Partage et évaluation des biens dans un cadre de séparation patrimoniale.

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Partage et évaluation des biens dans un cadre de séparation patrimoniale.

L’Essentiel :

Contexte de l’affaire

Une partenaire d’un pacte civil de solidarité et un partenaire, ayant vécu en concubinage et eu deux enfants, ont acquis plusieurs biens immobiliers en indivision, dont une maison et un appartement. Leur relation s’étant terminée, des complications sont survenues concernant le partage de leurs biens.

Dissolution du pacte civil de solidarité

Le pacte a été dissous par une déclaration conjointe, mais les parties n’ont pas réussi à s’accorder, entraînant une assignation en partage judiciaire.

Demandes de partage judiciaire

La partenaire a assigné le partenaire devant le juge aux affaires familiales, demandant l’ouverture des opérations de partage judiciaire et la désignation d’un notaire.

Contexte de l’affaire

Madame, en tant que partenaire d’un pacte civil de solidarité, et Monsieur, également partenaire, ont vécu en concubinage et ont eu deux enfants. Ils ont acquis plusieurs biens immobiliers en indivision, dont une maison et un appartement, tout en souscrivant des prêts immobiliers pour financer ces acquisitions. Leur relation a pris fin, entraînant des complications concernant le partage de leurs biens.

Acquisitions immobilières

Le couple a acquis une maison d’habitation en pleine propriété indivise, avec des parts respectives de 58% pour la partenaire et 42% pour le partenaire. Ils ont également acquis une parcelle de terrain et un appartement, tous deux en indivision, avec des pourcentages de propriété similaires. Ces biens ont été financés par des prêts et des fonds personnels.

Dissolution du pacte civil de solidarité

Le pacte civil de solidarité a été dissous par une déclaration conjointe, et un notaire a été désigné pour procéder aux opérations de partage amiable. Cependant, les parties n’ont pas réussi à parvenir à un accord, ce qui a conduit à une assignation en partage judiciaire.

Demandes de partage judiciaire

La partenaire a assigné le partenaire devant le juge aux affaires familiales, demandant l’ouverture des opérations de partage judiciaire. Elle a formulé plusieurs demandes, notamment la désignation d’un notaire pour procéder au partage, la fixation de la valeur des biens immobiliers, et le remboursement de certaines sommes qu’elle estime dues par le partenaire.

Réclamations financières

La partenaire a revendiqué des créances pour des dépenses engagées pour l’amélioration et la conservation des biens indivis, ainsi que pour des prélèvements effectués sur un compte commun. Elle a également demandé une indemnité d’occupation pour l’usage exclusif du logement familial depuis la séparation.

Réponses du partenaire

Le partenaire a contesté les évaluations des biens et a proposé des montants différents. Il a également demandé que la partenaire soit redevable d’indemnités d’occupation pour l’usage exclusif du logement et du véhicule. Il a reconnu que les parties avaient des créances mutuelles mais a contesté les montants réclamés par la partenaire.

Décision du tribunal

Le tribunal a ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage judiciaire des intérêts patrimoniaux des parties. Il a désigné un notaire pour superviser ces opérations et a fixé la valeur des biens immobiliers et du véhicule. L’indemnité d’occupation due par la partenaire a été déterminée, et plusieurs demandes de créances ont été examinées, avec des décisions favorables ou défavorables selon les cas.

Conclusion

Le tribunal a statué sur les différentes demandes des parties, en ordonnant le partage judiciaire des biens et en fixant des valeurs et des indemnités. Les parties ont été déboutées de certaines de leurs demandes, et le tribunal a rappelé que le jugement est exécutoire à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences juridiques de la dissolution d’un pacte civil de solidarité sur le partage des biens ?

La dissolution d’un pacte civil de solidarité entraîne des conséquences patrimoniales importantes, notamment en matière de partage des biens acquis durant la vie commune. Selon l’article 515-1 du Code civil, le pacte civil de solidarité est un contrat qui organise la vie commune de deux personnes. En l’absence de clause contraire, les partenaires sont soumis au régime de séparation des biens.

En cas de rupture, comme le stipule l’article 840 du Code civil, le partage des biens peut être demandé en justice lorsque les partenaires ne parviennent pas à un accord amiable. Cela signifie que si les partenaires ne s’entendent pas sur la répartition des biens, le juge aux affaires familiales peut être saisi pour statuer sur les conséquences patrimoniales de la rupture.

Il est également précisé dans l’article 815 du Code civil que nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision, ce qui permet à chaque partenaire de demander le partage de l’indivision à tout moment, sauf si un jugement ou une convention en dispose autrement.

Ainsi, la dissolution du pacte civil de solidarité ouvre la voie à un partage judiciaire des biens, si les parties ne parviennent pas à un accord amiable.

Comment se déroule le partage judiciaire des biens en indivision ?

Le partage judiciaire des biens en indivision est régi par les articles 815 et suivants du Code civil, ainsi que par les articles 1361 et 1364 du Code de procédure civile. Lorsqu’un partage amiable n’est pas possible, comme dans le cas présent, l’une des parties peut saisir le juge aux affaires familiales pour ordonner l’ouverture des opérations de partage.

L’article 1361 du Code de procédure civile stipule que le tribunal ordonne le partage, s’il peut avoir lieu, ou la vente par licitation du bien, et désigne un notaire chargé de dresser l’acte de partage. L’article 1364 précise que si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations.

Dans le cas présent, le tribunal a ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage judiciaire des intérêts patrimoniaux des parties, en désignant un notaire pour superviser ces opérations. Cela implique que le notaire devra établir un état liquidatif, dresser les comptes entre les copartageants, et déterminer la masse partageable.

Il est important de noter que le notaire a pour mission de s’assurer que toutes les créances et dettes des parties sont prises en compte dans le partage, conformément aux dispositions des articles 1373 à 1375 du Code de procédure civile.

Quelles sont les règles concernant l’indemnité d’occupation dans le cadre d’une indivision ?

L’indemnité d’occupation dans le cadre d’une indivision est régie par l’article 815-9 du Code civil, qui stipule que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires. L’indivisaire qui use et jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

Dans le cas présent, il a été établi que l’occupation exclusive du bien immobilier par l’un des indivisaires entraîne le paiement d’une indemnité d’occupation. L’indemnité est due même en l’absence d’occupation effective des lieux, dès lors que cette occupation est privative.

