Hospitalisation sous contrainte : évaluation des troubles mentaux et nécessité de soins.

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Hospitalisation sous contrainte : évaluation des troubles mentaux et nécessité de soins.

L’Essentiel : Madame [U] [K] a témoigné lors d’une audience publique sur son hospitalisation psychiatrique, se déclarant victime d’un vol et d’une agression. Elle a nié avoir agressé une adolescente et a demandé à être confrontée à elle. Bien qu’acceptant des traitements, elle contestait la contrainte de son hospitalisation. L’avocat de [U] [K], Me Marianna PARONIAN, a soulevé une irrégularité dans la procédure, arguant que le certificat médical de 72 heures n’était pas suffisant. Cependant, le tribunal a jugé que les conditions légales pour l’hospitalisation étaient respectées, maintenant ainsi la mesure pour des raisons de sécurité.

Contexte de l’affaire

Madame [U] [K] a été entendue lors d’une audience publique concernant sa situation d’hospitalisation psychiatrique. Elle a exprimé son sentiment de dénuement suite à un vol dont elle a été victime, se considérant également comme une victime d’agression. Elle a relaté avoir été prise dans un guet-apens alors qu’elle se dirigeait vers un commissariat pour signaler le vol de ses sacs de voyage.

Déclarations de la patiente

Au cours de son témoignage, [U] [K] a affirmé qu’elle n’avait pas agressé l’adolescente qui l’accusait et a demandé à être confrontée à elle. Elle a également mentionné avoir porté plainte pour le vol de ses affaires et a exprimé son désir de quitter l’hôpital pour poursuivre son pèlerinage. Bien qu’elle ait accepté de prendre des traitements, elle a précisé qu’elle n’était pas d’accord avec la contrainte de son hospitalisation.

Arguments de la défense

L’avocat de [U] [K], Me Marianna PARONIAN, a soulevé une irrégularité dans la procédure, arguant que le certificat médical de 72 heures n’était pas suffisamment circonstancié pour justifier la nécessité de l’hospitalisation complète. Elle a également souligné que la patiente n’avait pas été impliquée dans les événements qui lui étaient reprochés.

Analyse de la décision judiciaire

Le tribunal a examiné la régularité de la procédure et a constaté que les conditions légales pour l’hospitalisation avaient été respectées. Le certificat médical établi dans les 72 heures a été jugé conforme, car il décrivait l’état mental de la patiente et justifiait la poursuite de l’hospitalisation complète en raison de troubles persistants.

Conclusion de la décision

Le tribunal a décidé de maintenir l’hospitalisation complète de [U] [K], considérant que son état mental nécessitait une surveillance constante pour sa sécurité et celle des autres. La décision a été notifiée aux parties concernées, avec la possibilité pour [U] [K] de faire appel dans un délai de 10 jours. Les dépens ont été laissés à la charge de l’État.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de l’hospitalisation complète selon le Code de la Santé Publique ?

L’article L 3211-12-1 I du Code de la Santé Publique stipule que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire n’ait statué sur cette mesure.

Cette décision doit être prise avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission, ou de la décision modifiant la forme de la prise en charge.

Le juge doit être saisi dans un délai de 8 jours suivant l’admission ou la modification de la prise en charge.

Dans le cas présent, l’admission de [U] [K] a eu lieu le 23 janvier 2025, et le délai de 12 jours expire le 3 février 2025, ce qui respecte les conditions énoncées dans ces textes.

Quelles sont les exigences relatives au certificat médical dans le cadre de l’hospitalisation psychiatrique ?

L’article L3211-2-2 du Code de la Santé Publique précise que lors de l’admission en soins psychiatriques, un médecin doit réaliser un examen somatique complet dans les vingt-quatre heures suivant l’admission.

Un psychiatre doit établir un certificat médical constatant l’état mental du patient et la nécessité de maintenir les soins psychiatriques.

Ce certificat doit être établi dans les soixante-douze heures suivant l’admission et doit conclure à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques.

