Menaces de mort sur Twitter : la procédure à suivre

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Menaces de mort sur Twitter : la procédure à suivre
Une menace de mort sur Twitter (X) constitue bien un motif légitime de solliciter une mesure d’instruction (identification de l’auteur du message pour délinquance grave). Peuvent ressortir de la qualification pénale du délit de menaces de morts prévu par l’article 222-17 du code pénal qui dispose que « la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes dont la tentative est punissable est punie de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende lorsqu’elle est, soit réitérée, soit matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet. La peine est portée à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende s’il s’agit d’une menace de mort. »

Les hébergeurs (Twitter) sont tenus de conserver, pour les besoins de toutes les procédures pénales, les informations relatives à l’identité civile de l’utilisateur, les autres informations fournies par l’utilisateur lors de la souscription d’un contrat ou de la création d’un compte et les informations relatives au paiement, les premières pendant cinq ans et les autres pendant un an à compter de la fin de validité du contrat ou de la clôture du compte. Le contenu de ces informations est précisé par les I, II et III de l’article R 10-13 du Code des postes et des communications électroniques.

En outre, mais uniquement pour les besoins de la lutte contre la criminalité et la délinquance grave, de la prévention des menaces graves contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les hébergeurs sont tenus de conserver, pendant un an, les données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés. Le contenu de ces données est précisé par le IV de l’article R 10-13.

S’agissant de la demande de communication des données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés, il ne peut y être fait droit que si la procédure pénale envisagée relève de « la délinquance grave » (en effet en tout état de cause la procédure envisagée ne relève ni de faits pouvant recevoir une qualification criminelle, ni de « la prévention des menaces graves contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale »).

En l’espèce, les messages litigieux évoquent des actes de vengeance, contre le requérant et contre « la nouvelle génération » à savoir son fils scolarisé en école maternelle, dont l’auteur des messages indique rechercher l’adresse et les horaires, et des actes de violences graves. L’auteur anonyme évoque un « 1v1 » soit un duel, et la référence à « Yhwach » et « Yamamoto » renvoie à un animé japonais dans lequel les deux personnages se vengent l’un de l’autre, l’un tuant finalement son ennemi, de façon extrêmement violente. Ainsi si l’auteur des messages n’évoque pas expressément vouloir tuer le requérant et/ou son fils, il se réfère, à plusieurs reprises, à des actes de vengeances violents et invoque une référence « littéraire » ayant trait à un duel à mort. Il n’y a pas lieu dans le cadre de cette procédure de qualifier pénalement les faits de menaces de mort, mais un tel débat pourra légitimement se poser devant le juge correctionnel.

L’infraction de menace de mort est un délit grave, relevant des atteintes à l’intégrité physique ou psychique de la personne, puni d’une peine d’emprisonnement de 3 ans.

De plus la commission de ces faits, s’ils sont établis, est manifestement facilitée par l’utilisation des réseaux qui assure à l’auteur du message la publicité rapide qu’il recherche, tout en lui assurant anonymat et donc possiblement irresponsabilité. La multiplication des propos haineux et menaçants sur les réseaux, qui se propagent vite et sans filtre, facilite les intimidations et les cabales de toute sorte qui peuvent aboutir à des issues tragiques.

Enfin il convient de rappeler que les menaces alléguées sont commises à l’encontre d’un père et de son fils mineur, enfant scolarisé en maternelle.

Dès lors, il convient de faire droit à la demande de communication des données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés, telles que prévues par l’article R 13-10 IV du code des postes et des communications électroniques.

A noter que seules les données énumérées par la loi et le règlement peuvent être légalement conservées par les hébergeurs, et donc communiquées, sur autorisation judiciaire. Le juge ne peut autoriser la communication d’une donnée non prévue par les textes applicables. Pour autant, et sans débat sur les types de données légalement communicables, tout juge doit s’assurer du caractère exécutable de sa décision, et le cas échéant apporter les précisions nécessaires à l’exécution de sa décision, et partant à l’application de la loi.

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

L’obtention de telles mesures est subordonnée à plusieurs conditions : l’absence de procès devant le juge du fond, l’existence d’un motif légitime, l’intérêt probatoire du demandeur – apprécié notamment au regard de la mesure sollicitée et des intérêts du défendeur – et la nature légalement admissible de la mesure demandée.

