L’Essentiel : L’arrivée de Netflix en France soulève des questions sur son impact sur la production audiovisuelle locale. Bien que l’abonnement à 7,99 euros par mois offre un accès illimité à des contenus, Netflix n’a commandé qu’une seule série, « Marseille », et ne bénéficie pas du soutien du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) en raison de sa localisation aux Pays-Bas. De plus, les services de vidéo à la demande (VàD) établis à l’étranger, comme Netflix, échappent à certaines réglementations fiscales et de contribution à la production, ce qui crée une distorsion de concurrence sur le marché français.
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Impact de NetflixL’arrivée de Netflix invite à s’interroger sur son impact sur le système de production audiovisuelle français. Coûtant 7,99 euros par mois, l’abonnement à Netflix permet à chaque Français de disposer en illimité d’un service de vidéos à la demande. Pour le moment, le lancement de Netflix, service de média audiovisuel à la demande (SMAD) défini par la directive SMA de 2007 en France, n’a pas eu d’impact très significatif sur le système de production audiovisuelle français. Une seule série a été commandée par Netflix en France, « Marseille », produite par Federation Entertainment. Le budget par épisode serait compris entre 0,8 M€ et 1,0 M€, comparable au budget d’un épisode de série diffusée en première partie de soirée sur les chaînes françaises. Néanmoins, les productions soutenues par Netflix en France (une seule à ce jour) ne peuvent pas être soutenues par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), car la plate-forme est basée aux Pays-Bas. Ne contribuant pas financièrement au système du CNC, Netflix ne peut donc pas voir ses projets français cofinancés par le CNC. Si Netflix bénéficie d’un taux de notoriété élevé au sein du public français (66 % connaissent Netflix en février 2015), le service compterait toutefois moins de 250 000 abonnés selon des sources non officielles, contre 600 000 pour Canalplay fin 2014, selon le groupe Canal+. D’après les études que réalise le CNC sur le marché de la vidéo à la demande, l’usage de Netflix est quasiment stable depuis le mois de février dernier. Le choix d’un établissement au Luxembourg puis aux Pays-Bas par Netflix soulève une série de questions quant au respect de ses obligations fiscales et sectorielles. I – Taxes et fiscalité. Quelle TVA applicable ?En matière de TVA, les services de Vidéo à la demande (VàD) établis en France sont soumis à une TVA de 20 %, alors que les services établis à l’étranger bénéficient généralement d’une TVA plus avantageuse. La règle du pays de consommation, qui a commencé à s’appliquer à partir du 1er janvier 2015, devrait cependant mettre progressivement fin à cette distorsion de concurrence. Les éditeurs de services de VàD établis en France sont soumis à la taxe vidéo (2 % du chiffre d’affaires dans le cas général, 10 % dans le cas de programmes adultes) alimentant le CNC depuis la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, qui a complété l’article 302 bis KE du code général des impôts (nouvellement 1609 sexdecies B). Cet article, antérieur à la directive SMA de 2007, et donc à la notion juridique de SMAd, précise qu’ « est assimilée à une activité de vente ou de location de vidéogrammes la mise à disposition du public d’un service offrant l’accès à titre onéreux à des oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles, sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique ». Une extension de la taxe vidéo et VàD aux opérateurs établis à l’étranger a été votée lors de la loi de finances rectificative pour 2013 via son article 30. Cette disposition est maintenant en cours d’examen auprès de la Commission Européenne. Concernant l’impôt sur les sociétés, la réalisation de prestations de services immatérielles depuis le Luxembourg pose la question de la localisation de l’établissement stable dans le pays de consommation des services numériques. Le travail continue sur ce point, à l’OCDE comme au sein de l’Union européenne. Récemment, la Commission européenne a affiché sa volonté ferme d’avancer sur ce sujet de la localisation de l’établissement stable et le rattachement des profits au pays de consommation. S’agissant d’un sujet relevant des conventions bilatérales, le règlement de ce sujet dans les instances internationales est un passage obligé pour faire avancer le droit. II – Contribution à la production. Absence de contribution à la productionLe décret du 12 novembre 2010 précise les règles applicables en matière : de contribution des SMAd à la production d’oeuvres cinématographiques et audiovisuelles ; d’exposition et de mise en valeur effective de ces oeuvres ; de règles applicables à la publicité, au parrainage et au téléachat. Ce décret ne s’applique qu’aux plates-formes établies en