En l’espèce, le certificat médical établi dans les 72 heures a décrit l’état de santé de la patiente et a justifié la poursuite de l’hospitalisation complète, répondant ainsi aux exigences de motivation de l’article L3211-2-2.

Quels sont les droits du patient en matière de consentement aux soins psychiatriques ?

L’article L3211-2-1 du Code de la Santé Publique stipule que le consentement du patient est nécessaire pour toute prise en charge, sauf en cas d’impossibilité de donner ce consentement en raison de troubles mentaux.

Dans le cas de [U] [K], il a été établi que ses troubles mentaux rendaient son consentement impossible, justifiant ainsi l’hospitalisation complète sous contrainte.

Les certificats médicaux ont confirmé la nécessité de maintenir cette mesure pour préserver son intégrité et celle d’autrui.

Ainsi, le consentement n’est pas requis lorsque l’état de santé du patient ne le permet pas, ce qui a été le cas ici.

Quelles sont les voies de recours contre la décision d’hospitalisation complète ?

La décision d’hospitalisation complète peut être contestée par appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel, conformément à l’article R93-2 du Code de Procédure Pénale.

Le recours doit être formé par déclaration motivée dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision.

Il est important de noter que ce délai n’est pas suspensif, sauf si le Procureur de la République demande une suspension.

Dans cette affaire, [U] [K] a la possibilité de contester la décision d’hospitalisation complète dans les délais impartis, ce qui lui garantit un droit de recours.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

Procédure de Soins Psychiatriques Contraints

Recours Obligatoire

Ordonnance Du Vendredi 31 Janvier 2025
N°Minute : 25/110
N° RG 25/00903 – N° Portalis DBW3-W-B7J-56ON

Demandeur
Monsieur le PREFET – ARS (AGENCE RÉGIONALE DE LA SANTE)
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 2]
Non comparant

Défendeur
Madame [U] [K]
SDF
née le 17 Octobre 1978
Comparante
Partie Jointe
Monsieur le Procureur de la République près le Tribunal judiciaire de Marseille
Non comparant

En Présence de :
LE DIRECTEUR DE L’HOPITAL [4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Non comparant
Nous, Clara GRANDE, Magistrat du siège du Tribunal Judiciaire, assistée de Pauline SAMMARTANO, Greffier et en présence de [M] [I], Greffier stagiaire ;

Vu la requête de Monsieur le PREFET – ARS (AGENCE RÉGIONALE DE LA SANTE) à Marseille en date du 27 Janvier 2025 reçue au greffe du Magistrat du siège du Tribunal Judiciaire le 27 Janvier 2025, tendant à voir examiner la situation de Madame [U] [K], dans le cadre du contrôle obligatoire de soins psychiatriques contraints sous le régime de l’hospitalisation complète institué par l’article L 3211-12-1 1°, 2°,3° du Code de la Santé Publique en sa rédaction issue de la loi n° 2011-803 du 05 juillet 2011 modifiée par la Loi n°2013-869 du 27 septembre 2013;

Vu les articles L 3211-12 et L 3211-12-1 et R 3211-30 du Code de la Santé Publique résultant du décret n°2014-897 du 15 août 2014;

Les communications et les avis prévus et imposés par l’article R 3211-11 du Code de la Santé Publique ayant été faites et donnés par le Greffe ;

Vu l’avis écrit de Monsieur le Procureur de la République en date du 30 Janvier 2025 tendant au maintien en soins contraints sous le régime de l’hospitalisation complète;

EXPOSÉ DE LA DEMANDE ET DE LA PROCÉDURE :

A l’appel de la cause, les parties n’ont pas sollicité le huis clos ; les débats ont donc été publics ;

