Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Poitiers
Thématique : Débits internet non respectés : responsabilité du FAI
→ RésuméLes fournisseurs d’accès à Internet (FAI) sont tenus de garantir des débits conformes aux promesses contractuelles. En cas de non-respect, comme l’illustre le cas d’un couple ayant souscrit un abonnement « Haut débit », ils peuvent être condamnés à des dommages et intérêts. L’expert a conclu que les dysfonctionnements étaient dus à un sous-dimensionnement des infrastructures, rendant impossible la fourniture du débit promis lors des pics de demande. En conséquence, le tribunal a résilié le contrat et accordé 5000 euros de dommages et intérêts, soulignant la responsabilité du FAI dans l’exécution de ses obligations contractuelles.
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En termes de débits, le FAI est soumis à une obligation de résultat. La vente de bande passante sous dimensionnée par rapport aux besoins des consommateurs peut être sanctionnée contractuellement. L’opérateur peut être condamné s’il vend plus de ressources que ses infrastructures ne sont capables de fournir quand la demande est forte.
Engagement sur les débits
Un couple a souscrit auprès d’un opérateur un abonnement «Haut
débit» les faisant bénéficier d’un débit d’au moins 6 Mb par seconde en
réception et 512 kb par seconde en émission. Se plaignant de dysfonctionnements
récurrents de leur connexion, ils ont obtenu la condamnation de leur opérateur
(5000 euros de dommages et intérêts) et la résiliation de leur abonnement
aux torts de ce dernier.
Droit de résiliation et responsabilité de plein droit
Au sens de l’article L121-20-3 du Code de la consommation,
le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la
bonne exécution des obligations du contrat conclu à distance, que ces
obligations soient à exécuter par le professionnel qui a conclu ce contrat ou
par d’autres prestataires de service, sans préjudice de son droit de recours
contre ceux-ci.
L’article 1134 ancien du Code civil dispose que « Les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles
ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes
que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. » Le principe
de ces dispositions est repris désormais aux articles 1103 du code civil : «les
contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits»
et 1104 du code civil «les contrats doivent être négociés, formés et
exécutés de bonne foi».
L’article 1184 ancien du code civil précisait également que
‘la condition résolutoire (droit de résilier) est toujours sous entendue dans
les contrats synallagmatiques (entre plusieurs parties) pour le cas où l’une
des parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas le contrat n’est
point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
été exécuté a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention
lorsqu’ elle est possible ou d’en demander la résolution avec dommages et
intérêts.»
Expertise déterminante
Le rapport d’expertise a été déterminant et concluait que
«Ces perturbations surviennent de manière aléatoire et leur occurrence
est compatible avec mes conclusions». S’agissant du débit insuffisant,
l’expert a indiqué : «la société mutualise les ressources informatiques
qu’elle propose à ses clients. Certes, contractuellement, elle promet un
certain débit, mais en pratique, dans la réalisation technique, aucun débit
binaire n’est garanti de bout en bout. En jargon informatique, on dit qu’il n’y
a pas de «réservation de bande passante » ou encore pas de « qualité de
service». «Ceci correspond d’ailleurs au mode de fonctionnement de la
société. En effet, celle-ci autorise la multiplication des différents
équipements terminaux qui se trouvent au domicile de ses clients. Quand on
souscrit un abonnement ADSL chez l’opérateur, on n’a pas la garantie de
disposer de la totalité du débit binaire techniquement possible, car l’opérateur
autorise ses autres clients (à travers les liaisons WIFI) à utiliser une partie
du débit binaire du souscripteur.»
L’expert judiciaire, procédant par élimination de causes,
aux termes des tests auxquels il a procédé, a conclu que ‘nous avons
méthodiquement éliminé toutes les causes possibles de dysfonctionnement… la
seule explication qui reste, au vu des différents événements, est un sous
dimensionnement des équipements de la société. Quand on souscrit un abonnement,
généralement le débit binaire annoncé contractuellement est basé sur les
performances de la liaison ADSL entre le Modem et le DSLAM. Autrement dit, si
tous les clients souhaitent utiliser en même temps le débit binaire maximum qui
leur a été promis contractuellement, alors ce n’est physiquement pas possible.
Autrement dit, la société vend plus de ressources que ses infrastructures ne
sont capables de fournir quand la demande est forte’. A noter que l’expert
judiciaire, malgré ses demandes, n’a jamais pu obtenir de la société, le débit
global de ses installations vers Internet.
Au regard de ces éléments et faute pour la société de démontrer l’exécution de son obligation contractuelle de résultat, cela quel que soit le montant de l’abonnement déterminé par l’opérateur, le jugement a été confirmé en ce qu’il a prononcé la résolution judiciaire du contrat souscrit et alloué aux intimés une somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts. Télécharger la décision
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