Cour d’appel de Paris, 10 novembre 2017 17/12345
Cour d’appel de Paris, 10 novembre 2017 17/12345

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Résumé

Dans le cadre d’un contrat de distribution de chaînes télévisées, le changement de numérotation ne peut être unilatéral, sauf en cas de modification réglementaire. Même dans ce contexte, le distributeur doit faire ses meilleurs efforts pour respecter le plan initial convenu. L’affaire entre Canal+ et Altice illustre cette problématique, où une modification de la numérotation a été contestée par Canal+, qui a argué que celle-ci ne respectait pas les critères de L’ARCOM. La nouvelle réglementation impose une numérotation logique et équitable, et toute modification doit être justifiée et conforme aux principes de transparence et d’équité.

Impact du contexte réglementaire

Dans le cadre d’un contrat de distribution de chaînes télévisées, le changement de l’ordre de numérotation des chaînes ne peut intervenir unilatéralement sauf changement du contexte réglementaire qui s’impose aux parties. Y compris dans cette hypothèse, le distributeur est soumis à une obligation de faire ses meilleurs efforts pour respecter le plan de numérotation initial convenu avec l’éditeur de chaines.

Canal + c/ Altice

Dans l’affaire soumise Numéricâble et SFR (Altice) ont annoncé au Groupe Canal Plus une modification de leur plan de service et de la numérotation de leurs chaînes à la suite de la délibération de l’ARCOM du 15 février 2017. La modification contractuelle prévoyait de positionner la chaîne Canal+ Sport sur le Canal 118 dans un  » bloc Sport  » et les chaînes Canal +, Canal + Cinéma, Canal + Family, Canal + Série et Canal + Décalé du canal 40 canaux 152 et s. Le directeur général du Groupe Canal + s’est formellement opposé à cette modification contractuelle. Ce dernier a fait valoir que la nouvelle numérotation décidée unilatéralement par SFR et NC ne respectait pas les critères et les principes posés par l’ARCOM.

Nouvelle numérotation impérative

La numérotation de chaînes de télévision a été régie par une loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et par une délibération de l’ARCOM du 24 juillet 2007. La loi du 30 septembre 1986 a été modifiée par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des medias. l’ARCOM veille ainsi au respect de la numérotation logique s’agissant de la reprise des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre et au caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire de la numérotation des autres services de télévision dans les offres de programme des distributeurs de services.

l’ARCOM a pris, en application de la loi nouvelle une délibération n° 2017-3 du 15 février 2017 qui a fixé un ordre logique, commun à tous les distributeurs, des 27 chaînes hertziennes gratuites.  En revanche, les dispositions relatives à l’organisation des autres plans de services, blocs par blocs,  sont entrées en vigueur dans un délai de 6 mois. L’évolution réglementaire imposait donc bien à NC et SFR d’élaborer un nouveau plan de service.

Pas de changement arbitraire de numérotation

La nouvelle délibération de l’ARCOM avait donc un effet impératif sur le contrat de distribution  conclu entre les  parties mais le changement des canaux ne pouvait pas être arbitraire. En effet, à côté de blocs thématiques, l’ARCOM a autorisé la composition de 3 types de  » blocs  » : un  » bloc  » de chaînes locales, un  » bloc  » consacré à la promotion temporaire des services et un  » bloc de services  » dit ouvert.  La définition de ce bloc doit être justifiée par au moins un des critères suivants : le caractère particulièrement attractif de la programmation des services qui la composent, l’exclusivité de la distribution ou des résultats d’audience significatifs. En outre, la composition de ce bloc doit être conforme aux critères légaux de transparence, d’équité, d’homogénéité et de non-discrimination. Enfin, ce bloc ne peut être composé de plus de 25 services.

Il appartient au ARCOM qui peut être saisie d’un différend ou à la ARCOM compétente d’analyser et de vérifier la conformité des nouveaux plans de service mais le juge judiciaire demeure compétent pour apprécier le processus de mise en place des plans au regard des contrats, notamment la prévision de prescriptions légales ou réglementaires pouvant entraîner la modification de la numérotation actuelle des services et la nécessité.

