Arrivée de l’internet dans les prisons ?

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Arrivée de l’internet dans les prisons ?

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) a remis son avis positif pour un accès plus souple à Internet dans les lieux fermés (prisons, hôpitaux psychiatriques ….).  

Favoriser l’accès à Internet

Le CGLPL a réitéré
les recommandations formulées dans son avis du 20 juin 2011 relatif à l’accès à
l’informatique des personnes détenues, aux termes desquelles dans les locaux
partagés, dans lesquels se tient un tiers (formateur, enseignant…) et/ou un
personnel de l’administration, les matériels et les données permettant la
communication doivent être admis et même encouragés et des dispositions doivent
être prises à bref délai pour que chaque établissement assure depuis ces locaux
le lien avec les services en ligne (« internet »), l’administration
pouvant se réserver de rendre impossible l’accès à certains d’entre eux […] de
manière contrôlable et identifiée.

Ainsi, il est
recommandé que chaque personne détenue puisse disposer d’un accès à des sites
d’information de toute nature, dont les fonctions interactives auront été
préalablement inhibées dans des conditions comparables à celles qui prévalent
pour l’accès à la presse et à la documentation. Il est également recommandé que
chaque personne détenue ait accès à un système de messagerie fermé accessible
uniquement par les correspondants autorisés par le juge ou par l’administration
pénitentiaire, avec un contrôle comparable à celui qui est exercé sur le
courrier échangé sur papier, ainsi qu’à un système de vidéocommunications
contrôlé dans les mêmes conditions que l’est aujourd’hui le téléphone. Enfin,
pour les personnes détenues dont la situation ou les projets le justifient, il
est recommandé qu’un accès contrôlé, incluant les fonctions interactives, soit
mis en place vers les sites de services (formalités, enseignement, etc.) par
décisions individuelles.

Enjeux pour les détenus

Les enjeux liés à
l’accès à internet dans les lieux de privation de liberté sont multiples, tant
pour l’accès à l’information et à la formation et le maintien des liens avec
l’extérieur que pour la préparation à la sortie et la réinsertion. Si aucune
base légale ne permet de priver les personnes enfermées de tout accès à
internet, le CGLPL constate néanmoins que, selon les lieux de privation de
liberté concernés et leurs spécificités, notamment au regard du public qu’ils
accueillent, les modalités d’accès sont diverses et les limitations fréquentes.
Par ailleurs, si cet accès doit être favorisé, il convient de prêter une
attention particulière à l’accompagnement humain, à la lutte contre l’isolement
et au respect de la vie privée numérique des personnes privées de liberté.

Question de l’interdiction légale

En France,
l’interdiction absolue faite aux personnes détenues d’accéder à internet ne
repose sur aucune disposition légale. Une note du 21 mai 2004 intitulée
Interdiction faite aux détenus d’accéder à internet et à tout [système
d’information (SI)] extérieur a réglementé cet accès, et ce principe a été de
nouveau posé par la circulaire de l’administration pénitentiaire du 13 octobre
2009 relative à l’accès à l’informatique pour les personnes placées sous-main
de justice, puis par le décret du 23 décembre 2010 relatif à l’accès aux
publications écrites et audiovisuelles, aux termes duquel les personnes
détenues peuvent y accéder « par l’utilisation collective ou individuelle
d’équipements informatiques non connectés à des réseaux extérieurs ». Le décret
du 30 avril 2013 relatif aux règlements intérieurs types des établissements
pénitentiaires abroge et remplace le décret précité sans modifier cette
disposition désormais codifiée enannexe de l’article R.57-6-18 du code de
procédure pénale
.

La circulaire «
informatique » du 13 octobre 2009 aménage cette interdiction en rappelant qu’«
hormis pour les salles dédiées, notamment les espaces Cyber Base, les
connexions à des réseaux externes depuis les salles d’activité sont interdites.
Les règles de sécurité suivantes concernent donc les salles d’activités
connectées à des réseaux externes ayant reçu une validation de l’état-major de
sécurité et du [responsable de la sécurité des systèmes d’information (RSSI)]
».

