Le principe clef : la loi fixe le principe d’une compensation financière « appropriée », dont la nature et le montant doivent être établis par voie contractuelle entre les deux parties dans un délai « raisonnable » après que l’employeur a revendiqué l’attribution de l’invention.
S’il existe une mission inventive inhérente aux fonctions du salarié (contrat de travail), la rémunération supplémentaire est déterminée par les conventions collectives, les accords d’entreprise et les contrats individuels de travail (L. 611-7 u CPI). En pratique, peu de conventions collectives et d’accords collectifs encadrent cette rémunération supplémentaire. Reste l’option d’encadrer cette rémunération par le contrat de travail.
Le cadre juridique des inventions de salariés
Les inventions « de mission », qui sont « les inventions faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées », appartiennent à l’employeur.
En contrepartie, ce dernier est néanmoins tenu de verser au salarié une rémunération supplémentaire. La loi est muette sur le mode de calcul de cette rétribution et renvoie aux conventions collectives, aux accords d’entreprise et aux contrats de travail individuels.
L’enquête sur la rémunération des inventeurs salariés réalisée par questionnaire en 2008 par l’Observatoire de la propriété intellectuelle (OPI) souligne que « les dispositions prévues dans les conventions collectives sont, quand elles existent, floues et incomplètes, voire irrégulières ».
Sur les 280 entreprises sollicitées par l’OPI, 88 ont répondu, parmi lesquelles et 60 ont mis en place un dispositif de rémunération des inventeurs, qui prend le plus souvent la forme soit d’un « système de primes forfaitaires lié à la vie de l’invention » soit d’une combinaison de telles primes avec une rémunération variant en fonction de l’exploitation de l’invention.
Les inventions « hors mission » se subdivisent en deux catégories : les inventions « hors mission attribuables » et les inventions « hors mission non attribuables ».
Les premières sont les inventions faites par le salarié « soit dans le cours de l’exécution de ses fonctions, soit dans le domaine des activités de l’entreprise, soit par la connaissance ou l’utilisation des techniques ou de moyens spécifiques à l’entreprise, ou de données procurées par elle ».
Ces inventions appartiennent au salarié, mais l’employeur a le droit de les revendiquer, c’est-à-dire de « se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet » moyennant le paiement au salarié d’un « juste prix ». Il doit le faire dans le délai de quatre mois à compter de la date de réception de la déclaration de l’invention.
Si les parties ne parviennent pas à s’entendre, la somme qui revient à l’inventeur est fixée par la Commission nationale des inventions des salariés ou par le tribunal de grande instance en fonction, d’une part, des contributions de chacune des parties à la réalisation de l’invention et, d’autre part, de l’intérêt industriel et commercial de celle-ci.
La Commission nationale des inventions des salariés est une instance paritaire qui réunit un représentant des salariés ainsi qu’un délégué des employeurs. Elle est présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire, dont la voix est prépondérante en cas de partage.
Les secondes, c’est-à-dire les inventions « hors mission non attribuables », regroupent toutes les inventions n’entrant pas dans les catégories précédentes. Réalisées en dehors de toute mission inventive et dépourvues de tout lien avec l’entreprise, ces inventions, souvent qualifiées de « libres », appartiennent au salarié.
Dans tous les cas, le salarié a l’obligation de déclarer « immédiatement » son invention à son employeur et d’en indiquer l’objet, les circonstances de la réalisation et la catégorie dans laquelle il estime qu’elle se range.
En France, toutes les inventions liées à l’activité professionnelle du salarié sont donc susceptibles de donner lieu à une compensation financière, même lorsque leur auteur est explicitement investi par son employeur d’une mission inventive.
Cependant, le régime juridique de l’inventeur salarié est souvent considéré comme peu incitatif, notamment à cause de l’absence de règles précises portant sur la rémunération.
Droit d’attribution au bénéfice de l’employeur
Il convient donc de stipuler et encadrer au contrat de travail du salarié un droit d’attribution au bénéfice de l’employeur (et non la cession elle-même).
