L’Essentiel : La SAFER, propriétaire de parcelles agricoles, a vu Mme [K] exploitant un centre équestre subir des dommages lors de l’installation d’une clôture, endommageant une canalisation de gaz de GRDF. Cette dernière a assigné Mme [K] en indemnisation. La SAFER a contesté la décision de la cour d’appel, arguant que la responsabilité de GRDF ne pouvait être engagée, la faute de la victime étant exclusive. Elle a également souligné l’absence de servitude conventionnelle pour la canalisation. La cour a finalement reconnu que la constitution d’une servitude nécessitait des formalités légales, invalidant ainsi la condamnation de Mme [K].
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Propriétés et occupation des terrainsLa société d’aménagement foncier et d’établissement rural Provence-Alpes-Côte d’Azur (SAFER) est propriétaire de plusieurs parcelles agricoles. Mme [K] y exploite un centre équestre sous une convention d’occupation précaire. Incident et dommagesLors de l’installation d’une clôture, une canalisation souterraine de distribution de gaz, appartenant à la société Gaz réseau distribution de France (GRDF), a été endommagée par une pelle mécanique manœuvrée par Mme [K]. En conséquence, la société GRDF a assigné Mme [K] en indemnisation pour les préjudices subis. Intervention de la SAFERLa SAFER est intervenue volontairement dans l’instance, et Mme [K] a demandé en appel la garantie de la SAFER en cas de condamnation prononcée à son encontre. Arguments de la SAFERLa SAFER conteste la décision de la cour d’appel qui a condamné Mme [K] à verser des dommages-intérêts à la société GRDF. Elle soutient que la responsabilité de la société GRDF ne peut être engagée, car la faute de la victime est la cause exclusive du dommage. La SAFER fait également valoir que la canalisation de gaz ne pouvait être présente sans une servitude conventionnelle. Recevabilité du moyenLa société GRDF a contesté la recevabilité du moyen avancé par la SAFER, arguant qu’il était nouveau et mélangé de fait et de droit. Cependant, la SAFER avait déjà soutenu dans ses conclusions d’appel que la société GRDF avait commis une faute, rendant le moyen recevable. Bien-fondé du moyenLa cour a examiné les textes de loi concernant les servitudes d’utilité publique. Elle a conclu que la constitution d’une servitude de passage pour une canalisation de distribution de gaz sur une propriété privée nécessite une déclaration préalable d’utilité publique, ainsi que le respect de formalités de notification et d’affichage. En déclarant Mme [K] seule responsable, la cour d’appel a violé ces dispositions légales. |
Q/R juridiques soulevées :
Qui est propriétaire des parcelles agricoles mentionnées dans le texte ?La société d’aménagement foncier et d’établissement rural Provence-Alpes-Côte d’Azur (SAFER) est propriétaire de plusieurs parcelles agricoles. Quel type d’activité Mme [K] exerce-t-elle sur ces parcelles ?Mme [K] y exploite un centre équestre sous une convention d’occupation précaire. Quel incident a eu lieu lors de l’installation d’une clôture ?Lors de l’installation d’une clôture, une canalisation souterraine de distribution de gaz, appartenant à la société Gaz réseau distribution de France (GRDF), a été endommagée par une pelle mécanique manœuvrée par Mme [K]. Quelles actions la société GRDF a-t-elle entreprises suite à l’incident ?En conséquence, la société GRDF a assigné Mme [K] en indemnisation pour les préjudices subis. Comment la SAFER a-t-elle réagi à cette situation ?La SAFER est intervenue volontairement dans l’instance, et Mme [K] a demandé en appel la garantie de la SAFER en cas de condamnation prononcée à son encontre. Quels arguments la SAFER a-t-elle avancés pour contester la décision de la cour d’appel ?La SAFER conteste la décision de la cour d’appel qui a condamné Mme [K] à verser des dommages-intérêts à la société GRDF. Elle soutient que la responsabilité de la société GRDF ne peut être engagée, car la faute de la victime est la cause exclusive du dommage. Que soutient la SAFER concernant la présence