Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
→ RésuméM. Q… D… et Mme F… V… ont formé un pourvoi contre un arrêt de la cour d’appel de Montpellier, concernant leur exclusion du marché paysan et les demandes d’indemnisation qui en ont découlé. La cour d’appel a confirmé l’absence de préjudice financier, rejetant les arguments des époux D… sur la méthodologie de l’expert judiciaire. La Cour de cassation a examiné le pourvoi et a conclu qu’il n’y avait pas de motif de cassation, maintenant ainsi la décision de la cour d’appel. Les époux D… ont été condamnés aux dépens, sans indemnisation.
|
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 janvier 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10058 F
Pourvoi n° E 20-13.815
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 JANVIER 2021
1°/ M. Q… D…,
2°/ Mme F… V…, épouse D…,
domiciliés […] ,
ont formé le pourvoi n° E 20-13.815 contre l’arrêt rendu le 14 novembre 2019 par la cour d’appel de Montpellier (1re chambre B), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Groupama Méditerranée, caisse régionale d’assurances mutuelles agricole Méditerranée, dont le siège est […] ,
2°/ à l’association Marché paysan de […], dont le siège est […] ,
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites de la SARL Cabinet Briard, avocat de M. et Mme D…, de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Groupama Méditerranée, caisse régionale d’assurances mutuelles agricole Méditerranée, après débats en l’audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme D… aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme D… et les condamne à payer à la société Groupama Méditerranée, caisse régionale d’assurances mutuelles agricole Méditerranée la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme D….
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir, confirmant le jugement entrepris en ce qu’il avait constaté l’absence de préjudice des époux D…, mis hors de cause l’assureur de l’Association MPMC (Groupama Méditerranée) et rejeté leurs demandes, rejeté les demandes des époux D… tendant notamment à la condamnation de l’Association MPMC et Groupama Méditerranée à leur verser diverses indemnités et à la publication de l’arrêt ;
Aux motifs que « la Cour de cassation a considéré que l’arrêt du 20 novembre 2012 s’étant borné, dans son dispositif, à constater l’irrégularité de la décision disciplinaire de radiation du 27 mars 2007 et à ordonner avant dire droit une mesure d’expertise comptable destinée à déterminer l’existence d’un préjudice, pour les années 2007 2008, en lien de causalité directe avec ladite décision, sans trancher aucune contestation sur la période d’indemnisation devant être retenue, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Attendu qu’il s’en suit une cassation globale de l’arrêt du 5 février 2015, qui remet en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt ;
Attendu qu’en conséquence et par l’effet dévolutif de l’appel, la cour de renvoi se trouve saisie des conclusions susvisées en date du 29 août 2019, parfaitement recevables, dont il résulte qu’il est demandé l’indemnisation d’un préjudice sur la période 2007 à 2011, ce qui n’avait effectivement jamais été le cas en premier ressort, puisqu’il était sollicité du tribunal, par l’assignation en date
du 14 mars 2008, la réparation du manque-à-gagner pour l’année 2007 et pour l’année 2008 ;
Mais attendu que le rapport de l’expert M… a été rendu le 22 juillet 2013, et il peut donc être considéré que la demande concernant le manque-à-gagner pour les années 2009, 2010 et 2011 constitue le complément nécessaire de la demande initiale, au sens de l’article 566 du code de procédure civile ;
Attendu qu’au demeurant, cet aspect procédural ne change rien au plan probatoire, dès lors que la charge de la preuve repose sur les demandeurs initiaux qui sont les époux D…, et que l’expertise judiciaire n’a conclu que sur les années 2007 et 2008 ;
