Hospitalisation sous contrainte : irrégularités et droits du patient en question

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Hospitalisation sous contrainte : irrégularités et droits du patient en question

L’Essentiel : Un patient, né le 26 janvier 1983, a été admis en soins psychiatriques contraints le 22 janvier 2025, suite à une demande de son père. Cette admission a été décidée par le directeur de l’hôpital après que le patient ait été conduit aux urgences en raison de troubles du comportement. Deux certificats médicaux ont confirmé la nécessité de soins en milieu hospitalier spécialisé. Le directeur a saisi le juge du Tribunal Judiciaire le 29 janvier 2025. Lors de l’audience, l’avocat du patient a demandé la mainlevée de l’hospitalisation, arguant des irrégularités dans la procédure. Le juge a ordonné la mainlevée.

Admission en soins psychiatriques

M. [K] [J], né le 26 janvier 1983, a été admis en soins psychiatriques contraints le 22 janvier 2025, suite à une demande de son père, M. [J] [Z]. Cette admission a été décidée par le directeur de l’hôpital de [Localité 3] après que M. [K] ait été conduit aux urgences par les forces de l’ordre en raison de troubles du comportement. Deux certificats médicaux, établis le même jour, ont confirmé la nécessité de soins en milieu hospitalier spécialisé.

Procédure judiciaire

Le directeur de l’hôpital a saisi le juge du Tribunal Judiciaire le 29 janvier 2025, respectant le délai légal de huit jours après l’admission. Les certificats médicaux requis pour justifier la poursuite de l’hospitalisation ont été fournis, attestant que M. [K] ne pouvait pas consentir à son hospitalisation en raison de son état mental.

Débats et irrégularités

Lors de l’audience publique du 31 janvier 2025, M. [K] n’a pas pu signer son avis de présence, bien qu’il ait été informé de l’audience. L’avocat de M. [K], Maître Jean Chevrollier, a demandé la mainlevée de l’hospitalisation, arguant que le certificat de 24 heures avait été établi tardivement et que la décision du directeur était également tardive.

Motifs de la décision

Le juge a constaté des irrégularités dans la procédure, notamment que le certificat de 24 heures avait été rédigé 44 heures après le début de l’hospitalisation. De plus, M. [K] n’avait pas été informé de ses droits dans un délai raisonnable, ce qui constituait une violation des dispositions légales. En conséquence, le juge a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation sans consentement.

Effets de la décision

La mainlevée de l’hospitalisation prendra effet dans un délai de vingt-quatre heures, permettant à l’établissement de mettre en place un programme de soins si nécessaire. Le juge a également rappelé que cette décision pouvait faire l’objet d’un appel dans un délai de dix jours.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’admission en soins psychiatriques contraints selon l’article L3212-1 du code de la santé publique ?

Selon l’article L3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement que lorsque deux conditions sont réunies :

1. Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement.

2. Son état mental impose des soins immédiats, assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2 du I de l’article L. 3211-2-1.

Ces conditions visent à protéger les droits des patients tout en garantissant la nécessité de soins appropriés.

Quelles sont les obligations du directeur d’établissement lors de l’admission en soins psychiatriques ?

Le directeur de l’établissement doit prononcer la décision d’admission lorsque :

1. Il a été saisi d’une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade, à l’exclusion des personnels soignants exerçant dans l’établissement.

2. La décision d’admission doit être accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de 15 jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I de l’article L 3212-1 sont réunies.

Ces exigences garantissent que l’admission est fondée sur des évaluations médicales récentes et appropriées.

Quel est le rôle du juge du Tribunal Judiciaire dans la poursuite de l’hospitalisation complète ?

Selon l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique, l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge du Tribunal Judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure.

Cette saisine doit intervenir avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission, puis de six mois à compter de la dernière décision du juge.

Cette procédure vise à assurer un contrôle judiciaire sur les mesures privatives de liberté, garantissant ainsi les droits des patients.

Quelles sont les conséquences d’une procédure irrégulière dans le cadre de l’hospitalisation sans consentement ?

En l’espèce, la procédure a été jugée irrégulière car le certificat de 24 heures a été rédigé 44 heures après le début de l’hospitalisation contrainte.

De plus, la décision du directeur n’a été notifiée au patient que le même jour, sans que l’heure de prise de décision soit précisée.

