reconduites pour la plupart durant plusieurs saisons annuelles.

Parallèlement, des conventions de préachats des droits de diffusion étaient conclues entre la société TSE et la société France Télévisions, en présence de M. [S] [H], en vue de la diffusion des émissions sur la chaîne France 2.

La constance de la relation commerciale s’infère de la multiplicité des contrats dont l’exécution s’est étalée, sans interruption, durant près de dix-neuf ans, laquelle a donné lieu à un courant d’affaires particulièrement significatif. Il est, de ce point de vue, indifférent que les parties n’aient régularisé aucun accord-cadre et que les contrats, indépendants les uns des autres, aient été conclus à durée déterminée, sans clause de tacite reconduction, étant souligné qu’une nouvelle convention succédait dans les faits systématiquement à la précédente, sans interruption aucune ; dans ces circonstances, l’absence de clause d’exclusivité ou de garantie de chiffre d’affaires ne permet pas non plus d’écarter le caractère stable de la relation ;; en tout état de cause, l’absence de dépendance économique potentiellement liée à l’existence de partenaires concurrents ne permet pas d’écarter, en tant que telle, l’existence d’une relation établie au sens du texte susvisé.

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