Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Presse en difficulté : conditions du licenciement
→ RésuméUne société de presse ne peut licencier une salariée chargée de la modération des commentaires si elle externalise cette fonction. L’éditeur a tenté de justifier le licenciement par une réorganisation nécessaire à la compétitivité, évoquant des coûts de modération élevés. Cependant, les juges ont noté l’absence de documents comptables prouvant les difficultés économiques. De plus, le comité d’entreprise a émis un avis défavorable, estimant que les licenciements n’étaient pas justifiés. Ainsi, le licenciement de la salariée a été déclaré sans cause réelle et sérieuse, soulignant l’importance de preuves tangibles dans de telles décisions.
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Externaliser la modération des commentaires
Une société de presse qui procède à l’externalisation de la fonction de modération de ses commentaires la nuit et le week-end n’est pas en droit de licencier la salariée qui s’occupait antérieurement de cette fonction.
Sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise de presse
L’éditeur d’un magazine de presse a fait valoir, sans succès, dans la lettre de licenciement de la salariée, qu’une réorganisation de ce service de l’entreprise était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la société et du secteur média du groupe : « la modération représente un poste de charges extrêmement significatif difficilement maîtrisable compte tenu de la très forte croissance de la fréquentation du site, croissance de la fréquentation qui accroît le nombre de commentaires publiés. Les coûts de la modération annuelle s’élèvent à 400 Keuros, soit plus de 20 % de la perte d’exploitation du site. Le modèle de modération actuellement en vigueur est trop éloigné des pratiques actuelles des éditeurs de presse en ligne qui confient généralement la modération de leur site Internet à des prestataires extérieurs qui opèrent selon un cahier des charges beaucoup plus simple.[.] Après en avoir informé le comité d’entreprise ».
En dehors de l’évocation d’un contexte économique général touchant la presse magazine, qui ne peut en tant que tel justifier des menaces alléguées sur la compétitivité de l’entreprise, c’est à juste titre que les premiers juges ont relevé que la société de presse ne produisait qu’une note économique, à l’exclusion de tout document comptable, seul de nature à justifier la réalité des difficultés économiques invoquées, le coût annuel du service de modération, le résultat courant de l’entreprise, le lien entre les difficultés alléguées et la suppression du poste de la salariée.
Licenciement sans cause réelle et sérieuse
A noter qu’aux termes du procès-verbal du comité extraordinaire, le CE avait, au vu de la note invoquée, émis un avis défavorable estimant que les licenciements n’étaient pas justifiés au regard de la situation économique de la société. Le licenciement de la salariée modératrice était donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.
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