Attendu que la mission de l’expert judiciaire qui n’a jamais été contestée, consiste à se rendre sur l’exploitation, à se faire remettre et examiner tous les documents relatifs aux surfaces effectivement exploitées et quantités de production en 2007 et 2008 ainsi que tous documents fiscaux et comptables, déclaration d’ensemencements et factures, afférents à cette saison, puis de donner tous éléments permettant à la cour d’apprécier si les époux D… ont subi en 2007/ 2008 un préjudice en lien de causalité directe avec la décision irrégulière de radiation du 25 mars 2007 et le fait de n’avoir pas pu vendre leur propre production provenant de leur exploitation sur le marché paysan de […], à l’exclusion de la vente éventuelle de produits achetés ou provenant d’autres exploitations, donner le cas échéant tous éléments permettant d’évaluer ce préjudice et tous éléments utiles à la solution du litige ;
Attendu que les parties acceptent le débat de fond, n’étant plus véritablement contesté d’une part l’irrégularité la décision d’exclusion des époux D… pour le mois de décembre 2006 et la nullité de la décision de radiation notifiée le 13 novembre 2006, mais aussi l’ absence de dommages sur cette période stricto sensu de la fin de l’année 2006, et d’autre part l’annulation de la deŽcision du conseil d’administration en date du 25 mars 2007, mesure disciplinaire de radiation, qui n’a pas respecté les règles de forme prescrites par les statuts ;
Et attendu qu’au fond, sur la période 2007 à 2011, avec d’ores et déjà l’écueil probatoire dirimant constitué par l’absence de recherche de l’expert judiciaire sur la période postérieure à 2008, la charge de la preuve appartient aux demandeurs, qui doivent donc démontrer :
le chiffre d’affaires qui était réalisé sur le marché du […], à partir des produits émanant de leur exploitation, sur une période significative antérieure à 2007, puisqu’ils ont participé normalement à ce marché jusqu’à fin 2006 ;
le résultat net de leurs ventes sur ce marché, par l’établissement d’une moyenne sur une période significative comparable ;
le chiffre d’affaires qu’ils ont réalisé , à partir de 2007 et jusqu’en 2011, sur les autres marchés, avec établissement là aussi d’un résultat net significatif chaque année ;
la différence qui en résulte éventuellement, en termes de résultat net, et dont il pourrait se déduire qu’ elle est la conséquence certaine et directe de l’interdiction d’accès au marché du […] ;
Attendu qu’une première difficulté est évidente, à savoir que si l’on procède à une analyse de la rentabilité globale de l’exploitation, il est évident que l’interdiction du marché du […] s’est traduite par un redéploiement, non contesté, sur les autres marchés, d’où il suit que la marge éventuellement gagnée sur ces autres marchés vient en déduction du dommage allégué, étant précisé par ailleurs que l’interdiction du marché du […] s’est traduite par de moindres frais engagés à ce titre, et par un investissement plus important sur les autres marchés ;
Attendu qu’au surplus, il n’est pas contesté que Monsieur D… a pris sa retraite en juin 2008, tandis que Madame, née en […] , a cessé son activité en décembre 2011 ;
Attendu que sans méconnaître l’importance de l’apport de cette dernière, il n’en demeure pas moins que l’explication selon laquelle la retraite de Monsieur, pour liquider ses droits, ne l’a pas empêché de continuer à conseiller son épouse, laisse entière la question d’une exploitation, culture et vente sur plusieurs marchés, ne reposant à partir de juin 2008 que sur un exploitant à la retraite, qui indique lui-même qu’il est en mauvaise santé, et son épouse âgée à cette époque de 59 ans ;
Attendu que le rapport judiciaire M… est vivement contesté, alors que sa méthodologie en elle-même ne peut l’être, puisqu’il a établi un pré-rapport, soumis aux dires des parties auxquels il a été répondu, et que les époux D… ont fait appel à leur propre expert agricole ;
Attendu que la visite sur place de l’expert judiciaire n’aurait rien changé, puisque l’exploitation avait cessé, et que la question posée était celle non pas de la capacité de production, mais bien celle de la production personnelle réellement exposée à la vente du marché, ce qui se déduit beaucoup plus certainement des achats de semences notamment, dont la portée probatoire fait l’objet d’une discussion fouillée sur plusieurs pages par l’association du marché paysan, qu’il s’agisse des fraises, des pastèques, des pommes de terre, des tomates, des poireaux, des choux-fleurs, des haricots, des carottes etc., le tout sans réponse circonstanciée des époux D… ;
