Tribunal judiciaire de Paris, 21 novembre 2024, RG n° 23/12437
Tribunal judiciaire de Paris, 21 novembre 2024, RG n° 23/12437

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Responsabilité des organisateurs de voyages : enjeux d’indemnisation et contestations des préjudices.

Résumé

Résumé de l’Affaire

Dans cette affaire, une victime a subi un accident le 15 mai 2018 lors d’un voyage organisé par une société de voyages. Elle a été percutée par un bus qui transportait le groupe, entraînant des blessures graves.

Évaluation des Préjudices

Un médecin a évalué les blessures de la victime, notant un déficit fonctionnel temporaire partiel et des atteintes à son intégrité psychique. Un rapport d’expertise ultérieur a confirmé une hospitalisation prolongée et a estimé le déficit fonctionnel permanent à 42%, avec des préjudices esthétiques et d’agrément significatifs.

Demande d’Indemnisation

Les proches de la victime, comprenant son époux et ses enfants, ont assigné la compagnie d’assurance du voyagiste et la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) pour obtenir une indemnisation. Ils ont fait valoir leur droit à réparation intégrale, en raison de la responsabilité de plein droit des organisateurs de voyages.

Intervention de la CPAM

La CPAM de Loir et Cher a également intervenu dans l’affaire pour exercer son recours subrogatoire, justifiant son intervention par des règlements effectués au bénéfice de la victime.

Contestation de la Compagnie d’Assurance

La compagnie d’assurance a contesté les demandes d’indemnisation, arguant que les montants demandés n’étaient pas justifiés et que certains frais n’étaient pas imputables à l’accident. Elle a également remis en question la responsabilité des victimes indirectes, soulignant qu’elles devaient prouver une faute délictuelle du voyagiste.

Décision du Juge de la Mise en État

Le juge a reçu l’intervention de la CPAM et a condamné la compagnie d’assurance à verser une provision de 25.000 € à la victime, tout en rejetant les demandes des victimes indirectes. L’affaire a été renvoyée à la mise en état pour la clôture, avec des délais pour les conclusions des parties.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

5ème chambre 2ème section

N° RG 23/12437
N° Portalis 352J-W-B7H-C2EST

N° MINUTE :

Assignations des :
26 et 29 Septembre 2023

CONDAMNE
RENVOI

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 21 Novembre 2024
DEMANDEURS A L’INCIDENT

Madame [L] [H] épouse [U]
[Adresse 7]
[Localité 3]

Monsieur [M] [U]
[Adresse 7]
[Localité 3]

Madame [A] [F]
[Adresse 6]
[Localité 3]

ET

Monsieur [G] [F]
[Adresse 11]
[Localité 10]

Représentés par Maître Soukaïna MAHZOUM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1487

DEFENDERESSES A L’INCIDENT

HISCOX SA
[Adresse 4]
[Localité 9]

Représentée par la SELARL Houle Maître Yanick HOULE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1743

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’INDRE ET LOIRE
Expéditions
exécutoires
délivrées le :
[Adresse 1]
[Localité 2]

Décision du 21 Novembre 2024
5ème chambre 2ème section
N° RG 23/12437 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2EST

Non représentée

PARTIE INTERVENANTE

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LOIR & CHER
Intervenant volontairement aux lieu et place de la CPAM d’Indre et Loire
[Adresse 8]
[Localité 5]

Représentée par Maître Cécile DE LORME, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C1087 et par Maître Jacques SIEKLUCKI, avocat au barreau de TOURS, avocat plaidant

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Madame Christine BOILLOT, Vice-Présidente

Assistée de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 17 Octobre 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 21 Novembre 2024.

ORDONNANCE

Prononcée en audience publique
Réputée contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE
Madame [L] [H] a été victime, le 15 mai 2018, d’un accident alors qu’elle participait à un voyage au Canada, organisé par la société SELECTOUR PORNIC VOYAGE, assurée auprès de la compagnie HISCOX : elle a en effet été percutée par le bus qui transportait le groupe et qui a reculé, et a été sérieusement blessée.

Elle a été examinée par le docteur [N], psychiatre et psychothérapeute qui a retenu une consolidation au 15 mai 2019, un déficit fonctionnel temporaire partiel de 25%, une atteinte à l’intégrité psychique de 10% et un pretium doloris de 3/7 ainsi qu’un préjudice d’agrément.

Par ordonnance rendue le 7 décembre 2020, le juge des référés a ordonné une mesure d’expertise, initialement confiée au docteur [E], puis, en remplacement, du professeur [V], par ordonnance du 15 janvier 2021, lequel a rendu son rapport. Il rappelle que la patiente a subi une hospitalisation de plus de 5 mois, puis a été placée en hospitalisation de jour dans l’année qui a suivi l’accident et qui fixe sa consolidation au 23 octobre 2020. Le déficit fonctionnel est estimé à 42% après consolidation (10% au plan psychologique et 35% au plan orthopédique) et était avant la consolidation estimé à 45%, avec une heure d’assistance tierce personne à 1h00 par jour, et un préjudice esthétique à 4/7. L’expert retient un préjudice d’agrément évident et une assistance tierce personne à 5h00 par semaine et des souffrances endurées à 5/7 avec un préjudice esthétique définitif à 4/7, et un préjudice sexuel sans préjudice d’établissement, avec la nécessité d’un logement et d’un véhicule adaptés. Lors du rapport d’expertise le déficit fonctionnel permanent a pu être contesté, de même que l’assistance tierce personne.

