Contrat de distribution audiovisuelle : affaire Orange Studio

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Contrat de distribution audiovisuelle : affaire Orange Studio

L’Essentiel : La société ORANGE STUDIO ne peut revendiquer la qualité de distributeur officiel du film, malgré sa participation à la distribution. En effet, le contrat stipule que CANAL + DISTRIBUTION est le seul distributeur, et les aides du CNC sont réservées à ce dernier. La cour a jugé que les aides versées doivent être conservées par CANAL + DISTRIBUTION, car ORANGE STUDIO a déjà été remboursée de ses frais de distribution par les recettes salles. Ainsi, les prétentions d’ORANGE STUDIO concernant le partage des aides sont infondées, et le jugement du tribunal de commerce a été partiellement infirmé.

Attention à vos termes juridiques : « participer » n’emporte nécessairement la qualité de producteur ou distributeur. Participer à la distribution audiovisuelle n’emporte pas ipso facto la qualité de distributeur. Le versement des aides du CNC est réservé au seul distributeur officiel de l’œuvre audiovisuelle ou cinématographique. 

En l’espèce, dans la mesure où la société CANAL + DISTRIBUTION était le seul distributeur du film en question et que la société STUDIO 37 (aujourd’hui ORANGE STUDIO) a été remboursée de ses frais de distribution par les recettes salles, la juridiction a considéré, selon la lettre du contrat et l’intention des parties, que les aides ainsi versées au seul distributeur avaient vocation à être conservées par la société CANAL + DISTRIBUTION, la société ORANGE STUDIO ne pouvant prétendre à en obtenir le versement par moitié.

Si les parties ont entendu pour l’édition ou la commercialisation de vidéos en France se définir comme ‘co-éditrices’, il n’en est pas de même pour l’exploitation cinématographique où il est uniquement convenu que la société STUDIO 37 ‘participera’ à la distribution du film dans des termes prédéfinis, de sorte que la société ORANGE STUDIO n’est pas fondée à se revendiquer distributeur officiel du film et comme tel habilitée à percevoir les aides ad hoc, nonobstant le fait que les parties aient pu évoquer ce contrat du 10 mai 2010 comme un ‘ accord de co-distribution’ dans certains de leurs écrits.

La société ORANGE STUDIO a argué vainement que la conservation par la société CANAL + DISTRIBUTION de la totalité de l’aide ainsi versée constituait un enrichissement sans cause eu égard à sa prise en charge de seulement 50% des frais de distribution. Elle ne s’est pas non plus présentée à l’égard des tiers et notamment du CNC, comme distributeur du film. Enfin, la décision prise par la société ORANGE STUDIO de partager les aides et subventions reçues au titre de l’édition vidéographique ne saurait justifier d’imposer la réciprocité à la société CANAL + DISTRIBUTION, au regard des stipulations du contrat.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 18 MAI 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : 19/13793 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAI7A

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS 8e chambre – RG n° 2016040205

APPELANTE

SARL CANAL DISTRIBUTION anciennement dénommée B CANAL DISTRIBUTION

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de sous le numéro 448 803 684

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me X Y de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée de Me B BOROWSKY de l’AARPI CROSSEN & BOROWSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0210

INTIMÉE

SA ORANGE STUDIO

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 419 240

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[…]

[…]

Ayant son établissement principal […]

Représentée et assistée de Me D E F, avocat au barreau de PARIS, toque : E0309

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Mars 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et Déborah BOHÉE, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre

Françoise BARUTEL, Conseillère,

Mme Déborah BOHÉE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRÊT :

• Contradictoire

• par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

• signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DU LITIGE

La société ORANGE STUDIO (anciennement appelée STUDIO 37 jusqu’en 2012) est une filiale du groupe ORANGE qui est spécialisée dans la coproduction et l’acquisition de films français et européen.

La société CANAL DISTRIBUTION (anciennement dénommée B CANAL DISTRIBUTION), a pour activité la distribution de films de longs-métrages, fictions et documentaires dans les salles de cinéma françaises.

Le 5 mai 2010, la société B CANAL DISTRIBUTION a conclu avec les sociétés SCREEN RUNNER et LA BELLE KINOISE (ci-après Producteurs délégués) un accord pour la distribution du film franco-congolais intitulé «’Benda Bilili’» (ci-après, le film). Le contrat enregistré au registre du cinéma et de l’audiovisuel (ci-après RCA) prévoit de confier à la société B CANAL DISTRIBUTION l’exploitation cinématographique et télévisuelle du film en France pour une durée de 9 ans.

Le 7 mai 2010, la société STUDIO 37 a notamment conclu avec les Producteurs délégués, un accord de coproduction et d’exploitation vidéographique en France et à l’international enregistré au RCA le 28 mai 2010.

Le 10 mai 2010, la société STUDIO 37 a signé avec la société B CANAL DISTRIBUTION un accord confidentiel portant sur le film pour les exploitations en salles et TV, la société STUDIO 37 s’associant ainsi aux exploitations salles et TV dont bénéficiait la société B CANAL DISTRIBUTION par son contrat du 5 mai 2010, la société B CANAL DISTRIBUTION s’associant à l’édition dont bénéficiait la société STUDIO 37 par son contrat du 7 mai 2010.

