L’Essentiel : Le 27 janvier 2025, la directrice d’un établissement public de santé a décidé d’admettre une patiente en soins psychiatriques en raison de troubles du comportement, incluant des tentatives de suicide. Le 31 janvier, la directrice a saisi le juge des libertés et de la détention pour prolonger l’hospitalisation. L’avocat de la patiente a contesté la régularité de la procédure, notamment l’absence de notification de l’admission et une différence de signature. Toutefois, le juge a rejeté ces arguments, ordonnant la poursuite de l’hospitalisation complète, justifiée par l’état mental de la patiente, et a laissé les dépens à la charge de l’État.
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Contexte de l’HospitalisationLe 27 janvier 2025, la directrice d’un établissement public de santé a décidé d’admettre une patiente en soins psychiatriques. Cette admission a été motivée par des troubles du comportement, notamment des tentatives de suicide. La patiente a été hospitalisée d’urgence après une période d’observation aux urgences, débutée le même jour. Procédure JudiciaireLe 31 janvier 2025, la directrice de l’établissement a saisi le juge des libertés et de la détention pour obtenir la poursuite de l’hospitalisation complète de la patiente. Le ministère public a également été informé et a transmis ses observations par écrit le 5 février 2025. Lors de l’audience du 6 février 2025, l’avocat de la patiente a été entendu. Arguments de l’AvocatL’avocat de la patiente a soulevé des questions concernant la régularité de la procédure, notamment l’absence de notification de la décision d’admission. Il a également contesté la validité de la demande d’hospitalisation en raison d’une différence de signature sur les documents fournis. Cependant, le juge a rejeté ces arguments, considérant que les obligations légales avaient été respectées. Évaluation MédicaleL’évaluation médicale a révélé que la patiente présentait des troubles mentaux qui rendaient son consentement impossible. Son état nécessitait des soins immédiats et une surveillance médicale constante. Les observations médicales indiquaient un contact médiocre, un ralentissement psychomoteur et une adhésion passive aux soins. Décision du JugeAu terme des débats, le juge des libertés et de la détention a décidé de rejeter les moyens de nullité soulevés par l’avocat de la patiente. Il a ordonné la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète, considérant que l’état mental de la patiente justifiait cette décision. Les dépens ont été laissés à la charge de l’État, et l’ordonnance a été déclarée exécutoire de plein droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la régularité de la procédureLa question de la régularité de la procédure d’admission en soins psychiatriques est soulevée, notamment en ce qui concerne la notification de la décision d’admission à la patiente. Il est important de se référer à l’article L.3211-2-3 du code de la santé publique, qui stipule que : « Lorsqu’une personne remplissant les conditions pour être admise en soins psychiatriques est prise en charge en urgence par un établissement de santé qui n’assure pas la prise en charge des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, la période d’observation et de soins initiale prend effet dès le début de la prise en charge. » Dans cette affaire, la patiente a été hospitalisée le 27 janvier 2025, et bien que la décision d’admission ait été rédigée le 29 janvier 2025, la période d’observation a débuté dès le 27 janvier. La notification mentionnée par le conseil de la patiente, datée du 28 janvier 2025, concerne la prise en charge initiale. Il est donc établi que la patiente a été informée de la décision d’admission, des raisons qui la motivent, ainsi que de ses droits et des voies de recours. Ainsi, les obligations légales ont été respectées, et le moyen sera rejeté. Sur l’irrégularité de la demande de tiersLa question de l’irrégularité de la demande de tiers est également soulevée, en raison d’une différence de signature sur la carte d’identité et sur la demande. Il convient de noter qu’une période de près de 6 ans s’est écoulée entre l’émission de la carte d’identité et la signature de la demande. La signature du titulaire de la carte, qui avait 16 ans lors de son établissement, a pu changer. En tout état de cause, la production de ce document est suffisante pour établir l’identité du signataire, qui a été vérifiée par l’établissement de santé. Par conséquent, le moyen sera également rejeté. Sur la poursuite de la mesure de soins psychiatriquesLa question de la poursuite de la mesure de soins psychiatriques est régie par l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, qui précise que : « Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : En l’espèce, il est établi que la patiente présente des troubles qui rendent impossible son consentement et que son état mental nécessite des soins immédiats. L’article L. 3211-12-1 précise également que : « L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure, avant l’expiration d’un délai de douze jours. » Les éléments médicaux indiquent que la patiente présente un risque important de mise en danger et une grande ambivalence aux soins. Ainsi, il est justifié d’ordonner la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de la patiente, conformément aux dispositions légales. |
DE BOBIGNY
ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D’UNE MESURE D’HOSPITALISATION COMPLÈTE
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DÉLAI DE 12 JOURS
ADMISSION A LA DEMANDE D’UN TIERS OU EN CAS DE PÉRIL IMMINENT
N° RG 25/01032 – N° Portalis DB3S-W-B7J-2THB
MINUTE: 25/00240
Nous, Hélène ASTOLFI, juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de BOBIGNY, assisté de Caroline ADOMO, greffier, avons rendu la décision suivante concernant:
Madame [Z] [N]
née le 14 Novembre 1991 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Etablissement d’hospitalisation: L’EPS [6]
Absente représentée par Me Ophélie BLONDEL, avocat commis d’office
PERSONNE A L’ORIGINE DE LA SAISINE
Madame la directrice de L’EPS [6]
Absente
TIERS A L’ORIGINE DE L’HOSPITALISATION
Monsieur [E] [W]
Absent
MINISTÈRE PUBLIC
Absent
A fait parvenir ses observations par écrit le 05 février 2025
Le 27 janvier 2025, la directrice de L’EPS [6] a prononcé la décision d’admission en soins psychiatriques de Madame [Z] [N].