Le tribunal a constaté que l’occupation par l’un des indivisaires a été exclusive à partir du 1er mars 2023, date à laquelle les serrures ont été changées. Par conséquent, l’indemnité d’occupation a été fixée à 1280 euros par mois, en tenant compte de la valeur locative du bien et d’un abattement usuel de 20%.

Il est également précisé que l’indemnité d’occupation est due à l’indivision et non à l’autre indivisaire, ce qui signifie que le montant de l’indemnité doit être versé à la masse indivise.

Quelles sont les conditions pour qu’un indivisaire puisse revendiquer une créance pour des dépenses effectuées sur un bien indivis ?

Les conditions pour qu’un indivisaire puisse revendiquer une créance pour des dépenses effectuées sur un bien indivis sont énoncées dans l’article 815-13 du Code civil. Cet article stipule que lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation.

Pour qu’il y ait créance, il faut que la dépense ait été financée sur les deniers personnels d’un indivisaire et qu’elle n’ait pas présenté d’intérêt uniquement pour l’indivisaire qui l’a faite. Les dépenses d’amélioration, qui augmentent la valeur du bien, peuvent donner lieu à une créance, tandis que les dépenses d’entretien, qui ne constituent pas une amélioration, n’ouvrent pas droit à une indemnité.

Dans le cas présent, il a été établi que les travaux d’aménagement des combles, financés par l’un des indivisaires, ont entraîné une plus-value pour le bien. Par conséquent, la créance a été fixée à 40 120 euros au titre des travaux d’amélioration, car ces travaux ont effectivement augmenté la valeur du bien.

En revanche, les demandes de créance pour des dépenses d’entretien, comme les travaux de toiture, ont été déboutées, car ces dépenses ne constituaient pas des améliorations au sens de l’article 815-13 du Code civil.

– N° RG 23/02643 – N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDDZ6
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MEAUX

1ère Chambre Civile
Section 5 – Contentieux

N° RG 23/02643 – N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDDZ6
Minute n° 24/

JUGEMENT du 22 NOVEMBRE 2024

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE

Madame [O] [A] [G] [R]
[Adresse 14]
[Localité 22]

représentée par Maître Solange IEVA-GUENOUN, avocat au barreau de Meaux (SCP IEVA-GUENOU PAIN) ;

DEFENDEUR

Monsieur [X] [C] [F] [Y]
[Adresse 13]
[Localité 18]

représenté par Maître Valérie ROVEZZO, avocat au barreau de Meaux (SCP BAHUCHET-ESTIENNE-ROVEZZO) ;

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats :

Président : M. Renaud NOIROT, juge
Assesseur : Mme Cécile VISBECQ, juge

Statuant en double juges rapporteurs et, en l’absence d’opposition des parties, ont rendu compte des plaidoiries au tribunal dans le délibéré composé de :

Président : M. Renaud NOIROT, juge
Assesseurs : Mme Cécile VISBECQ, juge
Mme Laura GIRAUDEL, juge

GREFFIER : Lors des débats et au prononcé : Mme Sandrine FANTON

– N° RG 23/02643 – N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDDZ6
DÉBATS

A l’audience publique du 27 septembre 2024.

JUGEMENT

– contradictoire ;

– rendu publiquement, en premier ressort, par mise à disposition au greffe à la date du délibéré, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Renaud NOIROT, président, et par Sandrine FANTON greffier, lors du prononcé ;

* * * *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS

Madame [O] [R], née le [Date naissance 4] 1974 à [Localité 24] (78), et Monsieur [X] [Y], né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 20] (49), ont vécu en concubinage.

Deux enfants sont issus de leur relation :
– [J] [Y], née le [Date naissance 3] 2003 à [Localité 35] (92),
– [K] [Y], née le [Date naissance 1] 2004 à [Localité 34] (92).

Ils ont conclu un pacte civil de solidarité enregistré le 21 juin 2018 par l’officier d’état civil de la commune de [Localité 22] (77) aux termes duquel ils ont opté pour le régime légal de la séparation des patrimoines.

Selon acte authentique reçu par Maître [S] [E], notaire à [Localité 28] (77), le 12 juillet 2006, le couple a acquis la pleine propriété indivise à concurrence de 58% pour Madame [O] [R] et de 42% pour Monsieur [X] [Y], d’une maison d’habitation avec jardin située [Adresse 14] à [Localité 22] cadastrée Section AH N° [Cadastre 17] Lieudit [Adresse 14] d’une surface de 1a 73ca, au prix de 270 000 euros. Le couple a souscrit un prêt immobilier pour financer ce bien qui est devenu le domicile familial.

Selon acte authentique reçu par Maître [W] [V], notaire à [Localité 28] (77), le 19 septembre 2012, le couple a acquis la pleine propriété indivise à concurrence de 58% pour Madame [O] [R] et de 42% pour Monsieur [X] [Y], d’une parcelle située [Adresse 14] à [Localité 22] cadastrée Section AH N° [Cadastre 9] Lieudit [Adresse 14] d’une surface de 45ca, au prix de 1 euros financé par des fonds personnels.

Selon acte authentique reçu par Maître [W] [V], notaire à [Localité 28] (77), le 29 mai 2018, le couple a acquis la pleine propriété indivise à concurrence de 67% pour Madame [O] [R] et de 33% pour Monsieur [X] [Y], d’un appartement de type 3 pièces et d’une place de stationnement constituant les lots 141 et 480 de l’ensemble immobilier situé dans la [Adresse 36] à [Localité 22] et cadastré :
– Section ZB N° [Cadastre 10] Lieudit [Adresse 5] d’une surface de 13a 49ca,
– Section ZB N°[Cadastre 11] Lieudit [Adresse 36] d’une surface de 25a 26ca,
– Section ZB N°[Cadastre 12] Lieudit [Adresse 36] d’une surface de 8ca,
au prix de 205 000 euros financé à concurrence de 82 388,22 euros par des fonds personnels de Madame [O] [R] et d’un prêt immobilier de 159 350 euros remboursé par moitié par les parties.