attendu que la cour ne privilégie pas l’analyse susvisée du marché paysan, mais rappelle que la charge de la preuve incombe aux époux D…, qui, en substance, ne démontrent pas des achats de matières premières qui soient en rapport avec les chiffres d’affaires
revendiqués , tels que strictement définis, à savoir celui résultant de la vente de leur propre production ;
Attendu qu’il n’est pas inutile de relever au demeurant qu’il est reproché à l’expert judiciaire une approche strictement comptable, alors que tel est le cas des études de Madame J…, et de Madame G… qui sont toutes les deux des commissaires aux comptes experts-comptables ;
Attendu que si les quatre études de Madame J… (pièce 18, 23,27 et 28) sont établies de janvier à décembre 2008, il n’en demeure pas moins que l’expert judiciaire a déposé son rapport le 22 juillet 2013, et que la note technique de Monsieur X… date de novembre 2013, tandis que l’analyse critique de Madame G… date du 7 janvier 2014 ;
Attendu que s’il est toujours possible de soumettre au débat contradictoire des éléments postérieurs à l’expertise judiciaire, qui n’ont pas été débattus par conséquent devant cet expert judiciaire, il n’en demeure pas moins que les époux D… ont ainsi privé les intimés d’un débat technique contradictoire qu’une expertise judiciaire a justement pour finalité d’organiser de telle sorte que ces rapports amiables, réalisés à la seule initiative des appelants manquent singulièrement de pertinence, même s’ils ne sont pas pour autant irrecevables du seul fait de leur caractère purement unilatéral, alors même que les époux D… étaient assistés d’un expert agricole et d’un expert-comptable au cours de l’expertise judiciaire et qu’ils ont effectué des dires auxquels il a été répondu ;
Et attendu que les études de Madame J… se sont bornées, périodiquement, à établir les recettes sur la base du cahier de recettes journalières et du cahier récapitulatif des recettes mensuelles utilisés par les époux, ce qui ne permet absolument pas de répondre avec certitude à la question de la perte de marge nette sur le marché du […] qui résulte de l’interdiction d’y vendre à partir de 2007 leur propre production ;
Attendu que l’expert judiciaire, référence à sa mission s’est penché au contraire sur la question et il a rappelé les règles comptables applicables, dont à l’évidence certaine essentielle n’ont pas été respectées ;
attendu qu’il a été réclamé des demandeurs :
l’ensemble des factures fournisseurs concernant l’année 2007 et 2008 ;
les journaux comptables pour les années 2007 et 2008 (journal de caisse, journal de vente, journal des achats, journal des frais généraux, journaux des trésoreries et journaux des opérations diverses, journaux des opérations d’ouverture et de clôture des exercices 2007 et 2008) ;
grands livres comptables pour les exercices clos en 2007 et 2008 ;
balances pour les exercices 2007 et 2008 ;
bilan, compte de résultat et annexes pour l’exercice clos en 2007 2008 ;
caractéristiques techniques d’exploitation agricole pour les mêmes exercices ;
déclarations fiscales de l’exploitation agricole pour les mêmes exercices ;
attendu qu’en page 9 et 10, l’expert a rappelé les conditions de la vente directe, avec rappel de la méthodologie selon laquelle le préjudice pourrait être appréhendé, à savoir, ce qui est de bon sens, la comparaison des chiffres d’affaires réalisées en 2007 et 2008 par rapport aux années 2004, 2005 et 2006 qui constituent des références a priori admissibles, si elles sont démontrées ;
Attendu que l’expert a bien expliqué qu’il conviendra donc après cette comparaison globale et si celle-ci révèle une perte de chiffre d’affaires de s’assurer que celle-ci provient uniquement de la perte du marché paysan litigieux, et que pour ce faire les livres de recettes de chaque marché devront être produits, avec valeur probante pour chacun d’entre eux, avec la précision essentielle que les demandeurs devront donc démontrer leur production physique agricole sur les années 2004,2005,2006,2007 et 2008 ;
