Atteinte à la vie privée et calcul du préjudice : Questions / Réponses juridiques

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Atteinte à la vie privée et calcul du préjudice : Questions / Réponses juridiques

Lors de l’audience du 09 octobre 2024, présidée par Gauthier DELATRON, le tribunal a examiné l’affaire opposant [K] [C] à PRISMA MEDIA. [K] [C] a assigné la société pour atteinte à sa vie privée suite à la publication d’un article dans le magazine Voici, demandant 30 000 euros de dommages-intérêts. Bien que PRISMA MEDIA ait reconnu l’atteinte, elle a contesté la gravité du préjudice. Le tribunal a finalement condamné PRISMA MEDIA à verser 3 000 euros à [K] [C] pour atteinte à sa vie privée, tout en déboutant ses autres demandes.. Consulter la source documentaire.

Si la seule constatation de l’atteinte au respect à la vie privée et au droit à l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, le préjudice étant inhérent à ces atteintes, il appartient toutefois au demandeur de justifier de l’étendue du dommage allégué ; l’évaluation du préjudice est appréciée de manière concrète, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes, ainsi que des éléments invoqués et établis.

Par ailleurs, l’atteinte au respect dû à la vie privée et l’atteinte au droit à l’image constituent des sources de préjudice distinctes, pouvant ouvrir droit à des réparations différenciées, à condition qu’elles soient dissociables.

S’agissant de l’atteinte à la vie privée, l’allocation de dommages et intérêts ne se mesure pas à la gravité de la faute commise, ni au chiffre d’affaires réalisé par l’éditeur de l’organe de presse en cause ; cependant, la répétition des atteintes, comme l’étendue de la divulgation et l’importance du lectorat de ce magazine à fort tirage, sont de nature à accroître le préjudice.

En outre, l’utilisation de l’image d’une personne sans autorisation est de nature à provoquer chez son titulaire un dommage moral, la seule constatation de l’atteinte à ce droit par voie de presse ouvrant droit à réparation. Le demandeur doit toutefois justifier de l’étendue du dommage allégué, le préjudice étant apprécié concrètement, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes et des éléments versés aux débats.

En l’espèce, pour évaluer l’étendue du préjudice moral du demandeur consécutif à la publication litigieuse, il convient de prendre en compte le fait que celui-ci subit l’exposition au public d’éléments de sa vie privée dans un article qui paraît dans un magazine de diffusion nationale et à grand tirage et qui est annoncé en page de couverture, par un texte de couleur criarde annonçant la révélation d’une histoire présentée comme « secrète » et par la mention « PHOTOS EXCLU », soit sous la promesse de l’exclusivité propre à attirer l’attention d’un public plus large que celui des seuls acheteurs du magazine.

Il convient également de prendre en considération que l’article, en traitant du sujet intime de sa relation amoureuse supposée, à propos de laquelle le demandeur ne s’était pas publiquement exprimé au préalable, est de nature à donner de la consistance au préjudice allégué.

Il y a lieu également de retenir que les intéressés ont été photographiés avec un téléobjectif, ce qui démontre une surveillance préjudiciable de leurs activités, y compris dans des moments de nature privée.

Certains éléments commandent toutefois une appréciation plus modérée du préjudice subi par le demandeur.

Il sera, en premier lieu, souligné que la victime ne produit aucune pièce de nature à préciser le préjudice résultant spécifiquement pour lui de la publication de l’article.

Il convient également de relever que le ton de l’article reste bienveillant à l’égard de l’intéressé, dont les qualités supposées sont mises en avant.

Enfin, s’il a pas révélé officiellement cette liaison supposée à l’occasion des articles de presse postérieurs produits, il convient de relever que ses publications sur son compte INSTAGRAM, relayées par ces articles, qui font des allusions à sa liaison, sont de nature à attiser la curiosité du public et à nuancer la sensibilité de l’intéressé à l’évocation d’éléments relevant de sa vie privée par un magazine ainsi que l’importance qu’il accorde à la protection de celle-ci.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu d’allouer à la victime à titre de réparation de son préjudice moral, la somme de 3 000 euros pour les atteintes portées à sa vie privée et à son droit à l’image.


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