Rappel de créances salariales et obligations de l’employeur en liquidation judiciaire

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Rappel de créances salariales et obligations de l’employeur en liquidation judiciaire

L’Essentiel : M. [E] a été engagé par la société Montparnasse en tant que responsable de salle le 17 décembre 2018. Après un entretien préalable, une rupture conventionnelle a été conclue le 31 octobre 2019. Suite à la liquidation judiciaire de la société, M. [E] a saisi le conseil de prud’hommes, mais ses demandes ont été rejetées. En appel, il a demandé la reconnaissance de créances et des dommages et intérêts. La cour a infirmé le jugement de première instance pour le rappel de salaires, fixant sa créance à 25 913,77 euros, tout en confirmant d’autres demandes.

Engagement de M. [E] par la société Montparnasse

La société Montparnasse a recruté M. [Z] [R] [E] en tant que responsable de salle par un contrat de travail à durée indéterminée, débutant le 17 décembre 2018. Les relations de travail étaient régies par la convention collective nationale des Hôtels, Cafés, Restaurants. À la date de la rupture, la société employait habituellement moins de onze salariés.

Rupture conventionnelle et procédures judiciaires

M. [E] a été convoqué à un entretien préalable le 25 septembre 2019, qui a abouti à une rupture conventionnelle, effective le 31 octobre 2019. Par la suite, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Montparnasse le 7 novembre 2019, suivie d’une conversion en liquidation judiciaire le 25 juin 2020.

Actions en justice de M. [E]

Le 15 septembre 2020, M. [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris. Le jugement du 14 juin 2021 a rejeté ses demandes, le déboutant de l’ensemble de ses prétentions. M. [E] a interjeté appel le 29 décembre 2021, demandant l’infirmation du jugement et la reconnaissance de diverses créances au passif de la société.

Demandes de M. [E] en appel

Dans ses conclusions du 27 mars 2022, M. [E] a demandé à la cour d’infirmer le jugement de première instance, de reconnaître ses créances, et de condamner le liquidateur à fournir divers documents. Il a également sollicité des dommages et intérêts pour préjudice moral et financier, ainsi que des frais au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Réponse de la société AXYME

La société AXYME, en tant que liquidateur, a demandé la confirmation du jugement de première instance et le déboutement de M. [E] de toutes ses demandes. Elle a également demandé que M. [E] soit condamné à payer des frais sur le fondement de l’article 700.

Arguments de l’Unedic délégation AGS CGEA IDF Ouest

L’Unedic a également demandé la confirmation du jugement, le déboutement de M. [E] de ses demandes, et a précisé que la garantie de l’AGS ne serait applicable qu’aux créances justifiées et dans les limites de la garantie légale.

Analyse des demandes de rappel de salaire

M. [E] a demandé un rappel de salaires, affirmant avoir travaillé de nombreuses heures supplémentaires sans être rémunéré. Le liquidateur a contesté ces affirmations, soutenant que les salaires avaient été payés. La cour a noté que la charge de la preuve incombe à l’employeur et a jugé que M. [E] avait fourni des éléments suffisants pour justifier sa demande.

Décisions de la cour

La cour a infirmé le jugement de première instance concernant le rappel de salaire, fixant la créance de M. [E] à 25 913,77 euros, ainsi que 2 591,37 euros pour les congés payés. En revanche, elle a confirmé le jugement pour les demandes d’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages et intérêts, et d’intérêts légaux.

Remise de documents et dépens

La cour a ordonné la remise de documents tels qu’un bulletin de paie récapitulatif et un certificat de travail, sans astreinte. Les dépens de première instance et d’appel ont été mis à la charge du liquidateur, tandis que la demande de M. [E] au titre des frais irrépétibles a été rejetée.

Garantie de l’AGS

Enfin, la cour a déclaré que les sommes allouées à M. [E] seraient garanties par l’Unedic dans les conditions légales, sans que le liquidateur ait à justifier de l’absence de fonds disponibles.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la charge de la preuve en matière de paiement des salaires ?

La charge de la preuve du paiement des salaires incombe à l’employeur. En effet, selon l’article L. 3242-1 du Code du travail, « l’employeur est tenu de remettre au salarié un bulletin de paie lors de chaque paiement de salaire ».

Cela signifie que les mentions portées sur les bulletins de paie ne suffisent pas à prouver que le salaire a été effectivement versé. En cas de litige, il appartient à l’employeur de fournir des éléments probants pour démontrer le paiement des salaires dus.

En cas de contestation sur l’existence ou le nombre d’heures de travail effectuées, le salarié doit présenter des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre. Cela est précisé dans les articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du Code du travail, qui stipulent que « le salarié doit justifier de ses heures de travail » et que « l’employeur doit pouvoir contrôler les heures effectuées ».