C’est l’exécution de l’accord du 10 mai 2010 qui fait l’objet du présent litige.

Le film est sorti en salles le 8 septembre 2010. La société B CANAL DISTRIBUTION a envoyé régulièrement les comptes d’exploitation correspondant aux recettes générées. En octobre 2015, la société ORANGE STUDIO (venant aux droits de la société STUDIO 37) a émis les premières factures. En janvier 2016, la société B CANAL DISTRIBUTION a contesté les montants réclamés par la société ORANGE STUDIO alléguant que cette dernière avait considéré à tort le contrat de coproduction du 7 mai 2010, auquel elle n’est pas partie, pour établir la facturation.

Par une lettre recommandée avec accusé de réception du 16 juin 2016, la société ORANGE STUDIO a mis en demeure la société B CANAL DISTRIBUTION de lui régler la somme de 159.329,28 euros TTC et par lettre du 31 octobre 2016, cette dernière a communiqué aux producteurs délégués et à la société ORANGE STUDIO le compte d’exploitation arrêté au 30 septembre 2016. Aucun règlement n’étant intervenu, la société ORANGE STUDIO, par acte en date du 29 juin 2016, a fait assigner la société B CANAL DISTRIBUTION devant le tribunal de commerce.

Par jugement rendu le 15 mai 2019 dont appel, le tribunal de commerce de Paris a rendu la décision suivante:

— Condamne la S.A.R.L. B CANAL DISTRIBUTION à payer à la SA ORANGE STUDIO la somme de 93.527,19 euros HT au titre du contrat de coproduction’;

— Condamne la S.A.R.L. B CANAL DISTRIBUTION à payer à la SA ORANGE STUDIO la somme de 93.767 euros HT correspondant à 50% du fond de soutien distributeur et à 50% de l’aide sélective du CNC, déboutant pour le surplus’;

— Déboute la SA ORANGE STUDIO de sa demande tendant à condamner la SARL B CANAL DISTRIBUTION à lui régler la somme de 32.917,41 euros HT au titre du remboursement de 50% des frais vidéos nets réglés par ORANGE STUDIO’;

— Condamne la SA ORANGE STUDIO à payer à la S.A.R.L. B CANAL DISTRIBUTION la somme de 53.269,21 euros HT au titre du partage des recettes vidéographiques du film en vertu de l’accord 10 mai 2010′;

— Condamne la S.A.R.L. B CANAL DISTRIBUTION à payer à la SA ORANGE STUDIO la somme de 37.975,39 euros actualisées au 30 septembre 2017, au titre des intérêts dus sur factures, après compensation entre intérêts réciproques.

— Déboute la SA ORANGE STUDIO de toutes ses autres demandes, fins et conclusions;

— Condamne la S.A.R.L. B CANAL DISTRIBUTION à payer la SA ORANGE STUDIO la somme de 7.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus;

— Ordonne l’exécution provisoire ;

— Condamne la S.A.R.L. B CANAL DISTRIBUTION aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,38 euros dont 12,85 euros de TVA.

La société CANAL DISTRIBUTION a interjeté appel de ce jugement le 8 juillet 2019.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 15 février 2021 par la société CANAL DISTRIBUTION, appelante et intimée incidente, qui demande à la cour, de:

— Infirmer partiellement la décision déférée en ce qu’elle a condamné B CANAL DISTRIBUTION, désormais CANAL DISTRIBUTION, à payer les montants suivants’:

—  93.767 euros HT correspondant à 50% du Fonds de Soutien Distributeur et à 50% de l’aide sélective du CNC’;

—  37.975,39 euros HT correspondant aux intérêts sur factures’;

—  7.500 euros HT au titre de l’article 700′;

— Aux entiers dépens.

— Confirmer pour le surplus.

Statuant à nouveau:

— Débouter ORANGE STUDIO de l’ensemble de ses demandes au titre de l’appel incident’;

— Enjoindre à ORANGE STUDIO d’émettre des factures conformes comptablement aux sommes définitivement validées par la Cour’;

— Condamner ORANGE STUDIO à payer à CANAL DISTRIBUTION la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction pour ceux la concernant au profit de Maître X Y-SELARL 2H Avocats et ce conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 25 février 2021 par la société ORANGE STUDIO, intimée et appelante incidente, qui demande à la cour de:

— Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris en date du 15 mai 2019 en ce qu’il a :

— Condamné la Société C Distribution à payer à la Société Orange Studio la somme de 93.527,19 € HT arrêtée au 30 septembre 2016 au titre du contrat de coproduction.

— Condamné la Société C Distribution à payer à la Société Orange Studio la somme de 93.767 € HT correspondant à 50% du Fonds de Soutien Distributeur et à 50 % de l’Aide Sélective à la Distribution du CNC

— Condamné la Société Orange Studio à payer à la Société C Distribution la somme de 53.269,21 € HT arrêtée au 30 septembre 2016 au titre du partage des recettes vidéographiques du Film

— Condamné la Société C Distribution à payer à la Société Orange Studio la somme de 37.975,39 € actualisée au 30 septembre 2017, au titre des intérêts dus sur factures, après compensation entre intérêts réciproques.