Selon l’attestation établie par Maître [P] [D], notaire à [Localité 22] (77), le 21 octobre 2022, Madame [O] [R] et Monsieur [X] [Y] ont vendu un appartement de type 3 pièces et une place de stationnement constituant les lots n° 22 et 85 de l’ensemble immobilier situé [Adresse 15] à [Localité 22] et cadastré Section AB N° [Cadastre 8] Lieudit [Adresse 6] d’une surface de 24a 68ca qu’ils avaient acquis antérieurement.

La déclaration conjointe de dissolution du pacte civil de solidarité a été enregistrée le 7 décembre 2022 par l’officier d’état civil de la commune de [Localité 22] (77).

Maître [P] [D] a été désignée pour procéder aux opérations de partage amiable, qui n’ont pu aboutir.

Par acte délivré le 1er juin 2023, Madame [O] [R] a fait assigner Monsieur [X] [Y] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Meaux aux fins de partage judiciaire.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 avril 2024, Madame [O] [R] demande, au visa des articles 815 et suivants et 840 du code civil, 1364 du code de procédure civile, de :
– juger ses demandes recevables et bien fondées et y faisant droit,
– ordonner l’ouverture des opérations de partage des intérêts patrimoniaux des parties et de l’indivision existant entre elles,
– désigner tel notaire, qu’il plaira au tribunal à frais partagés, aux fins de procéder aux opérations de partage et de dresser un acte constatant le partage,
– constater qu’elle se propose de racheter les parts de Monsieur [X] [Y] de biens indivis,
– constater que l’actif de l’indivision est composé de deux biens immobiliers,
– fixer la valeur du bien sis à [Localité 22] [Adresse 14] à la somme de 460 000 euros,
– fixer la valeur du bien sis à [Localité 22] [Adresse 7] à la somme de 225 000 euros,
– fixer la valeur ARGUS du véhicule TOYOTA à la somme de 11 000 euros,
– juger que le compte sur LIVRET [21] a été exclusivement alimenté par elle et condamner Monsieur [X] [Y] à lui rembourser la somme indûment prélevée, soit 6 990 euros,
– fixer sa créance à la somme de 90 000 euros au titre de la plus-value apportée au bien sis [Localité 22], [Adresse 14] grâce aux travaux d’aménagement des combles réglés par elle,
– fixer son compte d’administration à la somme de 1425,21 euros au titre des frais réglés pour le compte de l’indivision,
– juger qu’elle n’a pas un usage privatif et exclusif du bien sis à [Localité 22], [Adresse 14] et juger qu’elle n’est redevable d’aucune indemnité d’occupation,
– à titre subsidiaire, fixer l’indemnité d’occupation à compter du changement des serrures, soit le 1er mars 2023, à la somme de 1087,50 euros par mois, après abattement de 25 % et dire que seuls 42% resteront à sa charge,
– juger que le compte [21] appartement [Adresse 23] n° [XXXXXXXXXX026] lui sera attribué, étant précisé qu’elle entend conserver le bien,
– débouter Monsieur [X] [Y] de toutes ses conclusions, fins et prétentions,
– condamner Monsieur [X] [Y] à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour les préjudices financiers subis par le retard à liquider l’indivision,
– condamner Monsieur [X] [Y] à lui payer la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Monsieur [X] [Y] aux entiers dépens de la présente procédure,
– juger que les dépens pourront être recouvrés par Maître Solange IEVA-GUENOUN conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– juger que les frais de partage seront répartis par moitié en les indivisaires,
– juger n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Madame [O] [R] sollicite l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage judiciaire faute pour les parties d’avoir pu parvenir à un partage amiable et ce malgré les démarches accomplies auprès de deux notaires.

Elle indique que le patrimoine indivis est composé notamment :
– du logement familial qu’elle demande d’évaluer à la somme de 460 000 euros compte tenu des estimations qu’elle produit,
– d’un appartement loué qu’elle demande d’évaluer à la somme de 225 000 euros compte tenu des estimations qu’elle produit,
– d’un véhicule de marque Toyota qu’elle demande d’évaluer à la somme de 11 000 euros au regard de sa cote Argus.

Elle soutient être créancière à l’égard de Monsieur [X] [Y] au titre d’un prélèvement de 6990 euros effectué par celui-ci sur son compte sur livret [21]. Elle précise que ce compte a été alimenté essentiellement au moyen de ses deniers personnels.

Elle fait valoir en outre des créances à l’égard de l’indivision pour avoir réglé seule les cotisations de l’association syndicale des copropriétaires de 2023 et de 2024, les cotisations d’assurance du logement familial de 2023 et de 2024, la facture de l’entretien de la toiture, la facture du métrage loi Carrez et les travaux d’amélioration du logement familial. Elle demande que sa créance au titre des travaux soit évaluée en fonction de la plus-value réalisée et non au montant nominal des travaux.

Elle s’oppose à toute indemnité d’occupation relative au véhicule Toyota. Elle reconnaît en avoir l’usage mais précise que celui-ci n’est pas exclusif, Monsieur [X] [Y] refusant de lui remettre les clés dont il dispose.

Concernant le logement familial, elle reconnaît l’habiter seule depuis le départ de Monsieur [X] [Y] en juillet 2022 mais souligne que cet usage n’est pas exclusif, Monsieur [X] [Y] refusant de lui remettre les clés dont il dispose. Elle ajoute qu’elle a changé les serrures en mars 2023 et demande de fixer l’indemnité d’occupation à la somme de 1087,50 euros par mois à compter de cette date sur la base des estimations de la valeur locative produites et d’un abattement de 25% en raison de la nature du bien, du caractère précaire de l’occupation et des relations entre les coïndivisaires. Elle demande en outre de limiter le montant de l’indemnité d’occupation à 42% de sa valeur correspondant à la quote-part de Monsieur [X] [Y] dans le bien.