La mesure sollicitée n’implique pas d’examen de la responsabilité des parties ou des chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé. Il suffit que soit constatée l’éventualité d’un procès dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

Si le litige au fond peut n’être qu’éventuel, la mesure sollicitée doit toutefois reposer sur des faits précis, objectifs et vérifiables, qui permettent de projeter ce litige futur comme plausible et crédible.

À cet égard, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer la réalité des faits qu’il allègue, il doit justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions, ne relevant pas de la simple hypothèse, en lien avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction, la mesure demandée devant être pertinente et utile.

Une mesure ne peut être ordonnée que si elle est légalement admissible et qu’elle ne cause pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de l’auteur des propos, à son droit à la protection de ses données personnelles, garantis par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ainsi qu’à son droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 10 de la même convention.

A ce stade de la procédure, et dans le cadre d’une demande de communication fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, le juge des référés n’a pas à qualifier pénalement les faits dont se plaignent les requérants, mais doit s’assurer de la suffisance d’éléments objectifs pour envisager un procès pénal sur la base de la qualification qu’ils invoquent.

Aux termes de l’article L 34-1 du code des postes et des communications électroniques (version en vigueur depuis le 31 juillet 2021 – Modifié par LOI n°2021-998 du 30 juillet 2021) :

« I. – Le présent article s’applique au traitement des données à caractère personnel dans le cadre de la fourniture au public de services de communications électroniques ; il s’applique notamment aux réseaux qui prennent en charge les dispositifs de collecte de données et d’identification.

II. – […].

II bis.- Les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver :

1° Pour les besoins des procédures pénales, de la prévention des menaces contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les informations relatives à l’identité civile de l’utilisateur, jusqu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la fin de validité de son contrat ;

2° Pour les mêmes finalités que celles énoncées au 1° du présent II bis, les autres informations fournies par l’utilisateur lors de la souscription d’un contrat ou de la création d’un compte ainsi que les informations relatives au paiement, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la fin de validité de son contrat ou de la clôture de son compte ;

3° Pour les besoins de la lutte contre la criminalité et la délinquance grave, de la prévention des menaces graves contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la connexion ou de l’utilisation des équipements terminaux.
[…].

Aux termes de l’article R10-13 du code des postes et des communications électroniques (version en vigueur depuis le 21 octobre 2021 – Modifié par Décret n°2021-1361 du 20 octobre 2021) :

« I.-Les informations relatives à l’identité civile de l’utilisateur, au sens du 1° du II bis de l’article L. 34-1, que les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver, sont :
1° Les nom et prénom, la date et le lieu de naissance pour une personne physique ou la raison sociale, ainsi que les nom, prénom, date et lieu de naissance de la personne agissant en son nom, lorsque le compte est ouvert au nom d’une personne morale ;
2° La ou les adresses postales associées ;
3° La ou les adresses de courrier électronique de l’utilisateur et du ou des comptes associés le cas échéant ;
4° Le ou les numéros de téléphone.

II.- Les autres informations fournies par l’utilisateur lors de la souscription d’un contrat ou de la création d’un compte, mentionnées au 2° du II bis de l’article L. 34-1, que les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver, sont :
1° L’identifiant utilisé ;
2° Le ou les pseudonymes utilisés ;
3° Les données destinées à permettre à l’utilisateur de vérifier son mot de passe ou de le modifier, le cas échéant par l’intermédiaire d’un double système d’identification de l’utilisateur, dans leur dernière version mise à jour.

III.-Les informations relatives au paiement mentionnées au 2° du II bis de l’article L. 34-1, que les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver, pour chaque opération de paiement, lorsque la souscription du contrat ou la création du compte est payante, sont :
1° Le type de paiement utilisé ;
2° La référence du paiement ;
3° Le montant ;
4° La date, l’heure et le lieu en cas de transaction physique.

IV.-Les données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés, mentionnées au 3° du II bis de l’article L. 34-1, que les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver, sont :
1° L’adresse IP attribuée à la source de la connexion et le port associé ;
2° Le numéro d’identifiant de l’utilisateur ;
3° Le numéro d’identification du terminal ;
4° Le numéro de téléphone à l’origine de la communication

[…]. »

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