Ainsi, dans le cas présent, M. [E] a produit des éléments tels que son contrat de travail et des attestations d’anciens collègues, tandis que le liquidateur n’a pas fourni de preuves suffisantes pour contredire ces éléments.

Quelles sont les conséquences de la non-remise des documents par le liquidateur ?

La remise de documents tels que le bulletin de paie récapitulatif, le certificat de travail et l’attestation destinée à France Travail est ordonnée par le tribunal. Selon l’article L. 1234-19 du Code du travail, « lorsqu’un salarié est licencié, l’employeur doit lui remettre un certificat de travail ».

Dans le cas où le liquidateur ne respecte pas cette obligation, le tribunal peut ordonner une astreinte. Cependant, dans cette affaire, la cour a décidé qu’il n’y avait pas lieu de prononcer une astreinte, ce qui signifie que le liquidateur doit se conformer à la décision sans pénalité financière supplémentaire.

Il est important de noter que la remise de ces documents est essentielle pour permettre au salarié de faire valoir ses droits, notamment en matière de recherche d’emploi et de justification de ses droits à indemnités.

Comment sont fixées les créances au passif de la liquidation judiciaire ?

Les créances au passif de la liquidation judiciaire sont fixées selon les dispositions du Code de commerce, notamment l’article L. 622-24, qui stipule que « les créances sont constatées par le juge-commissaire ».

Dans le cas de M. [E], le tribunal a fixé les créances suivantes au passif de la société Montparnasse : 25 913,77 euros à titre de rappel de salaire et 2 591,37 euros au titre des congés payés afférents.

Le tribunal a également pris en compte les éléments de preuve fournis par M. [E], tels que son contrat de travail et les attestations d’anciens collègues, pour évaluer le montant des créances.

Il est à noter que le liquidateur n’a pas produit d’éléments permettant de vérifier le temps de travail accompli par le salarié, ce qui a conduit le tribunal à retenir les demandes de M. [E] en matière de rappel de salaire.

Quelles sont les conditions de garantie de l’AGS en cas de liquidation judiciaire ?

La garantie de l’AGS (Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés) est régie par les articles L. 3253-6 à L. 3253-20 du Code du travail. Ces articles précisent que l’AGS garantit les créances des salariés dans les limites et conditions prévues par la loi.

En cas de liquidation judiciaire, l’AGS est tenue de garantir les sommes allouées aux salariés dans les limites du plafond applicable à la date de la rupture. Cela signifie que les créances fixées au passif de la société Montparnasse, telles que les rappels de salaires et les congés payés, seront couvertes par l’AGS, sous réserve des conditions légales.

Il est important de noter que les sommes allouées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens ne sont pas garantis par l’AGS, ce qui souligne l’importance de bien distinguer les différentes créances lors de la liquidation judiciaire.

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 29 JANVIER 2025

(N°2025/ , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00484 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CE6OA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Juin 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 20/06565

APPELANT

Monsieur [Z] [R] [E]

Chez [D] [W] [M] – [Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Badr MAHBOULI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2112

INTIMEES

S.E.L.A.R.L. AXYME

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean-marie HYEST, avocat au barreau de PARIS, toque : P0311

Association AGS CGEA IDF OUEST L’Unédic Délégation AGS – Centre de Gestion et d’Étude AGS (CGEA) d’Île de France Ouest, Association déclarée, représentée par sa Directrice nationale, Madame [I] [V], domiciliée à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Décembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane THERME, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre et de la formation

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE

La société Montparnasse a engagé M. [Z] [R] [E] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 17 décembre 2018 en qualité de responsable de salle.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des Hôtels, Cafés, Restaurants.

La société Montparnasse occupait à titre habituel moins de onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

M. [E] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 25 septembre 2019 à la suite duquel une rupture conventionnelle a été conclue. Le contrat de M. [E] a pris fin le 31 octobre 2019.

Par jugement du 7 novembre 2019 le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Montparnasse et a désigné la SELARL AJRS en qualité d’administrateur et la SELARL AXYME en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 25 juin 2020 le tribunal de commerce de Paris a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et a désigné la SELARL AXYME en qualité de liquidateur.

Le 15 septembre 2020, M. [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris.

Par jugement du 14 juin 2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a rendu la décision suivante :

‘Rejette la demande d’irrecevabilité.

Déboute Monsieur [E] [Z] [R] de l’ensemble de ses demandes.

Laisse les dépens à la charge de Monsieur [E] [Z] [R],

Déboute Maitre [Y] [O] ès qualité de liquidateur de la SAS MONTPARNASSE de sa demande au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile’.