Ces irrégularités ont conduit à un grief pour le patient, qui n’a pas eu connaissance de ses droits dans un délai raisonnable, en violation des dispositions de l’article L 3211-3 alinéa 3 du Code de la Santé Publique.

Ainsi, la mainlevée de l’hospitalisation sans consentement a été ordonnée pour remédier à ces violations.

Quelles sont les modalités de notification de la décision de mainlevée de l’hospitalisation ?

La décision de mainlevée de l’hospitalisation complète doit être notifiée au patient, au directeur de l’hôpital, à l’avocat du patient, au tiers demandeur à l’hospitalisation, ainsi qu’au Procureur.

Cette notification doit être effectuée dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de l’ordonnance, afin de permettre la mise en œuvre d’un programme de soins si nécessaire.

Ces modalités garantissent la transparence et le respect des droits des personnes concernées par des mesures de soins sans consentement.

COUR D’APPEL D’ANGERS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’ ANGERS

Dossier : N° RG 25/00077 –
N° Portalis DBY2-W-B7J-H2AT
Minute : 25/00077
ORDONNANCE EN PROCEDURE
D’HOSPITALISATION SOUS CONTRAINTE

DEMANDEUR :

Monsieur LE DIRECTEUR DU [2]
Non comparant, ayant fait ses observations par écrit

Monsieur [Z] [J], Père et Tiers demandeur à l’hospitalisation, Comparant

DÉFENDEUR :

Monsieur [K] [J]
Non comparant, représenté par Maître Jean CHEVROLLIER, avocat au barreau d’ANGERS

Nous, Jean-Yves EGAL, Premier Vice-Président au Tribunal Judiciaire d’ANGERS, assisté de Murielle LECHAT-MARIN, faisant fonction de greffier,

Vu l’article L3212-1 du code de la santé publique,

Vu la décision d’admission en soins psychiatriques contraints prise par le directeur de l’hôpital de [Localité 3] le 22 janvier 2025, concernant :

M. [K] [J]
né le 26 Janvier 1983 à [Localité 1]

Vu la saisine en date du 29 janvier 2025 du directeur de l’hôpital et les pièces jointes à la saisine, tendant à la poursuite de l’hospitalisation sans consentement de M. [K] [J],

Vu l’avis de monsieur le Procureur de la République en date du 30 janvier 2025 porté à la connaissance des parties à l’audience,

Vu les débats tenus en audience publique le 31 janvier 2025.
M. [J] [K] n’a pas été en mesure de signer son avis sur sa présence à l’audience et il est attesté par les infirmiers ayant signé la demande d’avis que le patient a été informé de l’audience et ne souhaitait pas y participer.

Le tiers a été avisé de l’audience et entendu à l’audience.

Maitre Jean Chevrollier a sollicité la mainlevée de la mesure en faisant valoir que le certificat de 24h et la décision du directeur étaient tardifs.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE:

Selon l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
– ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
– son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2 du I de l’article L. 3211-2-1 ;

Le directeur de l’établissement prononce la décision d’admission :
1° Soit lorsqu’il a été saisi d’une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci, à l’exclusion des personnels soignants exerçant dans l’établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu’il remplit les conditions prévues au présent alinéa, le tuteur ou le curateur d’un majeur protégé peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La décision d’admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de 15 jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I de l’article L 3212-1 sont réunies.

Selon l’article L. 3211-12-1 du même code, l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge du Tribunal Judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission puis de six mois à compter de la dernière décision du juge. Cette saisine est accompagnée d’un avis motivé du psychiatre.

M. [J] [K] né le 26 janvier 1983 a été admis le 22 janvier 2025 en soins psychiatriques sous la forme de l’hospitalisation complète sur décision du directeur du [2] en date du 24 janvier, à la demande d’un tiers, en l’espèce de M. [J] [Z] son père , au vu des conclusions d’un premier certificat médical en date du 22 janvier à 21h54 émanant du docteur [O] [F] et d’un second certificat médical en date du 22 janvier à 22h06 émanant du DR [U], lesquels indiquaient que le patient avait été adressé par les forces de l’ordre au service des urgences pour trouble du comportement avec agitation, qu’il avait déjà été hospitalisé en psychiatrie et se trouvait sans suivi ; les médecins relèvent que le patient présentait des troubles du comportement se caractérisant notamment par des symptômes délirants de contamination inébranlables et envahissants, altérant ses capacités de raisonnement et de discernement ; ces symptômes sont à l’origine d’une tension psychique forte et il existe une souffrance morale associée et un retentissement social très élevé; enfin il est relevé que le patient refusait l’hospitalisation nécessaire en psychiatrie.