— Débouté la Société B C Distribution de toutes ses autres demandes, fins et conclusions.

— Condamné la Société C Distribution à payer à la Société Orange Studio la somme de 7.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus.

— Ordonné l’exécution provisoire.

— Condamné la Société C Distribution aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,36 € dont 12,85 € de TVA.

Statuant à nouveau et réformant la décision du 15 mai 2019 :

— Condamner la Société C Distribution à payer à la Société Orange Studio la somme de 7 750.25 € arrêtée au 30 septembre 2016 portée à 8 757.50 € au 30 septembre 2017 au titre de sa commission de distribution Salles et TV HT.

— Condamner la Société C Distribution à payer à la Société Orange Studio la somme de 32.917,41€ HT arrêtée au 30 septembre 2016 au titre du remboursement de 50 % des frais vidéo nets réglés par la Société Orange Studio au titre de l’accord du 10 mai 2010.

Y ajoutant

— Condamner par ailleurs la Société C Distribution à régler à la Société Orange Studio la somme de 15 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens dont distraction au profit de Maître D E F conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

— Débouter la Société C Distribution en toutes ses demandes, fins et conclusions y compris ses demandes d’injonction et de communication et au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 mars 2021.

MOTIFS DE L’ARRÊT

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.

– Sur les chefs du jugement non critiqués:

La cour constate que le jugement n’est pas critiqué en ce qu’il a :

— condamné la société CANAL DISTRIBUTION à payer à la société ORANGE STUDIO la somme de 93.527,19€ au titre du contrat de coproduction,

— condamné la société ORANGE STUDIO à payer à la société CANAL DISTRIBUTION la somme de 53.269,21€ au titre du partage des recettes vidéographiques du film.

Il sera confirmé de ces chefs pour les justes motifs qu’il comporte.

– Sur les créances contestées de la société ORANGE STUDIO:

– Sur la demande au titre du Fonds de Soutien Distributeur et de de l’Aide Sélective à la Distribution:

La société CANAL DISTRIBUTION rappelle d’abord que le fonds de soutien distributeur constitue un soutien financier automatique mis en place par le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) au profit de l’entreprise qui distribue un film de long métrage afin de la motiver à s’engager dans la distribution de films futurs. Elle précise que, pour bénéficier de ce fonds, il faut que le distributeur dispose d’un mandat de distribution enregistré au RCA et ait pris en charge les dépenses de distribution du film concerné. Or, elle soutient être le seul distributeur «salles» du Film en vertu des différents contrats signés, ajoutant qu’elle a effectué les opérations matérielles auprès des tiers pour en assurer la distribution. Elle conteste la qualité de distributeur revendiquée par la société ORANGE STUDIO en exposant que l’accord du 10 mai 2010, étant confidentiel, constitue un accord financier et non un accord de codistribution, élément confirmé par l’article 5.1 du contrat de coproduction du 7 mai 2010 qui stipule que la société ORANGE STUDIO ne peut distribuer le film en salles qu’à l’issue du mandat confié à la société CANAL DISTRIBUTION. L’appelante ajoute que la société ORANGE STUDIO mentionnée au générique en tant que «’coproducteur’» du film n’y a jamais été désignée comme codistributeur.

En outre, l’appelante fait valoir, d’une part, qu’en vertu de l’article A1 de l’accord du 10 mai 2010, les avances investies au titre des frais de distribution devaient être remboursées prioritairement sur les recettes issues de l’exploitation cinématographique en salles du film et que, d’autre part, ledit accord prévoit que l’équivalent du fonds de soutien devait être versé seulement à titre de garantie pour le remboursement des frais, dans le cas où ces frais n’auraient pas été remboursés par les recettes salles. Or, en l’espèce, les frais de distribution ayant été intégralement remboursés, cette garantie n’avait pas à jouer.

Concernant l’aide sélective à la distribution, l’appelante expose que, contrairement au fonds de soutien distributeur qui est automatique, cette aide est accordée suite à l’examen de l’intérêt du film en cause et de l’entreprise qui le distribue, en fonction notamment de la fragilité financière des entreprises candidates, de leur volume d’activité et de la qualité du travail réalisé, de sorte que cette aide lui a été spécifiquement accordée, la société ORANGE STUDIO ne pouvant en bénéficier, puisqu’elle qui vise à soutenir de petites entreprises. Elle ajoute que selon l’article A.1 de l’accord du 10 mai 2010, cette aide sélective ne devait pas être partagée entre les parties comme un bénéfice, sa vocation étant limitée à rembourser les frais de distribution qui sont partagés à 50% dans les conditions spéciales prévues dans cet accord, de sorte qu’elle doit conserver cette aide au même titre que la société ORANGE STUDIO conserve sa part de RNPP (Recettes Nettes Part Producteur).