Enfin, elle considère avoir subi plusieurs préjudices financiers compte tenu du comportement de Monsieur [X] [Y]. Elle précise que celui-ci a retardé les opérations de partage en s’opposant aux propositions amiables effectuées dès la vente de l’appartement [Adresse 33] à [Localité 22] en octobre 2022. Elle sollicite la somme de 5000 euros en réparation de ses préjudices.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2024, Monsieur [X] [Y] demande de :
– ordonner l’ouverture des opérations de partage des intérêts patrimoniaux des parties et de l’indivision existant elles,
– désigner tel notaire qui plaira au tribunal aux fins de procéder aux opérations de partage et de dresser un acte le constatant,
– constater que Madame [O] [R] se propose de racheter ses parts de biens communs indivis,
– fixer la valeur du bien sis à [Localité 22] [Adresse 14] à la somme de 500 000 euros,
– fixer la valeur du bien sis à [Localité 22] [Adresse 7] à la somme de 250 000 euros,
– fixer les indemnités d’occupation dues par Madame [O] [R] aux sommes de :
* 1550 euros par mois au titre de sa jouissance exclusive du pavillon indivis à compter du 1er juillet 2022,
* 500 euros par mois au titre de sa jouissance exclusive du véhicule Toyota à compter du 1er juillet 2022,
– débouter Madame [O] [R] de l’ensemble de ses autres demandes,
– condamner Madame [O] [R] à la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Madame [O] [R] aux entiers dépens de la présente procédure,
– dire que les dépens seront recouvrés directement par Maître Valérie ROVEZZO conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Monsieur [X] [Y] ne s’oppose pas aux opérations de comptes, liquidation et partage judiciaire.

Il s’oppose en revanche sur la valeur des biens constituant le patrimoine indivis, indiquant qu’au regard des estimations qu’il produit, le logement familial vaut 500 000 euros et l’appartement 250 000 euros. Il ajoute que les parties s’étaient accordées sur une valeur de 15 000 pour le véhicule et demande que cette somme soit retenue.

Concernant la créance revendiquée par Madame [O] [R] au titre du prélèvement effectué sur le compte sur livret [21], il expose que ce compte était alimenté par le couple et servait à approvisionner le compte joint pour payer les charges du ménage. Il ajoute que chacune des parties a reçu environ la moitié du solde du compte le 20 juin 2022.

Il reconnaît que Madame [O] [R] a réglé les travaux d’aménagement des combles du logement familial mais conteste le montant de l’indemnisation due à ce titre. Il explique qu’elle ne démontre pas que les 90 000 euros correspondent à la valeur de la surface créée et qu’elle ne peut revendiquer que le montant de la dépense faite.

S’agissant du compte d’administration de Madame [O] [R], il fait valoir que les montants sollicités ne sont pas justifiés, correspondent en outre aux charges du ménage et que les biens auxquels ils se rapportent ne sont pas identifiables.

Il considère que Madame [O] [R] est redevable d’une indemnité d’occupation relative au logement familial à compter du 1er juillet 2022, date à laquelle il a quitté ce logement. Il indique, au vu des estimations produites, que la valeur locative est de 1550 euros par mois. Il rappelle que l’abattement usuel pour compenser le caractère précaire de l’occupation est de 20% et non de 25%. Concernant le véhicule, il sollicite une indemnité d’occupation de 500 euros par mois à compter du 1er juillet 2022.

Il conteste enfin avoir commis une faute dans le cadre des opérations amiables de partage et soutient que Madame [O] [R] ne justifie pas de ses préjudices. Il demande dès lors que celle-ci soit déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures susvisées des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens.

La clôture a été ordonnée le 22 avril 2024.

L’affaire a été évoquée à l’audience de plaidoiries du 27 septembre 2024 et mise en délibéré au 22 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il convient de rappeler qu’en application des articles 515-1 et suivants du code civil, le pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes pour organiser leur vie commune. Les partenaires sont liés, à défaut de clause contraire, au régime de séparation des biens. Ils peuvent toutefois soumettre, dans le cadre d’une convention, les biens qu’ils acquièrent au régime de l’indivision.

Les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation des droits et obligations résultant pour eux du pacte civil de solidarité. A défaut d’accord, le juge aux affaires familiales statue sur les conséquences patrimoniales de la rupture, sans préjudice de la réparation du dommage éventuellement subi.

Lorsque les partenaires ont plusieurs biens immobiliers en indivision, l’article 839 du code civil permet de procéder à un partage amiable unique.

Sur la demande d’ouverture des opérations de partage judiciaire et de désignation d’un notaire :

En application de l’article 815 du code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut-être toujours provoqué, à moins qu’il y ait été sursis par jugement ou convention.

L’article 840 de ce même code ajoute que le partage est fait en justice lorsque l’un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s’il s’élève des contestations sur la manière d’y procéder ou de le terminer ou lorsque le partage amiable n’a pas été autorisé ou approuvé dans l’un des cas prévus aux articles 836 et 837.

En l’espèce, les parties ne sont pas parvenues à s’accorder sur un partage amiable global de leurs intérêts pécuniaires et patrimoniaux, malgré les démarches entreprises par les parties auprès d’un notaire, attestées par les pièces versées aux débats par Madame [O] [R].

Il convient en conséquence d’ordonner l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage judiciaire des intérêts patrimoniaux des parties selon les modalités précisées au dispositif.

Il ne sera pas constaté que Madame [O] [R] propose de racheter les parts de Monsieur [X] [Y], cette demande ne constituant pas une prétention au sens de l’article 4 du code de procédure civile.

Selon l’article 1361 du code de procédure civile, le tribunal ordonne le partage, s’il peut avoir lieu, ou la vente par licitation du bien, et désigne un notaire chargé de dresser l’acte de partage.

L’article 1364 du même code précise que si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations. Le notaire est choisi par les copartageants et, à défaut d’accord, par le tribunal.

En l’espèce, la complexité des opérations à venir, qui devront prendre en compte diverses créances dues à l’indivision ou par l’indivision dont l’actif se compose de deux biens immobiliers justifient la désignation d’un notaire sous le contrôle d’un juge commis.

Les parties ne s’étant pas mises d’accord sur la désignation d’un notaire, il convient de nommer Maître [B] [L], notaire à [Localité 25] (77).

Il sera rappelé que le notaire désigné par le tribunal a pour mission conformément aux dispositions de l’article 1368 du code de procédure civile de dresser un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir.

