L’Essentiel : M. X, de nationalité géorgienne, a reçu un arrêté préfectoral le 26 janvier 2024, lui ordonnant de quitter le territoire français. Notifié le 8 février, il a été placé en rétention le 27 décembre 2024. Le 30 décembre, deux requêtes ont été déposées au tribunal judiciaire de Nîmes : une pour prolonger la rétention et l’autre pour la contester. Le 31 décembre, le magistrat a ordonné le maintien de M. X en rétention pour 26 jours. Après un appel le 2 janvier 2025, le tribunal a constaté des irrégularités, déclarant l’appel recevable et infirmant l’ordonnance initiale.
|
Arrêté préfectoral et notificationM. X, se disant [J] [O], de nationalité géorgienne, a reçu un arrêté préfectoral le 26 janvier 2024, lui imposant l’obligation de quitter le territoire français, notifié le 8 février 2024. Suite à cela, une décision de placement en rétention a été prise le 27 décembre 2024. Requêtes au tribunal judiciaire de NîmesLe 30 décembre 2024, deux requêtes ont été déposées au greffe du tribunal judiciaire de Nîmes : l’une par le Préfet du Tarn pour prolonger la mesure de rétention, et l’autre par M. [J] [O] pour contester cette décision. Ordonnance du magistratLe 31 décembre 2024, le magistrat a rendu une ordonnance déclarant les requêtes recevables, rejetant les exceptions de nullité, et ordonnant le maintien de M. [J] [O] en rétention pour une durée maximale de 26 jours. Cette mesure devait prendre fin le 26 janvier 2025. Appel de l’ordonnanceM. [J] [O] a interjeté appel de cette ordonnance le 2 janvier 2025. L’audience a eu lieu sans la présence du Ministère Public et du Préfet du Tarn, mais avec l’assistance d’un interprète en langue géorgienne. Arguments de M. [J] [O] et de son avocateM. [J] [O] a déclaré ignorer son obligation de quitter le territoire et a exprimé son souhait de retourner en Géorgie avec son frère, qui dépend de lui. Son avocate a soulevé plusieurs exceptions de nullité concernant la procédure de rétention, notamment des problèmes d’interprétariat et l’absence de notification au procureur de Castres. Recevabilité de l’appelL’appel a été jugé recevable, ayant été interjeté dans les délais légaux. Exceptions de nullité examinéesLe tribunal a examiné les exceptions de nullité soulevées par l’avocate de M. [J] [O]. Bien que certaines irrégularités aient été constatées, notamment l’absence d’un interprète adéquat, le tribunal a conclu que cela avait porté atteinte aux droits de M. [J] [O]. Décision finaleLa Cour d’Appel de Nîmes a déclaré l’appel recevable, a constaté que la procédure était affectée de nullité, et a infirmé l’ordonnance du tribunal judiciaire de Nîmes. Les parties ont été informées de leur droit de former un pourvoi en cassation. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de la rétention administrative selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ?La rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, notamment les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9. L’article L.741-1 précise que la rétention administrative peut être ordonnée pour les étrangers qui font l’objet d’une obligation de quitter le territoire français. Il est également stipulé que la rétention ne peut excéder une durée maximale de 90 jours, sauf exceptions prévues par la loi. De plus, l’article L.743-1 indique que la rétention doit être justifiée par des raisons précises, telles que le risque de fuite ou la nécessité de préparer l’éloignement de l’étranger. Il est important de noter que la rétention doit être effectuée dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, conformément à l’article L.743-9. En résumé, la rétention administrative doit respecter des conditions strictes, tant en termes de durée que de justification, afin de garantir les droits des étrangers concernés. Quels sont les droits de l’étranger en matière de rétention administrative ?Les droits de l’étranger en matière de rétention administrative sont énoncés dans plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, notamment les articles L.743-1 et L.743-12. L’article L.743-1 stipule que l’étranger a le droit d’être informé des raisons de sa rétention et de bénéficier d’une assistance juridique. De plus, l’article L.743-12 précise que l’étranger doit être informé de ses droits, notamment le droit de contester la mesure de rétention devant le juge. Il est également important de souligner que l’étranger a le droit d’être assisté par un interprète, si nécessaire, afin de garantir la compréhension des procédures et des décisions qui le concernent. En cas de violation de ces droits, l’article L.743-12 prévoit que le magistrat ne peut prononcer la mainlevée de la rétention que si cette violation a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger. Ainsi, les droits de l’étranger en matière de rétention administrative sont protégés par la loi, et toute irrégularité dans la procédure peut entraîner des conséquences juridiques. Quelles sont les conséquences d’une atteinte aux droits de l’étranger lors de la