de la canalisation de gaz ?La SAFER fait également valoir que la canalisation de gaz ne pouvait être présente sans une servitude conventionnelle. Comment la société GRDF a-t-elle réagi aux arguments de la SAFER ?La société GRDF a contesté la recevabilité du moyen avancé par la SAFER, arguant qu’il était nouveau et mélangé de fait et de droit. Quel était le point de vue de la SAFER sur la recevabilité de son moyen ?Cependant, la SAFER avait déjà soutenu dans ses conclusions d’appel que la société GRDF avait commis une faute, rendant le moyen recevable. Quelles conclusions la cour a-t-elle tirées concernant les servitudes d’utilité publique ?La cour a examiné les textes de loi concernant les servitudes d’utilité publique. Elle a conclu que la constitution d’une servitude de passage pour une canalisation de distribution de gaz sur une propriété privée nécessite une déclaration préalable d’utilité publique, ainsi que le respect de formalités de notification et d’affichage. Quelles violations légales la cour d’appel a-t-elle commises selon la SAFER ?En déclarant Mme [K] seule responsable, la cour d’appel a violé ces dispositions légales. Quel est le contenu du moyen pris en sa première branche ?La SAFER fait grief à l’arrêt de condamner Mme [K] à payer à la société GRDF une certaine somme à titre de dommages-intérêts et de la condamner à relever et garantir Mme [K] de toute condamnation prononcée à son encontre. Quelles sont les conditions pour établir une servitude de passage pour une canalisation de distribution de gaz ?Les servitudes nécessaires aux ouvrages de transport et de distribution du gaz, après déclaration d’utilité publique des travaux, doivent être établies suivant les modalités prévues aux articles R. 323-7 à R. 323-14 du code de l’énergie. Quel est le rôle de la faute de la victime dans la responsabilité du gardien d’une chose ?Le gardien d’une chose instrument du dommage n’engage pas sa responsabilité lorsque la faute de la victime est la cause exclusive du dommage et est partiellement exonéré de sa responsabilité s’il prouve que la faute de la victime a contribué à son dommage. Quels articles du code civil et du code de l’énergie sont mentionnés dans le texte ?La cour d’appel a violé les articles 649, 650 et 690 du code civil, L. 433-11 et R 323-1 à R. 323-14 du code de l’énergie, ensemble l’article 1384 ancien devenu 1242, du code civil. |
FC
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 novembre 2024
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 635 FS-B
Pourvoi n° Q 21-21.303
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 NOVEMBRE 2024
La société d’aménagement foncier et d’établissement rural Provence-Alpes-Côte d’Azur, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Q 21-21.303 contre l’arrêt rendu le 17 juin 2021 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (chambre 1-8), dans le litige l’opposant :
1°/ à Mme [U] [K], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à la société Gaz réseau de distribution de France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société d’aménagement foncier et d’établissement rural Provence-Alpes-Côte d’Azur, de la SARL Le Prado – Gilbert, avocat de la société Gaz réseau de distribution de France, après débats en l’audience publique du 22 octobre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, Mmes Grandjean, Grall, M. Bosse-Platière, Mmes Pic, Oppelt, conseillers, Mmes Schmitt, Gallet, Davoine, MM. Pons, Choquet, conseillers référendaires, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 juin 2021), la société d’aménagement foncier et d’établissement rural Provence-Alpes-Côte d’Azur (la SAFER) est propriétaire de diverses parcelles agricoles.
2. Bénéficiant d’une convention d’occupation précaire sur ces terrains, Mme [K] y exploite un centre équestre.
3. Lors de l’installation d’une clôture, une canalisation souterraine de distribution de gaz, appartenant à la société Gaz réseau distribution de France (la société GRDF), a été endommagée par une pelle mécanique manoeuvrée par Mme [K].