L’esprit de la loi, tel qu’il résulte des articles 1373 à 1375 du code de procédure civile, n’est pas de faire trancher par le juge, au stade de l’ouverture des opérations, des contestations isolées en préjugeant des opérations de liquidation partage qui forment un tout. La présente juridiction n’a en effet pas vocation à effectuer une pré-liquidation des droits respectifs des parties, une telle mission incombant au notaire saisi dans les conditions fixées par les articles 1364 et suivants du code de procédure civile. Ce n’est qu’en cas de désaccord des copartageants sur le projet d’acte liquidatif dressé par le notaire commis, que le tribunal, auquel ce projet, ainsi qu’un procès-verbal des dires respectifs des parties seront transmis, statuera sur l’ensemble des désaccords persistants.

Néanmoins, il peut s’avérer opportun, en dehors du cadre posé par les dispositions précitées, de trancher des contestations, notamment des contestations de principe, dès lors que les parties en ont débattu de façon complète, et que la décision sur ce point n’est pas susceptible de nuire à la cohérence des opérations à venir.

Sur la valeur des biens indivis :

En l’espèce, les parties s’opposent sur la valeur vénale des biens immobiliers et du véhicule indivis.

La fixation de la valeur vénale d’un bien ne présente d’intérêt que dans le cadre de son attribution à l’un des copartageants, ou de l’appréciation par la juridiction du montant d’une éventuelle indemnité d’occupation et de la mise à prix de l’immeuble dans le cadre de sa potentielle licitation judiciaire.

* Concernant le bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 22] (77) :

En l’absence de demande d’attribution préférentielle, d’indemnité d’occupation ou de licitation de l’appartement sis [Adresse 7] à [Localité 22] (77), il n’y a pas lieu de statuer sur sa valeur vénale. Celle-ci sera établie dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage judiciaire devant le notaire désigné à cette fin.

* Concernant le bien immobilier sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) :

Madame [O] [R] demande de fixer la valeur du bien à la somme de 460 000 euros compte tenu des évaluations produites :
– estimation de l’agence [19] du 8 janvier 2022 : entre 450 000 et 470 000 euros,
– estimation de l’agence [32] du 3 mars 2023 : entre 460 000 et 470 000 euros,
– estimation du site SE LOGER le 27 décembre 2023 : 458 300 euros.

Monsieur [X] [Y] s’y oppose et propose de fixer la valeur du bien à la somme de 500 000 euros compte tenu des évaluations produites :
– estimation du site MEILLEURSAGENTS du 5 juin 2023 : entre 461 069 et 539 081 euros,
– estimation du site MEILLEURSAGENTS du 21 décembre 2023 : entre 470 058 et 552 919 euros.

Il résulte des débats et des pièces produites par les parties, que le bien est une maison d’environ 115 m2 sur un terrain de 218 m2. Elle comprend un salon-séjour et cinq chambres. Elle se situe à [Localité 22] dans un quartier calme à proximité immédiate du centre ville.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, de la situation géographique du bien, des caractéristiques du bien et son environnement, et des conditions économiques de marché, il convient de fixer la valeur vénale du bien immobilier à la somme de 480 000 euros.

* Concernant le véhicule Toyota :

Madame [O] [R] demande de fixer la valeur du bien à la somme de 11 000 euros compte tenu de l’évaluation Argus du 2 novembre 2022 versée aux débats.

Monsieur [X] [Y] s’y oppose et propose de fixer la valeur du bien à la somme de 15 000 euros conformément à l’accord des parties. Il ne mentionne pas les pièces à l’appui de sa demande, de sorte que la preuve de cet accord n’est pas apportée.

En conséquence, il convient de fixer la valeur vénale du véhicule à la somme de 11 000 euros.

Sur l’indemnité d’occupation :

Aux termes de l’article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l’effet des actes régulièrement passés au cours de l’indivision. L’indivisaire qui use et jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

relative au bien immobilier sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) :

* Sur le principe et le point de départ de l’indemnité d’occupation du bien indivis :

L’existence de l’indemnité d’occupation suppose la jouissance exclusive du bien indivis par l’un seulement des indivisaires, cette jouissance entraînant une impossibilité de droit ou de fait, pour les coïndivisaires, d’user de la chose.

L’utilisation du bien indivis par les autres indivisaires doit ainsi être exclue par l’occupation privative. L’indemnité est due même en l’absence d’occupation effective des lieux, dès lors que cette occupation est privative.

Il ressort des pièces produites que Madame [O] [R] occupe le bien immobilier depuis la séparation du couple en juillet 2022. Toutefois, il ressort du courriel adressé le 1er mars 2023 par Monsieur [X] [Y] que celui-ci disposait des clés de ce logement puisqu’il a écrit « je vous remettrai les clés de la maison lors de la signature du rachat de mes parts ». Madame [O] [R] indique avoir changé les serrures du logement le 1er mars 2023. L’occupation est dès lors exclusive à compter de cette date et non du 1er juillet 2022.

Madame [O] [R] est donc redevable d’une indemnité d’occupation à compter du 1er mars 2023.

* Sur le montant de l’indemnité d’occupation :

Madame [O] [R] indique que la valeur locative du bien est de 1450 euros compte tenu des estimations produites :
– agence [19] le 2 mars 2023 : entre 1500 et 1600 euros par mois,
– agence [27] : entre 1300 et 1400 euros par mois.
Elle demande d’appliquer un abattement de 25% en raison de la nature du bien, du caractère précaire de l’occupation et des relations entre les indivisaires et considère dès lors que l’indemnité est de 1087,50 euros par mois.
Elle sollicite enfin de retenir uniquement 42% de cette somme puisqu’elle est propriétaire à hauteur de 58% et Monsieur [X] [Y] de 42%.

Monsieur [X] [Y] propose quant à lui de fixer le montant de l’indemnité d’occupation à 1550 euros par mois après abattement usuel de 20% compte tenu de l’estimation du site MEILLEURS AGENTS qui fixe la valeur locative moyenne du bien à 1889 euros par mois.