rétention administrative ?Les conséquences d’une atteinte aux droits de l’étranger lors de la rétention administrative sont clairement définies dans l’article L.743-12 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Cet article stipule que si une irrégularité dans la procédure de rétention a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger, le magistrat ne peut prononcer la mainlevée de la rétention que si cette atteinte est démontrée. En d’autres termes, si un étranger prouve qu’il n’a pas été informé de ses droits ou qu’il n’a pas eu accès à un interprète, cela peut constituer une base pour contester la légalité de sa rétention. De plus, si la procédure est affectée de nullité, comme cela a été le cas dans l’affaire de M. [J] [O], cela peut entraîner l’infirmation de l’ordonnance de rétention et la libération de l’étranger. Ainsi, les atteintes aux droits de l’étranger peuvent avoir des conséquences significatives, allant de la nullité de la procédure à la libération immédiate de l’individu concerné. Comment se déroule la contestation d’une décision de rétention administrative ?La contestation d’une décision de rétention administrative est encadrée par les articles L.743-21 et R.743-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Selon l’article L.743-21, l’étranger peut interjeter appel de la décision de rétention dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision. L’article R.743-10 précise que l’appel doit être formé par écrit et déposé auprès du greffe du tribunal judiciaire compétent. Il est également important de noter que l’étranger a le droit d’être assisté par un avocat lors de cette procédure, ce qui garantit une défense adéquate de ses droits. Une fois l’appel interjeté, le tribunal examine la légalité de la décision de rétention et peut décider de la maintenir ou de l’infirmer, en tenant compte des arguments présentés par l’étranger et son avocat. En résumé, la contestation d’une décision de rétention administrative suit une procédure précise, permettant à l’étranger de faire valoir ses droits devant le juge. |
N° RG 25/00003 – N° Portalis DBVH-V-B7J-JN5E
Recours c/ déci TJ Nîmes
31 décembre 2024
[O]
C/
LE PREFET DU TARN
COUR D’APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 03 JANVIER 2025
Nous, M. André LIEGEON, Conseiller à la Cour d’Appel de Nîmes, désigné par le Premier Président de la Cour d’Appel de Nîmes pour statuer sur les appels des ordonnances du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes en charge du contentieux de la rétention administrative, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l’Asile (CESEDA), assisté de Mme Céline DELCOURT, Greffière,
M. X SE DISANT [J] [O]
né le 10 Février 1988 à [Localité 2]
de nationalité Géorgienne
Vu la requête reçue au greffe du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes en charge du contentieux de la rétention administrative le 30 décembre 2024 à 12 heures 28, enregistrée sous le N°RG 24/5995 présentée par M. le Préfet du Tarn ;
Vu la requête reçue au greffe du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes en charge du contentieux de la rétention administrative le 30 décembre 2024 à 17 heures 51, enregistrée sous le N°RG 24/5995 présentée par M. [J] [O];
Vu l’ordonnance rendue le 31 Décembre 2024 à 14 heures 40 par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes en charge du contentieux de la rétention administrative, qui a :
* Déclaré les requêtes recevables ;
* Ordonné la jonction des requêtes ;
* Rejeté les exceptions de nullité soulevées ;
* Rejeté la requête en contestation de placement en rétention;
* Ordonné pour une durée maximale de 26 jours commençant 4 jours après la notification de la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, de M. X SE DISANT [J] [O] ;
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l’expiration d’un délai de 26 jours à compter du 31 décembre 2024 à 18 heures 00,
Vu l’appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur X SE DISANT [J] [O] le 02 Janvier 2025 à 10 heures 34 ;
Vu l’absence du Ministère Public près la Cour d’appel de Nîmes régulièrement avisé ;
Vu l’absence du Préfet du Tarn, régulièrement convoqué ;
Vu l’assistance de Madame [C] [W] interprète en langue georgienne inscrite sur la liste des experts de la cour d’appel de Nîmes ;
Vu la comparution de Monsieur X SE DISANT [J] [O], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Patricia PERRIEN, avocat de Monsieur X SE DISANT [J] [O] qui a été entendu en sa plaidoirie ;
Monsieur [J] [O] a reçu notification le 8 février 2024 d’un arrêté préfectoral en date du 26 janvier 2024 lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai.
Par requête du 30 décembre 2024, le Préfet du Tarn a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes d’une demande en prolongation de la mesure.
Par ordonnance prononcée le 31 décembre 2024 à 14 heures 40, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [J] [O] et a ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-six jours.
