Conseil d’Etat, 24 février 2022, n° 455277
Conseil d’Etat, 24 février 2022, n° 455277

Type de juridiction : Conseil d’Etat

Juridiction : Conseil d’Etat

Résumé

L’attribution d’une subvention par une personne publique confère des droits au bénéficiaire, à condition que ce dernier respecte les conditions d’octroi. Dans le cas de la société 504 Productions, des demandes d’aides pour des spectacles vivants ont été soumises, mais les tournages n’ont pas pu se réaliser comme prévu, faute d’autorisation. Les modifications apportées aux conditions initiales n’ont pas été signalées au CNC, entraînant le retrait des aides accordées. Ainsi, le respect des conditions d’octroi est utile pour éviter des remboursements et garantir le maintien des droits liés à la subvention.

Une société qui ne respecte pas strictement les conditions d’octroi d’une aide du CNC s’expose à un remboursement intégral de celles-ci.

L’attribution d’une subvention par une personne publique

L’attribution d’une subvention par une personne publique crée des droits au profit de son bénéficiaire.

Toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu’elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d’octroi, qu’elles aient fait l’objet d’une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu’elles découlent implicitement mais nécessairement de l’objet même de la subvention.

Affaire 504 Productions

Il ressort des pièces du dossier et n’est pas contesté que la société 504 Productions a déposé des demandes d’aides à production pour les oeuvres de récréation de spectacle vivant des groupes « Sofiz » et « Moriarty Vs Wati Watia Zorey Band » dont la captation devait avoir lieu en juin 2017 à l’occasion du festival Rio Loco à Toulouse.

En l’absence d’autorisation de la part de l’organisateur du festival, il est constant que les tournages des deux oeuvres concernées n’ont pu être réalisés aux dates et lieux prévus et que les spectacles ont fait l’objet de captations ultérieures dans des salles de concert sans que la société 504 Productions n’informe le Centre national du cinéma et de l’image animée de ces modifications avant la délivrance des autorisations préalables.

Changement dans les conditions d’organisation des spectacles

Si la date et le lieu des tournages ne conditionnent pas l’attribution des aides financières, l’objet même de l’aide est de subventionner l’oeuvre de récréation de spectacle vivant dans les conditions fixées notamment par la demande déposée par la société de production.

Conseil d’État, 10ème chambre jugeant seule, 24 février 2022, n° 455277

Vu la procédure suivante :

La société 504 Productions a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler les deux décisions du 30 août 2018 du centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) retirant les deux décisions du 25 juillet 2017 et du 22 août 2017 lui accordant une autorisation préalable et la première tranche de l’aide à la production pour l’adaptation audiovisuelle des spectacles vivants « Sofaz » et « Moriarty Vs Wati Watia Zorey Band » ainsi que les deux titres de recettes émis le 31 août 2018 par le CNC mettant respectivement à sa charge les sommes de 24 000 euros et 24 870,75 euros. Par un jugement n° 1819122/5-1, 1819128/5-1, 1819130/5-1 et 1819133/5-1 du 9 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a fait droit aux demandes de la société 504 Productions.

Par un arrêt n° 20PA02548 du 4 juin 2021, la cour administrative d’appel de Paris, a, sur appel du CNC, annulé ce jugement et rejeté les demandes présentées par la société 504 Productions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 5 août et le 28 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société 504 Productions demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel du CNC ;

3°) de mettre à la charge du CNC la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code du cinéma et de l’image animée ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d’Etat,

— les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la Société 504 Productions ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 822-1 du code de justice administrative : « Le pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat fait l’objet d’une procédure préalable d’admission. L’admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n’est fondé sur aucun moyen sérieux ».

2. Pour demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque, la société 504 Productions soutient que la cour administrative d’appel de Paris l’a entaché d’erreur de droit et de dénaturation des pièces du dossier en jugeant qu’elle n’avait pas rempli les conditions mises à l’octroi de la subvention financière du centre national du cinéma et de l’image animée pour l’aide à la production audiovisuelle des spectacles vivants « Sofaz » et « Moriarty Vs Wati Watia Zorey Band ».