Selon les modalités de l’Art. R. 611-7 du CPI, le délai d’attribution ouvert à l’employeur pour revendiquer le droit d’attribution est de quatre mois, sauf accord contraire entre les parties qui ne peut être que postérieur à la déclaration de l’invention.
Ce délai court à compter de la date de réception par l’employeur de la déclaration de l’invention contenant les indications prévues aux articles R. 611-2 (1° et 2°) et R. 611-3 ou, en cas de demande de renseignements complémentaires reconnue justifiée, de la date à laquelle la déclaration a été complétée.
La revendication du droit d’attribution s’effectue par l’envoi au salarié d’une communication précisant la nature et l’étendue des droits que l’employeur entend se réserver.
La rémunération complémentaire ou juste prix
Le principe de cette rémunération complémentaire ou juste prix suppose que :
- l’invention soit brevetable
- l’employeur soit intéressé et si oui la conclusion impérative d’un écrit
- le versement d’un juste prix
Défaut d’accord entre les parties
Le salarié doit obtenir, au titre de son invention, un juste prix qui, à défaut d’accord entre les parties, est fixé par la commission de conciliation instituée par l’article L. 615-21 du CPI ou par le tribunal judiciaire : ceux-ci prendront en considération tous éléments qui pourront leur être fournis notamment par l’employeur et par le salarié, pour calculer le juste prix tant en fonction des apports initiaux de l’un et de l’autre que de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention.
La contractualisation : légalité des critères en amont
Il est légal de fixer au contrat de travail du salarié et en amont des critères précis de rémunération complémentaires (et non des barèmes de rémunération). En effet, la pratique des barèmes pourrait être sanctionnée car non librement négociés (décision unilatérale de l’employeur).
Le montant de la compensation doit tenir compte de trois éléments : l’intérêt économique de l’invention, les fonctions du salarié dans l’entreprise et le rôle de cette dernière dans le processus d’invention.
La compensation financière pourrait aussi résulter de la multiplication de la valeur de l’invention par un facteur dit « de participation », c’est-à-dire un coefficient qui chiffre la contribution personnelle de l’inventeur et tient compte du fait que l’invention est rarement le fait d’un seul individu.
Plusieurs méthodes pour calculer la valeur de l’invention, parmi lesquelles l’analogie avec les licences et le profit pour l’entreprise. La première méthode est la plus utilisée : l’inventeur reçoit alors une redevance de licence, c’est-à-dire un certain pourcentage du chiffre d’affaires lié à l’invention. Ce pourcentage varie selon les secteurs d’activité. Il s’élève en moyenne à 0,075 %, en étant le plus souvent compris entre 0,005 % et 0,5 %.
Le facteur de participation est théoriquement compris entre 0,01 et 0,99. Il est calculé en fonction de plusieurs éléments, en particulier du poste et des fonctions de l’inventeur dans l’entreprise, des instructions reçues de la hiérarchie et des informations communiquées par l’entreprise. La plupart des inventions sont le fait de développeurs-chercheurs, pour lesquels le facteur de participation est le plus souvent compris entre 0,1 et 0,2.
Le juste prix est fixé en fonction des apports initiaux de l’un et de l’autre et de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention.
Les critères envisageables (validés dans l’affaire 3M)
TGI Paris, 3-1, 14 avril 2016, RG 14/17322, affaire 3M :
Un paiement forfaitaire de 10.000 euros à la délivrance du brevet (somme divisée en fonction du nombre d’inventeurs) et donc sans lien avec l’exploitation du brevet puis le versement d’une deuxième somme en cas d’exploitation du brevet pendant la période de 10 ans qui
suit le dépôt calculée en fonction du salaire.