Compte tenu de la précarité de l’occupation, des valeurs locatives et vénales du bien produites par les parties, des conditions économiques du marché, de la situation géographique et des caractéristiques du bien, il convient de retenir une valeur locative de 1600 euros par mois et d’appliquer un abattement usuel de 20%, la nature du bien et les relations des parties étant indifférents pour apprécier cette compensation. L’indemnité d’occupation mensuelle due à l’indivision par Madame [O] [R] sera donc fixée à la somme de 1280 euros.

Madame [O] [R] est donc redevable à l’indivision d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1280 euros à compter du 1er mars 2023.

Il n’y a pas lieu de dire que la charge revenant à Madame [O] [R] est de 42% de cette indemnité, la créance d’indemnité d’occupation étant détenue par l’indivision et non par Monsieur [X] [Y].

relative au véhicule Toyota :

* Sur le principe et le point de départ de l’indemnité d’occupation du bien indivis :

L’existence de l’indemnité d’occupation suppose la jouissance exclusive du bien indivis par l’un seulement des indivisaires, cette jouissance entraînant une impossibilité de droit ou de fait, pour les coïndivisaires, d’user de la chose.

L’utilisation du bien indivis par les autres indivisaires doit ainsi être exclue par l’occupation privative. L’indemnité est due même en l’absence d’occupation effective du bien, dès lors que cette occupation est privative.

Il résulte des débats et des pièces produites par les parties que Madame [O] [R] a conservé le véhicule et l’utilise seule depuis la séparation du couple. Toutefois, il ressort du courriel adressé le 1er mars 2023 par Monsieur [X] [Y] que celui-ci dispose des clés du véhicule et ne les a pas restituées. Il a ainsi écrit « je vous remettrai les clés de la maison lors de la signature du rachat de mes parts. Ainsi que celle de la voiture et seulement si je reçois le virement concernant le CHR la veille au plus tard de la signature ».

Faute pour Madame [O] [R] de jouir de façon exclusive du véhicule, aucune indemnité d’occupation n’est due.

Sur la créance de Madame [O] [R] à l’encontre de Monsieur [X] [Y] :

En l’espèce, Madame [O] [R] indique bénéficier d’une créance à l’encontre de Monsieur [X] [Y] au titre du prélèvement sur le compte bancaire [21] ouvert à son nom de la somme de 6990 euros le 20 juin 2022. Elle ne précise pas le fondement juridique de sa demande.

Monsieur [X] [Y] s’y oppose au motif que ce compte était alimenté par les deux parties et servait à approvisionner le compte joint pour régler les dépenses du ménage.

Alors que les créances entre un partenaire et l’indivision sont réglées conformément au droit commun de l’indivision et notamment les articles 815-9, 815-12 et 815-13 code civil, les créances entre partenaires relèvent du droit commun des obligations et prennent leur source dans un contrat, un quasi-contrat, un délit ou un quasi-délit. Le fondement juridique le plus appliqué en l’absence de contrat, est l’enrichissement injustifié prévu par les articles 1303 et suivants du code civil. En application de l’article 1353 du code civil, il appartient à celui qui invoque une créance de prouver l’existence d’un mouvement de valeurs entre les patrimoines personnels des partenaires, c’est-à-dire un enrichissement du patrimoine personnel de l’un des partenaires et l’appauvrissement corrélatif du patrimoine personnel de l’autre et d’établir l’absence de justification à ce mouvement.

Il résulte des relevés du compte [21] que celui-ci a été alimenté par Madame [O] [R] mais également par des virements issus du compte joint (avril, mai, août, octobre et décembre 2019, janvier, avril, mai, juin, novembre et décembre 2020, novembre 2021) et par Monsieur [X] [Y] (février 2021). Les mouvements au débit sont essentiellement à destination du compte joint des partenaires et il résulte des relevés de ce compte, qu’il servait aux dépenses du ménage.

En outre, il résulte de l’intitulé même des virements effectués le 20 juin 2020 que les partenaires ont souhaité se partager le solde du compte par moitié, le virement vers le compte de Madame [O] [R] étant nommé « Vir cloture cpt part [O] » et celui vers le compte de Monsieur [X] [Y] « Vir solde du compte M. [Y] [X] ».

En conséquence, faute pour Madame [O] [R] de justifier d’un enrichissement et d’un appauvrissement corrélatif, elle sera déboutée de sa demande de créance.

Sur les créances contre l’indivision :

Aux termes de l’article 815-13 alinéa 1 du code civil, lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.

Il résulte de ce texte, qu’un indivisaire peut être créancier de l’indivision lorsqu’il a effectué une dépense d’amélioration ou de conservation du bien indivis.

Pour qu’il y ait créance, il faut que la dépense ait été financée sur les deniers personnels d’un indivisaire et qu’elle n’ait pas présenté d’intérêt uniquement pour l’indivisaire qui l’a faite.

La dépense d’amélioration est celle qui, sans être indispensable, est utile à la valorisation du bien.

La dépense de conservation est celle qui est nécessaire.

Une dépense d’entretien, qui ne constitue pas une dépense d’amélioration ou de conservation, n’ouvre pas droit à une indemnité au titre de l’article 815-13 du code civil.

En application de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Sur la dépense d’amélioration :

Il résulte de l’article 815-13 du code civil que la créance de l’indivisaire qui a amélioré le bien au moyen de deniers personnels correspond en principe au profit subsistant c’est-à-dire à la plus-value résultant de l’amélioration mais qu’en raison de l’équité le juge peut la moduler notamment en fonction de la dépense faite.

Il est constant que Madame [O] [R] a réglé au moyen de deniers personnels la facture relative aux travaux d’aménagement des combles (24 000 euros). Il résulte de la demande de permis de construire que la surface hors œuvre nette du bien était 107,61 m2 et que les travaux devaient permettre de créer 18,62 m2 dans les combles afin de réaliser deux chambres. Ces travaux ont été effectués, de sorte que le bien a été amélioré. Les certificats de superficie « loi Carrez » d’avril 2006 et décembre 2022 font état d’une surface passée de 95,52 m2 à 105,55 m2.

Il résulte des pièces produites par Madame [O] [R] relatives à l’estimation de la valeur vénale du bien mais également des ventes de biens immobiliers de 2021 à 2022 que le prix du m2 peut être estimé à 4000 euros.

