Désistement et conséquences financières dans un contexte contractuel complexe

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Désistement et conséquences financières dans un contexte contractuel complexe

L’Essentiel : En 2010, la société Etablissements [U] a installé des panneaux photovoltaïques sur des hangars de la société Frissonnet, mais des dysfonctionnements sont rapidement apparus, notamment un défaut d’étanchéité et une incapacité à produire de l’électricité. Frissonnet a alors demandé une expertise amiable, suivie d’une assignation en justice en 2018 pour obtenir une expertise judiciaire. Le tribunal de commerce a déclaré son incompétence, transférant l’affaire au tribunal de grande instance. En 2024, après plusieurs décisions, la cour a constaté le désistement de Soltis, rejetant les demandes d’indemnité et condamnant cette dernière aux dépens.

Contexte de l’affaire

En 2010, la société Etablissements [U] a installé des panneaux photovoltaïques sur des hangars appartenant à la société Frissonnet. Les travaux ont été finalisés en décembre de la même année.

Problèmes rencontrés

La société Frissonnet a constaté des dysfonctionnements liés à l’installation, notamment un défaut d’étanchéité et une incapacité à produire de l’électricité. En conséquence, elle a demandé une expertise amiable contradictoire impliquant l’installateur et son assureur.

Procédures judiciaires

Le 22 octobre 2018, Frissonnet a assigné l’installateur et son assureur devant le tribunal de commerce d’Angoulême pour obtenir une expertise judiciaire. Par la suite, la société Etablissements [U] a appelé en cause la société Soltis, revendeur des panneaux.

Incompétence du tribunal

Le juge des référés du tribunal de commerce a déclaré son incompétence au profit du tribunal de grande instance d’Angoulême, qui a ensuite accepté la demande d’expertise et désigné un expert.

Décisions judiciaires

Le 7 juin 2023, le juge a ordonné une provision complémentaire de 50.000 €, répartie entre les parties. En janvier 2023, Etablissements [U] a assigné Soltis pour obtenir une indemnisation et la prise en charge des frais.

Jugement du tribunal judiciaire

Le 20 février 2024, le tribunal a joint les deux instances, déclaré recevables les demandes d’Etablissements [U] contre Soltis, et a prononcé un sursis à statuer en attendant le rapport d’expertise. Plusieurs condamnations à titre de provisions ont été prononcées à l’encontre des parties.

Appel et désistement

La société Soltis a interjeté appel de l’ordonnance le 13 mars 2024, mais a ensuite déposé un désistement d’instance le 30 août 2024, qui a été accepté par les autres parties.

Décisions finales

Le 16 septembre 2024, la cour a constaté le désistement de Soltis et a rejeté les demandes d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamnant Soltis aux dépens de l’instance.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences juridiques du désistement d’instance selon le Code de procédure civile ?

Le désistement d’instance est régi par les articles 400 et suivants du Code de procédure civile. Selon l’article 400, « lorsqu’une partie se désiste de son action, le juge constate ce désistement et met fin à l’instance ».

Ce désistement entraîne, sauf convention contraire, la soumission de la partie qui se désiste à payer les frais de l’instance éteinte, conformément à l’article 399.

Ainsi, dans le cas présent, la société Soltis a demandé à la cour de constater son désistement, ce qui a été accepté par les autres parties.

Cela signifie que la cour a été dessaisie de l’affaire, et que les frais de procédure seront à la charge de la partie qui se désiste, sauf accord différent entre les parties.

Comment le juge a-t-il statué sur les demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ?

L’article 700 du Code de procédure civile stipule que « la partie qui perd le procès peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ».

Dans cette affaire, la cour a rejeté la demande d’indemnité formulée par les parties au titre de cet article.

Elle a considéré que l’équité ne commandait pas d’allouer une indemnité aux parties qui le sollicitaient, ce qui signifie que, bien que les parties aient demandé une compensation pour les frais engagés, la cour a jugé que les circonstances ne justifiaient pas une telle allocation.