Monsieur [J] [O] a interjeté appel de cette ordonnance le 2 janvier 2025 à
A l’audience, Monsieur [J] [O] déclare qu’il ignorait qu’il était dans l’obligation de quitter le territoire français. Il ajoute que son frère âgé de 32 ans n’est pas autonome et totalement dépendant de lui. Il souhaite repartir dans son pays avec celui-ci et s’oppose en conséquence au maintien en rétention.
In limine litis, son avocate soulève les moyens de nullité suivants :
– Aucun certificat de conformité n’est produit alors que l’OPJ a signé les procès-verbaux de manière électronique ;
– Lorsque la préfecture prend sa décision de placement en rétention administrative, elle doit aviser les procureurs ; or dans le cas présent, seul le procureur de Nîmes a été avisé, pas le procureur de Castres, ce qui constitue une nullité d’ordre public ;
– Il existe un problème d’interprétariat dans la mesure où un interprète en russe est intervenu en garde à vue, alors que Monsieur [J] [O] est géorgien, de sorte qu’il lui était difficile de comprendre ce qui était dit ; de plus, cette intervention s’est faite par téléphone ;
– La décision du préfet manque de base légale ; Monsieur [J] [O] a formé appel de la décision de rejet de sa demande d’asile du mois de janvier 2024 ; or, il a sollicité qu’il soit procédé à un réexamen de sa demande de sorte qu’il ne pouvait être placé en rétention administrative mais aurait dû bénéficier d’une assignation à résidence.
Sur le fond, elle fait valoir que M. [J] [O] est aidant et s’occupe de son frère qui n’est pas autonome.
Monsieur le Préfet requérant n’est pas représenté.
SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL
L’appel interjeté par Monsieur [J] [O] à l’encontre de l’ordonnance du magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Nîmes dûment notifiée a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21 et R.743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Il est donc recevable.
SUR LES EXCEPTIONS DE NULLITÉ
L’article L. 743-12 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose : « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi d’une demande sur ce motif ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger ».
Le certificat de conformité prévu à l’article A 53-8 du code de procédure pénale ne figure pas dans le dossier pénal. Toutefois, cette absence ne peut entraîner la nullité que s’il est démontré qu’elle a eu pour conséquence de porter atteinte substantiellement aux droits de Monsieur [J] [O]. Or une telle atteinte n’est ni alléguée, ni démontrée, de sorte que le moyen de nullité soulevé est inopérant.
Monsieur [J] [O] a été placé en rétention administrative le 27 décembre 2024 à 18 heures, à l’issue de sa garde à vue. Du procès-verbal d’avis à magistrat du 27 décembre 2024 à 17 heures 45, il ressort que le magistrat du parquet de Castres a été informé de la mise en rétention à venir de Monsieur [J] [O], lequel est arrivé au centre de rétention de [Localité 1] à 21 heures. Selon le procès-verbal figurant à la procédure, le magistrat du parquet de Nîmes a été informé une première fois à 18 heures, puis à 21 heures 10, après l’arrivée du retenu au centre de rétention administrative. Aussi, ce moyen de nullité n’est pas fondé.
Monsieur [J] [O] a signé son procès-verbal d’audition et le procès-verbal de notification de ses droits, alors qu’il était assisté d’un interprète en langue russe. Or, il est établi que l’intéressé est géorgien de sorte qu’il est manifeste que celui-ci n’a pas été mis en situation de saisir exactement les informations transmises. A cet égard, il sera d’ailleurs observé qu’à l’audience, celui-ci est assisté d’un interprète en langue géorgienne qui a confirmé que cette langue est différente du russe. Il s’ensuit qu’il y a nécessairement eu une atteinte aux droits de Monsieur [J] [O].
En conséquence, la procédure est affectée de nullité.
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9 ; R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,
Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l’application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux;
CONSTATANT qu’aucune salle d’audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n’est disponible pour l’audience de ce jour ;
DÉCLARONS recevable l’appel interjeté par Monsieur X SE DISANT [J] [O] ;
DISONS que la procédure est affectée de nullité;
INFIRMONS l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l’article R.743-20 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation 5 quai de l’Horloge 4ème étage, 75055 PARIS CEDEX 05.
Fait à la Cour d’Appel de Nîmes,
Le 03 Janvier 2025 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
‘ Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 1] à M. X SE DISANT [J] [O], par l’intermédiaire d’un interprète en langue georgienne.
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :
– Monsieur X SE DISANT [J] [O], par le Directeur du CRA de [Localité 1],
– Me Patricia PERRIEN, avocat
,
– Le Préfet du Tarn
,
– Le Directeur du CRA de [Localité 1],
– Le Ministère Public près la Cour d’Appel de Nîmes,
– Le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nîmes.
Laisser un commentaire