L’Essentiel : La mise en relation entre avocats et internautes, souvent via des sites proposant des numéros surtaxés, soulève des questions de légalité. Le Conseil National des Barreaux (CNB) argue que cette pratique, qui implique une commission pour les avocats, enfreint les règles déontologiques, notamment l’interdiction de rémunération d’apports. Cependant, les juges ont statué que les frais perçus par le site relèvent de ses propres services et non des honoraires des avocats. Ainsi, la demande d’interdiction du CNB a été rejetée, considérant que ces rémunérations ne contreviennent pas aux règles établies.
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Convention d’apporteur d’affaires ?De nombreux sites proposent de mettre en relation les internautes avec des avocats (notamment par le biais de numéros surtaxés). Cette pratique de mise en relation moyennant contrepartie est-elle licite ? S’agit-il d’un contrat d’apporteur d’affaires contraire à la déontologie ? Dans cette affaire, un article de la convention de prestations de services conclue entre le site internet avec les avocats référencés en ligne prévoyait « En contrepartie de la parfaite exécution des prestations visées à l’article 1 ci-dessus, le prestataire percevra du cabinet d’avocats une rémunération tarifaire dont le prix est fixée à 50 euros HT par demande de devis achetée sur la plate-forme ». Le CNB faisait valoir que le site en cause, en percevant une commission d’avocats, violait les dispositions de l’article 10 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocats lequel dispose ‘la rémunération d’apports est interdite’. Il ajoutait que cette pratique était également contraire à l’article 111 du décret du 27 novembre 1991 lequel dispose ‘la profession d’avocat est incompatible : a) Avec toute les activités de caractère commercial, qu’elles soient exercées directement ou par personne interposée. A ce titre, la violation d’un décret par un tiers non soumis à son application, constitue pour celui qui y est soumis une faute délictuelle susceptible de réparation de sorte que le CNB était recevable à se prévaloir de cette violation. Intervention légale des intermédiairesLes juges ont considéré que la rémunération forfaitaire réglée par l’avocat en fonction des demandes de devis achetés sur la plate-forme en ligne correspond aux frais d’intervention des services d’entremise, de la société c’est-à-dire de ses propres prestations et non d’une rétribution sur les honoraires de l’avocat, de sorte que c’est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande d’interdiction formée à ces deux derniers titres. Les juges n’ont donc pas fait droit à la demande du CNB tendant à voir interdire les conditions actuelles de rémunérations de ces prestations dès lors qu’elles sont étrangères aux honoraires perçus par l’avocat directement par son client. |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce qu’une convention d’apporteur d’affaires ?Une convention d’apporteur d’affaires est un accord par lequel une personne ou une entité (l’apporteur) s’engage à mettre en relation des clients potentiels avec un professionnel, en échange d’une rémunération. Dans le contexte des avocats, cette pratique soulève des questions de déontologie, car la profession d’avocat est régie par des règles strictes concernant la rémunération. En France, le Code de déontologie des avocats interdit explicitement la rémunération d’apports, ce qui signifie que les avocats ne peuvent pas verser de commissions à des intermédiaires pour des clients qu’ils leur apportent. Cette interdiction vise à préserver l’indépendance et l’intégrité de la profession, en évitant que des considérations commerciales n’influencent la relation entre l’avocat et son client. Pourquoi la mise en relation par des sites internet est-elle controversée ?La mise en relation par des sites internet est controversée car elle peut être perçue comme une violation des règles déontologiques qui régissent la profession d’avocat. Les sites qui facturent des frais pour mettre en relation des avocats avec des clients potentiels peuvent être considérés comme des intermédiaires commerciaux, ce qui est incompatible avec la nature de la profession d’avocat. Le Conseil National des Barreaux (CNB) a exprimé des préoccupations concernant ces pratiques, arguant qu’elles compromettent l’éthique professionnelle et la qualité des services juridiques offerts. En effet, la rémunération d’apports est interdite par l’article 10 du décret n° 2005-790, et toute activité commerciale liée à la profession d’avocat est également prohibée, comme le stipule l’article 111 du décret du 27 novembre 1991. Quelle a été la décision des juges concernant la rémunération des intermédiaires ?Les juges ont décidé que la rémunération perçue par le site internet pour les demandes de devis n’était pas considérée comme une commission sur les honoraires des avocats. Ils ont estimé que cette rémunération correspondait plutôt aux frais d’intervention des services d’entremise fournis par le site, ce qui a conduit à un rejet de la demande d’interdiction formulée par le CNB. Cette décision souligne que tant que la rémunération est distincte des honoraires perçus par l’avocat, elle peut être considérée comme légale. Ainsi, les juges ont validé le modèle économique du site, tant qu’il ne contrevient pas aux règles déontologiques en matière de rémunération des avocats. Quelles sont les implications de cette décision pour les avocats et les sites de mise en relation ?Cette décision a des implications significatives pour les avocats et les sites de mise en relation. Pour les avocats, cela signifie qu’ils peuvent continuer à utiliser ces plateformes tant que les frais payés ne sont pas considérés comme des commissions sur leurs honoraires. Cela leur permet d’accéder à un plus large éventail de clients potentiels, tout en respectant les règles déontologiques. Pour les sites de mise en relation, cette décision valide leur modèle économique, leur permettant de fonctionner sans craindre des sanctions légales, tant qu’ils respectent les limites établies par la jurisprudence. Cependant, cela soulève également des questions sur la qualité des services juridiques et l’impact de la commercialisation sur la profession d’avocat. |
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