Ainsi, même si la société Frissonnet avait maintenu sa demande au titre de l’article 700, la cour a décidé de ne pas y faire droit, ce qui est une application stricte des principes d’équité et de justice procédurale.

Quelles sont les implications de la décision de la cour concernant les dépens ?

La question des dépens est régie par l’article 696 du Code de procédure civile, qui précise que « les dépens comprennent les frais de justice exposés par les parties ».

Dans le jugement rendu, la cour a condamné la société Soltis aux dépens de la présente instance, ce qui signifie qu’elle devra supporter les frais de la procédure engagée contre elle.

Cette décision est importante car elle souligne la responsabilité financière des parties dans le cadre d’un litige.

En outre, la cour a également mentionné que chaque partie conservera ses propres frais et dépens, ce qui est une pratique courante lorsque des désistements sont acceptés.

Cela signifie que, malgré le désistement, les parties ne seront pas tenues de rembourser les frais de l’autre, ce qui peut être perçu comme une mesure d’équité dans le cadre de la résolution des litiges.

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 14 JANVIER 2025

N° RG 24/01206 – N° Portalis DBVJ-V-B7I-NVUQ

S.A. SOLSTIS

c/

S.A.R.L. FRISSONNET

S.A.R.L. [U]

Société MUTUELLE DE [Localité 6] ASSURANCES

Nature de la décision : AU FOND

Copie exécutoire délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance rendu le 20 février 2024 par le Juge de la mise en état d'[Localité 3] (chambre : 1, RG : 23/00063) suivant déclaration d’appel du 13 mars 2024

APPELANTE :

S.A. SOLSTIS agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Adresse 2] / Suisse

Représentée par Me Benoît COUSSY, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ ES :

S.A.R.L. FRISSONNET agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Adresse 5]

Représentée par Me Gabrielle GERVAIS DE LAFOND de la SCP ACALEX AVOCATS CONSEILS ASSOCIES, avocat au barreau de CHARENTE

S.A.R.L. [U] agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Christophe POUZIEUX de la SCP CMCP, avocat au barreau de CHARENTE

MUTUELLE DE [Localité 6] ASSURANCES agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Adresse 4]

Représentée par Me Charlotte MOUSSEAU de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI – MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 septembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel BREARD, conseiller, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Paule POIREL, présidente,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Mélina POUESSEL, greffier placé

Greffier lors du prononcé : Vincent BRUGERE, greffier

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Suite à un contrat conclu en 2010, la société Etablissements [U] a posé des panneaux photovoltaïques sur deux hangars à usage agricole de la société Frissonnet, les travaux ayant été achevés en décembre 2010.

Se plaignant de ce que l’installation ne fonctionnait plus, cette dernière a sollicité une expertise amiable contradictoire à l’égard de l’installateur et de son assureur, la société Mutuelle de [Localité 6] Assurances, lors de laquelle il est admis qu’un défaut d’étanchéité et de production d’électricité ont été relevé

Par acte d’huissier délivré le 22 octobre 2018, la société Frissonnet a fait assigner l’installateur et son assureur devant le juge des référés du tribunal de commerce d’Angoulême aux fins d’expertise judiciaire.

Par exploit du 29 janvier 2019, la société Etablissements [U] a appelé en la cause la société Soltis, en sa qualité de revendeur des panneaux installés.

Par ordonnance en date du 30 avril 2019, le juge des référés du tribunal de commerce d’Angoulême s’est déclaré incompétent au profit du juge des référés du tribunal de grande instance de la même ville.

Ce dernier a fait droit à la demande par ordonnance du 7 août 2019 et a désigné M. [I], remplacé par M. [K].

Par ordonnance en date du 7 juin 2023, le juge chargé du contrôle des expertises a ordonné une provision complémentaire d’un montant total de 50.000 €, dont 20.000 € à la charge de la société Frissonnet et le solde à la charge des trois autres parties, à hauteur de 10.000 € chacune, montants qui n’ont pas été versés.

