La mise en mouvement de l’action publique

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La mise en mouvement de l’action publique

La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil. »

Il en résulte que la juridiction civile n’est obligée de surseoir à statuer que lorsque les trois conditions suivantes sont réunies:

– l’action engagée devant elle est une action “en réparation du dommage causé par l’infraction” :

– l’action publique a été mise en mouvement pour les faits à l’origine du dommage dont il est demandé réparation,

– la juridiction pénale n’a pas encore rendu de décision définitive.

Dans le cas de l’article 4 alinéa 3 du code de procédure pénale, le prononcé d’un sursis à statuer relève du pouvoir discrétionnaire des juges du fond (en ce sens 2e Civ., 7 juillet 2016, n° 15-19.975). Le juge peut prononcer un sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice (Cass. Com., 11/06/1991, n°89-15216).

Par ailleurs, en application de l’article 4 alinéa 3 du code de procédure pénale, le prononcé d’un sursis à statuer relève du pouvoir discrétionnaire du juge de la mise en état.

En la cause, il n’apparaît pas d’une bonne administration de la justice de prononcer le sursis à statuer en ce qu’il contribuerait à retarder l’issue de ce litige sans nécessité, n’étant notamment pas établi que l’issue de la procédure pénale en cours serait de nature à influencer, même indirectement, la décision à intervenir.

L’Essentiel : Madame [M] [S] et Madame [V] [C] sont en conflit concernant l’utilisation de marques similaires liées à des visites en chanson à [Adresse 6]. Madame [S] accuse Madame [C] de porter atteinte à ses droits sur sa marque « [Adresse 6] Enchanté », tandis que Madame [C] défend son droit d’utiliser « [Adresse 6] EN CHANSONS ». Après une opposition irrecevable à l’INPI et des assignations en justice, le juge a décidé de ne pas accorder de sursis à statuer, soulignant que cela retarderait le litige. Il a ordonné aux parties de rencontrer un conciliateur de justice d’ici le 3 mars 2025.
Résumé de l’affaire :

Présentation des parties

Madame [M] [S] est une artiste lyrique qui propose des visites de [Adresse 6] en chanson sous le nom “[Adresse 6] Enchanté”. Elle détient la marque semi-figurative “Monuments enchantés” et la marque verbale “[Adresse 6] Enchanté”. De son côté, Madame [V] [C] est une artiste-interprète qui a créé en 2021 une visite intitulée « [Adresse 6] EN CHANSONS » et utilise ce nom commercial depuis. Elle possède également la marque verbale « [Adresse 6] EN CHANSONS ».

Conflit entre les parties

Le litige a débuté lorsque Madame [S] a estimé que l’activité de Madame [C] portait atteinte à ses droits sur sa marque et son concept. Elle a donc demandé à Madame [C] de cesser d’utiliser des appellations similaires. En réponse, Madame [C] a exigé que Madame [S] cesse d’utiliser les termes « [Adresse 6] EN CHANSONS » ou « [Adresse 6] EN CHANTANT ». Par la suite, Madame [S] a mis en demeure Madame [C] de cesser l’exploitation de sa marque.

Procédures judiciaires

Le 26 juillet 2022, Madame [S] a fait opposition à l’enregistrement de la marque « [Adresse 6] EN CHANSONS », mais cette opposition a été déclarée irrecevable par l’INPI. En avril 2023, Madame [S] a assigné Madame [C] et Monsieur [F] devant le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir le retrait de la marque. En mai 2024, Madame [C] a cité Madame [S] devant le tribunal correctionnel pour plusieurs délits, dont la dénonciation calomnieuse et le harcèlement moral.

Prétentions des parties

Dans ses conclusions, Madame [C] demande au juge de déclarer ses demandes recevables et de surseoir à statuer en attendant l’issue de la procédure pénale. Elle soutient que la décision pénale éclairera le tribunal sur les accusations de dénigrement et de procédures abusives. Monsieur [F] a également demandé un sursis à statuer et la condamnation de Madame [S] à lui verser une somme pour frais. En revanche, Madame [S] a rejeté ces demandes, arguant que le sursis à statuer est dilatoire.