La société ORANGE STUDIO répond que le soutien financier au distributeur, destiné à venir rémunérer le risque pris par ce dernier dans l’avance des frais d’exploitation, doit être partagé à parts égales, chacune d’entre elle en ayant assuré la charge. Elle relève à ce titre que:

— l’accord du 10 mai 2010 prévoit expressément à son article A1 la répartition 50/50 de ces aides sans aucune réserve;

— la qualité de distributeur exclusif en salle de la société CANAL DISTRIBUTION, conférée par le contrat qu’elle a conclu avec les producteurs délégués le 5 mai 2010, a été modifiée par l’accord litigieux du 10 mai 2010 qui a été conclu postérieurement;

— la mission dévolue à la société STUDIO 37 (devenue ORANGE STUDIO) par l’accord du 10 mai 2010 rentre dans la définition du distributeur telle qu’elle est entendue par la profession car ledit accord prévoit sa participation dans la distribution notamment en stipulant que les deux parties détermineront le budget de distribution et que toutes les décisions relatives à la sortie du film seront prises conjointement par les parties;

— c’est en qualité de codistributeur et au regard de la prise de risque de la société STUDIO 37 à hauteur de 50% des frais d’exploitation salles que la société CANAL DISTRIBUTION a accepté de partager la commission de distribution de 30% destinée à lui revenir;

— le fait que seulement le logo de la société CANAL DISTRIBUTION apparaisse lorsqu’il est fait mention du distributeur en salle n’a pas d’impact sur la qualité de codistributeur du film des parties puisque ces dernières ont convenu que la société CANAL DISTRIBUTION était le distributeur physique du film pour le compte de la codistribution.

Elle prétend remplir les conditions lui permettant de bénéficier du fonds de soutien distributeur ainsi que de l’aide sélective à la distribution en ce qu’établie en France, elle a une activité régulière de distributeur et que les montants alloués sont destinés à la récupération de frais de distribution comme il est prévu par les règles du CNC. Elle ajoute que, contrairement aux dires de l’appelante, les parties se référaient à l’accord du 10 mai 2010 en tant que «’l’accord de codistribution’» dans les courriels

échangés et reproche à la société CANAL DISTRIBUTION de dénaturer les stipulations dudit accord.

Sur ce, la cour constate d’abord que les parties ont entendu organiser les modalités de leurs relations financières dans le cadre de leur collaboration sur le film ‘BENDA BILILI’ par un accord confidentiel, leur rôle ‘officiel’ respectif étant fixé dans les accords régularisés avec les producteurs les 5 et 7 mai 2010.

Ainsi, s’agissant de l’exploitation cinématographique en salles en France, l’accord du 10 mai 2010 stipule que: ‘SDD, en sa qualité de distributeur en salles en France du film, gérera l’ensemble de l’organisation de la distribution pour la sortie et l’exploitation en salles (…)

De par le présent accord, il est entendu que S37 participera à la distribution en salles du film en France dans les termes suivants: (…) En concertation avec les producteurs, S37 et SDD détermineront le budget de distribution, de promotion et de soutien du film (….) Sachant qu’en cas de désaccord l’avis de SDD prévaudra. (..) Toutes les décisions relatives à la sortie du film seront prises conjointement. (….) S37 s’engage à apporter en numéraire 50% du montant des frais de distribution. (… )

En contrepartie, S37 se verra accorder, jusqu’à remboursement de son apport HT au titre des frais de distribution 50% des recettes de distribution du film en salles après déduction de la commission de distribution. (…)

Il est entendu que, après déduction de la commission de distribution, les recettes salles seront prioritairement affectées au remboursement des frais de distribution salles à 50/50 entre SDD et S37 avant tout reversement auprès des producteurs.

Les parties conviennent que dans l’hypothèse où les frais de distribution salles n’étaient pas récupérés dans un délai de 8 mois après la date de sortie en salle, alors la quote part de 30% de RNPP vidéo/VOD, 30% de RNPP télévisuelles, 30% du fonds de soutien et autres recettes revenant à STUDIO 37 au titre de l’accord de coproduction du 7 mai 2010 signé entre STUDIO 37 et les producteurs sera partagée entre STUDIO 37 et SDD au prorata des montants restant à récupérer par chacune d’elles. (…)

La commission de distribution cinématographique établie au titre de l’accord du 5 mai 2010 à 30% sera partagée entre SDD et S37 comme suit: 25% pour S37 et 75% pour STUDIO 37. L’ensemble des aides et subventions non remboursables allouées au film et effectivement perçues par SDD au titre de la distribution en salles seront portées à 50/50 au remboursement des frais de distribution dans les conditions mentionnées au contrat du 5 mai 2010, en particulier l’aide CANAL +. En ce qui concerne le Fonds de soutien distributeur généré par l’exploitation en salles du films sur le compte distributeur de SDD, il est entendu que SDD en portera 100% au remboursement des frais ( soit 50% au bénéfice de SDD et 50% au bénéfices de S37) ».

Ce contrat, qui fait la loi des parties et qui doit être exécuté de bonne foi, stipule donc que les aides reçues par la société CANAL DISTRIBUTION au titre de la distribution du film en salle ainsi que le fonds de soutien distributeur n’ont pas vocation à être partagées par moitié automatiquement, comme le prévoit le contrat pour la commission de distribution cinématographique, mais à être ‘portées au remboursement des frais de distribution’ à parts égales entre chaque partie. Ainsi, si comme le contrat le mentionne d’abord, les frais de distribution sont remboursés grâce aux recettes salles, ce qui a été le cas en l’espèce, le film ayant connu le succès lors de sa sortie, ces aides versées au seul distributeur officiel du film ont vocation à être conservées par lui.

