L’Essentiel : Monsieur [X] [L] a contesté le taux d’incapacité permanente partielle de 14% fixé par la CPAM du Rhône, arguant que ses séquelles d’une maladie professionnelle étaient sous-estimées. Lors de l’audience, il a souligné ses douleurs persistantes et son incapacité à exercer son métier de boulanger, entraînant son licenciement. La CPAM a défendu son évaluation, considérant la limitation des mouvements comme légère. Après consultation médicale, le tribunal a réévalué le taux d’incapacité à 16%, dont 7% pour le taux socio-professionnel, reconnaissant l’impact significatif de la maladie sur la carrière de Monsieur [X] [L].
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Contexte de l’affaireMonsieur [X] [L] a contesté une décision implicite de rejet de la Commission Médicale de Recours Amiable, qui avait confirmé une décision de la CPAM du Rhône fixant son taux d’incapacité permanente partielle à 14%. Cette décision était liée à des séquelles d’une maladie professionnelle survenue le 30/12/2019, avec une consolidation le 06/01/2023. Audience et arguments des partiesLors de l’audience du 26/09/2024, Monsieur [X] [L] a exprimé son désaccord avec le taux médical de 9% qui lui a été attribué, le jugeant insuffisant par rapport à ses séquelles. Il a évoqué des douleurs persistantes et des limitations dans ses mouvements, ainsi que des difficultés à exercer son métier de boulanger, ce qui a conduit à son licenciement. La CPAM, quant à elle, a soutenu que le taux attribué était approprié, arguant que la limitation des mouvements était légère. Consultation médicaleLe tribunal a ordonné une consultation médicale, réalisée par le Docteur [G] [N], qui a confirmé que le taux médical de 9% était justifié. Le médecin a noté une limitation légère des mouvements, sans constatation d’amyotrophie, et a conclu qu’il n’y avait pas lieu de majorer ce taux. Évaluation du taux socio-professionnelConcernant le taux socio-professionnel, le tribunal a examiné les éléments fournis par Monsieur [X] [L], notamment un avis d’inaptitude du médecin du travail. Ce dernier a confirmé l’inaptitude de l’assuré à son poste de boulanger, sans possibilité de reclassement. Le tribunal a donc décidé de réévaluer le taux socio-professionnel à 7%, tenant compte de l’impact de la maladie sur sa carrière. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré le recours de Monsieur [X] [L] recevable et a réformé la décision de la CPAM, fixant le taux d’incapacité permanente partielle à 16%, dont 7% pour le taux socio-professionnel. Il a également ordonné l’exécution provisoire de cette décision et a condamné la CPAM du Rhône aux dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la recevabilité du recoursLa recevabilité du recours est régie par l’article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC) et l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale. L’article 125 du NCPC stipule que : « Le juge doit vérifier d’office la recevabilité des recours. L’exercice d’un recours administratif préalable est une condition nécessaire pour le recours contentieux. » De plus, l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale précise que : « Les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accidents du travail ou de maladies professionnelles sont soumis à un recours préalable devant la Commission Médicale de Recours Amiable. » Dans le cas présent, Monsieur [X] [L] a exercé un recours préalable le 06/04/2023, qui a été rejeté par décision implicite. Il a ensuite formé un recours contentieux le 15/09/2023. Ainsi, le tribunal a déclaré le recours recevable, conformément aux dispositions légales. Sur l’évaluation du taux médicalL’évaluation du taux médical est encadrée par l’article L434-2 du Code de la sécurité sociale, qui stipule que : « Le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité. » Dans cette affaire, le médecin consultant a constaté une limitation légère de la plupart des mouvements de l’épaule droite. Il a conclu que le taux médical de 9% attribué pour la rupture de la coiffe des rotateurs était correct. Les observations du médecin consultant, ainsi que les pièces fournies, ont permis de confirmer que ce taux correspondait à une juste évaluation des séquelles de l’assuré à la date de consolidation. Par conséquent, la demande de réévaluation du taux médical a été rejetée. Sur l’évaluation du taux socio-professionnelL’article L434-2 du Code de la sécurité sociale précise également que : « Le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité. » Pour qu’une majoration du taux d’incapacité soit accordée au titre du retentissement professionnel, il est nécessaire de prouver une perte d’emploi ou un préjudice économique en lien direct avec la maladie professionnelle. Monsieur [X] [L] a été déclaré inapte par le médecin du travail, ce qui a conduit à son licenciement. Son ancienneté dans la profession de boulanger et son âge ont été pris en compte, ainsi que les restrictions imposées par le médecin du travail. Ainsi, le tribunal a décidé de réévaluer le taux socio-professionnel à 7%, tenant compte de l’impact des deux maladies professionnelles sur sa capacité à travailler. Cette décision a été motivée par la situation professionnelle de l’assuré, qui a été profondément affectée par sa maladie. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL
Jugement du 26 Novembre 2024
Minute n° :
Audience du : 26 septembre 2024
Requête n° : N° RG 23/03010 – N° Portalis DB2H-W-B7H-YVCI
PARTIES EN CAUSE
partie demanderesse
Monsieur [X] [L]
[Adresse 1]
[Localité 2]
assisté de Monsieur [M] [H], juriste de la [4]
partie défenderesse
CPAM DU RHONE
Service Contentieux Général
[Localité 3]
représentée par Monsieur [W], audiencier muni d’un pouvoir
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats tenus en audience publique et du délibéré :
Présidente : Justine AUBRIOT
Assesseur collège employeur : Caroline LAMANDE
Assesseur collège salarié : Bruno MARCHE
Assistés lors des débats et du délibéré de : Maéva GIANNONE, Greffière
Notification le :
Une copie certifiée conforme à :
[X] [L]
CPAM DU RHONE
Une copie certifiée conforme au dossier
Par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15/09/2023, Monsieur [X] [L] a formé un recours à l’encontre d’une décision implicite de rejet de la Commission Médicale de Recours Amiable confirmant la décision notifiée de la CPAM du RHONE du 28/02/2023, et qui a fixé à 14% le taux d’incapacité permanente partielle dont 5% de taux socio professionnel suite à une maladie professionnelle MP57A du 30/12/2019 consolidée le 06/01/2023, dont les séquelles sont décrites de la manière suivante par le médecin conseil : « séquelles d’une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite traitée chirurgicalement, chez un droitier boulanger de 57 ans, consistant principalement en une légère limitation de la mobilité, un manque de force du membre supérieur droit et des douleurs, y compris au repos ».
Le greffe de la juridiction a donc convoqué les parties, conformément à l’article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l’audience du 26/09/2024.
À cette date, en audience publique :
– Monsieur [X] [L] était présent assisté de Monsieur [M], juriste de la [4]. Il a fait valoir que sa situation n’avait pas été exactement évaluée et conteste le taux médical de 9% qui lui a été attribué qui est à son sens insuffisant au regard des séquelles qu’il présente. Il argue que le barème prévoit un taux compris entre 10% et 15% pour une limitation légère de tous les mouvements de l’épaule dominante. Il explique avoir d’importantes douleurs au niveau de son épaule droite, » même au repos « . Il a été opéré en janvier 2022, a un traitement médicamenteux (Paracétamol, Tramadol) et a subi plusieurs infiltrations.
Il sollicite également une réévaluation du taux socio professionnel. Il indique exercer le métier de boulanger depuis 1981, et depuis 2012 au sein de la société [5]. Il explique avoir été déclaré inapte par le médecin du travail avec d’importantes restrictions et a été licencié le 17/02/2023. Il soutient ne plus être en capacité d’exercer son métier et qu’une reconversion est difficile à son âge (59 ans).
– La CPAM du RHONE était comparante et représentée par Monsieur [W]. Elle sollicite la confirmation du taux médical et fait valoir que l’assuré souffre d’une limitation « légère », voire » très légère » de certains mouvements, et qu’un taux au minimum de 10% est proposé par le barème lorsque tous les mouvements sont atteints, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Sur le taux socio professionnel, la caisse sollicite le rejet de la demande de l’assuré et fait valoir que le taux attribué de 5% est proportionnel au taux médical de 9%. Elle soutient que l’assuré n’apporte aucun élément nouveau.
En raison de la nature du litige, le tribunal a ordonné une consultation médicale confiée au Docteur [G] [N], mesure qui a été exécutée sur-le-champ.
A l’issue de cette consultation, le médecin consultant, commis conformément aux dispositions des articles R 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur [X] [L], a exposé oralement la synthèse de ses constatations médicales, dont les parties ont pu discuter.
Les conclusions écrites du médecin consultant auprès du tribunal sont jointes à la minute du présent jugement.
Puis, le tribunal s’est retiré et a délibéré de l’affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 26/11/2024.
– Sur la recevabilité du recours
La recevabilité du recours n’est pas discutée par la caisse. Il appartient néanmoins au juge de la vérifier d’office, l’exercice d’un recours administratif préalable conditionnant le recours contentieux en vertu de l’article 125 du NCPC et de l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale (visant les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accident du travail ou maladie professionnelle), applicable aux décisions notifiées à compter du 1er janvier 2020.