Motivation du juge

Le juge a rappelé que le sursis à statuer n’est pas automatique et doit être justifié par des conditions précises. Il a conclu que la demande de sursis à statuer ne se justifie pas dans ce cas, car elle retarderait inutilement le litige. De plus, les accusations portées par Madame [C] ne sont pas directement liées à l’action civile en cours.

Décisions finales

Le juge a rejeté la demande de sursis à statuer, réservé les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile. Il a également ordonné aux parties de rencontrer un conciliateur de justice d’ici le 3 mars 2025, soulignant l’importance de la conciliation dans la résolution de ce litige.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour prononcer un sursis à statuer selon le code de procédure pénale ?

Le prononcé d’un sursis à statuer est régi par l’article 4 du code de procédure pénale. Cet article stipule que :

« L’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique.

Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement.

La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil. »

Ainsi, pour qu’un sursis à statuer soit prononcé, trois conditions doivent être réunies :

1. L’action engagée devant la juridiction civile doit être une action en réparation du dommage causé par l’infraction.

2. L’action publique doit avoir été mise en mouvement pour les faits à l’origine du dommage.

3. La juridiction pénale n’a pas encore rendu de décision définitive.

Il est important de noter que le prononcé d’un sursis à statuer relève du pouvoir discrétionnaire des juges du fond, comme l’indique la jurisprudence (2e Civ., 7 juillet 2016, n° 15-19.975).

Quels sont les critères d’éligibilité à une mesure de conciliation selon le code de procédure civile ?

Les critères d’éligibilité à une mesure de conciliation sont établis par les articles 21, 128 et 129-2 du code de procédure civile.

L’article 21 précise que :

« Le juge peut, à tout moment de la procédure, inviter les parties à rencontrer un conciliateur de justice. »

L’article 128, quant à lui, indique que :

« La conciliation est une mesure de nature à favoriser le règlement amiable des litiges. »

Enfin, l’article 129-2 stipule que :

« Lorsque l’affaire présente des critères d’éligibilité à une mesure de conciliation, le juge peut donner injonction aux parties de rencontrer un conciliateur de justice. »

Ces articles soulignent l’importance de la conciliation dans le processus judiciaire, favorisant ainsi un règlement amiable des différends. Dans le cas présent, le juge a ordonné aux parties de rencontrer un conciliateur, ce qui est conforme à ces dispositions.

Comment le juge de la mise en état peut-il statuer sur les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ?

Le juge de la mise en état a des prérogatives spécifiques concernant les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

L’article 696 du code de procédure civile stipule que :

« La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie. »

De plus, l’article 700 précise que :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. »

Le juge doit tenir compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Il peut également, même d’office, décider qu’il n’y a lieu à condamnation pour des raisons d’équité.

Enfin, l’article 790 indique que le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes fondées sur l’article 700, mais dans le cas présent, ces demandes ont été réservées, ce qui signifie qu’elles seront examinées ultérieurement.

Quelles sont les implications d’une injonction à rencontrer un conciliateur de justice ?

L’injonction à rencontrer un conciliateur de justice a plusieurs implications pour les parties concernées.

Selon les articles 21, 128 et 129-2 du code de procédure civile, cette injonction vise à favoriser le règlement amiable des litiges.

Elle impose aux parties de se présenter à un rendez-vous avec un conciliateur, ce qui est considéré comme une étape importante dans le processus judiciaire.

Le juge rappelle que ce rendez-vous est obligatoire et gratuit, et qu’il peut se faire par visio-conférence ou téléphone si une rencontre en présentiel n’est pas possible.