Aussi, dans la mesure où la société CANAL DISTRIBUTION est le seul distributeur du film et que la société STUDIO 37 (aujourd’hui ORANGE STUDIO) a été remboursée de ses frais de distribution par les recettes salles, il convient de dire, selon la lettre du contrat et l’intention des parties, que les aides ainsi versées au seul distributeur ont vocation à être conservées par la société CANAL DISTRIBUTION, la société ORANGE STUDIO ne pouvant prétendre à en obtenir le versement par moitié.

La cour remarque au surplus que si les parties ont entendu pour l’édition ou la commercialisation de vidéos en France se définir comme ‘co-éditrices’ (page 4 du contrat), il n’en est pas de même pour l’exploitation cinématographique où il est uniquement convenu que la société STUDIO 37 ‘participera’ à la distribution du film dans des termes prédéfinis, de sorte que la société ORANGE STUDIO n’est pas fondée à se revendiquer distributeur officiel du film et comme tel habilitée à percevoir les aides ad hoc, nonobstant le fait que les parties aient pu évoquer ce contrat du 10 mai 2010 comme un ‘ accord de co-distribution’ dans certains de leurs écrits.

Par ailleurs, la société ORANGE STUDIO argue vainement que la conservation par la société CANAL DISTRIBUTION de la totalité de l’aide ainsi versée constituerait un enrichissement sans cause eu égard à sa prise en charge de seulement 50% des frais de distribution, puisque cette aide n’a pas vocation à rembourser uniquement les frais ainsi exposés mais davantage à inciter le distributeur à s’engager dans le financement de nouveaux films. Elle ne peut davantage être suivie lorsqu’elle soutient être bien fondée à bénéficier de cette aide comme remplissant les conditions posées par la loi puisque les stipulations du contrat ne l’ont pas désignée comme tel et qu’elle ne s’est pas présentée à l’égard des tiers et notamment du CNC, comme distributeur du film. Enfin, la décision prise par la société ORANGE STUDIO de partager les aides et subventions reçues au titre de l’édition vidéographique ne saurait justifier d’imposer la réciprocité à la société CANAL DISTRIBUTION, au regard des stipulations du contrat.

Il convient en conséquence de débouter la société ORANGE STUDIO de ses demandes sur ce point, le jugement querellé étant infirmé de ce chef.

– Sur le versement de la sous-commission distributeur salles:

L’intimée forme un appel incident contre le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de sa demande au titre de la sous-commission de distribution et demande à la cour de condamner l’appelante à lui régler la somme de 7.750,25 euros arrêtée au 30 septembre 2016 portée à 8.757,50 euros au 30 septembre 2017, correspondant à 25% de la commission de distribution. A cet égard, la société ORANGE STUDIO soutient que cette sous-commission avait été convenue à l’article A.1 de l’accord du 10 mai 2010 et qu’elle ne faisait l’objet d’aucune contestation de la part de l’appelante ni dans son principe ni dans son montant, de sorte que c’est à tort que le tribunal de commerce l’a déboutée de ses demandes sur ce point.

L’appelante demande la confirmation du jugement déféré en relevant que l’intimée n’apporte aucun élément au soutien de sa demande.

Sur ce, la cour relève que, dans le dispositif de ses conclusions devant le tribunal de commerce (versées en pièce 42 par la société ORANGE STUDIO), la société CANAL DISTRIBUTION a demandé de fixer la somme due à la société ORANGE STUDIO au titre de la sous-commission de distribution de 25% sur la commission distributeur à 8.757,50€ HT, le tribunal ayant pourtant rejeté cette demande estimant que cette dernière ne justifiait pas de sa demande en paiement. En outre, le principe du versement de cette somme ressort de la lettre même de l’accord du 10 mai 2010, comme mentionné ci-dessus, soit 25% de la commission de distribution devant revenir à la société STUDIO 37 (aujourd’hui ORANGE STUDIO).

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de la société ORANGE STUDIO et de condamner la société CANAL DISTRIBUTION à lui verser une somme de 8.757,50 € arrêtée au 30 septembre 2017 correspondant à la part de 25 % de l’intimée dans la commission de distribution, l’appelante ne formant aucune contestation sur ces modalités de calcul.

Le jugement critiqué sera en conséquence infirmé sur ce point.

– Sur les intérêts dus sur factures:

L’appelante soutient que les factures émises en 2011 par la société ORANGE STUDIO contenaient des erreurs et que cette dernière n’a été en mesure de formuler sa demande de paiement à son encontre et d’en fixer le quantum qu’en mai 2016, de sorte que le tribunal ne pouvait effectuer son calcul d’intérêts sur les sommes réclamées par l’intimée avant mai 2016. La société CANAL DISTRIBUTION, considérant que l’intimée est responsable des retards dans le paiement, en raison des factures erronées qu’elle a émises, demande à la cour d’annuler les indemnités de retard.