L’accord prévoit un second versement à l’inventeur salarié en cas d’exploitation commerciale de l’invention dans les 10 ans suivant le dépôt du brevet protégeant l’invention concernée, dans les conditions suivantes : le montant du complément est évalué selon un barème de cotation reposant sur les 4 critères dégagés par la jurisprudence :
• le contexte général de la recherche,
• le degré de difficulté de la perfection de l’invention,
• la contribution personnelle de l’inventeur et, le degré d’intérêt industriel et commercial. Le second versement doit être proratisé en fonction du nombre de co inventeurs déclarés et est effectué sous forme d’un versement unique et définitif,
Le montant du second versement, calculé sur la base d’un mois de salaire brut, est compris entre 0,4 mois et un maximum de 3 mois de salaire brut.
L’accord Pasteur :
Le montant de la rémunération supplémentaire alloué à l’ensemble des salariés bénéficiaires, par invention brevetée, correspondra à :
– 50 % de la part des redevances nettes annuelles dont le montant est inférieur ou égal à 200 000 euros
– 25% de la part des redevances nettes annuelles dont le montant est supérieur à 200 000 euros.
Exemple: Si lors d’une année N, le montant de la redevance nette annuelle est de 280k euros, le montant de la rémunération supplémentaire est de (50%*200 000) + (25%*80 000) = 120 000 euros
L’accord Air Liquide
Application de coefficients pondérateurs :
C1: cadre général de la recherche
C2: difficulté de mise au point
C3: portée du brevet
C4: intérêt économique
C5: autres critères
Avec C1 + C2 + C3 + C4 + C5 = 1
E : coefficient exceptionnel
Sm: salaire moyen brut annuel dans l’entreprise (50 000 euros)
Transposer ce qui existe pour les fonctionnaires :
Article R611-14-1 du CPI :
I.-Pour les fonctionnaires ou agents publics de l’Etat et de ses établissements publics relevant des catégories définies dans l’annexe au présent article et qui sont les auteurs d’une invention mentionnée au 1 de l’article R. 611-12, la rémunération supplémentaire prévue par l’article L. 611-7 est constituée par une prime d’intéressement aux produits tirés de l’invention par la personne publique qui en est bénéficiaire et par une prime au brevet d’invention.
II.-La prime d’intéressement est calculée, pour chaque invention, sur une base constituée du produit hors taxes des revenus perçus chaque année au titre de l’invention par la personne publique, après déduction de la totalité des frais directs supportés par celle-ci pour l’année en cours ainsi que des frais directs supportés les années antérieures n’ayant pas fait l’objet de déduction faute de revenus suffisants, et affectée du coefficient représentant la contribution à l’invention de l’agent concerné. La prime au brevet d’invention n’est pas prise en compte dans les frais directs.
La prime due à chaque agent auteur d’une invention correspond, charges comprises, à 50 % de la base définie ci-dessus, dans la limite du montant du traitement brut annuel soumis à retenue pour pension correspondant au deuxième chevron du groupe hors échelle D, et, au-delà de ce montant, à 25 % de cette base.
La prime d’intéressement est versée annuellement et peut faire l’objet d’avances en cours d’année.
III.-La prime au brevet d’invention a un caractère forfaitaire. Son montant est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de la fonction publique et de la recherche. Elle est pour chaque agent affectée du coefficient représentant sa contribution à l’invention.
Cette prime est versée en deux tranches. Le droit au versement de la première tranche, qui représente 20 % du montant de la prime, est ouvert à l’issue d’un délai d’un an à compter du premier dépôt de la demande de brevet. Le droit au versement de la seconde tranche est ouvert lors de la signature d’une concession de licence d’exploitation ou d’un contrat de cession dudit brevet.
IV.-Lorsque plusieurs agents sont auteurs d’une même invention, la contribution respective de chacun d’eux à l’invention, représentée par un coefficient, est déterminée définitivement avant le premier versement annuel au titre de la rémunération supplémentaire mentionnée au I ou, le cas échéant, avant le versement d’avances, selon des modalités arrêtées par le ministre ayant autorité sur le service ou par l’ordonnateur principal de la personne publique. Lorsqu’un seul agent est auteur de l’invention, le coefficient représentant sa contribution est égal à 1.