Il a été jugé que la composition du  » bloc ouvert  » ne répondait pas à l’ensemble des critères que les sociétés NC et SFR se sont fixées à elles-mêmes. L’attribution des chaînes de ce bloc n’était pas complète et le recours effectif au critère d’attractivité, aurait en outre permis d’envisager le décalage de chaînes pour attribuer à Canal + les places laissées disponibles. Ce faisant, les chaînes de ce groupe se seraient trouvées positionnées, comme prévu au contrat, dans un ordre proche de la numérotation 40, quand bien même il ne s’agissait que d’une obligation de moyen.

Enfin, le décalage aux numéros 118, puis 152 à 156 ou à 158 des chaînes Canal + est clairement de nature à porter préjudice à ses chaînes. Ces circonstances ont été jugées constitutives de violations des dispositions contractuelles, non dans l’existence d’une obligation de maintien de la numérotation, mais en ce que NC et SFR ne pouvaient soutenir avoir fait leurs « meilleurs efforts ». Toutefois, une saisine de l’ARCOM devra impérativement être initiée. En  effet,  s’il  n’existe aucune contestation sérieuse quant à la violation de l’obligation contractuelle d’exécution de bonne foi du contrat de distribution, au stade du référé, le juge judiciaire ne peut se substituer au ARCOM pour rétablir ou maintenir une numérotation qui relève de son seul pouvoir d’appréciation.

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Questions / Réponses juridiques

Quel est l’impact du contexte réglementaire sur la numérotation des chaînes de télévision ?

Le contexte réglementaire joue un rôle déterminant dans la numérotation des chaînes de télévision. Selon le texte, un changement unilatéral de l’ordre de numérotation n’est pas permis, sauf si des modifications réglementaires l’exigent.

Cela signifie que les distributeurs doivent faire des efforts pour respecter le plan de numérotation initial convenu avec les éditeurs de chaînes, même en cas de changement réglementaire.

Cette obligation de respecter le plan initial est essentielle pour maintenir la transparence et l’équité dans la distribution des chaînes.

Que s’est-il passé dans l’affaire Canal + c/ Altice ?

Dans l’affaire Canal + contre Altice, Numéricâble et SFR ont annoncé une modification de leur plan de service, affectant la numérotation des chaînes, suite à une délibération de l’ARCOM.

La chaîne Canal+ Sport a été repositionnée sur le canal 118, tandis que d’autres chaînes du groupe Canal+ ont été déplacées vers des canaux moins favorables.

Le directeur général de Canal + a contesté cette modification, arguant qu’elle ne respectait pas les critères établis par l’ARCOM, ce qui a soulevé des questions sur la légitimité de la décision unilatérale des distributeurs.

Quelles lois régissent la numérotation des chaînes de télévision ?

La numérotation des chaînes de télévision est régie par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, ainsi que par une délibération de l’ARCOM du 24 juillet 2007.

Cette loi a été modifiée par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, qui vise à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias.

l’ARCOM est chargé de veiller au respect d’une numérotation logique et équitable, en s’assurant que les services de télévision soient accessibles de manière transparente et non discriminatoire.

Quelles sont les implications de la nouvelle délibération de l’ARCOM ?

La délibération de l’ARCOM a un effet impératif sur les contrats de distribution, mais elle ne permet pas un changement arbitraire de la numérotation.

l’ARCOM a défini des blocs thématiques pour la numérotation, autorisant la création de blocs de chaînes locales, de promotions temporaires et de blocs ouverts.

Ces blocs doivent respecter des critères de transparence, d’équité et d’homogénéité, et ne peuvent pas dépasser 25 services.

Cela garantit que les chaînes sont positionnées de manière juste et conforme aux attentes des consommateurs.

Comment l’ARCOM et les juridictions peuvent-ils intervenir en cas de litige ?

l’ARCOM a le pouvoir d’analyser et de vérifier la conformité des nouveaux plans de service en cas de différend.

Cependant, le juge judiciaire est également compétent pour évaluer le respect des contrats, notamment en ce qui concerne les obligations légales ou réglementaires.

Dans le cas de Canal + et Altice, il a été déterminé que la composition du « bloc ouvert » ne respectait pas les critères établis, ce qui a conduit à des violations contractuelles.

Il est donc essentiel que les parties impliquées saisissent l’ARCOM pour résoudre les litiges liés à la numérotation des chaînes.

 


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