L’intimée soutient avoir calculé les intérêts en reprenant les facturations HT réciproques des parties, en leur appliquant les intérêts en fonction des sommes restant dues ou payées tardivement par chacune d’elles et demande la confirmation du jugement. Elle précise avoir reversé aux coproducteurs délégués leur quote-part des intérêts que lui a versés la société CANAL DISTRIBUTION en exécution du jugement pour indemniser le retard qu’ils ont subi dans le paiement des sommes qui leur revenaient, puisqu’ils ont dû attendre l’exécution du jugement par la société CANAL DISTRIBUTION.

Sur ce, il convient de rappeler qu’en droit les intérêts ne sont dus qu’à compter de la mise en demeure de payer la somme due. Il n’est pas contesté par la société CANAL DISTRIBUTION qu’elle a été mise en demeure de payer les sommes en cause par la société ORANGE par l’envoi d’une mise en demeure le 11 mai 2016 faisant un compte entre les parties.

En outre, il est constant que le taux d’intérêt de retard à appliquer est le taux de refinancement de la BCE majoré de 10 points de pourcentage.

Il ne peut cependant être fait droit à la demande de la société ORANGE STUDIO qui a produit aux débats un récapitulatif des diverses créances réciproques auxquelles elle a appliqué le taux d’intérêt de retard, puisque la cour a modifié les créances dues et que les sommes ayant servi de base au calcul des intérêts ne sont en conséquence plus les mêmes.

Il convient donc de dire que l’ensemble des sommes dues, telles que fixées au terme de cet arrêt, et par le jugement pour les créances confirmées, portera intérêt au taux contractuel à compter du 11 mai 2016, sans que l’intimée soit fondée à solliciter d’en annuler le paiement, des erreurs ayant été commises par les deux parties s’agissant de leurs créances réciproques.

Le jugement querellé qui a fixé le montant global de la somme due au titre des intérêts sur la base de créances qui ont été modifiées par la présente décision est en conséquence infirmé de ce chef.

– Sur les créances contestées de la société CANAL DISTRIBUTION au titre de la contribution au paiement de 50% des frais vidéo:

L’intimée fait valoir qu’en vertu de l’article 8.1 de l’accord du 10 mai 2010, il incombait à la société CANAL DISTRIBUTION de lui verser au 30.09.2016 une participation de 50% au titre des frais vidéos exposés, soit 32.917,41 euros HT. Elle retient que s’il n’y a pas de document écrit confirmant expressément un accord de la société CANAL DISTRIBUTION sur le montant des frais vidéo, M.

Z A, son salarié participant à l’élaboration et à la sortie du DVD désigné par Mme B C, sa gérante, a eu connaissance du budget de lancement et de la mise en place de la sortie vidéo mais n’a formulé aucune réserve, ce qui constitue un accord implicite de la société CANAL DISTRIBUTION. Ainsi, la société ORANGE STUDIO rappelle avoir avancé l’intégralité des frais vidéo alors que 50% de ces frais incombaient contractuellement à la société CANAL DISTRIBUTION et demande donc sa condamnation à lui régler la somme de 32.917,41 euros à ce titre.

Concernant la demande de production des décomptes de recettes-vidéo formée par la société CANAL DISTRIBUTION, la société ORANGE STUDIO indique avoir adressé à cette dernière le 2 octobre 2020 ses décomptes consolidés n°9 (arrêtés au 30.09.2017) et n°10 incluant les recettes vidéo, suite à la réception des décomptes de la société B CANAL DISTRIBUTION arrêtés au 30.09.2017 et au 30.09.2018.

L’appelante, indiquant ne pas avoir été en mesure de valider les frais de vidéos réglés par ORANGE STUDIO, demande la confirmation du jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée des demandes formulées à ce titre.

Sur ce, le contrat stipule en matière de frais d’édition vidéographique que ‘les parties décideront d’un commun accord le montant de ces coûts’, les deux sociétés se partageant chacune la moitié du solde des recettes nettes.

Il n’est pas contesté que la société STUDIO 37 (aujourd’hui ORANGE STUDIO) n’a pas sollicité formellement par écrit l’accord de la société CANAL DISTRIBUTION afin de valider les frais d’édition vidéo. Cependant, il n’en demeure pas moins que la société ORANGE STUDIO démontre qu’un représentant de la société CANAL DISTRIBUTION a participé aux réunions marketing organisant la sortie vidéo au cours desquelles ont été communiqués et étudiés certains éléments du budget et des frais d’exploitation. Par ailleurs, il ressort d’un courrier daté du 28 octobre 2013 rédigé par la société CANAL DISTRIBUTION que cette dernière ne conteste pas son obligation au paiement mais sollicite des explications, les considérant ‘exagérément élevés’, demandant en conséquence à la société ORANGE STUDIO de ‘bien vouloir nous fournir les comptes concernant notre co-édition vidéographique conformément à notre accord de co-édition ainsi que le détail des frais nous étant opposable avec les explications correspondantes.’

Or, par courrier du 11 mai 2016, la société ORANGE STUDIO a justifié de l’ensemble des frais vidéo engagés par elle, et à nouveau dans le cadre de la présente instance ( pièces 20-0, 20-bis, 20-ter), la société CANAL DISTRIBUTION n’en contestant aucun dans le détail, se contentant de soutenir ne pas avoir donné son accord ni avoir été en mesure de les valider.