L’inexécution de cette injonction, sans motif légitime, peut constituer un défaut de diligences, justifiant une radiation du dossier ou influençant l’appréciation des demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ainsi, cette mesure vise à encourager les parties à dialoguer et à trouver une solution amiable avant de poursuivre le contentieux.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le
Copie certifiée conforme délivrée à :
– Maître Sellier, vestiaire C65
– Maître Cohen, vestiaire C1887
– Maître Loue, vestiaire E183
Copie par mail :
– conciliatrice – Madame [I] [O]

3ème chambre
3ème section

N° RG 23/05663 –
N° Portalis 352J-W-B7H-CZTSD

N° MINUTE :

Assignation du :
20 avril 2023

incident

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 29 janvier 2025

DEMANDERESSE

Madame [M] [S]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Alain SELLIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C615

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/022651 du 06/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)

DEFENDEURS

Madame [V] [C]
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Bertrand LOUE, avocat au barreau de PARIS,vestiaire #E0183

Monsieur [A] [F]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représenté par Maître Richard Ruben COHEN de la SELASU SELASU RICHARD R. COHEN, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1887
Décision du 29 janvier 2025
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/05663 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZTSD

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Anne BOUTRON, vice-présidente
assistée de Lorine MILLE, greffière

DEBATS

A l’audience sur incident du 21 novembre 2025, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 29 janvier 2025.

ORDONNANCE

Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [M] [S] se présente comme artiste lyrique. Elle propose des visites de [Adresse 6] en chanson dénommées “[Adresse 6] Enchanté”.
Elle se déclare titulaire de:- la marque française semi-figurative “Monuments enchantés” n°3797495 déposée à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) le 14 janvier 2011 et renouvelée en janvier 2021;
– la marque verbale française “[Adresse 6] Enchanté” déposée à l’INPI le 11 juin 2022.

Madame [V] [C] se présente comme artiste-interprète, exerçant son activité sous le statut d’entrepreneur individuel. Elle expose avoir créé en 2021 une visite de [Adresse 6] intitulée « [Adresse 6] EN CHANSONS » et utiliser le nom commercial «[Adresse 6] EN CHANSONS » depuis l’année 2021. Elle expose être titulaire de la marque verbale française « [Adresse 6] EN CHANSONS » déposée à l’INPI le 12 mai 2022.
Monsieur [A] [Y] [F] se présente comme ami de Mme [C].
Estimant que l’activité de Mme [C] portait à atteinte à ses droits sur le concept des visites chantées de [Adresse 6] et sa marque “[Adresse 6] Enchanté”, Mme [S] a, par courrier du 9 juin 2022, demandé à Mme [C] de cesser de copier sa marque et son concept.
En réponse, Mme [C] a demandé à Mme [S] de cesser d’utiliser par écrit ou à l’oral, l’appellation « [Adresse 6] EN CHANSONS » ou « [Adresse 6] EN CHANTANT”.
Par courrier du 7 juillet 2022, Mme [S] a mis en demeure Mme [C] de cesser l’exploitation de sa marque « [Adresse 6] EN CHANSONS ».

Décision du 29 janvier 2025
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/05663 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZTSD

Le 26 juillet 2022, Mme [S] a fait opposition à l’enregistrement de la marque «[Adresse 6] EN CHANSONS» par Mme [C], opposition déclarée irrecevable par l’INPI le 6 septembre 2022.
Par acte du 20 avril 2023, Mme [S] a fait assigner Mme [C] et M. [F] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de retrait et d’annulation de la marque “[Adresse 6] EN CHANSONS”.
Le 31 mai 2024, Mme [C] a fait citer à comparaître, par citation directe signifiée pour une audience du 6 septembre 2024, Mme [S] devant la 14e chambre du tribunal correctionnel de Paris pour les délits de dénonciation calomnieuse, complicité par instigation du délit d’établissement d’attestations établissant des faits matériellement inexacts, usage d’attestations établissant des faits matériellement inexacts, harcèlement moral. L’affaire a été fixée devant la 10e chambre correctionnelle à l’audience du 5 mai 2025.
Prétentions des parties

Dans ses dernières conclusions notifiées le 31 mai 2024, Mme [C] demande au juge de la mise en état de:
Déclarer Madame [V] [C] recevable et bien fondée en ses conclusions;

Surseoir à statuer dans l’attente de l’issue, par une décision définitive, de la procédure pénale n° 24149000175 engagée devant la 14 ème chambre du tribunal correctionnel de Paris pour des faits de harcèlement moral, de complicité par instigation d’établissement de fausses attestations, d’usage de fausses attestations et de dénonciation calomnieuse, à l’encontre de Madame [M] [S] et de ses coauteurs;