Sur la base de ce rapport, par actes extrajudiciaires des 26 et 29 septembre 2023, les consorts [H] [U] [F], soit la victime son époux et ses enfants, ont assigné la compagnie HISCOX INSURANCE COMPANY LIMITED SA et la CPAM Indre et Loire au visa de l’article L 211-16 du code du tourisme aux fins d’obtenir indemnisation de l’accident dont Madame [L] [H] a été victime, le 15 mai 2018, faisant valoir son droit à réparation intégral au regard de la responsabilité de plein droit des organisateurs de forfait touristique, alors qu’elle a au préalable pendant de longs mois tenté de trouver une issue amiable de ce litige.

Le 23 janvier 2024 la CPAM de Loir et Cher est intervenue par voie de conclusions d’intervention volontaire pour exercer son recours subrogatoire adressant en ce sens des conclusions au fond au tribunal.

Vu les conclusions d’incident des consorts [H] [U] [F] du 3 novembre 2023, dans lesquelles ils sollicitent du juge de la mise en état qu’il les juge recevables et bien fondés en leurs demandes concernant le droit à indemnisation de Madame [L] [H], incontestable, en tant que victime directe, à la suite de l’accident dont elle a été victime le 15 mai 2018, sur le fondement des articles L 211-16 et suivants du code du tourisme, ainsi que celui de [M] [U], [A] [F] et [G] [F], en tant que victimes indirectes de l’accident, en sollicitant à titre de provision à valoir sur la liquidation définitive des préjudices la condamnation de la société HISCOX à verser:
– 200.000,00 € à [L] [H];
– 10.000€ à [M] [U] son époux;
– 5.000 € à [A] [F], sa fille ;
– 5.000 € à [G] [F], son fils;
En tout état de cause de
rendre l’ordonnance commune à la CPAM de l’Indre-et-Loire sa condamnation à lui verser 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ; et à verser à [M] [U], [A] [F] et [G] [F] la somme de 1.500,00 € chacun au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Les demandeurs font valoir que leur droit à réparation est incontestable dès lors que le bus est un prestataire de service du voyage SELECTOUR, et que la garantie de son assureur la compagnie HISCOX est dès lors mobilisable, et au regard des termes de l’expertise judiciaire.

Vu les conclusions en réponse à incident de HISCOX SA, notifiées par RPVA le 14 novembre 2023, dans lesquelles cette dernière sollicite :
A titre principal, de juger que,
le principe et le quantum des demandes de provision de Madame [L] [H], épouse [U], Monsieur [M] [U], Madame [A] [T] [F] et Monsieur [G] [F] ne sont pas justifiées, et font l’objet d’une contestation sérieuse ; qu’ils ne sont pas recevables et fondés à engager la responsabilité contractuelle de plein droit de l’assurée de la société HISCOX SA et de les débouter de leurs demandes, ainsi que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie d’Indre-et-Loire des siennes ;En tout état de cause, condamner solidairement les demandeurs à lui payer 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens du présent incident, dont distraction au profit de Maître Yanick Houle.

La compagnie d’assurance fait valoir que la demanderesse a déjà perçu à titre de provision :
10.000€ de sa part ;86.807,80€ de la part de la SAAQ.Et qu’elle ne rapporte pas la preuve de ses besoins particuliers et conteste la provision dans son principe comme dans son évaluation.
Elle souligne que l’expert a relevé les antécédents médicaux de la victime directe et qu’il ressort de la pièce n° 27 que certaines dépenses ne seraient pas imputables à l’accident.
Elle conteste notamment le poste assistance tierce personne tel qu’évalué, le déficit fonctionnel temporaire et partiel et permanent, des souffrances endurées, du préjudice esthétique, et des frais de logement adaptés dans leur quantum ; elle conteste le préjudice d’agrément et sexuel dans leur principe comme dans leur quantum.
Elle fait valoir le mal fondé des demandes des victimes indirectes qui ne peuvent nullement se prévaloir de la responsabilité contractuelle de l’article L211-16 du code du tourisme et qui ne pourraient rechercher que la responsabilité délictuelle du tour operator et de son assureur en établissant sa faute, sachant qu’en l’occurrence aucune faute ne saurait être imputée au tour operator en lien causal avec le préjudice, alors que c’est la victime directe qui s’est placée derrière la roue de l’autocar.

Les parties ont été appelées à l’audience du juge de la mise en état du 17 octobre 2024.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe, susceptible d’appel dans les termes de l’article 795 du code de procédure civile,

REÇOIT l’intervention volontaire de la CPAM de Loir et Cher ;

CONDAMNE la compagnie HISCOX INSURANCE COMPANY LIMITED SA à verser à Madame [L] [H] 25.000€ à titre de provision supplementaire, à valoir sur son indemnisation définitive ;

REJETTE les plus amples demandes des demandeurs au titre de l’incident ;

RÉSERVE les dépens et demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

RENVOIE l’affaire à la mise en état du pour clôture au 6 février 2025 – les parties étant invitées à préciser leur demande de clôture -, avec conclusions du demandeur avant le 20 décembre 2024, et conclusions du défendeur avant le 30 janvier 2025.

Faite et rendue à Paris le 21 Novembre 2024.

La Greffière La Juge de la mise en état

Erell GUILLOUËT Christine BOILLOT

 


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