4. La société GRDF l’a assignée en indemnisation de ses préjudices.
5. La SAFER est intervenue volontairement à l’instance et Mme [K] a demandé en cause d’appel sa garantie en cas de condamnation prononcée à son encontre.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. La SAFER fait grief à l’arrêt de condamner Mme [K] à payer à la société GRDF une certaine somme à titre de dommages-intérêts et de la condamner à relever et garantir Mme [K] de toute condamnation prononcée à son encontre, alors « que le gardien d’une chose instrument du dommage n’engage pas sa responsabilité lorsque la faute de la victime est la cause exclusive du dommage et est partiellement exonéré de sa responsabilité s’il prouve que la faute de la victime a contribué à son dommage ; que les servitudes nécessaires aux ouvrages de transport et de distribution du gaz, après déclaration d’utilité publique des travaux, doivent être établies suivant les modalités prévues aux articles R. 323-7 à R. 323-14 du code de l’énergie ; qu’en retenant, pour exclure toute faute de la société GRDF, victime du dommage causé par Mme [K] en sa qualité de gardienne de l’engin mécanique ayant endommagé une canalisation de gaz souterraine, qu’il ne pouvait lui être reproché la présence d’une canalisation de gaz dans le sous-sol de la propriété de la Safer Provence Alpes Côte d’Azur sans bénéfice d’une servitude conventionnelle dans la mesure où elle bénéficiait d’une servitude légale sans besoin d’une autorisation préalable, quand la servitude de passage de la canalisation de distribution du gaz ne pouvait être établie qu’en suivant la procédure prévue par les articles R. 323-7 à R. 323-14 du code de l’énergie, la cour d’appel a violé les articles 649, 650 et 690 du code civil, L. 433-11 et R 323-1 à R. 323-14 du code de l’énergie, ensemble l’article 1384 ancien devenu 1242, du code civil. »
Recevabilité du moyen
7. La société GRDF conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu’il est nouveau et mélangé de fait et de droit.
8. Cependant, dans ses conclusions d’appel, la SAFER soutenait que la société GRDF avait commis une faute constituant la cause exclusive de son dommage, la canalisation ne faisant l’objet d’aucune servitude, conventionnelle ou d’utilité publique, en l’absence de respect de la procédure d’autorisation préalable nécessaire pour faire passer une canalisation de gaz dans le tréfonds d’une propriété privée.
9. Le moyen, qui n’est pas nouveau, est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l’article 650, alinéa 2, du code civil, les articles L. 433-5 à L. 433-7, L. 433-10, R. 433-5, R. 433-9, R. 323-14 et R. 323-15 du code de l’énergie :
10. Selon le premier de ces textes, tout ce qui concerne les servitudes établies pour l’utilité publique ou communale est déterminé par des lois ou des règlements particuliers.
11. Selon les trois suivants, les travaux nécessaires à l’établissement et à l’entretien des ouvrages d’une concession de distribution de gaz peuvent être, sur demande du concédant ou du concessionnaire, déclarés d’utilité publique par l’autorité administrative, ce qui confère au concessionnaire le droit d’instituer des servitudes, après notification des dispositions projetées en vue de leur établissement aux propriétaires des fonds concernés par les ouvrages.
12. Il résulte des derniers que les servitudes de passage de canalisation de distribution de gaz sont établies par arrêté préfectoral, lequel doit être notifié au pétitionnaire, affiché à la mairie de chacune des communes intéressées, puis notifié par ce dernier, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à chaque propriétaire intéressé ainsi qu’à chaque occupant pourvu d’un titre régulier.
13. Il s’en déduit que, sauf accord du propriétaire du fonds servant, la constitution d’une servitude de passage pour une canalisation de distribution de gaz sur une propriété privée doit être précédée d’une déclaration préalable d’utilité publique des travaux, délivrée par l’autorité préfectorale, et qu’elle ne peut être exercée que suivant les modalités déterminées par arrêté préfectoral et après accomplissement de formalités de notification et d’affichage.
14. Pour déclarer Mme [K] seule responsable de l’entier dommage, l’arrêt retient que ni celle-ci ni la SAFER ne peuvent reprocher à la société GRDF l’absence de servitude conventionnelle, dès lors que cette dernière bénéficie d’une servitude légale d’utilité publique, dont la mise en oeuvre, s’agissant d’une canalisation de distribution de gaz, ne nécessite aucune autorisation préalable.
15. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
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