Depuis cette date, Madame [Z] [N] fait l’objet d’une hospitalisation complète au sein de L’EPS [6].
Le 31 janvier 2025, la directrice de l’établissement a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète de Madame [Z] [N].
Le ministère public a fait connaître son avis par conclusions écrites du 05 février 2025.
A l’audience du 06 février 2025, Me Ophélie BLONDEL, conseil de Madame [Z] [N], a été entendu en ses observations.
L’affaire a été mise en délibéré à ce jour.
Sur la régularité de la procédure
1/ Sur l’absence de notification de la décision d’admission
Le conseil de Madame [Z] [N] soutient que la procédure est irrégulière en ce que l’établissement de santé ne rapporte pas la preuve de la notification de la décision d’admission en soins sans consentement à la patiente. Il indique qu’il est versé aux débats une notification de décision en date du 28 janvier 2025 alors que la décision d’admission date du 29 janvier 2025. Il en résulterait nécessaire un grief pour la patiente.
Il convient de rappeler qu’en application de larticle L.3211-2-3 du code de la santé publique, lorsqu’une personne remplissant les conditions pour être admise en soins psychiatriques est prise en charge en urgence par un établissement de santé qui n’assure pas la prise en charge des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, la période d’observation et de soins initiale prend effet dès le début de la prise en charge.
En l’espèce, Madame [Z] [N] a été hospitalisée le 27 janvier 2025 au sein des urgences de l’hôpital [4]. Le certificat médical et la demande de soins datent de ce jour. Si la décision de soins sans consentement rédigée par l’EPS de [6] n’a été rédigée que le 29 janvier 2025, soit à la date de transfert de la patiente dans cet établissement, la période d’observation et de soins initiale a pris effet au 27 janvier 2025. La notification mentionnée par le conseil de la patiente, datée du 28 janvier 2025, concerne la prise en charge initiale et le certificat des 24 heures qui doivent être notifiés à la patiente. Il ne saurait s’en déduire l’absence de notification de la décision d’admission à la patiente. Il ressort par ailleurs du certificat de situation établi par l’EPS le 29 janvier 2025 et versé en procédure que la patiente a bien été informée de la décision d’admission, des raisons qui la motivent, de la décision de poursuite des soins et de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours. En l’état de ces éléments, les obligations légales sont bien remplies.
Le moyen sera rejeté.
2/ Sur l’irrégularité de la demande de tiers
Le conseil de Madame [Z] [N] soutient que la demande de tiers est irrégulière en ce que la signature figurant sur la carte d’identité jointe à la demande diffère de celle figurant sur la demande, de sorte qu’il n’est pas possible de vérifier si le signataire de la demande est bien la personne figurant sur le document d’identité.
En l’espèce, il convient de relever qu’une personne de près de 6 ans s’est écoulée entre la date d’émission de la carte d’identité et la date de la signature de la demande et que la signature du titulaire de la carte (âgé de 16 ans au moment de son établissement) a pu changer. En tout état de cause, la production de ce document suffit à faire foi concernant le signataire de la demande, dont l’identité a été vérifiée par l’établissement de santé.
Le moyen sera rejeté.
Sur la poursuite de la mesure de soins psychiatriques
Aux termes de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1.
L’article L. 3211-12-1 du même code dispose que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure, avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ou à compter de la décision par laquelle le directeur de l’établissement a modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète.
Il résulte des pièces du dossier que Madame [Z] [N] été hospitalisée sans son consentement sur demande d’un tiers (frère) et dans le cas d’urgence, suivant décision de la directrice d’établissement en date du 29 janvier 2025 après une période d’hospitalisation aux urgences débutée le 27 janvier 2025, pour des troubles du comportement à type de conduites ordaliques (tentative de suicide par défenestration et arme blanche) dans un contexte de rupture de soins. A l’examen initial, il était relevé un contact préservé, une intolérance importante à la frustration, et un contexte de craving. Elle présentait un risque important de nouvelle mise en danger et une grande ambivalence aux soins.
L’avis motivé en date du 03 février 2025 mentionne que la patiente a une présentation correcte. Le contact est médiocre, le faciès triste. Elle présente un ralentissement psychomoteur. Son discours est peu spontané, cohérent dans l’ensemble mais reste très superficiel. Elle présente une tendance à la rationalisation et à la banalisation des mises en danger. Sa thymie est basse. Elle ne rapporte pas d’idées suicidaires actives mais souffre de troubles du sommeil. Son adhésion aux soins est passive et très incertaine dans la durée.
Madame [Z] [N] n’est pas présente à l’audience. Il ressort du certificat de situation en date du 06 février 2025 que la patiente est actuellement sthénique avec risque de passage à l’acte hétéro-agressif et de fugue, état qui contre indique son audition.
Il résulte des éléments médicaux ci dessus rappelés, lesquels ne peuvent être remis en cause par le juge des libertés et de la détention, que Madame [Z] [N] présente des troubles médicalement attestés qui rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant le maintien d’une hospitalisation complète.
En conséquence, il convient d’ordonner la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de Madame [Z] [N].
Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bobigny, après débats tenus en audience publique dans la salle d’audience aménagée à l’établissement public de santé de [6], [Adresse 2], statuant au tribunal par décision susceptible d’appel,
Rejette les moyens de nullité soulevés,
Ordonne la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de Madame [Z] [N],
Laisse les dépens à la charge de l’Etat,
Dit que cette ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Fait et jugé à Bobigny, le 06 février 2025
Le Greffier
Caroline ADOMO
La vice-présidente
Juge des libertés et de la détention
Hélène ASTOLFI
Ordonnance notifiée au parquet le à
le greffier
Vu et ne s’oppose :
Déclare faire appel :
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