Point sur les expérimentations

Expérimentées au
titre d’une convention signée en 2007 entre le ministère de la justice et la
Caisse des dépôts et consignations, les Cyber-bases justice sont des espaces
informatiques équipés en réseaux avec un accès limité et contrôlé à internet,
dénués néanmoins de possibilité d’interaction directe avec l’extérieur. Sept
établissements pénitentiaires ont été désignés pour développer
l’expérimentation qui a débuté en 2009. Dix ans après, certaines de ces
Cyber-bases ont cessé de fonctionner, notamment en raison d’une maintenance
insuffisante ou inadaptée. Cet outil, qui avait vocation à « rendre les personnes
détenues autonomes dans l’utilisation de l’outil internet et multimédia et de
leur permettre d’accéder aux équipements informatiques, au travers d’ateliers
collectifs, d’accompagnement individuel ou d’accès encadré », n’a par ailleurs
jamais été déployé dans d’autres établissements.

Un nouveau projet, appelé Numérique en détention
(NED), est actuellement expérimenté par l’administration pénitentiaire et vise
à « dématérialiser certains processus de gestion internes ». Ce portail,
accessible en cellule, dans des salles d’activité ou dans les coursives,
devrait permettre aux personnes incarcérées de procéder à des commandes en
cantine (achat de nourriture et de biens d’usage courant), de consulter le
solde de leur compte nominatif, de formuler des requêtes auprès des différents
services de l’établissement ou encore d’avoir accès à un environnement
numérique de travail cependant limité à quelques enseignements et formations et
sans accès à internet.

Pratiques dans les lieux de rétention
administrative

Dans les lieux de
rétention administrative, ni lecode de l’entrée et du séjour des
étrangers et du droit d’asile
(CESEDA), ni les règlements intérieurs ne prohibent l’accès à
internet des personnes retenues, sans pour autant l’autoriser explicitement ou
l’organiser concrètement. Néanmoins, une circulaire du 14 juin 2010 relative à
l’harmonisation des pratiques dans les centres et les locaux de rétention
administrative et lors de l’exécution des escortes, qui fixe les règles quant
au retrait ou à l’autorisation de conserver des objets dans les lieux de
rétention administrative et contient une liste des « objets autorisés » et des
« objets déposés à l’arrivée », inclut dans la première catégorie le «
téléphone portable démuni d’appareil photographique » et, dans la seconde, les
« appareils informatiques ou électroniques permettant la prise de vue ». Selon
le CGLPL, la pratique consistant à retirer systématiquement aux personnes
retenues les téléphones portables ou autres terminaux équipés d’un appareil
photographique (le plus souvent munis d’un accès à internet) n’est pas
justifiée par un motif lié à la sécurité des biens et des personnes mais par
les dispositions légales et réglementaires relatives à la protection du droit à
l’image, alors que les sanctions pénales encourues pour atteinte à la vie
privée pourraient utilement faire l’objet d’un affichage, en plusieurs langues,
au sein des locaux de rétention, en vue de prévenir toute infraction dans ce
domaine.

Dans ces conditions, le CGLPL recommande que
tous les appareils informatiques ou électroniques soient autorisés en centre de
rétention administrative, même ceux permettant la prise de vue. Il recommande
également que les zones d’hébergements soient équipées de rangements comportant
un dispositif de fermeture afin que chaque personne retenue puisse mettre ses
biens en sécurité, qu’il s’agisse de son téléphone ou de tout autre matériel
informatique personnel, et en user sans dépendre de la disponibilité des
fonctionnaires. Enfin, un accès wifi et une salle équipée de terminaux
(ordinateurs, imprimantes, scanners…) connectés à internet doivent être mis à
disposition des personnes retenues en vue de faciliter l’exercice de leurs
droits (contact avec les avocats, accès à l’information juridique), leurs
démarches administratives et personnelles (virements bancaires, résiliation de
contrats, transmission de documents), de maintenir leurs liens avec leurs
proches, de leur permettre de s’informer utilement ou encore de lutter contre
l’ennui et l’oisiveté forcée.

Internet dans les établissements
psychiatriques

Le CGLPL
recommande également qu’un accès à internet soit aménagé dans l’ensemble des
centres hospitaliers accueillant des patients admis en soins psychiatriques
sans leur consentement, afin de permettre aux patients dont l’état clinique le
permet de consulter leur messagerie, de se former ou de s’informer et d’initier
des démarches pour préparer leur levée d’hospitalisation, en toute autonomie.
De même, les patients doivent pouvoir conserver leurs terminaux mobiles
personnels (smartphones, ordinateurs portables, tablettes, etc.). Les seules
exceptions doivent relever d’une décision médicale ou du choix du patient
concerné. Toutes les chambres doivent être équipées de casiers fermant à clé
afin que les patients puissent assurer, de manière autonome, la protection de
leurs biens. La présence de professionnels aux côtés des patients lorsqu’ils
utilisent leur messagerie électronique, consultent des sites internet ou
effectuent des démarches en ligne ne peut être justifiée que par la demande
expresse formulée par le patient lui-même ou par un motif thérapeutique. Les
établissements de santé doivent par ailleurs aménager un accès wifi pour
permettre aux patients d’utiliser leurs terminaux personnels.