Madame [U] [K], comparante en personne a été entendue et déclare : Par rapport à la mesure, je fais consciente à la justice et je ne peux pas la juger. Par rapport à une autre justice, par rapport au fait que je sois arrivée ici, je veux en parler ici.
Je suis en train de faire un pèlerinage auprès de [Localité 8].
Il y a 14 jours, des hommes m’ont volé mes sacs de voyage. J’ai été volé mais c’est aussi un viol car je me suis senti démunise. Je me dirigeais vers le commissariat de police et j’ai été prise dans un guet-apens. J’ai vu deux hommes partir et me sacs avaient disparu. 4 heures après, la voiture de police est arrivée et ils m’ont demandé la permission d’être fouillée. J’ai expliqué que je n’avais rien fait et ils m’ont dit qu’ils avaient reçu un coup de téléphone d’une adolescente qui se serait plainte que je l’avais agressée. Ils m’ont ensuite embarqué jusqu’au Commissariat de Police. A ce moment, je me suis expliqué et je leur ai dit que j’aurai aimé être confronté à cette adolescente alors que je ne l’ai pas agressé et que l’on m’a volé. J’ai porté plainte, et j’espère qu’ils l’ont bien enregistré. Ensuite, ils m’ont amené à l’hôpital.
Je me sens bien ici, ils me donnent des traitements et j’accepte de les prendre. Ils ne font rien de spécial, tout va bien.
Si je sors, je vais continuer mon chemin de Compostel mais je dois appeler mon assurance à [Localité 7]. J’ai de la famille qui habite à l’étranger.
J’ai porté plainte, et on m’a volé mes affaires donc je pense qu’il y a un quiproco. Je souhaite quitter l’hôpital.

Me Marianna PARONIAN, avocat commis d’office en application de l’article L 3211-12-2 alinéa 2 du Code de la Santé Publique , déclare soulever l’irrégularité de la procédure : Le certificat médical des 72h n’est pas circonstancié et on ne montre pas que l’hospitalisation est primordiale, qu’il n’y a pas de dangerosité. Il y a une contradiction.

Sur le fond, dans tous le dossier, elle nie tout ce qu’il s’est passé. Elle n’est jamais monté dans le bus car elle s’est fait voler ses affaires.
Sur les soins, elle n’est pas d’accord et elle dit qu’elle ne veut pas rester sous contrainte. Elle dit que si on l’oblige à prendre les traitements, elle les prendra mais elle n’est pas réellement d’accord.

A l’issue de l’audience, les parties ont été avisées que la décision est mise en délibéré ;

MOTIFS DE LA DÉCISION :

SUR LA FORME

Attendu que selon l’article L 3211-12-1 I du Code de la Santé Publique
“L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II ou par le représentant de l’Etat dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L. 3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, n’ait statué sur cette mesure :
« 1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ; le juge est alors saisi dans un délai de 8 jours à compter de cette admission ;
« 2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3 ; le juge est alors saisi dans un délai de 8 jours à compter de cette admission “;

Attendu en l’espèce que [U] [K] a fait l’objet d’une admission en soins psychiatriques et en hospitalisation complète par décision du 23 Janvier 2025 ; Que la période de 12 jours en cours expire donc le 03 Février 2025 ;

Que les conditions énoncées dans ces textes ont été respectées ;

Attendu que la saisine en vue du contrôle a été émise dans les formes et délais des articles R 3211-10 du Code de la Santé Publique;

Sur le moyen tiré du caractère insuffisamment circonstancié du certificat de 72h

L’article L3211-2-2 prévoit que lorsqu’une personne est admise en soins psychiatriques, elle fait l’objet d’une période d’observation et de soins initiale sous la forme d’une hospitalisation complète.

Dans les vingt-quatre heures suivant l’admission, un médecin réalise un examen somatique complet de la personne et un psychiatre de l’établissement d’accueil établit un certificat médical constatant son état mental et confirmant ou non la nécessité de maintenir les soins psychiatriques au regard des conditions d’admission définies aux articles L. 3212-1 ou L. 3213-1. Ce psychiatre ne peut être l’auteur du certificat médical ou d’un des deux certificats médicaux sur la base desquels la décision d’admission a été prononcée.