Si l’invention résulte d’une collaboration entre agents relevant de plusieurs personnes publiques, les modalités de répartition et de paiement de la prime d’intéressement et de la prime au brevet d’invention sont arrêtées de concert par les personnes publiques concernées.
V.-Lorsque l’invention a été réalisée par l’agent dans le cadre de son activité principale, la rémunération due au titre de la prime d’intéressement et de la prime au brevet d’invention lui est versée, en complément de sa rémunération d’activité, sans autre limitation que celle prévue.
Le cas échéant, la prime d’intéressement continue d’être versée à l’agent pendant le temps d’exploitation de l’invention, s’il quitte ses fonctions pour quelque cause que ce soit ou est admis à faire valoir ses droits à pension de retraite. En cas de décès de l’agent, la prime d’intéressement et la prime au brevet d’invention sont versées jusqu’au terme de l’année civile du décès.
Rémunérations complémentaire : les points juridiques déjà jugés
Confirmation de la nullité de l’avenant à la Convention collective des Industries chimiques subordonnant le droit à octroi d’une gratification à l’exploitation de l’invention dans les 10 ans (CA de Paris, Pôle 5 chambre 2, Gilles R… c/ L’OREAL du 11 mars 2011).
Compétence des juridictions sur la rémunération complémentaire : le Tribunal Judiciaire n’est pas compétent (au profit du Conseil de prud’hommes) en matière de rémunération supplémentaire d’inventeur salarié en cas de stipulations spécifiques au cas du salarié inventeur insérées dans la convention collective (CA Angers, 24 février 2022)
« A défaut d’avoir défini des critères négociés avec les syndicats au sein de l’entreprise dans le cadre de la convention collective de la métallurgie, la société DRAKA COMTEQ ne peut reprocher aux salariés défendeurs d’avoir utilisé, pour chiffrer leurs demandes, les critères applicables tels que définis par rarticle R 611-14-1 II du Code de la propriété intellectuelle, critères qui constituent une méthode calcul transposable à la situation des salariés d’une
entreprise privée et sont des éléments objectifs pour évaluer les sommes dues à chacun.
En conséquence, le tribunal retient cette méthode de calcul et fait droit aux demandes de X, Y et Z à hauteur de 450.000 euros pour X, 310.000 euros pour Y et 280.000 euros pour Z » (TGI Paris, 3-1, 10/11/2008, RG 07/06280, aff. Draka Comtech)
« II n’existe en l’espèce aucun accord d’entreprise ni de clauses du contrat de travail, liant le salarié à son employeur, fixant les conditions de la rémunération de l’inventeur […]. En réalité, à défaut de disposition légale ou réglementaire fixant les modalités de la rémunération supplémentaire due à un salarié pour une invention de mission, non prévue par le contrat de travail ni par une convention collective, ni par un accord d’entreprise, les juges doivent par une appréciation souveraine en fonction des éléments de chaque cause, évaluer la rémunération supplémentaire au vu des éléments qui leur sont produits, en tenant compte du cadre général de la recherche, de l’intérêt économique de l’invention, de la contribution personnelle de l’inventeur et des difficultés de mise au point » (TGI Paris, 3-2, 26/5/2015, RG 13/08458, aff. Pierre FABRE)
« Cet accord collectif prévoit comme suit les différentes rémunération supplémentaire dues:
500 euros bruts pour le dépôt : 1.500 euros bruts pour la délivrance Europe : 1 000 euros pour chaque invention non exploitée une somme supplémentaire en cas de commercialisation […]
La valeur de ce brevet pionnier a été admise par la société EJS qui a accepté de payer à M. A la somme de 2 millions d’euros pour le détenir dans son portefeuille de brevet et qui a communiqué sur le développement économique qu’elle espérait du fait de cette invention.