Ainsi, le profit subsistant peut être calculé ainsi :
valeur améliorée (4000 € x 105,55 m2) – valeur sans l’amélioration (4000 € x 95,52 m2) = 40 120 euros.

En conséquence, la créance de Madame [O] [R] à l’encontre de l’indivision est fixée à la somme de 40 120 euros au titre des travaux d’amélioration du bien immobilier indivis.

Sur les dépenses de conservation :

* Sur les cotisation de l’ASL :

Madame [O] [R] demande au juge de fixer sa créance à l’encontre de l’indivision à la somme de 15 euros par an au titre des cotisation de l’association syndicale libre [Adresse 29].

Il résulte de l’acte d’acquisition du bien immobilier indivis sis [Adresse 14] à [Localité 22] que le bien constitue l’un des lots du groupe d’habitation dénommé « [Adresse 29] » et que tout propriétaire de l’un des lots du groupe d’habitation est membre de plein droit de l’association.

Cette dépense relève ainsi de la conservation de l’immeuble en ce sens qu’en cas de non paiement, l’ASL peut agir en recouvrement et solliciter la vente forcée du bien.

Madame [O] [R] justifie avoir réglé 15 euros par chèque tiré sur son compte personnel pour régler l’appel de cotisation 2023.

Elle ne justifie pas du règlement de la cotisation de 2024, produisant uniquement l’appel de fonds.

En conséquence, il convient de fixer la créance de Madame [O] [R] à l’encontre de l’indivision à la somme de 15 euros au titre du règlement de la cotisation de l’ASL [Adresse 29] pour l’année 2023.

Elle sera invitée à communiquer au notaire liquidateur les relevés de ses comptes bancaires faisant apparaître en débit les sommes afférentes au règlement de la cotisation de l’ASL pour l’année 2024, le juge aux affaires familiales se réservant le pouvoir de trancher une éventuelle contestation, en cas de difficulté devant le notaire.

* Sur les cotisation d’assurance habitation :

Madame [O] [R] demande au juge de fixer sa créance à l’encontre de l’indivision à la somme de 560,10 euros pour l’année 2024 et de 520,11 euros pour l’année 2023 au titre des cotisation de l’assurance habitation du bien immobilier indivis sis [Adresse 14] à [Localité 22].

L’assurance-habitation, qui tend à la conservation de l’immeuble, incombe à l’indivision jusqu’au jour du partage en dépit de l’occupation privative (Civ. 1re, 20 janvier 2004, pourvoi n°01-17.124). Elle est en effet nécessaire à la conservation d’un bien indivis susceptible de connaître des sinistres.

Madame [O] [R] produit un courrier de la [31] en date du 5 février 2023 indiquant qu’au titre de son contrat d’assurance relatif à sa résidence principale de 6 pièces située à [Localité 22] sa cotisation annuelle TTC s’élève à la somme de 520,11 euros et un courrier du 28 janvier 2024 indiquant qu’au titre de son contrat d’assurance relatif à sa résidence principale de 6 pièces située à [Localité 22] sa cotisation annuelle TTC s’élève à la somme de 560,10 euros pour la période du 1er avril 2024 au 31 mars 2025. Elle ne justifie pas du paiement.

Elle sera par conséquent invitée à communiquer au notaire liquidateur les relevés de ses comptes bancaires faisant apparaître en débit les sommes afférentes au règlement des cotisation d’assurance habitation, le juge aux affaires familiales se réservant le pouvoir de trancher une éventuelle contestation, en cas de difficulté devant le notaire.

* Sur la facture relative à la toiture :

Madame [O] [R] demande au juge de fixer sa créance à l’encontre de l’indivision à la somme 170 euros au titre des travaux effectués sur la toiture. Elle produit une facture pour des travaux de démoussage de toiture et de nettoyage des dalles, façades et cheminée. Il est précisé que la facture a été acquittée le 25 février 2023 en espèces.

Ces travaux ne constituent pas des dépenses de conservation mais d’entretien et ne donnent pas lieu à créance au titre de l’article 815-13 du code civil.

En conséquence, Madame [O] [R] sera déboutée de sa demande.

* Sur la facture de métrage loi Carrez :

Madame [O] [R] demande au juge de fixer sa créance à l’encontre de l’indivision à la somme 170 euros au titre du métrage loi Carrez réalisé en décembre 2022.

Cette dépense est nécessaire afin d’évaluer le bien immobilier en vue de sa vente ou du rachat de parts, de sorte qu’elle incombe à l’indivision.

Madame [O] [R] produit une facture du 10 décembre 2022 faisant état d’un montant dû de 145 euros. Elle ne justifie pas du règlement au moyen de deniers personnels.

Elle sera par conséquent invitée à communiquer au notaire liquidateur les relevés de ses comptes bancaires faisant apparaître en débit les sommes afférentes au règlement de cette facture, le juge aux affaires familiales se réservant le pouvoir de trancher une éventuelle contestation, en cas de difficulté devant le notaire.

Sur la demande d’attribution du compte [21] lié à la gestion de l’appartement sis [Adresse 7] à [Localité 22] :

Il n’existe aucun fondement légal à l’attribution d’un compte bancaire.

Cette demande sera rejetée. Il appartient aux parties de faire le nécessaire par sa clôture éventuelle.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :

Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Madame [O] [R] sollicite la condamnation de Monsieur [X] [Y] à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi du fait du refus de celui-ci de parvenir à un partage amiable.

Conformément à l’article 1240 du code civil une condamnation pour résistance abusive suppose de caractériser une faute.

Le partage n’ayant pas encore eu lieu, il n’est pas possible de considérer que Monsieur [X] [Y] résiste abusivement à l’exécution d’une obligation, étant rappelé que si la loi impose aux coïndivisaires de rechercher une solution amiable, elle ne les oblige pas à trouver un accord, et il appartient à la partie la plus diligente ou la plus pressée d’interrompre les démarches amiables si elles n’aboutissent pas pour saisir le juge.

Il résulte de ces énonciations que la preuve d’une faute imputable à Monsieur [X] [Y] n’est pas rapportée.

En conséquence, Madame [O] [R] sera déboutée de sa demande de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Sur l’exécution provisoire :

En application de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

Aucun élément ne justifie de faire échec à l’exécution provisoire de droit prévue par cet article.