M. [E] a formé appel par déclaration transmise par voie électronique le 29 décembre 2021.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 27 mars 2022,

auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, M. [E] demande à la cour de :

‘- INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Paris en date du 14 juin 2021 (N° RG 20/05656) sauf en ce qu’il a « dit les demandes formulées par M. [E] recevables» ;

– DIRE ET JUGER recevables les demandes formulées par Monsieur [E] à l’encontre de la SELARL AXYME, prise en la personne de Maître [O] [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SAS MONTPARNASSE ;

– FIXER AU PASSIF de la société SAS MONTPARNASSE les créances suivantes :

25 913,77 € bruts à titre de rappel de salaires du 17 décembre 2018 au 31 octobre 2019;

2 591,37 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférents au rappel de salaires du 17 décembre 2018 au 31 octobre 2019 ;

2 377,43 € bruts à titre d’indemnité de congés payés ;

2 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et financier ;

2 500 € sur le fondement au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, au titre de la procédure de première instance ;

3 000 € sur le fondement au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, au titre de la procédure d’appel.

– ORDONNER à la SELAS AXYME, prise en la personne de Maître [O] [Y],

en qualité de liquidateur judiciaire de la société SAS MONTPARNASSE, la remise sous astreinte de 500 € par document et par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir des documents suivants :

de l’intégralité des bulletins de paye Monsieur [E] rectifiés afin que le salaire de base,

les heures supplémentaires majorées à 110% et les heures supplémentaires majorées

à 120% équivalent à un salaire total de 2 253,77 € bruts ;

d’un bulletin de salaire correspondant aux condamnations afférentes à la décision à

intervenir ;

d’un reçu pour solde de tout compte rectifié conformément à la décision à intervenir ;

d’un certificat de travail rectifié conformément à la décision à intervenir ;

– DIRE ET JUGER que les dépens, en ce compris les frais afférents aux voies d’exécution forcée

de première instance et ceux éventuellement à venir en cas de non-exécution par la société de

la décision à intervenir, seront passés en frais privilégiés sur le passif de la société SAS MONTPARNASSE ;

– DIRE ET JUGER opposable à la SELAS AXYME, prise en la personne de Maître [O] [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SAS MONTPARNASSE la décision à intervenir ;

– DIRE ET JUGER opposable à l’AGS-CGEA IDF OUEST la décision à intervenir, laquelle devra garantir les créances fixées au passif de la société dans la limite de sa garantie.

– DEBOUTER la SELAS AXYME de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

– DIRE ET JUGER que les condamnations à intervenir porteront intérêts au taux légal, avec

anatocisme à compter de la requête du 14 septembre 2020 en application de l’article 1154 du

Code civil ;

– DEBOUTER la SELAS AXYME, prise en la personne de Maître [O] [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SAS MONTPARNASSE de sa demande reconventionnelle formée au titre des frais irrépétibles ;

– CONDAMNER la SELAS AXYME, prise en la personne de Maître [O] [Y],

en qualité de liquidateur judiciaire de la société SAS MONTPARNASSE aux entiers dépens, en

ce compris les frais afférents aux voies d’exécutions qui seraient engagées en cas de non exécution par la société de la décision à intervenir.’.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 24 juin 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, la société AXYME demande à la cour de :

‘-CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de PARIS le 14 juin 2021.

– DEBOUTER Monsieur [Z] [R] [E] de l’ensemble de ses demandes de fixation au passif de la société MONTPARNASSE à caractère salarial et indemnitaire

– DEBOUTER plus généralement Monsieur [Z] [R] [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

– DEBOUTER Monsieur [Z] [R] [E] de sa demande d’intérêts au taux légal et de capitalisation des intérêts.

A TITRE SUBSIDIAIRE :

– DIRE ET JUGER que l’AGS CGEA devra garantir les éventuelles créances fixées au passif de la société MONTPARNASSE SAS.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

– CONDAMNER Monsieur [Z] [R] [E] à payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– DEBOUTER Monsieur [Z] [R] [E] de ses demandes relatives à l’article 700 du Code de procédure civile

– CONDAMNER Monsieur [Z] [R] [E] en tous les dépens.’.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 27 juin 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, l’Unedic délégation AGS CGEA IDF Ouest demande à la cour de :

‘- Confirmer le jugement dont appel ;

– Débouter M. [E] de ses demandes, fins et conclusions ;

– Rejeter les demandes de fixation de créances qui ne sont ni fondées dans leur principe ni justifiées dans leur montant et en tout état de cause, réduire aux seuls montants dûment justifiés les créances susceptibles d’être fixées ;

– Donner acte à la concluante des conditions d’intervention de l’AGS dans le cadre des dispositions du code de commerce rappelées ci-dessus, et des conditions, limites et plafonds de la garantie de l’AGS prévus notamment par les articles L.3253-6 à L.3253-17, L.3253-19 à L.3253-20 du Code du travail ;

– Rejeter toute demande contraire dirigée à l’encontre de l’AGS ;

– Dire en tout état de cause que la décision à intervenir de fixation de créances ne sera opposable à l’AGS que dans les conditions, limites et plafond de sa garantie légale subsidiaire ;

– Dire que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant de ces dispositions, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce dernier de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L.3253-20 du code du travail.’.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 1er octobre 2024.