Attendu que l’expert s’est livré ensuite en page 12 à une analyse des bilans et des comptes de résultat pour les années 2006,2007 et 2008 dont il résulte un résultat négatif en 2006 de 13 233 €, positif en 2007 de 7061 €, sachant qu’il est demandé en moyenne pour chaque année de 2007 à 2011 un préjudices de 52 670 €, soit 263 350 € au total, avec un maniement pour le moins rapide de la louche comptable par Madame G… qui estime « raisonnablement » qu’en 2009, 2010, et 2011 il convient de retenir un préjudice identique à celui des deux premières années, soit 50 000 € par an ;
Attendu que l’on passerait donc d’un déficit de 13 233 € en 2006, année normale où le marché paysan n’a en rien porté préjudice à l’exploitation, à une triple perte en 2009, 2010 et 2011 d 50 000 € à chaque fois, du seul fait de l’impossibilité d’accès au marché du […] ;
Attendu qu’en page 56, en réponse à un dire, l’expert judiciaire a rappelé que le bloc de la légalité comptable pour obtenir une comptabilité régulière et sincère représentant l’image fidèle de l’entreprise nécessite à tout le moins : des pièces comptables permettant l’enregistrement au journal ayant une valeur probante, un enregistrement chronologique au journal, un enregistrement analytique compte par compte au Grand livre, un enregistrement synthétique à la balance, des états de synthèse : bilan, compte de résultat annexe comptable ;
Attendu que dans cette affaire, l’expert judiciaire a rappelé qu’il n’a été livré au débat contradictoire que les bilans et comptes de résultats qui sont issus de la balance, elle-même provenant du
grand livre, lui-même provenant du journal, lui-même provenant de la fourniture des pièces comptables et que dans la mesure ou les bilans et les comptes de résultat ont été produits au débat contradictoire, c’est que les pièces comptables existaient, à savoir le journal, le grand livre et la balance ;
Attendu que l’expert a rappelé que l’impartialité attachée à l’expertise judiciaire ne peut emprunter l’approche d’une reconstitution de comptabilité, telle que sollicitée de Madame J… et de la société pluri conseil ;
Attendu qu’en page 58, l’expert indique que malgré ses demandes réitérées, il n’a pu se faire remettre par les parties tous les documents relatifs aux surfaces exploitées et aux quantités de production 2007 et 2008, ce qui n’a rien à voir avec la simple production des relevés cadastraux, sauf à assimiler surfaces appartenant aux époux et surfaces exploitées ;
Attendu que l’expert judiciaire indique aussi que si les bilans et les comptes de résultats ont été remis, il n’a pas pu avoir en main pour l’exercice concerné les pièces comptables justificatives, les journaux, les grands livres et les balances ;
Attendu que s’agissant des études fournies par les époux D…, l’expert indique que les hypothèses émises ne sont pas justifiées par des pièces comptables ayant une valeur probante, et que le préjudice qui s’en déduit n’est pas certain ;
Attendu qu’en réalité, l’expert n’a pu établir, pour les années 2007 et 2008, et a fortiori pour les années suivantes, un préjudice en lien de causalité directe avec la décision irrégulière de radiation du 27 mars 2007 et le fait de n’avoir pas pu vendre leur propre production provenant de leur exploitation sur le marché paysan, à l’exclusion de la vente éventuelle de produits achetés ou provenant d’autres exploitations ;
Attendu qu’en d’autres termes, et s’il est possible que la présence sur le marché litigieux jusqu’en 2006 ait généré un chiffre d’affaires certain, il n’en demeure pas moins que le préjudice qui découle de l’interdiction d’accès ne peut résulter que de la perte de chiffre d’affaires relative à des produits issus de la propre exploitation des demandeurs, ce qu’ils ne démontrent pas, alors même que le marché paysan qui n’a pas la charge de la preuve produit à tout le moins une attestation de son président , qui d’une part a constaté l’achat de tomates cur de buf sur le marché d’intérêt national de Cavaillon et d’autre part s’est rendu sur l’exploitation des demandeurs, où il a pu constater des petites surfaces de serres et des productions de légumes en petites quantités, dont l’état sanitaire ne correspondait pas avec les produits présentés sur l’étal qui étaient de catégorie extra de manière permanente, affirmation qui rejoint d’ailleurs , quant à la qualité des produits vendus, celle de Madame A… et de Madame E…, produites par les demandeurs ;