Sur les dépens :

Compte tenu de la nature de l’affaire, les dépens seront employés en frais privilégiés de partage, modalité incompatible avec la distraction des dépens prévue par les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Compte tenu de la nature familiale du litige, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Madame [O] [R] et Monsieur [X] [Y] les frais irrépétibles qu’ils ont dû engager dans le cadre de la présente instance.

Madame [O] [R] et Monsieur [X] [Y] seront en conséquence déboutés de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant en qualité de juge aux affaires familiales, publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Ordonne l’ouverture des opérations de compte liquidation partage judiciaire des intérêts patrimoniaux entre Madame [O] [R], née le [Date naissance 4] 1974 à [Localité 24] (78) et Monsieur [X] [Y], né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 20] (49) ;

Commet pour y procéder Maître [B] [L], notaire à [Localité 25], [Adresse 16] ;

Désigne en qualité de juge commis le magistrat présidant la section des liquidations et indivisions relevant de la compétence du tribunal judiciaire de Meaux pour surveiller ces opérations et faire son rapport sur le partage en cas de difficulté ;

Dit qu’en cas d’empêchement du notaire désigné, il sera procédé à son remplacement par ordonnance du juge commis rendue sur simple requête ;

Rappelle que le notaire accomplira sa mission dans les conditions fixées par les articles 1365 et suivants du code de procédure civile ;

Rappelle que le notaire commis pourra s’adjoindre si la valeur ou la consistance des biens le justifie, un expert choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis ;

Dit que le notaire ainsi désigné se fera remettre tous documents financiers utiles à sa mission, en intervenant directement tant auprès de parties qu’auprès des tiers, sans que le secret professionnel ne puisse lui être opposé ;

Dit que le notaire commis sera investi des pouvoirs de l’article 1365 du code de procédure civile et qu’il pourra interroger le FICOBA ;

Dit que le notaire commis pourra sur simple présentation du présent jugement se faire communiquer par les administrations, banques ou offices notariaux ainsi que le fichier FICOBA, tous les renseignements concernant le patrimoine mobilier ou immobilier, ou le revenu des parties, sans que ne puisse lui être opposé le secret professionnel ;

Rappelle que le notaire ainsi désigné dispose d’un délai d’un an après que le jugement sera passé en force de chose jugée pour achever les opérations de liquidation et de partage, sauf à en référer au juge commis de toute difficulté, dans les conditions prévues à l’article 1365 du code de procédure civile ;

Rappelle qu’en cas de défaillance d’une des parties lors des opérations de liquidation et de partage, un représentant devra lui être désigné selon la procédure prévue aux articles 841-1 du code civil et 1367 du code de procédure civile ;

Rappelle que les copartageants peuvent à tout moment abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage amiable et qu’en cas de signature d’un tel acte de partage amiable, le notaire en informe le juge commis qui constate la clôture de la procédure ;

Rappelle qu’à défaut pour les parties de signer un état liquidatif, le notaire devra transmettre au greffe un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties et son projet d’état liquidatif comprenant une proposition de composition de lots ;

Rappelle qu’en application de l’article 1374 du code de procédure civile, les parties ne seront plus recevables, sauf si le fondement est né ou s’est révélé postérieurement, en des demandes qu’elles n’auraient pas exprimées antérieurement au rapport du juge commis ;

Fixe la valeur du bien immobilier sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) à la somme de 480 000 euros ;

Fixe la valeur du véhicule Toyota à la somme de 11 000 euros ;

Fixe l’indemnité mensuelle due par Madame [O] [R] à l’indivision au titre de l’occupation du bien immobilier indivis sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) à la somme de 1280 euros à compter du 1er mars 2023 ;

Déboute Monsieur [X] [Y] de sa demande de fixation d’une indemnité due par Madame [O] [R] au titre de la jouissance du véhicule indivis de marque Toyota ;

Déboute Madame [O] [R] de sa demande de créance à l’encontre de Monsieur [X] [Y] au titre du prélèvement de 6990 euros effectué sur le compte [21] à son nom ;

Fixe la créance de Madame [O] [R] à l’encontre de l’indivision à la somme de 40 120 euros au titre des travaux d’amélioration (aménagement des combles) du bien immobilier indivis sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) ;

Déboute Madame [O] [R] de sa demande de créance à l’encontre de l’indivision au titre des travaux d’entretien de la toiture du bien immobilier indivis sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) ;

Fixe la créance de Madame [O] [R] à l’encontre de l’indivision à la somme de 15 euros au titre la cotisation 2023 de l’ASL [Adresse 29] ;

Invite Madame [O] [R] à remettre au notaire commis les pièces au soutien de ses prétentions au titre de créances à l’encontre de l’indivision au titre de la cotisation de 2024 de l’ASL [Adresse 29], des cotisations d’assurance habitation du bien sis [Adresse 14] à [Localité 22] (77) et du métrage loi Carrez et dit que le juge aux affaires familiales tranchera le cas échéant les contestations subsistantes ;

Déboute Madame [O] [R] de sa demande d’attribution du compte bancaire [21] lié à la gestion de l’appartement sis [Adresse 7] à [Localité 22] (77) ;

Déboute Madame [O] [R] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Rejette toute autre demande ;

Rappelle que le présent jugement bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage ;

Déboute Madame [O] [R] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute Monsieur [X] [Y] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Renvoie l’affaire à l’audience dématérialisée de mise en état du juge commis du 10 avril 2025 pour contrôle de l’avancement des opérations de compte liquidation et partage ;

Invite les parties et le notaire à renseigner le juge commis pour la date fixée, puis aux dates de renvoi qui seront arrêtées, de l’état d’avancement des opérations ;

Dit que cette information sera faite :
– pour les parties représentées par un avocat, par RPVA,
– à défaut de représentation par avocat et pour le notaire désigné par courrier électronique à l’adresse : [Courriel 30] ;

Rappelle qu’à défaut pour les parties d’accomplir ces diligences au fur et à mesure des opérations de liquidation, l’affaire sera supprimée du rang des affaires en cours.

Et le présent jugement a été signé par Renaud NOIROT, président, et par Sandrine FANTON, greffier.

Le greffier Le président


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