3. Aucun de ces moyens n’est de nature à permettre l’admission du pourvoi.

D E C I D E :

— ————-

Article 1er : Le pourvoi de la société 504 Productions n’est pas admis.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société 504 Productions.

Copie en sera adressée au centre national du cinéma et de l’image animée.

Délibéré à l’issue de la séance du 10 février 2022 où siégeaient : Mme Nathalie Escaut, conseillère d’Etat, présidant ; M. Alexandre Lallet, conseiller d’Etat et M. Bruno Delsol, conseiller d’Etat-rapporteur.

Rendu le 24 février 2022.

La présidente :

Signé : Mme Nathalie Escaut

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Delsol

La secrétaire :

Signé : Mme A B455277

Questions / Réponses juridiques

Quelles sont les conséquences du non-respect des conditions d’octroi d’une aide du CNC ?

Le non-respect des conditions d’octroi d’une aide du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) peut entraîner des conséquences financières significatives pour la société bénéficiaire. En effet, si une société ne respecte pas strictement les conditions établies lors de l’octroi de l’aide, elle s’expose à un remboursement intégral des sommes perçues.

Cela signifie que la société devra restituer l’intégralité des aides financières accordées, ce qui peut avoir un impact majeur sur sa trésorerie et sa viabilité économique. Les conditions d’octroi sont souvent définies par des normes précises, des décisions administratives ou des conventions signées, et leur non-respect peut être interprété comme une violation des engagements pris par la société.

Quels droits sont créés par l’attribution d’une subvention par une personne publique ?

L’attribution d’une subvention par une personne publique crée des droits au profit du bénéficiaire, mais ces droits sont conditionnels. Ils ne sont établis que si le bénéficiaire respecte les conditions d’octroi de la subvention. Ces conditions peuvent découler de normes réglementaires, de décisions administratives ou de conventions signées entre la personne publique et le bénéficiaire.

Il est donc essentiel pour le bénéficiaire de bien comprendre et de respecter ces conditions pour éviter des conséquences négatives, telles que le remboursement des aides. En cas de non-respect, les droits liés à la subvention peuvent être remis en question, et le bénéficiaire peut se retrouver dans une situation juridique délicate.

Quel est le contexte de l’affaire 504 Productions ?

L’affaire 504 Productions concerne une société qui a demandé des aides à production pour des œuvres de spectacle vivant. Ces demandes étaient liées à des spectacles devant se dérouler lors du festival Rio Loco à Toulouse en juin 2017. Cependant, en raison de l’absence d’autorisation de l’organisateur du festival, les tournages n’ont pas pu avoir lieu comme prévu.

Au lieu de cela, les spectacles ont été captés ultérieurement dans d’autres salles de concert, sans que la société n’informe le CNC des modifications apportées. Cette situation a conduit à des décisions du CNC retirant les autorisations et les aides accordées, ce qui a entraîné un contentieux entre 504 Productions et le CNC.

Quelles modifications ont été apportées aux conditions d’organisation des spectacles ?

Bien que la date et le lieu des tournages ne soient pas des conditions essentielles pour l’attribution des aides financières, l’objet même de l’aide est de subventionner l’œuvre de récréation de spectacle vivant dans les conditions fixées par la demande déposée par la société de production.

Cela signifie que toute modification substantielle dans l’organisation des spectacles, comme le changement de lieu ou de date sans notification au CNC, peut être considérée comme un non-respect des conditions d’octroi. Par conséquent, même si les aides sont attribuées, le non-respect des conditions initiales peut entraîner des conséquences juridiques et financières pour la société.

Quel a été le jugement du Conseil d’État concernant 504 Productions ?

Le Conseil d’État a examiné le pourvoi de la société 504 Productions, qui contestait un arrêt de la cour administrative d’appel de Paris. Cette cour avait annulé un jugement antérieur qui avait donné raison à 504 Productions, en considérant que la société n’avait pas respecté les conditions d’octroi de la subvention.

Le Conseil d’État a décidé de ne pas admettre le pourvoi de 504 Productions, indiquant que les moyens présentés par la société n’étaient pas suffisants pour justifier une révision de la décision. Cela signifie que la décision de la cour administrative d’appel, qui avait annulé les aides accordées, a été maintenue, et la société a été tenue de rembourser les sommes perçues.

 


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