Attendu que les attestations de Monsieur W…, régulières en la forme, n’ont pas fait l’objet d’une plainte ;
Attendu que l’examen de la recherche de l’assureur devient sans objet ;
Attendu qu’une somme de 1500 € est justifiée au bénéfice de l’association du Marché Paysan, au titre des frais inéquitablement exposés devant la cour de renvoi ;
Attendu que sur le strict plan de l’équité il n’est pas justifié de faire application de cet article au bénéfice de l’assureur » ;
1° Alors que les parties peuvent produire tout élément de preuve de nature à contester un rapport d’expertise judiciaire et les juges du fond sont tenus de les apprécier pour trancher eux-mêmes le débat sur le bien-fondé des conclusions de l’expert ; qu’en l’espèce, pour rejeter les demandes indemnitaires des exposants, la cour d’appel a conclu « l’expert n’avait pu établir, pour les années 2007 et 2008, et a fortiori pour les années suivantes, un préjudice en lien de causalité directe avec la décision irrégulière de radiation du 27 mars 2007 et le fait de n’avoir pas pu vendre leur propre production provenant de leur exploitation sur le marché paysan, à l’exclusion de la vente éventuelle de produits achetés ou provenant d’autres exploitations », après avoir écarté les éléments de preuve produits par les exposants pour contester le rapport de l’expert judiciaire, sans les examiner au fond, motif pris simplement de ce qu’« il n’en demeure pas moins que les époux D… ont ainsi privé les intimés d’un débat technique contradictoire qu’une expertise judiciaire a justement pour finalité d’organiser de telle sorte que ces rapports amiables, réalisés à la seule initiative des appelants manquent singulièrement de pertinence, même s’ils ne sont pas pour autant irrecevables du seul fait de leur caractère purement unilatéral, alors même que les époux D… étaient assistés d’un expert agricole et d’un expert-comptable au cours de l’expertise judiciaire et qu’ils ont effectué des dires auxquels il a été répondu » ; qu’en l’état de ces circonlocutions et de l’absence de tout motif relatif au contenu des notes techniques de Monsieur X… et de Mesdames N… et G… produites par les exposants, ce qui démontre que, si la cour a formellement retenu la recevabilité des pièces et expertises produites par les exposants pour démontrer à la cour les erreurs du rapport d’expertise de Monsieur M…, cette dernière ne les a pas examinées, mais les a écartées a priori motif pris de ce qu’elles avaient été établies non-contradictoirement après l’expertise ; qu’en statuant ainsi, sans examiner le contenu des notes techniques de Monsieur X… et de Mesdames G… et N… que produisaient notamment les exposants et en se contentant en réalité de se référer aux conclusions contestées du rapport d’expertise, la cour d’appel a commis un excès de pouvoir négatif et violé l’article 16 du Code de procédure civile, ensemble l’article 6, § 1 de la Convention ESDH ;
2° Alors que toute personne étant présumée de bonne foi, il appartient à chaque partie de rapporter la preuve des faits qui fonde ses prétentions ; qu’en l’espèce, l’Association MPMC a exclu les époux D… du marché paysan et fait obstacle à leur réadhésion à l’association, en alléguant qu’ils auraient manqué à leurs obligations contractuelles de ne vendre que des produits issus de leur exploitation agricole ; que la cour d’appel a constaté l’illicéité des deux décisions de l’Association, sans rechercher si elle avait valablement prouvé les griefs sur lesquels elle avait prétendu fonder l’exclusion des exposants, avant de rejeter la demande de ces derniers tendant à être indemnisés du préjudice que leur expulsion du marché et de l’association leur avait causé, au motif qu’ils ne prouvaient pas la perte de chiffre d’affaires relative à des produits issus de leur propre exploitation ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a dispensé l’Association d’avoir à prouver, comme elle en avait la charge, que les exposants auraient vendu des produits qui n’étaient pas issus de leur exploitation, possibilité qu’elle a prise pour acquise, quand le balancier de la charge de la preuve n’imposait aux époux D…, qui étaient présumés avoir exécuté de bonne foi le contrat d’association, que de prouver la perte de chiffre d’affaires résultant de leur exclusion du marché paysan et laissait à l’Association la charge de prouver que, comme elle l’alléguait, certaines ventes auraient dû être retirées de l’assiette du chiffre d’affaires considéré pour établir leur préjudice, à raison de ce qu’elles auraient concerné des produits qui ne pouvaient pas être vendus sur le marché, a méconnu la charge de la preuve pesant sur chacune des parties et violé l’article 1353 du Code civil, ensemble les articles 9 du Code de procédure civile, 2274 du Code civil et 6, § 1 de la Convention ESDH ;