Questions / Réponses juridiques

Quel est l’avis du CGLPL concernant l’accès à Internet dans les lieux fermés ?

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) a émis un avis positif pour un accès plus souple à Internet dans les établissements tels que les prisons et les hôpitaux psychiatriques.

Cet avis s’inscrit dans la continuité des recommandations formulées en 2011, qui préconisent que les personnes détenues puissent avoir accès à des outils informatiques et à Internet, notamment dans des locaux partagés avec des formateurs ou des personnels administratifs.

Le CGLPL insiste sur l’importance d’un accès contrôlé, permettant aux détenus de communiquer et d’accéder à des informations variées, tout en respectant des conditions de sécurité et de contrôle.

Quels sont les enjeux de l’accès à Internet pour les détenus ?

L’accès à Internet dans les lieux de privation de liberté présente plusieurs enjeux cruciaux. Il permet aux détenus d’accéder à l’information, de se former, et de maintenir des liens avec l’extérieur, ce qui est essentiel pour leur réinsertion.

Le CGLPL souligne que, bien qu’il n’existe pas de base légale pour interdire cet accès, les modalités d’accès varient considérablement d’un établissement à l’autre.

Il est également important de veiller à l’accompagnement humain des détenus, à la lutte contre l’isolement, et au respect de leur vie privée numérique, afin de garantir un accès équilibré et bénéfique à Internet.

Quelle est la situation légale concernant l’accès à Internet pour les détenus en France ?

En France, il n’existe pas de loi interdisant formellement l’accès à Internet pour les personnes détenues. Cependant, des notes et circulaires ont réglementé cet accès, établissant des restrictions.

La circulaire de 2009 rappelle que les connexions à des réseaux externes sont interdites, sauf dans des salles dédiées. Les détenus peuvent utiliser des équipements informatiques non connectés à Internet, mais l’accès à des réseaux extérieurs reste limité.

Cette réglementation a été codifiée dans le code de procédure pénale, mais le CGLPL plaide pour une réévaluation de ces restrictions afin de favoriser un accès plus large et contrôlé à Internet.

Quelles expérimentations ont été menées concernant l’accès à Internet en prison ?

Des expérimentations ont été menées avec les Cyber-bases justice, des espaces informatiques équipés d’un accès limité à Internet, initiées en 2009.

Cependant, certaines de ces installations ont cessé de fonctionner en raison d’un manque de maintenance. L’objectif initial était de rendre les détenus autonomes dans l’utilisation d’Internet, mais le déploiement a été limité.

Actuellement, un nouveau projet, Numérique en détention (NED), est en cours d’expérimentation, visant à dématérialiser certains processus de gestion internes, mais sans accès direct à Internet.

Comment se déroule l’accès à Internet dans les lieux de rétention administrative ?

Dans les lieux de rétention administrative, l’accès à Internet n’est pas explicitement prohibé, mais il n’est pas non plus organisé de manière concrète.

Une circulaire de 2010 a établi des règles concernant les objets autorisés, incluant les téléphones portables sans appareil photo, mais le retrait systématique des appareils équipés d’accès à Internet est souvent pratiqué.

Le CGLPL recommande d’autoriser tous les appareils informatiques, y compris ceux permettant la prise de vue, et de fournir un accès Wi-Fi pour faciliter les démarches administratives et maintenir les liens avec l’extérieur.

Quelles recommandations le CGLPL fait-il pour les établissements psychiatriques ?

Le CGLPL recommande que tous les centres hospitaliers accueillant des patients en soins psychiatriques sans consentement aménagent un accès à Internet. Cela permettrait aux patients de consulter leur messagerie, de se former et d’initier des démarches pour leur levée d’hospitalisation.

Les patients devraient également pouvoir conserver leurs appareils mobiles, sauf décision médicale contraire.

Des casiers sécurisés devraient être mis à disposition pour protéger leurs biens, et un accès Wi-Fi doit être aménagé pour l’utilisation de leurs terminaux personnels, garantissant ainsi leur autonomie et leur droit à l’information.


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