Ententes anticoncurrentielles : faut-il définir le marché pertinent ? Quelle différence avec l’abus de position dominante ?

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Ententes anticoncurrentielles : faut-il définir le marché pertinent ? Quelle différence avec l’abus de position dominante ?

Question de l’âge d’un film

L’âge d’un film n’est qu’un critère d’attractivité parmi d’autres pour les chaînes en clair. Il ressort, en effet, de la liste des films français figurant parmi les 10 meilleures audiences cinéma des chaînes historiques de la TNT en première partie de soirée qu’il ne peut être établi de lien systématique entre l’âge d’un film et son succès d’audience.  Ainsi, certains films qui ont connu un grand succès critique ou d’audience lors de leur sortie en salle continuent de rassembler un large public lors de leurs diffusions télévisées. Certains de ces films, tels que « La grande vadrouille », « Les aventures de Rabbi Jacob », « Le mur de l’Atlantique » sont en outre considérés comme des films « culte » ou des films emblématiques du patrimoine culturel français et sont donc demandés et diffusés régulièrement par les chaînes de télévision, malgré leur ancienneté.

De même, la circonstance que le film a été ou non préfinancé par une chaîne historique en clair n’est pas un critère déterminant, même si l’on peut constater un tropisme de la demande des chaînes vers des films qui ont été préfinancés par des chaînes en clair. Ces derniers sont, en effet, souvent ceux qui, comme le souligne le CSA, ont les budgets les plus élevés, la meilleure distribution et les sujets les plus familiaux et partant, sont les plus aptes à réaliser des audiences satisfaisantes en salle ou à la télévision. Le montant des droits de diffusion des films EOF de catalogue.

Le critère du succès en salles

De manière générale, le succès d’un film lors de son premier cycle d’exploitation est le principal facteur d’appréciation du montant de ses droits de diffusion lorsqu’il devient film de catalogue. Le nombre d’entrées en salle est, à cet égard, déterminant, de même que l’audience réalisée lors des diffusions antérieures. Par ailleurs, le montant des droits, à l’exception de ceux relatifs à certains films de patrimoine, tend généralement à diminuer au fur et à mesure que le film est diffusé.

De manière générale, les droits des films de catalogue achetés par les chaînes historiques en clair sont plus onéreux que ceux des films achetés par les nouvelles chaînes de la TNT. À cet égard, dans son avis du 24 juin 2015, le CSA a relevé que la différence entre les montants versés par ces deux types de chaînes peut se situer dans un rapport de 1 à 10.

Dans sa décision n° 14-DCC-50, l’Autorité de la concurrence relevait sur ce point que : « les prix d’acquisition des films varient en fonction des chaînes, c’est-à-dire en fonction de l’audience, de l’exposition et la promotion du film. Par conséquent certains films attractifs, dont les prix peuvent être élevés, sont, en pratique, fréquemment achetés par les chaînes gratuites historiques dont les budgets sont moins contraints que ceux des nouvelles chaînes de la TNT » (paragraphe 326).

Dans son avis, le CSA observe également que certains films, les plus onéreux, ceux qui présentent, a priori, le meilleur potentiel d’audience, sont uniquement achetés par les chaînes historiques.

Catégorisation des films

Les films peuvent généralement être classés en trois catégories en fonction de leur potentiel commercial. La « catégorie A », qui désigne ceux qui ont le plus fort potentiel d’audience télévisée, est celle à laquelle appartiennent des films comme « Bienvenue chez les Ch’tis » ou les trois films « Astérix », qui ont rencontré un grand succès en salle et qui « sont de facto “réservés” aux chaînes hertziennes historiques pour des raisons tarifaires » (cote 3332). La « catégorie B » comprend des films plus anciens qui ont été diffusés en première partie de soirée sur des antennes historiques. Ces derniers conservent une certaine valeur commerciale pour des diffusions l’après-midi sur des chaînes historiques ou en première partie de soirée sur des chaînes de la TNT lancées en 2005. Concrètement, ce sont les films que les chaînes D8, W9 et TMC – qui ont des niveaux d’audience et des moyens comparables – se disputent. Il s’agit par exemple de films tels que « Germinal » ou « Gazon Maudit ».