En l’espèce Monsieur [X] [L] justifie avoir exercé un recours préalable devant la commission médicale de recours amiable le 06/04/2023, qui a été rejeté par décision implicite.
Il a formé un recours contentieux le 15/09/2023.
Le recours est déclaré recevable.
Sur l’évaluation du taux médical
La juridiction saisie du recours, doit vérifier l’application du barème et des dispositions de l’article L 434-2 du Code de la Sécurité Sociale.
En application de l’article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
En l’espèce, le Docteur [G] [N], médecin consultant, relève d’après l’examen clinique réalisé par le médecin conseil, une limitation légère de la plupart des mouvements. La rotation externe est légèrement diminuée à droite avec atteinte de T1, rotation interne un peu diminuée avec atteinte de L1 en manœuvre main-lombes à droite. La rétropulsion est de 40° bilatérale. Il n’observe pas d’amyotrophie, les mouvements complexes ne sont pas mentionnés, considérés donc comme réalisés.
Le médecin consultant conclut que le taux médical de 9% pour rupture de la coiffe des rotateurs droite, épaule dominante, est correctement attribué et qu’il n’y a pas lieu de majorer ce taux.
Par conséquent, il ressort des observations et constatations du médecin consultant, des pièces fournies, du rapport du médecin-conseil, et des débats à l’audience de ce jour, que le taux médical de 9% correspond à une juste évaluation des séquelles de l’assuré à la date de consolidation.
La demande de réévaluation du taux médical sera donc rejetée.
Sur l’évaluation du taux socio-professionnel
Il résulte des dispositions de L. 434-2 du Code de la sécurité sociale que » Le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques, et mentales de la victime, ainsi que d ‘après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité « .
Les notions de qualification professionnelle et d’aptitude se rapportent aux possibilités d’exercice d’une profession déterminée et aux facultés que peut avoir une victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.
Dès lors, la majoration du taux d’incapacité au titre du retentissement professionnel suppose que soit rapportée la preuve d’une perte d’emploi ou d’un préjudice économique distinct en lien direct et certain avec la maladie professionnelle.
En l’espèce, Monsieur [X] [L] exerçait la profession de boulanger depuis 1981 et depuis 2012 au sein du Fournil de l’Ile Barbe. La CPAM du Rhône lui a attribué un taux socio professionnel à hauteur de 5%, étant ici précisé que l’intéressé souffre également d’une maladie professionnelle de rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche. Ce taux de 5% englobe donc l’incidence professionnelle sur les deux épaules.
Monsieur [X] [L] verse aux débats un avis d’inaptitude du médecin du travail en date du 19/01/2023. Il est mentionné que l’assuré est » inapte au poste car inapte aux manutentions des charges, aux sollicitations répétées des membres supérieurs, aux postures bras au-dessus de l’horizontale. Inapte aux postures : station debout prolongée, tronc perché en avant et rotation du tronc. Pas de poste à pourvoir dans l’entreprise qui soit compatible avec les capacités restantes. Pas de reclassement dans l’entreprise « .
Il justifie avoir été licencié le 17/02/2023 pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.
Il ressort de tous ces éléments que la situation professionnelle de l’intéressé a été profondément impactée par la maladie professionnelle, eu égard à son ancienneté de plus de 10 ans au sein de la société [5], à son âge à la date de consolidation (58 ans), et à une reconversion peu probable dans la mesure où l’assuré n’a exercé que la seule profession de boulanger et compte tenu des restrictions posées par le médecin du travail.
Il convient donc de réévaluer le taux socio-professionnel à hauteur de 7%, étant précisé que ce taux englobe l’incidence professionnelle des deux maladies professionnelles de rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite et de l’épaule gauche.
Il convient par ailleurs d’ordonner l’exécution provisoire vu l’ancienneté du litige.
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort,
– DÉCLARE recevable en la forme le recours formé par Monsieur [X] [L] ;
– REFORME la décision notifiée par la CPAM du RHONE le 28/02/2023 confirmée par la décision implicite de la Commission Médicale de Recours Amiable et FIXE à 16% dont 7% de taux socio professionnel le taux d’incapacité permanente partielle de Monsieur [X] [L] en raison de la maladie professionnelle du 30/12/2019 consolidée le 06/01/2023;
– ORDONNE l’exécution provisoire ;
– RAPPELLE, en application de l’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale introduit par l’article 61 (VII) de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie ;
– CONDAMNE la CPAM du Rhône aux entiers dépens à compter du 01/01/2019.
Jugement rendu par mise à la disposition au greffe dont la minute a été signée par la présidente et la greffière.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
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