Dans les soixante-douze heures suivant l’admission, un nouveau certificat médical est établi dans les mêmes conditions que celles prévues au deuxième alinéa du présent article.

Lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques, le psychiatre propose dans le certificat mentionné au troisième alinéa du présent article la forme de la prise en charge mentionnée aux 1° et 2° du I de l’article L. 3211-2-1 et, le cas échéant, le programme de soins. Cette proposition est motivée au regard de l’état de santé du patient et de l’expression de ses troubles mentaux.

En l’espèce, le certificat médical établi avant les 72h, en date du 25 janvier 2025, s’il indique en effet que la patiente est en lien et qu’il n’existe pas d’agressivité ni de dangerosité psychiatrique, au regard des faits pour lesquels elle a été prise en compte par les services de police (faits reprochés d’agression sur une mineure), établit toutefois la persistance de troubles justifiant la poursuite de sa prise en charge dans le cadre d’une hospitalisation complète : “patiente bien connue du secteur qui présente des troubles psychiques avec des conduites d’errance pathologique et des difficultés à poursuivre les soins en ambulatoire du fait de son instabilité géographique”, discours marqué par des “idées délirantes de thématique mystique”, des “néologismes et une diffluence marquée”, un “rationalisme morbide”.

Ce certificat, qui décrit à la fois l’état de santé de la patiente ainsi que l’expression de ses troubles mentaux, répond à l’exigence de motivation de l’article L3211-2-2 du CSP.

Le moyen soulevé sera ainsi rejeté.

SUR LE FOND

ATTENDU qu’il résulte du dossier et des débats que l’hospitalisation complète continue à s’imposer;

Qu’en effet, [U] [K] a été hospitalisée dans le cours d’une mesure de garde à vue pour violences sur mineure de moins de 15 ans, en présentant divers troubles décrits dans le certificat médical initial, imposant son hospitalisation complète sous contrainte. En l’espèce, la patiente présentait à son arrivée les troubles suivants : discours hermétique, familiarité et désinhibition sans accélération psychomotrice franche, désorganisation idéique avec relâchements et associations. Il était relevé un contexte d’errance liée à l’absence de domicile fixe.

Il était souligné que ses troubles mentaux rendaient son consentement impossible et que son état rendait nécessaire une hospitalisation complète avec une surveillance constante afin de préserver son intégrité et celle d’autrui.

Les certificats médicaux établis pendant la période d’observation font état de la persistance des troubles et démontrent la nécessité de maintenir la mesure d’hospitalisation complète. L’avis médical établi en vue de l’audience préconise également le maintien de la mesure en la forme actuelle. La procédure étant régulière, le JLD ne saurait se prononcer sur les soins dont doit bénéficier la patiente, qui relèvent de la compétence exclusive des médecins.

Il y a lieu dans ces conditions d’autoriser la poursuite de l’hospitalisation complète de la patiente.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Clara GRANDE, Magistrat du siège du Tribunal Judiciaire, statuant par décision réputée contradictoire et en premier ressort ;

REJETONS le moyen soulevé ;

DISONS que les soins psychiatriques dont [U] [K] fait l’objet pourront se poursuivre sous la forme de l’hospitalisation complète ;

DISONS que cette décision sera notifiée à [U] [K], à Monsieur le Préfet de Bouches du Rhône requérant, à Monsieur le Procureur de la République, avec copie pour information au Directeur de l’établissement dans lequel les soins sont prodigués ;

RAPPELONS que la présente décision peut être frappée d’appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel d’Aix en Provence dans un délai de 10 jours à compter de sa notification.

Le recours doit être formé par déclaration motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel d’Aix en Provence, [Adresse 3] et notamment par courriel à [Courriel 5] ;
Le délai et le recours ne sont pas suspensifs ; seul le Procureur de la république peut demander au Premier Président de déclarer le recours suspensif.

LAISSONS les dépens à la charge de l’Etat en application de l’article R93-2 du Code de Procédure Pénale ;

LE GREFFIER, LE MAGISTRAT DU SIEGE.


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