En conséquence, l’accord d’entreprise n’ayant pas précisé quelle rémunération supplémentaire accorder pour un brevet pionnier qui n’a pas directement été exploité mais a permis le dépôt de brevets suivants qui eux sont exploités, il y a lieu de fixer à 50.000 euros la somme devant revenir à M.X (TGI Paris, 20 juin 2013)
TGI Paris, 3-2, 23 mars 2018, RG 15/00961 : « Ainsi, à défaut pour l’employeur de justifier avoir mis son salarié en mesure de pouvoir exercer cette action, soit en prévoyant une disposition particulière dans son contrat de travail, soit en mettant en œuvre une procédure interne à l’entreprise aisément accessible au salarié lui permettant d’être informé de manière suffisamment précise sur les délais et conditions de mise en œuvre du bénéfice de ladite rémunération supplémentaire, le cas échéant en renvoyant aux dispositions d’une convention collective, il convient d’apprécier concrètement au regard des circonstances de l’espèce et notamment des fonctions du salarié au sein de l’entreprise ou de celles qu’il a exercées après son départ en relation ou non avec l’invention dont il se prévaut ou encore de l’accessibilité par ce dernier à des informations nécessaires à l’exercice de son action en paiement, la date à laquelle il a eu ou aurait dû avoir connaissance de ces éléments.».
Affaire SKF France : Une charte d’entreprise est unilatérale et ne constitue pas un accord d’entreprise Considérant cependant que ce mode de rémunération, fixé unilatéralement
par l’employeur, n’est pas prévu par la convention collective de la métallurgie ; qu’il n’a pas fait l’objet d’un accord d’entreprise au sein de la société SKF FRANCE ; que n’ayant pas été soumis à l’accord exprès et écrit de M. A, il n’a pas été intégré à son contrat de travail.
TGI Paris, 3-1, 3 juin 2013, RG 11/18262 : « Il convient de constater que M. A a formé sa réclamation en rémunération supplémentaire dès le 30 juin 2007 pour les brevets déposés par la société EJS pour lesquels son nom est mentionné comme co-inventeur, que la société EJS a conclu un accord d’entreprise relatif à la rémunération supplémentaire en date du 25 juin 2010 avec effet rétroactif au 1er janvier 1998, que a quitté la société le 20 mars 2010.
Contrairement à ce que soutient, cet accord qui prévoit une clause de rétroactivité qui
est manifestement favorable aux salariés puisqu’elle exclut tout débat sur la prescription des demandes pour les brevets déposés à compter du 1er janvier 1998, lui est donc applicable pour le brevet FR 775 qui a été déposé le 25 janvier 1999 au nom du GIE AGRO INDUSTRIE.
CA Paris, 6-10, 14 septembre 2016 : les clauses interdisant au salarié de procéder à des dépôts de créations inventées pendant l’exécution de son contrat / de publier des articles scientifiques / des informations commerciales ou techniques relatives à Ilog limitent la liberté d’utilisation du savoir acquis par le salarié et « sont en conséquence assimilables à une clause de non-concurrence » ; allocation de 60 000 euros
TGI Paris, 3-2, 23 mars 2018, RG 15/00961 : « En application de l’article L. 611-7 précité, le droit à la rémunération supplémentaire de Monsieur Y X au titre de l’invention de mission qu’il a réalisée est né en 1998, date de la réalisation de l’invention, de telle sorte que l’action en paiement de cette rémunération était soumise à cette date, en raison de sa nature de créance salariale, à la prescription quinquennale de l’ancien article 2277 du code civil […]
CA Paris, 5-2, 2 mars 2018, RG 16/23992 : Le salarié doit avoir connaissance des éléments utiles au calcul de cette rémunération supplémentaire
CA Paris, 30 juin 2015, 5-1, RG 13/10097 : L’invention ayant fait l’objet du brevet FR 09 50127, dont M. A est l’inventeur a été réalisée par lui à l’occasion de l’exécution de son contrat de travail avec la société Icare Développement, aux droits de laquelle interviennent sur ce
point les sociétés INS et Télécom Design, et dans le cadre de la mission qui lui était confiée et doit donc recevoir la qualification d’invention de mission ». La cour évalue la rémunération supplémentaire « à la somme de 50.000 € que la SA Télécom Design, actuelle titulaire des
droits sur le brevet, sera condamnée à lui payer ».
