Exploitation permanente de l’oeuvre musicale : une obligation de moyens renforcée

Notez ce point juridique

L’exploitation permanente et suivie de l’œuvre musicale constitue pour l’éditeur une obligation de moyens renforcée. Celle-ci est appréciée différement (plus souplement) pour les oeuvres de sonorisation d’oeuvres audiovisuelles.

Il convient pour apprécier en l’espèce l’étendue de son obligation de déterminer d’une part, si l’œuvre audiovisuelle a été exploitée, et d’autre part, si d’autres moyens de diffusion de l’œuvre musicale ont été envisagés par l’éditeur.

L’exploitation des œuvres précitées a eu lieu la plupart du temps du vivant de l’artiste et en lien avec la diffusion de l’œuvre audiovisuelle.

Toutefois, l’obligation d’exploitation suivie et permanente de l’œuvre doit être appréciée selon sa nature, s’agissant dans le cas présent de  » musique pour l’image  » dont elle est difficilement dissociable.

L’article L132-1 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction applicable au litige, définit le contrat d’édition comme  » le contrat par lequel l’auteur d’une oeuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’oeuvre, à charge pour elle d’en assurer la publication et la diffusion « .

Selon son article L132-12  » l’éditeur est tenu d’assurer à l’oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession « .

En l’espèce, les contrats de cession et d’édition musicale comportent une clause de cession du droit exclusif d’exploitation de l’œuvre musicale et de reproduction sous quelque forme que ce soit, ainsi qu’un droit de reproduction exclusif sur tous supports matériels connus et non encore connus.

En la cause, les contrats ont rappelé l’obligation d’exploitation permanente et suivie de l’œuvre musicale, et son exploitation commerciale conforme aux usages de la profession (article X des contrats).

Il est prévu à l’article XVIII des contrats qu’en ce qui concerne les musiques d’œuvres audiovisuelles,  » l’auteur dispense l’éditeur de procéder à la reproduction graphique de l’œuvre, l’auteur reconnaissant expressément que l’inclusion de l’œuvre musicale dans l’œuvre audiovisuelle constitue l’exploitation conforme aux usages de la profession telle que prévue par la loi « .

Le code des usages et bonnes pratiques de la profession précise que  » l’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale ne sont pas considérées comme assurées si la seule exploitation réalisée est celle de la diffusion musicale de l’œuvre audiovisuelle pour laquelle elle a été spécialement créée « ,

Il prévoit notamment que les œuvres relevant de la librairie musicale doivent être présentes sur le site de l’éditeur ou tout autre site présentant des catalogues thématiques, leur présence sur des supports physiques. Leur exploitation permanente et suivie est assurée par  » la production ou l’acquisition de leurs enregistrements radiophoniques, par la fixation de ces œuvres sur un support physique ou numérique, la recherche de leur placement dans des œuvres audiovisuelles, publicitaires ou multimédia « .

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne la succession de l’auteur-compositeur [C] [T], qui a cédé ses droits éditoriaux sur certaines de ses œuvres à la société TELE IMAGES EDITIONS, qui a ensuite été dissoute et a transmis son patrimoine à la société GETEVE PRODUCTIONS. La succession de [C] [T] a estimé que les œuvres n’étaient pas exploitées conformément aux contrats de cession et d’édition, et a demandé des justifications à GETEVE PRODUCTIONS. Après plusieurs mises en demeure restées sans réponse satisfaisante, la succession a assigné GETEVE PRODUCTIONS en justice pour inexécution contractuelle et résolution des contrats. Les parties ont des positions divergentes sur la prescription des demandes et sur le fond du litige, notamment en ce qui concerne les obligations d’exploitation des œuvres musicales de [C] [T]. La succession demande la résolution des contrats, des dommages et intérêts, ainsi que des frais de justice, tandis que GETEVE PRODUCTIONS conteste les accusations de manquements graves et soutient avoir assuré une exploitation conforme des œuvres.

Les points essentiels

Les montants alloués dans cette affaire:

Réglementation applicable

– Code civil
– Code de procédure civile
– Code de la propriété intellectuelle

Article 2224 du code civil:
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Le délai de prescription court en conséquence à compter de la date à laquelle les inexécutions reprochées ont pu être constatées.

Article 2233 du code civil:
La prescription ne court pas :
– à l’égard d’une créance qui dépend d’une condition, jusqu’à ce que la condition arrive
– à l’égard d’une action en garantie, jusqu’à ce que l’éviction ait lieu ;
– à l’égard d’une créance à terme, jusqu’à ce que ce terme soit arrivé.

Article 1383 du code civil:
L’aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques.

Article 4 du code de procédure civile:
L’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. Toutefois l’objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Article 1229 du code civil:
La résolution met fin au contrat / La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Article L132-1 du code de la propriété intellectuelle:
Le contrat d’édition est le contrat par lequel l’auteur d’une oeuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’oeuvre, à charge pour elle d’en assurer la publication et la diffusion.

Article L132-12 du code de la propriété intellectuelle:
L’éditeur est tenu d’assurer à l’oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Jean-marie GUILLOUX
– Maître Armelle FOURLON

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x
Scroll to Top