Oeuvre d’art et dignité humaine : la liberté d’expression prime – Questions / Réponses juridiques.

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Oeuvre d’art et dignité humaine : la liberté d’expression prime – Questions / Réponses juridiques.

Le principe du respect de la dignité humaine ne peut pas, à lui seul, justifier une restriction à la liberté d’expression des artistes. L’article 16 du code civil, invoqué par l’AGRIF, ne constitue pas une loi au sens de l’article 10, paragraphe 2, de la Convention, permettant de limiter cette liberté. La Cour de cassation a affirmé que la dignité humaine ne peut pas être un fondement autonome pour restreindre la liberté d’expression. Ainsi, toute restriction doit être prévue par la loi et viser des objectifs légitimes, ce qui n’est pas le cas ici.. Consulter la source documentaire.

Quel est le principe du respect de la dignité humaine en relation avec la liberté d’expression des artistes ?

Le principe du respect de la dignité humaine ne peut constituer à lui seul un fondement autonome de restriction à la liberté d’expression des artistes.

L’article 16 du code civil, créé par la loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain, ne constitue pas à lui seul une loi, au sens de l’article 10, paragraphe 2, de la Convention, permettant de restreindre la liberté d’expression.

Qu’est-ce que l’affaire « You are my mirror 1 ; L’infamille » ?

Selon l’arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2021), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 26 septembre 2018, pourvoi n° 17-16.089), l’association Fonds régional d’art contemporain de Lorraine (le FRAC) a organisé, dans ses locaux, une exposition intitulée « You are my mirror 1 ; L’infamille », à l’occasion de laquelle ont été présentés des écrits rédigés par un artiste.

Quelle action a été entreprise par l’AGRIF ?

L’Association générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (l’AGRIF) a soutenu que la présentation de ces écrits, dans une exposition accessible à tous, était constitutive de l’infraction prévue et réprimée par l’article 227-24 du code pénal.

Elle a saisi le procureur de la République près le tribunal de grande instance, qui a décidé d’un classement sans suite.

Comment l’AGRIF a-t-elle invoqué l’atteinte à la dignité humaine ?

Invoquant, sur le fondement de l’article 16 du code civil, une atteinte portée à la dignité de la personne humaine, l’AGRIF a assigné le FRAC en réparation du préjudice causé aux intérêts collectifs qu’elle a pour objet de défendre.

Quel est le droit à la liberté d’expression selon la Convention ?

Selon l’article 10, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à la liberté d’expression.

Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière.

Quel est le rôle de la liberté d’expression dans une société démocratique ?

La Cour européenne des droits de l’homme affirme que la liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique et l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de chacun (CEDH, arrêt du 7 décembre 1976, Handyside c. Royaume-Uni, n° 5493/72, § 49).

Qu’est-ce que la liberté d’expression artistique ?

La liberté d’expression englobe la liberté d’expression artistique, qui constitue une valeur en soi (CEDH, décision du 11 mars 2014, Jelsevar c. Slovénie, n° 47318/07, § 33) et qui protège ceux qui créent, interprètent, diffusent ou exposent une œuvre d’art (CEDH, arrêt du 3 mai 2007, Ulusoy e.a. c. Turquie, n° 34797/02, § 42).

Quelles sont les conditions de restriction de la liberté d’expression selon la Convention ?

L’article 10, paragraphe 2, de la Convention prévoit que la liberté d’expression peut être soumise à certaines restrictions ou sanctions prévues par la loi, lorsque celles-ci constituent des mesures nécessaires à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire.

Quelles sont les implications de la dignité humaine dans le cadre de la liberté d’expression ?

Il en résulte que toute restriction à la liberté d’expression suppose, d’une part, qu’elle soit prévue par la loi, d’autre part, qu’elle poursuive un des buts légitimes ainsi énumérés.

Si l’essence de la Convention est le respect de la dignité et de la liberté humaines (CEDH, arrêt du 22 novembre 1995, S.W. c. Royaume-Uni, n° 20166/92, § 44), la dignité humaine ne figure pas, en tant que telle, au nombre des buts légitimes énumérés à l’article 10, paragraphe 2, de la Convention.

Quelle conclusion a tirée la Cour de cassation concernant la dignité humaine ?

La Cour de cassation en a déduit que la dignité de la personne humaine ne saurait être érigée en fondement autonome des restrictions à la liberté d’expression (Ass. plén., 25 octobre 2019, pourvoi n° 17-86.605, publié).

Au surplus, l’article 16 du code civil, créé par la loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain et invoqué par la requérante, ne constitue pas à lui seul une loi, au sens de l’article 10, paragraphe 2, de la Convention, permettant de restreindre la liberté d’expression.

Quelle a été la décision de la cour d’appel concernant l’AGRIF ?

Ayant relevé que l’AGRIF poursuit l’exposition des œuvres en cause sur le seul fondement de l’atteinte à la dignité au sens de l’article 16 du code civil, la cour d’appel a exactement retenu que le principe du respect de la dignité humaine ne constitue pas à lui seul un fondement autonome de restriction à la liberté d’expression.


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