3° Alors que le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit, de sorte que les dommages et intérêts sont alors de la perte subie et du gain manqué ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a écarté tout préjudice causé par les décisions irrévocablement annulées de radiation et d’expulsion définitive des époux D… de l’Association MPMC et du marché paysan du […], aux motifs que l’expert n’avait pu établir un préjudice en lien de causalité directe avec la décision irrégulière de radiation du 27 mars 2007 et le fait de n’avoir pas pu vendre leur propre production provenant de leur exploitation sur le marché paysan, à l’exclusion de la vente éventuelle de produits achetés ou provenant d’autres exploitations ; qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants, dès lors que ces derniers avaient été privés irrégulièrement de l’accès au marché et avaient donc nécessairement manqué le gain qu’ils auraient pu tirer de leurs ventes sur ce marché hebdomadaire, puisqu’il n’est pas contesté qu’ils produisaient bien des biens, la cour d’appel a méconnu le principe de réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime, violant ainsi l’article 1231 (ex- 1147) du Code civil, ensemble l’article 4 du Code civil ;
4° Alors que le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit, de sorte que les dommages et intérêts sont alors de la perte subie et du gain manqué ; qu’en l’espèce, les époux D… faisaient valoir que, outre leurs pertes financières d’exploitation, les décisions illicites de l’Association MPMC leur avaient causé un préjudice lié à la perte d’investissements réalisés précisément pour les besoins de leur activité sur le marché paysan du […] (V. concl., p. 20) ; que, pour rejeter leurs demandes indemnitaires, la cour d’appel s’est contentée de relever que, en réalité, « l’expert n’a pu établir, pour les années 2007 et 2008, et a fortiori pour les années suivantes, un préjudice en lien de causalité directe avec la décision irrégulière de radiation du 27 mars 2007 et le fait de n’avoir pas pu vendre leur propre production provenant de leur exploitation sur le marché paysan, à l’exclusion de la vente éventuelle de produits achetés ou provenant d’autres exploitations », dès lors que, « s’il est possible que la présence sur le marché litigieux jusqu’en 2006 ait généré un chiffre d’affaires certain, il n’en demeure pas moins que le préjudice qui découle de l’interdiction d’accès ne peut résulter que de la perte de chiffre d’affaires relative à des produits issus de la propre exploitation des demandeurs, ce qu’ils ne démontrent pas » ; qu’en statuant ainsi par des motifs relatifs à l’existence d’une perte financière d’exploitation résultant de l’éviction brutale et illicite des exposants, mais inopérants sur la perte avérée et irrémédiable des investissements qu’ils avaient réalisés pour les besoins de leur activité sur le marché paysan, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime, et de l’article 1231 (ex- 1147) du Code civil ;
5° Alors que le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit, de sorte que les dommages et intérêts sont alors de la perte subie et du gain manqué ; qu’en l’espèce, les époux D… sollicitaient l’indemnisation du préjudice moral que leur avaient causé les décisions illicites de l’Association et la publication de l’arrêt, en arguant du caractère brutal et vexatoire de leur expulsion du marché et de l’association, lequel avait affecté gravement la santé de Monsieur D… et porté atteinte à leur réputation professionnelle (V. concl., p. 20, in fine s.) ; qu’en rejetant leurs demandes, pourtant étayées de nombreuses preuves, à ce titre, sans motivation, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.
Laisser un commentaire