Le contenu détaillé de ces certificats médicaux caractérisent pleinement la nécessité de soins en hospitalisation complète en milieu hospitalier spécialisé de par la nature et la gravité des troubles constatés, et sous contrainte puisqu’il n’était pas possible d’obtenir le consentement de M. [J] [K].

La demande du tiers et les justificatifs d’identité nécessaires, sont joints au dossier.

L’information légale prévue par l’article L 3211-3 portant sur les modalités de cette hospitalisation ainsi que sur les droits des patients a été délivrée à M. [J] [K] le 24 janvier.

Le juge du Tribunal Judiciaire a été saisi le 29 janvier, soit avant l’expiration du délai de 8 jours à compter de l’admission intervenue le 22 janvier 2025, conformément aux dispositions de l’article L 3211-12-1 du Code de la Santé Publique.

Les conditions légales ont donc été respectées.

Le certificat médical des 24 heures a été rédigé par le docteur [W] le 24 janvier 2025 à 17h15 et le certificat médical des 72 heures a été rédigé par le docteur [B] le 25 janvier à 12h20 ; ils comportent les éléments de motivation requis pour justifier en fait et en droit la poursuite de l’hospitalisation complète sous contrainte.

La décision de maintien de l’hospitalisation complète a été prise le 27 janvier 2025 par le DIRECTEUR DE L’HOPITAL et portée le 27 janvier 2025 à la connaissance de M. [J] [K].

L’ avis motivé en date du 27 janvier 2025, dressé par le docteur [M] conclut à la nécessité d’une poursuite des soins en hospitalisation complète sans consentement en relevant notamment que le patient présentait encore une désorganisation de la pensée, une difficulté à étayer ses hypothèses entrainant une perte de cohérence de son discours, des idées délirantes, une absence de critique des troubles du comportement ayant conduit à son hospitalisation dans un contexte d’anosognosie.

En l’espèce la procédure est irrégulière puisque le certificat de 24 h a été réalisé en réalité seulement 44 heures après le début de l’hospitalisation contrainte; en outre la décision du directeur n’est intervenue que le 24 janvier et le patient en a eu connaissance le même jour sans que l’heure de prise de décision et de notification soient connues; le patient a nécessairement subi un grief en raison de ces irrégularités puisqu’il n’a pas eu connaissance de ses droits dans un délai raisonnable en violation des dispositions de l’article L 3211-3 alinéa 3 du Code de la Santé Publique et que la décision d’admission est intervenue tardivement.

Par conséquent il convient d’ordonner la main levée de cette mesure d’hospitalisation sans consentement.

Dans l’intérêt de M. [J] [K] la mainlevée interviendra avec effet différé de vingt-quatre heures au plus pour que l’établissement puisse le cas échéant, mettre en œuvre un programme de soins et ce en application de l’article L.3211-12-1, III alinéa 2 du code de la santé publique.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Ordonnons la mainlevée de l’hospitalisation complète de Monsieur [K] [J]

Disons toutefois que la mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu’un programme de soins puisse le cas échéant être établi en application des dispositions de l’article L 3211-2-1 II ;

Rappelons qu’appel peut être interjeté de cette décision dans un délai de dix jours de sa notification, par déclaration transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel.

Ainsi rendu le 31 janvier 2025 à 10h30.

Le greffier, Le juge du tribunal judiciaire chargé du contrôle des mesures privatives ou restrictives de liberté dans le domaine des soins sans consentement,

Mentions de notification :

Copie de la présente ordonnance transmise à M. [K] [J] par l’intermédiaire du directeur de l’hôpital
Copie de la présente ordonnance transmise à M. le directeur de l’hôpital,
Copie de la présente ordonnance transmise à Me Jean CHEVROLLIER
Copie de la présente ordonnance transmise par lettre simple au tiers demandeur à l’hospitalisation
Copie de la présente ordonnance transmise à M. Le Procureur
le 31/01/2025
le greffier


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