Par ailleurs, ni la société CANAL DISTRIBUTION ni la société ORANGE STUDIO n’ont contesté la décision du tribunal de commerce qui a condamné l’intimée à verser à la société CANAL DISTRIBUTION la moitié des sommes dues au titre du solde des recettes.

Il ressort de cet ensemble d’éléments que si l’accord formel de la société CANAL DISTRIBUTION n’a pas été recueilli par la société ORANGE STUDIO, il n’en demeure pas moins que cette celle-ci a été associée à l’ensemble des opérations y afférent, qu’elle n’a pas contesté son obligation à paiement mais a réclamé des justificatifs, qui, depuis, ont été fournis, sans qu’elle ne précise les frais qui lui sembleraient injustifiés ou trop élevés.

En conséquence, le contrat devant être exécuté de bonne foi par les parties, la société CANAL DISTRIBUTION ne peut se retrancher derrière l’absence d’accord formel obtenu, dont le formalisme n’a au demeurant pas été précisé par les parties, pour refuser d’exécuter le contrat qui lui impute la prise en charge de la moitié des frais vidéo alors qu’elle bénéficie par ailleurs de la moitié du solde des recettes.

Il convient, en conséquence, de faire droit aux demandes de la société ORANGE STUDIO sur ce point et de condamner la société CANAL DISTRIBUTION à lui verser la somme de 32.917,41€ HT arrêtée au 30 septembre 2016, le jugement entrepris étant infirmé de ce chef.

– Sur la demande de production de factures:

L’appelante soutient que les factures communiquées par la société ORANGE STUDIO restent incomplètes et ne soldent pas l’intégralité du passif depuis les premières recettes jusqu’au compte du 30 septembre 2016. Elle demande à la cour d’enjoindre à l’intimée de produire des factures valables’:

— comportant les informations TVA applicable et le montant HT exact,

— séparant précisément les factures dues en application du contrat du 5 mai 2010 et celles dues en application de l’accord du 10 mai 2010,

— détaillant les comptes d’exploitation et/ou des décisions de justice afférentes.

Elle ajoute que la cour devant se placer au jour du jugement du 15 mai 2019, seuls les comptes arrêtés en 2016 sont concernés et non ceux postérieurs. Elle demande donc le rejet des demandes d’ORANGE STUDIO relatives aux comptes d’exploitation postérieurs au jugement du 15 mai 2019, considérant que la comptabilité ultérieure devrait s’ajuster automatiquement sur la base des comptes de 2016, actualisés par la décision de la cour.

L’intimée rétorque que dans les comptes arrêtés au 30 septembre 2016 qui font l’objet du litige, les montants HT des divers postes de créance ne sont pas contestés et que tant devant le tribunal qu’en appel, les deux parties ont demandé des condamnations sur la base des montants HT. En outre, elle indique avoir procédé à un recalcul de toutes les TVA et fourni à la société CANAL DISTRIBUTION le 23 septembre 2020 des avoirs annulant ses factures de sous-commission de distribution et de frais vidéo, en application du jugement de première instance qui n’a pas retenu ces postes en sa faveur alors que la décision sur ces points est frappée d’appel ainsi que des factures pour les intérêts et les frais accordés par le Elle ajoute que ce courriel a été complété par celui du 1er février 2021. Elle demande le rejet de la demande de production de factures formulée par la société ORANGE STUDIO en estimant qu’il s’agit d’une demande inutile et non justifiée.

Sur ce, excepté pour les sommes en débat dans le cadre du présent litige et les calculs d’intérêts, la société CANAL DISTRIBUTION ne démontre nullement que les facturations produites par la société ORANGE STUDIO seraient erronées alors que les condamnations portent sur des montants HT.

Il convient en conséquence uniquement d’inviter les parties à émettre des factures conformes comptablement aux sommes validées dans le présent arrêt.

– Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les deux parties succombant, il convient de dire que chacune d’entre elles gardera à sa charge les dépens exposés en première instance et en appel, sans qu’il n’y ait lieu à application de l’article 699 du code de procédure civile, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant infirmées.

L’équité et la situation des parties commandent de rejeter les demandes formulées par les deux parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement rendu le 15 mai 2019 par le tribunal de commerce de Paris sauf en ce qu’il a :

— Condamné la société CANAL DISTRIBUTION à payer à la société ORANGE STUDIO la somme de 93.767 euros HT correspondant à 50% du fond de soutien distributeur et à 50% de l’aide sélective du CNC, déboutant pour le surplus’;

— Débouté la société ORANGE STUDIO de sa demande de condamner la société B CANAL DISTRIBUTION à lui régler la somme de 32.917,41 euros HT au titre du remboursement de 50% des frais vidéos nets réglés par la société ORANGE STUDIO’;

— Condamné la société CANAL DISTRIBUTION à payer à la société ORANGE STUDIO la somme de 37.975,39 euros actualisées au 30 septembre 2017, au titre des intérêts dus sur factures, après compensation entre intérêts réciproques.

— Condamné la S.A.R.L. CANAL DISTRIBUTION à payer la SA ORANGE STUDIO la somme de 7.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus;

— Condamné la S.A.R.L. CANAL DISTRIBUTION aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,38 euros dont 12,85 euros de TVA.