Cass., com., 31 janvier 2018, pourvoi 16-13262 : « à supposer l’invention de mission caractérisée, le droit à rémunération supplémentaire du salarié ne peut être invoqué qu’à l’encontre de l’employeur et prend naissance à la date de réalisation de l’invention
brevetable »
CA Paris, 6-10, 14 septembre 2016 : Le pôle social de la Cour est compétent pour connaître de la demande de rémunération supplémentaire pour invention présentée par le salarié. « Même si cette invention n’était pas forcément brevetable, l’article 75 de la convention collective Syntec prévoit qu’une invention ou une innovation émanant d’un salarié et utilisée par l’entreprise peut donner lieu à l’attribution de primes » ; allocation de 100.000 euros
TGI Paris, 3-2, 23 mars 2018, RG 15/00961 : Il ressort de la combinaison de ces deux articles qu’il ne suffit donc pas être titulaire d’un droit à rémunération supplémentaire, lequel naît en application de l’article L. 611-7 susvisé à compter du jour où le salarié réalise une invention dans le cadre de la mission qui lui est confiée par son employeur, pour que le délai de prescription de son action en paiement de cette rémunération commence à courir, mais qu’il convient de rechercher concrètement la date à laquelle le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action en paiement, sans pour autant qu’il soit nécessaire de subordonner ce point de départ à la connaissance de tous les éléments pour déterminer le montant de sa créance, la possibilité pour le salarié d’exercer son droit à
rémunération supplémentaire ne devant pas se confondre avec la connaissance par le salarié du montant de la rémunération qui lui est due ».
CA Versailles, 16 janvier 1996, RG n 94-23877 : Le juste prix versé en contrepartie d’une invention hors mission attribuée à l’employeur revêt le caractère d’une rémunération au sens de l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 2, 24 février 2017, n° 16/04710 : « Les dispositions de la convention collective nationale des industries chimiques, combinées à celles de l’article L. 611-7 du CPI, mettent à la charge de l’employeur des obligations tenant d’une part, au paiement d’une rémunération supplémentaire et d’autre part, à l’information due à l’inventeur salarié et relative notamment aux modalités de calcul de la rémunération supplémentaire. L’inventeur salarié a agi en responsabilité contractuelle à l’encontre de son ancien employeur pour manquement à son obligation d’information sur le calcul des rémunérations supplémentaires qui lui ont été versées.
Le point de départ du délai de la prescription quinquennale se situe, conformément à l’article 2224 du Code civil, au jour où le demandeur « a connu ou aurait dû connaitre » les faits lui permettant d’engager son action, soit au jour du paiement de la rémunération supplémentaire si un tel paiement a été effectué ou au jour où la gratification ou la rémunération supplémentaire aurait dû être payée si elle ne l’a pas été, soit à compter du début de l’exploitation de l’invention pour autant que cette dernière entre dans le champ d’application de la convention collective applicable. Les demandes en responsabilité non prescrites concernant les inventions restantes sont mal fondées.
En effet, les pièces versées aux débats démontrent suffisamment que le salarié avait accès aux informations qu’il réclame. Ainsi, le système de calcul de la rémunération supplémentaire mis en place par l’employeur était accessible par ses salariés, notamment sur l’intranet de la société. Par ailleurs, le salarié, qui occupait des fonctions équivalentes à celles de cadre dirigeant et qui déclarait lui-même chaque année la mise en ¿uvre de ses inventions dans des produits cosmétiques dont il assurait la promotion, connaissait le sort de ses inventions et l’étendue de leur exploitation. »