Réserver les dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [C] fait valoir que la décision du juge pénal sur les infractions de dénonciation calomnieuse et harcèlement moral imputées à Mme [S] permettra d’éclairer le tribunal dans son appréciation sur les fautes de dénigrement et procédures abusives reprochées à Mme [S] dans la présente instance. Elle estime que le sursis serait d’une bonne administration de la justice, le débat dans la présente instance ne pouvant être tenu sereinement, selon elle, compte tenu des délits imputés à Mme [C] et à ses proches dans les conclusions au fond notifiées le 29 février 2024 par Mme [S] dans la présente instance et qui fonde l’action de Mme [C] à l’encontre de cette dernière devant le juge pénal pour dénonciation calomnieuse. Elle estime que le sursis se justifie également du fait des poursuites pour fausses attestations constituant des pièces versées dans la présente instance. Elle indique que les poursuites par citation directe se résolvent en général rapidement.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 8 octobre 2024, M. [F] demande au juge de la mise en état de:
IN LIMINE LITIS :

ORDONNER le sursis à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure pénale initiée sur citation directe signifiée le 31 mai 2024 en vue de l’audience du 6 septembre 2024 par Madame [V] [C] à l’encontre de Madame [M] [S] ;

CONDAMNER Madame [M] [S] à payer la somme de 1 500 euros à Monsieur [A] [Y] [F] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER Madame [M] [S] au règlement des entiers dépens de l’incident.

Au soutien de ses prétentions, M. [F] fait valoir que la citation directe contre Mme [S] tend notamment à établir que certaines des pièces qu’elle produit dans la présente instance présentent des faits volontairement inexacts, avec usage de faux, au préjudice de Madame [C], et pourraient ainsi être écartées des débats si elles étaient déclarées frauduleuses. Il estime, de plus, que l’issue de la procédure pénale permettra de statuer sur le caractère abusif de l’action de Mme [S].
Dans ses dernières conclusions notifiées le 13 novembre 2024, Mme [S] demande au juge de la mise en état de:
DECLARER Madame [M] [S] recevable et bien fondée en ses conclusions ;
REJETER les demandes de Madame [V] [C],
REJETER les demandes de Monsieur [A] [F],
REJETER la demande de sursis à statuer,
RESERVER les dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [S] expose que l’audience pénale n’est pas encore fixée et que la demande de sursis à statuer est dilatoire, permettant à Mme [C] de poursuivre les agissements qu’elle lui reproche. Elle ajoute qu’il n’y a pas identité de parties entre la présente instance et la procédure pénale dans laquelle interviennent d’autres parties dont les parents de Mme [C].
Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties, il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Aux termes de l’article 789 1°du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance.
L’article 73 du même code précise que:
« Constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. »

L’article 378 du code de procédure civile dispose « La décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine. »

Selon l’article 4 du code de procédure pénale: « L’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique. Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement. La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil. »

Il en résulte que la juridiction civile n’est obligée de surseoir à statuer que lorsque les trois conditions suivantes sont réunies:-l’action engagée devant elle est une action “en réparation du dommage causé par l’infraction”,
– l’action publique a été mise en mouvement pour les faits à l’origine du dommage dont il est demandé réparation,
– la juridiction pénale n’a pas encore rendu de décision définitive.

Dans le cas de l’article 4 alinéa 3 du code de procédure pénale, le prononcé d’un sursis à statuer relève du pouvoir discrétionnaire des juges du fond (en ce sens 2e Civ., 7 juillet 2016, n° 15-19.975).
Le juge peut prononcer un sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice (Cass. Com., 11/06/1991, n°89-15216).

En l’occurrence, aux termes de la citation directe notifiée à Mme [S] (pièce Mme [C] n°2), Mme [C] impute à Mme [S] les délits de:- harcèlement moral résultant des mêmes faits que ceux invoqués au titre du dénigrement dans la présente instance, Mme [C] faisant valoir un préjudice identique;
– dénonciation calomnieuse résultant de l’imputation par Mme [S] dans ses conclusions au fond du 29 février 2024 notifiées dans la présente instance de plusieurs infractions à Mme [C], ses proches et aux personnes qui ont témoigné en sa faveur;
– usage de fausses attestations établies par Messieurs [B] [L], [G] [D] et La touche enchantée, versées aux débats dans la présente instance.