Enfin, les films dits de « catégorie C » qui sont ceux qui ont le potentiel le moins fort. Ce sont des films qui sont généralement acquis par les chaînes qui ont des ressources moins importantes, comme NT1 (devenue « TFX »), NRJ12, Chérie 25 ou Numéro 23. L’existence de disparités aussi marquées dans les montants que les chaînes sont susceptibles d’engager pour acquérir un film est de nature à inciter les distributeurs à contacter d’abord les chaînes historiques en clair avant de s’adresser aux nouvelles chaînes de la TNT. Dans son avis du 24 juin 2015, le CSA a souligné que « les distributeurs, dans une logique d’efficacité, ciblent leurs propositions d’acquisition sur les chaînes susceptibles d’être les plus intéressées et ayant les moyens financiers de les acquérir au meilleur prix ». De même, dans sa décision n° 14-DCC-50 précitée, l’Autorité indiquait que les listes sont « d’abord proposées aux chaînes gratuites historiques puis aux nouvelles chaînes de la TNT, les disponibilités des films s’amenuisant au fil des achats des premiers acheteurs sollicités ».

Selon le CSA, les statistiques relatives à la diffusion des films confirment que les films diffusés par les nouvelles chaînes de la TNT sont généralement plus anciens que ceux diffusés par les chaînes historiques en clair qui ont notamment recours à des préachats. En effet, seuls 426 des 1 880 FIF diffusés entre 2011 et 2014 par D8 (devenue C8), NRJ12, TMC et W9 étaient sortis en salle moins de 10 ans avant leur diffusion (12 % des films diffusés par D8, 22 % de ceux diffusés par TMC, 32 % des films diffusés par NRJ12 et 34 % des films diffusés par W9). Parmi la catégorie des films les plus récents diffusés sur les nouvelles chaînes de la TNT, on peut observer des disparités notables entre chaînes affiliées ou non à une chaîne historique quant au succès en salle. Ainsi, les films produits depuis moins de 10 ans qui ont été diffusés sur D8 (devenue C8) et NRJ12 en 2014 ont, en moyenne, eu moins de succès en salle que ceux diffusés sur TMC et W9 (13 des 14 films diffusés par TMC et W9 ayant réalisé plus de 2 millions d’entrées ont été coproduits par la chaîne mère).

Le nombre de diffusions

Dans son avis du 24 juin 2015, le CSA a souligné que les chaînes historiques négocient une seule diffusion par fenêtre, là où les nouvelles chaînes de la TNT achètent souvent une multidiffusion. C’est notamment le cas de France 4, NRJ12 ou Gulli, qui achètent souvent deux diffusions au sein d’une même fenêtre – une en première partie de soirée et une autre l’après-midi ou en deuxième partie de soirée.

La durée des droits et la fréquence des diffusions

Le CSA a souligné, dans son avis du 24 juin 2015 que, compte tenu du montant très élevé qu’elles sont capables de consacrer aux achats de droits de films de catalogue, les chaînes historiques peuvent négocier une durée d’exclusivité de diffusion d’un film de catalogue de 18 mois, ce qui permet de préserver le caractère événementiel de la diffusion, alors que les nouvelles chaînes de la TNT négocient des durées bien plus courtes, d’une durée minimale de trois mois et plus généralement de six ou neuf mois. Dans sa décision n° 14-DCC-50, l’Autorité relevait : « Les films les plus attractifs ne sont généralement pas reproposés immédiatement à la vente pour préserver une certaine durée entre deux diffusions. Pendant ce délai, les films concernés ne sont plus mis en vente afin de conserver un certain degré de rareté ce qui permet de maintenir leur valeur. Celle- ci est en effet susceptible de diminuer lorsqu’un film est diffusé un grand nombre de fois à la télévision sur de courtes périodes, ce qui entraîne une « usure » du film en termes de potentiel d’audience ». Les films de catalogue diffusés sur les antennes des nouvelles chaînes de la TNT tendent généralement, à présenter un « état d’usure » supérieur à celui des films de catalogue diffusés sur celles des chaînes historiques.

 


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