MOTIFS

Sur le rappel de salaire

M. [E] forme une demande de rappel de salaires et de congés payés afférents, et demande en conséquence la fixation de la créance au passif de la liquidation de la société.

Il explique qu’il travaillait tous les jours de la semaine, de 11h à 23h, qu’il a accompli de nombreuses heures supplémentaires mais qu’il n’a pas perçu les salaires, malgré ce qui est indiqué sur les fiches de paie.

Le liquidateur de la société Montparnasse fait valoir que les salaires ont été payés au salarié, ce qui résulte des mentions portées sur les fiches de paie de M. [E].

La charge de la preuve du paiement du salaire incombe à l’employeur. La preuve du paiement ne résulte pas des mentions portées sur les bulletins de paie.

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence de rappels de salaire, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

M. [E] détaille les modalités de calcul du montant qu’il sollicite au titre du rappel de salaire, y compris le montant de l’indemnité compensatrice de repas, et produit : son contrat de travail du 15 décembre 2018 pour un emploi de responsable de salle, les bulletins de paie du mois de janvier 2019 jusqu’au mois d’octobre 2019, des attestations de plusieurs anciens salariés de l’établissement qui indiquent qu’il travaillait tous les jours, à partir de 11h jusqu’à la fin du service du soir.

M. [E] produit ainsi des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre en fournissant ses propres éléments.

Le liquidateur de la société Montparnasse ne produit quant à lui aucun élément permettant de vérifier le temps de travail accompli par le salarié, ni que le salaire qui était dû lui a effectivement été versé. Il n’est pas plus établi que M. [E] a bénéficié de l’avantage en nature sous forme de repas.

La somme de 25 913,77 euros doit en conséquence être fixée au passif de la société Montparnasse, outre celle de 2 591,37 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l’indemnité compensatrice de congés payés

La somme due au titre des congés payés fait déjà l’objet d’une fixation au passif de la liquidation pour l’intégralité des sommes qui sont dues au salarié, et ce depuis l’origine du contrat, de sorte que M. [E] doit être débouté de sa demande distincte formée à ce titre.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral et financier

M. [E] ne justifie pas de l’existence d’un préjudice moral et financier et doit être débouté de sa demande.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les intérêts

Le jugement d’ouverture de la procédure de redressement étant antérieur à la saisine du conseil de prud’hommes, aucun intérêt au taux légal n’a couru.

M. [E] sera débouté de sa demande d’anatocisme. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la remise de documents

La remise d’un bulletin de paie récapitulatif, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à France travail conformes à la présente décision est ordonnée. La situation ne justifie pas le prononcé d’une astreinte.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Le liquidateur de la société Montparnasse supportera les dépens de première instance et d’appel, ès qualités], et la charge de ses frais irrépétibles et la somme de 2 000 euros sera fixée au passif de la procédure de liquidation de la société au titre de l’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel. Il n’y a pas lieu d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes qui a rejeté la demande au titre des frais irrépétibles.

Sur la garantie de l’AGS

Le présent arrêt est déclaré commun à l’Unedic délégation AGS CGEA Ile-de-France Ouest et les sommes allouées au salarié seront garanties par cet organisme dans les conditions légales et les limites du plafond qui sont applicables à la date de la rupture, sans que le liquidateur ne soit tenu de justifier préalablement de l’absence de fonds disponibles, étant précisé que ni les sommes allouées en application de l’article 700 du code de procédure civile ni les dépens ne sont garantis par ledit organisme.

Par ces motifs,

La cour,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes sauf en ce qu’il a débouté M. [E] de ses demandes au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés, de dommages-intérêts pour préjudice moral et financier, des intérêts légaux avec anatocisme et d’indemnité pour frais irrépétibles,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Fixe les créances suivantes de M. [E] au passif de la liquidation de la société Montparnasse :

– 25 913,77 euros à titre de rappel de salaire et 2 591,37 euros au titre des congés payés afférents,

– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne au liquidateur de la société Montparnasse la remise d’un bulletin de paie récapitulatif, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à France travail conformes à la présente décision et dit n’y avoir lieu à astreinte,

Déclare le présent arrêt commun à l’Unedic délégation AGS CGEA Ile-de-France Ouest, qui sera tenue de garantir les sommes allouées à M. [E] dans les conditions légales et les limites du plafond applicables à la date de la rupture.

Condamne la société Axyme, es qualités de liquidateur de la société Montparnasse, aux dépens de première instance et d’appel,

Déboute la société Axyme de sa demande au titre des frais irrépétibles.

La Greffière La Présidente


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