L’infirme de ces chefs, et statuant à nouveau,

— Déboute la société ORANGE STUDIO de ses demandes en paiement correspondant à 50% du fonds de soutien distributeur et à 50% de l’aide sélective du CNC;

— Condamne la société CANAL DISTRIBUTION à verser à la société ORANGE STUDIO la somme de 8.757,50€ HT arrêtée au 30 septembre 2017 au titre de sa commission de distribution Salles et TV;

— Condamne la société CANAL DISTRIBUTION à payer à la société ORANGE STUDIO la somme de 32.917,41 euros HT au titre du remboursement de 50% des frais vidéos nets réglés par la société ORANGE STUDIO;

— Dit que l’ensemble des sommes dues portera intérêt au taux contractuel à compter du 11 mai 2016,

— Laisse à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et rejette les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

— Invite les parties à émettre des factures conformes comptablement aux sommes validées dans le présent arrêt,

— Déboute les parties de leurs demandes formulées en appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Laisse à chaque partie la charge de ses dépens en appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la distinction entre « participer » et « distributeur » dans le contexte de la distribution audiovisuelle ?

La distinction entre « participer » et « distributeur » est déterminante dans le domaine de la distribution audiovisuelle. Le terme « participer » ne confère pas automatiquement le statut de producteur ou de distributeur.

En effet, une société peut participer à la distribution d’une œuvre sans en être le distributeur officiel. Cela signifie que même si une société est impliquée dans le processus de distribution, cela ne lui donne pas droit aux aides financières réservées uniquement au distributeur officiel, comme celles du CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée).

Ainsi, le versement des aides est strictement limité au distributeur reconnu par les contrats en vigueur, ce qui souligne l’importance de la terminologie juridique dans ce secteur.

Quel a été le rôle de la société CANAL + DISTRIBUTION dans le litige ?

La société CANAL + DISTRIBUTION a joué un rôle central dans le litige en tant que distributeur exclusif du film « Benda Bilili ». Selon les contrats signés, elle était la seule habilitée à gérer l’exploitation cinématographique et télévisuelle du film en France.

Le tribunal a reconnu que CANAL + DISTRIBUTION avait le droit de conserver les aides financières versées, car elle avait remboursé ses frais de distribution grâce aux recettes générées par le film.

La société ORANGE STUDIO, qui avait participé à la distribution, ne pouvait pas revendiquer une part des aides, car elle n’était pas désignée comme distributeur officiel dans les contrats. Cela a été un point clé dans la décision du tribunal, qui a confirmé que les aides devaient être conservées par le distributeur officiel.

Quelles étaient les principales revendications de la société ORANGE STUDIO dans ce litige ?

La société ORANGE STUDIO a formulé plusieurs revendications dans le cadre de ce litige. Elle a d’abord soutenu qu’elle devait recevoir une part des aides financières, notamment le fonds de soutien distributeur et l’aide sélective du CNC, en raison de sa participation à la distribution du film.

ORANGE STUDIO a également demandé le remboursement de 50% des frais de distribution qu’elle avait avancés, arguant que ces frais devaient être partagés selon les termes de l’accord du 10 mai 2010.

Enfin, elle a contesté le fait que CANAL + DISTRIBUTION conserve la totalité des aides, affirmant que cela constituait un enrichissement sans cause, étant donné qu’elle avait pris en charge une partie des frais de distribution.

Cependant, le tribunal a rejeté ces demandes, confirmant que les aides étaient réservées au distributeur officiel.

Comment le tribunal a-t-il justifié sa décision concernant les aides financières ?

Le tribunal a justifié sa décision en se basant sur les termes des contrats signés entre les parties. Il a souligné que les aides financières, telles que le fonds de soutien distributeur et l’aide sélective du CNC, étaient spécifiquement destinées au distributeur officiel, qui, dans ce cas, était CANAL + DISTRIBUTION.

Le tribunal a également noté que les frais de distribution avaient été remboursés par les recettes générées par le film, ce qui signifie que les aides n’avaient pas vocation à être partagées.

De plus, il a été établi que l’accord du 10 mai 2010 ne conférait pas à ORANGE STUDIO le statut de distributeur officiel, mais plutôt un rôle de participation dans la distribution, ce qui ne lui donnait pas droit aux aides.

Ainsi, la décision du tribunal a été fondée sur une interprétation stricte des contrats et des intentions des parties.

Quelles étaient les conséquences de la décision du tribunal pour les deux sociétés ?

La décision du tribunal a eu des conséquences significatives pour les deux sociétés. Pour CANAL + DISTRIBUTION, elle a confirmé son statut de distributeur officiel, lui permettant de conserver les aides financières versées par le CNC.

Cela a renforcé sa position dans le secteur de la distribution audiovisuelle, lui permettant de continuer à bénéficier de soutiens financiers pour ses futurs projets.

En revanche, pour ORANGE STUDIO, la décision a été un revers, car elle a été déboutée de toutes ses demandes concernant les aides et le remboursement des frais de distribution.

Elle a également été condamnée à payer des sommes à CANAL + DISTRIBUTION, ce qui a eu un impact financier négatif sur elle. Cette décision a mis en lumière l’importance de la clarté contractuelle et des rôles définis dans les accords de distribution.


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