Les demandes reconventionnelles de Mme [C] dans la présente instance ne sont pas fondées sur les infractions pour lesquelles une citation directe a été signifiée à Mme [S], visée des chefs de harcèlement moral, dénonciation calomnieuse et fausses attestations, mais sur la responsabilité extracontractuelle de celle-ci tirée d’un dénigrement et d’une procédure abusive, de sorte que l’action civile dont Mme [C] a saisi ce tribunal est indépendante de l’action publique.
Par ailleurs, si Mme [S] reproche aux défendeurs, aux termes de ses conclusions du 29 février 2024 notifiées dans la présente instance, la commission d’infractions pénales à son détriment, elle n’en a pas saisi le juge pénal.
En conséquence, en application de l’article 4 alinéa 3 du code de procédure pénale, le prononcé d’un sursis à statuer relève du pouvoir discrétionnaire du juge de la mise en état.

A cet égard, il n’apparaît pas d’une bonne administration de la justice de prononcer le sursis à statuer en ce qu’il contribuerait à retarder l’issue de ce litige sans nécessité, n’étant notamment pas établi que l’issue de la procédure pénale en cours serait de nature à influencer, même indirectement, la décision à intervenir. Notamment, s’agissant de l’allégation de fausses attestations de Messieurs [B] [L], [G] [D] et La touche enchantée, Mme [C] et M. [F] n’expliquent pas en quoi le contenu de ces trois attestations, sur les 8 attestations produites par Mme [S], serait déterminant dans la résolution de ce litige, alors par ailleurs que le tribunal est souverain pour en apprécier le caractère probant.
Il convient par conséquent de rejeter la demande de sursis à statuer.
Sur les frais

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
Selon l’article 699 du même code, les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision.La partie contre laquelle le recouvrement est poursuivi peut toutefois déduire, par compensation légale, le montant de sa créance de dépens.

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
L’article 790 du même code précise que le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700.
En l’occurrence, l’instance se poursuivant, les dépens et demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront réservés.

Injonction à rencontrer un conciliateur

L’affaire présentant des critères d’éligibilité à une mesure de conciliation, il y a lieu de donner injonction aux parties de rencontrer un conciliateur de justice en la personne de Mme [I] [O], par application des articles 21, 128 et 129-2 du code de procédure civile, d’ici le 3 mars 2025.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état,

Rejette la demande de sursis à statuer ;

Réserve les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Donne injonction à d’une part, Mme [M] [S] et, d’autre part, Mme [V] [C] et M. [A] [F] de rencontrer:
Madame [I] [O],
conciliatrice de justice
(adresse mail : [Courriel 5])

Fixe la durée de la mission de Madame [I] [O] jusqu’au 3 mars 2025,

Dit que les parties seront contactées par la conciliatrice de justice et les invitons à se présenter au rendez-vous fixé par la conciliatrice, en personne, accompagnée, le cas échéant, de leur conseil,

Rappelle que ce rendez-vous est obligatoire et gratuit, et peut se faire par visio-conférence ou téléphone en cas d’impossibilité d’une rencontre en présentiel,

Dit qu’aux fins de vérification de l’exécution de la présente injonction, la conciliatrice indiquera à la juridiction l’identité et la qualité des personnes s’étant présentées au rendez-vous ainsi que l’issue de ce dernier,

Rappelle que l’inexécution de cette injonction, sans motif légitime, est susceptible de constituer un défaut de diligences justifiant une radiation du dossier ou pourra constituer un des critères de l’équité lors de l’appréciation par le juge des demandes formées du chef des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Renvoie à l’audience de mise en état dématérialisée du 27 mars 2025 à 14 heures pour conclusions de M. [F] à défaut de conciliation, à notifier 8 jours avant.

Faite et rendue à Paris le 29 janvier 2025

La greffière Le juge de la mise en état
Lorine Mille Anne Boutron


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