Par acte d’huissier en date du 6 janvier 2023, la société Etablissements [U] a fait assigner au fond la société Soltis afin de la voir condamnée à la relever indemne de toute condamnation à son encontre dans le cadre du litige l’opposant à la société Frissonnet, outre sa condamnation à lui verser les sommes de 10.000 € à titre de dommages et intérêts et de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La même requérante a fait assigner son assureur aux fins de se voir relever indemne de toute condamnation à l’égard de sa cliente et à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par jugement du 20 février 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Angoulême a :

– Rappelé que les deux instances ont été jointes par décision du 21 novembre 2023 ;

– Déclaré non prescrites, et en conséquence recevables, les demandes formées par la société Etablissements [U] à l’encontre de la société Soltis ;

– Prononcé un sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise judiciaire ;

– Condamné la société Etablissements [U] à payer à la société Frissonnet la somme de 11.273,11 € à titre de provision ad litem ;

– Condamné la société Solstice à payer à la société Frissonnet la somme de 11.273,11€ à titre de provision ad litem ;

– Condamné la société Mutuelle de [Localité 6] Assurances à payer à la société Frissonnet la somme de 10.000 € à titre de provision ad litem ;

– Condamné in solidum les sociétés Etablissements [U], Solstis et Mutuelle de [Localité 6] Assurances à payer à la société Frissonnet la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Solstis ;

– Débouté la société Mutuelle de [Localité 6] Assurances de sa demande de retrait du rôle de l’affaire ;

– Renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du mardi 17 décembre 2014 à 9 heures ;

-Réservé les dépens de l’incident et dit qu’ils suivront le sort de ceux de l’instance au fond.

La société Solstis a relevé appel de cette ordonnance par déclaration du 13 mars 2024.

Par conclusions de désistement déposées le 30 août 2024, l’appelante demande à la cour de :

– juger recevable et bien fondé son désistement d’instance,

– lui donner acte de son désistement d’instance à l’encontre des sociétés Frissonnet, Etablissements [U] et Mutuelle de [Localité 6] Assurances,

– dire et juger que chacune des parties conservera ses frais et dépens de procédure.

Par message RPVA du 9 septembre 2024, le conseil de la société Etablissements [U] a indiqué ne pas avoir d’observations ou demande sur le désistement de la Société appelante.

Par message RPVA du même jour, le conseil de la société Frissonnet a fait savoir que le désistement d’appel est accepté, mais qu’il maintenait sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, laquelle avait été formée à l’encontre de chacune des sociétés Soltis, Etablissements [U] et Mutuelle de [Localité 6] Assurances à hauteur de 3.500 € lors des conclusions remise au greffe le 13 juin 2024.

Par conclusions déposées le 10 septembre 2024, la société Mutuelle de [Localité 6] Assurances demande à la cour de :

– lui donner acte qu’elle accepte le désistement de ses demandes de la société Solstis,

– lui donner acte qu’elle se désiste également de ses propres demandes,

– laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens ou, à défaut, les mettre à la charge de l’appelant.

L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 16 septembre 2024, avec clôture de la procédure à la date du 2 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

Il convient de constater le désistement de l’appelante, accepté par les intimés ainsi que le désistement de la société Mutuelles de [Localité 6] Assurances de ses propres demandes et partant le dessaisissement de la cour en application des dispositions des articles 400 et suivants du code de procédure civile, ainsi qu’il résulte du protocole d’accord annexé à la présente décision.

Le désistement emporte, sauf convention contraire, soumission de payer les frais de l’instance éteinte en application de l’article 399 du même code.

Au vu de ce qui précède, l’équité ne commande pas qu’il soit alloué une indemnité aux parties qui le sollicitent au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande faite en ce sens sera donc rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Constate le désistement d’action et d’instance de la société Soltis et le dessaisissement de la cour au vu des écritures de cette partie ;

Rejette la demande faite au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Soltis aux dépens de la présente instance.

Le présent arrêt a été signé par Paule POIREL, présidente, et par Vincent BRUGERE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


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