France et ces dispositions ne s’appliquent notamment pas à iTunes, GooglePlay, ni à Netflix. De ce fait, la révision de la directive SMA, sur laquelle s’appuie le décret suscité, constituera dans les prochains mois un sujet important pour les Autorités françaises, dans la perspective notamment d’y faire s’appliquer la règle du pays de destination, et non plus du pays d’origine. Chronologie des médiasSeuls les SMAd établis en France sont directement soumis à la chronologie des médias. Néanmoins, si un service établi hors de France contrevenait à celle-ci, tout ayant droit de l’oeuvre établi en France et, à ce titre, soumis à cette chronologie, pourrait, le cas échéant, faire l’objet de sanctions financières. Ainsi, toute la production domestique est a minima couverte par la chronologie des médias, quel que soit le lieu d’établissement du SMAd concerné. À noter qu’à ce jour, aucun acteur de SMAd établi hors de France n’a volontairement enfreint la chronologie des médias française, y compris pour des oeuvres acquises directement auprès d’ayants droit étrangers. En particulier, iTunes respecte totalement cette chronologie, bien qu’établi au Luxembourg et bien qu’il soit impliqué dans la plupart des expérimentations de sorties simultanées salle de cinéma / VàD dans d’autres pays, en Europe et aux États-Unis. La pertinence économique de la chronologie des médias pour les ayants droit et l’importance de la production nationale dans la consommation des oeuvres en VàD en France limitent le risque d’une infraction à la chronologie émanant de SMAd établis à l’étranger, sans bien sûr l’éteindre totalement. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est l’impact de Netflix sur le système de production audiovisuelle français ?L’impact de Netflix sur le système de production audiovisuelle français est encore limité. Bien que le service de vidéo à la demande (VàD) ait été lancé en France, il n’a pas significativement modifié le paysage audiovisuel. Actuellement, seule une série, « Marseille », a été produite par Netflix en France, avec un budget par épisode comparable à celui des séries diffusées sur les chaînes françaises. Cependant, cette production ne bénéficie pas du soutien du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) en raison de la localisation de Netflix aux Pays-Bas. Cela soulève des questions sur la contribution de Netflix au financement du système audiovisuel français, d’autant plus que le service ne contribue pas financièrement au CNC. Quelle est la situation de la TVA pour les services de vidéo à la demande ?Les services de vidéo à la demande (VàD) établis en France sont soumis à une TVA de 20 %. En revanche, les services établis à l’étranger, comme Netflix, bénéficient souvent d’une TVA plus avantageuse. Depuis le 1er janvier 2015, la règle du pays de consommation a été mise en place pour réduire cette distorsion de concurrence. Les éditeurs de services de VàD en France doivent également payer une taxe vidéo, qui est de 2 % du chiffre d’affaires, et de 10 % pour les programmes destinés aux adultes. Cette taxe alimente le CNC et a été introduite par la loi n° 2004-669. Une extension de cette taxe aux opérateurs étrangers est en cours d’examen par la Commission Européenne. Pourquoi Netflix ne contribue-t-il pas à la production audiovisuelle en France ?Netflix ne contribue pas à la production audiovisuelle en France en raison des règles établies par le décret du 12 novembre 2010, qui ne s’appliquent qu’aux plateformes basées en France. Ce décret impose des obligations de contribution à la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles, mais ne concerne pas les services comme Netflix, qui sont basés à l’étranger. La révision de la directive SMA pourrait changer cette situation, car les autorités françaises envisagent d’appliquer la règle du pays de destination, ce qui pourrait inclure Netflix. Ainsi, la question de la contribution de Netflix à la production reste un sujet de débat et d’évolution potentielle dans les mois à venir. Comment la chronologie des médias s’applique-t-elle aux SMAd ?La chronologie des médias s’applique uniquement aux services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) établis en France. Cela signifie que les plateformes étrangères, comme Netflix, ne sont pas directement soumises à ces règles. Cependant, si un service établi hors de France enfreint cette chronologie, les ayants droit en France peuvent demander des sanctions financières. À ce jour, aucun SMAd étranger n’a enfreint volontairement la chronologie des médias française. Par exemple, iTunes respecte cette chronologie, bien qu’il soit basé au Luxembourg. La pertinence économique de cette chronologie pour les ayants droit et l’importance de la production nationale limitent le risque d’infraction par des SMAd étrangers. |
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